Des partouzes, du voile, du mot antisémitisme et des boiteux


photo Ricardo Moraes/Reuters

 

L’Islam sans gêne, titre en une Le Point de cette semaine. S’ils nous trouvent sans gêne, c’est peut-être parce qu’eux sont tout empêtrés dans leur gêne face à l’islam. Sur leur site, le jour de la sortie de ce numéro, à la rubrique anniversaire, ils évoquaient une partouze organisée au Vatican par le pape et le clan des Borgia. Façon de dire : voilà qui nous sommes, nous. Le lendemain, jour anniversaire de la guerre d’indépendance algérienne, ils ont mis : « 1er novembre 1925. Plutôt mort que cocu. Max Linder entraîne sa jeune épouse dans le suicide. » C’est ça, ils se sentent cocus. Comme Longuet avec l’Algérie. Et comme dans les pièces de théâtre, les cocus deviennent vite ridicules, avec leur suspicion, leur égarement, leur rancoeur.

Ils ont dû laisser leurs colonies, alors ensuite c’est le peuple de métropole qu’ils se sont mis à coloniser. Ce peuple formé de beaucoup d’immigrés et enfants d’immigrés, mais aussi du peuple de toujours et de sa jeunesse, de tous ceux qui n’ont pas pour but dans la vie de dominer et exploiter autrui. Mais au fond les colonisés sont déjà plus libres que les colons, prisonniers de ce besoin de coloniser sans lequel ils ont peur de ne pouvoir survivre.

« L’islam sans gêne ». Cette couverture d’une jeune femme voilée avec de bien beaux yeux. Il y a quand même quelque chose de louche, si je puis dire, dans l’obsession de ces gens contre l’islam. Comme un désir refoulé. Le désir de Dieu. Ils essaient de se rattraper en brandissant leur sexe apeuré, mais cela ne suffira jamais. Car c’est pire qu’un désir sexuel refoulé pour ceux qui voient des gens aimer Dieu alors qu’eux ne le peuvent pas, à cause de leur culture. « Venez à la félicité ! », appelle le muezzin. Se tenir debout, s’incliner, se prosterner devant Dieu, rien n’est meilleur à vivre et ils se sont condamnés à ne jamais le connaître.

 

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« Nulle contrainte en religion » dit le Coran (II, 256). Dieu libère. Une religion qui se mettrait à dire le contraire irait vers sa mort. Mais parmi mes frères en islam, ils sont nombreux aussi à avoir quelque problème avec la femme. Le premier des cinq piliers de l’islam est l’attestation de foi selon laquelle « il n’est de dieu que Dieu, et Mohammed est son messager ». Ceci, nous le répétons plusieurs fois par jour, afin de nous prémunir contre l’idolâtrie, et de nous rappeler que la parole que nous devons suivre, c’est celle qu’a transmise Mohammed, lui-même recommandant aussi celle des autres prophètes. Dans le Coran il demande aux femmes la pudeur, de rabattre leur habit sur leur poitrine. Rien de plus. Il n’est jamais question de cheveux ni de hidjab, sauf pour tout autre chose que la tête de la femme (nous en avons parlé à propos des sourates Al-Khaf et Marie). Les historiens relatent que Mohammed a fait cette recommandation de pudeur aux femmes parce que les messieurs de Médine visiblement ne savaient pas se tenir, et voulaient se les échanger comme des chameaux. Ils rappellent aussi que le voile n’a jamais été imposé aux femmes en islam, qu’il n’a pas été porté pendant les siècles de splendeur de son règne et n’est devenu à la mode qu’à partir de sa décadence. À méditer.

Pour les prescriptions, plusieurs hadiths montrent que le Prophète était en fait un homme très souple et très compréhensif des différentes situations des êtres humains. Autant que je sache, il n’a jamais dit qu’une femme non voilée irait en enfer, alors qu’il l’a beaucoup dit pour les hypocrites.

Mais parmi nos frères (surtout) et nos sœurs, beaucoup semblent vouer une idolâtrie à cette question tout à fait secondaire, qui n’est en rien l’un des piliers de l’islam, et qu’ils sacralisent pourtant. Se retrouvant ainsi à faire le même jeu que ceux qui ont peur d’eux. Car c’est la peur aussi qui les fait se raccrocher au voile comme à la jupe de leur maman. Non mes frères vous ne perdrez pas votre virilité si vos femmes vont tête nue. Non mes sœurs vous ne serez pas assurées d’être plus saintes si vous êtes voilées. Je comprends le choix du voile d’autant mieux que depuis longtemps je suis moine dans l’âme et pratique beaucoup la contemplation et la méditation avec une capuche sur la tête. Je prie voilée, et je prie selon les temps et la règle de l’islam. Mais pour le reste du temps il faut que cela demeure un choix, un choix ni contraint ni forcément définitif. Et j’aime aussi sortir cheveux au vent, qu’il me parle librement aux oreilles. Dieu y souffle, et il est d’accord pour que je l’écoute.

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Houria Bouteldja, porte-parole des Indigènes de la République, est traitée par le Crif de « démon antisémite » pour avoir rappelé dans une émission télévisée que le problème de l’antisémitisme était lié à l’antisionisme, lui-même généré par les crimes commis par l’État d’Israël. Ah ! antisémitisme ! Le mot sert aux sionistes, juifs ou autres, de Vade retro Veritas ! Il est parfaitement vrai que le problème israëlien est crucial pour la paix sociale hors d’Israël et pour la paix dans le monde, mais comme ils ne veulent pas l’admettre ils sont prêts à toutes les dénégations. Ils ne sont évidemment pas les seuls à fonctionner ainsi, mais ils se trouvent malheureusement au coeur d’une question particulièrement aiguë, qui rend le déni de plus en plus invivable pour tout le monde.

Il ne s’agit pas de faire de l’État juif le bouc émissaire de tous les maux, mais de reconnaître ce qui est. À savoir que cet État viole chaque jour un peu plus le droit international, et ceci avec la complicité de pays occidentaux impérialistes qui perpétuent ainsi sous une autre forme le colonialisme des Blancs au détriment d’Arabes. L’antisémitisme est évidemment injustifiable, mais on ne peut le combattre sans agir aussi contre l’injustice énorme perpétrée par l’État juif, sans s’en désolidariser. Ces gars se contredisent allègrement, étant mystiques quand ça les arrange (le droit à leur terre sacrée) et ne l’étant plus quand il s’agit de voir comment le mal, à partir d’un point crucial, peut empoisonner le reste du monde.

Pour autant ils ne sont pas les seuls, loin de là, à boiter gravement. Citons aussi les anti-colonialistes collabos. Les féministes sans pensée. Les religieux sans Dieu. Les élites porcines. Les auteurs tortureurs de verbe… La fosse éternelle, les boiteux sont toujours tout près d’y tomber. Ils ont beau fermer les yeux, un jour ou l’autre ça finit par arriver. Allez hop, sortez de là !

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alinareyes