Le symptôme Mehdi Meklat


 
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Ainsi donc Mehdi Meklat a déversé des tombereaux de merde sur twitter pendant des années, et ne les a jamais regrettés puisqu’avant de se faire pincer, il y a quelques jours, et de supprimer à la hâte quelque 50 000 tweets, il les y a gardés comme témoins de sa pensée hideuse. Tel un flic ultra-brutal surpris en train de torturer un citoyen au coin d’un mur ou un curé dénoncé par les enfants qu’il a violés, il s’est donc vite rajusté pour essayer de garder bonne figure et bonne place au sein de la société, et il a mêlé explications foireuses, apitoiements sur soi et arrogance secrète de qui se croit tout permis et se voit bientôt « pardonné » pour des actes qui après tout lui paraissent assez naturels.

Et de même que la police et l’église cherchent avant tout à préserver leur institution respective, de même les médias qui avaient porté ce sadique qu’ils avaient décidé bankable ont aussitôt… gardé le silence, puis, quand il leur est devenu trop difficile de continuer à se taire, ont déployé maint tour de passe-passe afin de faire apparaître la chose pour ainsi dire comme une aventure littéraire, faisant référence à des personnages de roman, relativisant les faits en les comparant avec d’autres sans commune mesure et présentant un jeune homme joueur et inconscient des risques qu’il prenait – pour un peu, le présentant comme la victime des réseaux sociaux scandalisés par ses incitations aux crimes racistes, antisémites, sexistes, homophobes, par meurtre, viol, violences. Le garçon n’était-il pas sympathique devant les caméras ? Ah, si on avait pu s’en tenir là, au lieu d’aller lui chercher des noises, tout ceci pour faire monter le Front National. Voilà où en est la presse de gauche.

Mise à part cette ignominie, je me demande : mais pourquoi donc se sont-ils entichés de ces deux jeunes hommes, Mehdi Meklat et son compère Badroudine Saïd Abdallah, dit Badrou, au point de les inviter et de les faire travailler partout, dans tous les médias et même dans l’édition et à la fondation Cartier ? Ont-ils vraiment quelque chose de si spécial ? Après avoir lu quelques-uns de leurs textes et visionné quelques-unes de leurs vidéos, ma réponse est clairement : non. J’ai aussi trouvé et lu en ligne quelques pages de leurs deux romans : néant. Il faut dire que c’est l’éditeur, Le Seuil, qui leur en a passé commande – et leur a donné les moyens d’aller écrire le premier à Istanbul, le deuxième à Los Angeles. Ce qui est juste hallucinant. Ce qui veut dire que ces deux jeunes hommes ont été récupérés comme des produits. Le produit « banlieusard des cités » (comme il existe pour les entrepreneurs à qui l’on passe commande d’abris pour les migrants, le produit « migrant »). L’être humain, en même temps que l’art et la littérature, transformé en produit. Voilà où en est la culture.

Dès lors il ne faut pas s’étonner qu’une rage antisémite, raciste, homophobe, misogyne, puisse être chiée par le produit et que ceux qui vivent du produit s’empressent tant bien que mal d’essuyer les dégâts et d’assurer que ce n’est rien. Rien qu’un dommage collatéral de la guerre contre la vérité menée à tout moment par ce que nous appelons la civilisation.
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alinareyes