Les mille et une pièces du palais intérieur

un sac du Vieux Campeur découpé en lanières et crocheté aujourd’hui

Aujourd’hui j’ai dépassé, pour la première fois depuis que j’ai une montre cardio, donc depuis Noël, les 170 battements de cœur par minute, pendant ma séance de fractionné. Sans du tout sentir que j’étais à fond. Je ne vais pas à fond tant que je n’ai pas fait le test d’effort chez le cardiologue, je ne veux pas prendre de risque alors que je me mets à courir tard dans ma vie. J’ai mieux réalisé ma séance que la dernière fois, mais je dois la réajuster, trois minutes de pause entre les deux séries, c’est trop. Non que je ne sois pas fatiguée après la première série, mais cela me coupe trop dans mon effort, et ensuite je cours moins bien la deuxième série, par fatigue mais aussi par un peu de démotivation après une interruption trop longue. Ou bien c’est que mes muscles étaient un peu pesants, après la séance de musculation d’hier. Et puis c’est ma quatrième semaine, je dois réduire légèrement l’entraînement avant et afin de mieux le reprendre. C’est à force de m’informer sur la course à pied et aussi d’écouter mon corps que je peux établir au mieux, par moi-même, mon entraînement. C’est extrêmement intéressant.

Ce qui me plairait beaucoup, ce serait de faire du trail. J’en ferai un de ces jours, inch’Allah. D’abord, continuer à apprendre à courir. Chaque fois qu’on se lance dans quelque chose d’autre, c’est comme si on agrandissait sa maison. Notre maison intérieure pousse et se ramifie comme un fantastique être vivant, on peut finir par habiter un extraordinaire palais, dont on n’est jamais obligé d’arrêter la croissance. Certains se consacrent à une seule chose et construisent et agrandissent ainsi leur maison, d’autres, dont je suis, empruntent de multiples voies. Des voies qui peuvent être aussi petites que par exemple se mettre à découper des sacs plastique en lanières pour les crocheter, comme je l’ai fait aujourd’hui, entre autres – sans bien savoir ce que j’en ferai, mais justement c’est intéressant d’avoir à le trouver, et je le trouverai.

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Mes dernières créations au crochet. Et Ingrato

Voici, recto et verso, le gilet que j’ai inventé, créé tout en le réalisant. Ses mailles ajourées, à l’effet élastique, enserrent le corps de près, notamment aux bras et sur le devant ; je le trouve très seyant. J’ai acheté les jolis petits boutons chez Toto.

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Avec de petits bouts de fil de coton restants, j’ai fait encore une lavette, tellement plus agréable à utiliser que les éponges du commerce.

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Et avant cela, j’avais réalisé ce deuxième tapis de bain, avec des lanières découpées dans de vieux t-shirts (c’est la partie la plus longue du travail) et crochetées – un vrai plaisir pour les pieds nus !

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Mes précédentes réalisations au crochet sont ici

Et j’ai découvert dans l’émission Tracks sur Arte un jeune artiste chilien, Ingrato, qui fait des masques, des cagoules et d’autres vêtements au crochet très colorés, qui m’ont beaucoup plu et encouragée à continuer à inventer dans cette technique, si ludique, plaisante et riche en possibilités :

oeuvres d’Ingrato, photo Beatriz Arce

Journal du jour et de la nuit

Cette nuit avant de m’endormir comme un bébé après une séance de yoga et pranayama (respiration yogique), j’ai vu dans un demi-sommeil un temple grec dont les colonnes étaient des brides (mailles au crochet). J’adore être au lit, quand je ne dors pas mes pensées sont si belles, et quand je dors mes rêves sont si beaux.

Hier je suis allée au Kilo Shop de la rue de la Verrerie, où il y a un rayon sport, chercher un coupe-vent de running, et j’en ai trouvé un que j’ai mis aujourd’hui, il est parfait. Un Adidas de 90 grammes, taille XS, de la même couleur orangé vif que mes chaussures Puma, à l’état neuf, et payé au poids, donc, 4 euros. Depuis le temps que je cherchais dans les magasins de sport et en ligne une veste imperméable que je puisse mettre maintenant qu’il ne fait plus froid ! je n’en trouvais pas à moins de plusieurs dizaines d’euros, un prix que je refuse de mettre. Sur ma lancée, toujours à vélo, je suis allée dans un Sostrene Grene chercher une pelote de coton, j’en ai trouvé une d’un beau rouge, que j’intègre à mon pull en cours de confection. Jusque là je le crochetais avec trois couleurs, la quatrième mousquetaire est très bienvenue. Je compose le pull à mesure, comme un tableau et aussi comme un jeu de Lego, le crochet permet ce genre de construction improvisée et mobile. J’ai longé la Seine et je l’ai traversée, c’était charmant de rouler par ce temps gris, comme aujourd’hui de courir dans le vent.

Aujourd’hui c’était mon entraînement « tempo run » : 15 mn de jogging d’échauffement, 15 mn à rythme plus soutenu (proche de celui que j’aimerais arriver à tenir sur 10 km), dix minutes de jogging calme au retour. La semaine dernière, pour ma première séance selon ce modèle, je suis partie trop vite dans le tempo run, à la fin j’étais obligée de ralentir beaucoup. Cette semaine, je suis donc partie plus lentement, et j’ai tâché de garder ce rythme jusqu’à la fin, ce que j’ai fait sans peine – sans assez de peine, il me semble. Il me faudra donc la prochaine fois chercher encore la bonne allure, ni trop ni pas assez rapide. Ma montre estime quand même que j’ai progressé, tout n’est donc pas perdu ! D’après tous les conseils que j’écoute et lis en ligne, je me suis fait un programme, pour ce mois-ci, de trois sorties par semaine : une de fractionné, une de tempo, une autre longue. Je compte faire évoluer l’entraînement progressivement, sans changer la formule d’une séance avant d’arriver à la faire au mieux. J’ai bien fait de choisir une première course en juin prochain et pas avant : je dois m’entraîner sérieusement si je ne veux pas arriver dix minutes après les derniers. Sans doute serais-je incapable aujourd’hui de remonter en une dizaine de minutes quelque 200 mètres de dénivelé dans la neige, comme je le faisais il y a quinze ans quand je passais l’hiver seule en montagne, bien au-dessus du village d’où je remontais avec mes courses dans le dos. C’était de la marche, mais quasiment de la course, les godillots s’enfonçant dans la neige ou essayant de s’accrocher sur la glace ! J’arrivais chez moi euphorique. Les cancers (physiques et sociaux) m’ont affaiblie, mais enfin je suis quand même plutôt en grande forme et j’ai un énorme désir de jouir encore dans mon corps, que ce soit en courant, en faisant du vélo, en randonnant ou en toute autre activité physique vive et heureuse. Heureusement O est très sportif, nous pouvons et pourrons faire pas mal de choses ensemble, et nous avons de beaux et bons projets en ce sens.

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Flow, course, crochet, musique

J’ai choisi la première course à laquelle je veux participer : les dix kilomètres de la course du château de Vincennes, en juin prochain. D’y penser, je suis en joie et je me sens des ailes. Elle est très belle, je crois, et le 10 km est une bonne distance pour les débutant·es.

J’ai associé la musique à la course dans l’état de flow, qui est musical, en vérité, même si on n’écoute pas de musique en courant. Tout le corps est rythme dans la course, et il peut entrer dans la grâce d’un rythme qui devient flux. « Panta rei », « tout flue », selon la parole d’Héraclite qui fait depuis longtemps la devise de ce site.

pièces d’un pull que j’invente à mesure que je le fais ; pour l’instant, il ne paie pas trop de mine, mais il devrait être bien singulier et intéressant, au final

Et involontairement, j’ai associé aussi la musique à la pratique du crochet, en m’apercevant que je comptais mes brides en les appelant dans ma tête des doubles-croches. Les mailles s’enchaînent comme les pas de course, et mon cœur chante.

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Au bonheur du crochet

J’ai fini mon châle-boléro, dans l’esprit de mes peintures et d’après un tuto d’une youtubeuse, qui s’inspirait elle-même de la série Outlander (que du coup je regarde). En fait je suis partie d’un rectangle, comme elle l’indique, et pour le reste j’ai tout changé : les fils (très fins, travaillés par trois), la couleur, les points, la forme.

C’était donc mon premier ouvrage depuis très longtemps, et maintenant je vais en faire un autre, et d’autres. Je suis assez contente de celui-ci, il est bien spécial et tout le monde l’aime bien à la maison.

Internet est génial pour le partage. Sur Instagram je me suis abonnée aussi à quelques jeunes femmes de çà et là dans le monde qui font des belles créations au crochet, et sur Youtube également à un homme adepte de ce même art. Que du bonheur !

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Éden

work in progress

Après avoir fait, telle Candide, le tour d’un certain monde somme toute assez risible, j’ai le bonheur de cultiver les mille essences de mon jardin dans une paix joyeuse. En ce moment c’est le sport, toujours avec le même enthousiasme, et le crochet, que je pratique comme j’ai pratiqué la peinture, dans l’expérimentation des couleurs et de la texture, avec des points en reliefs et des fils très fins crochetés par trois de couleurs différentes, en faisant varier l’une ou l’autre des couleurs et contemplant l’effet. Cela après m’être refait la main en crochetant un assortiment de disques démaquillants et de lavettes multicolores, remplaçant avantageusement cotons jetables et éponges. J’ai l’intention, une fois que j’aurai terminé cet ouvrage en cours, un boléro, d’expérimenter d’autres matières. Les travaux manuels et les exercices physiques donnent une paix et une joie sans pareilles. Et si tout le monde parvenait à rester dans la paix et la joie, le monde se porterait mieux. On ne parle ni des trains qui arrivent à l’heure ni des gens qui vont bien, mais ce sont eux qui maintiennent la vie bien active et bien pesée. Il y a une paresse morale à se laisser aller à la morosité ou au mal. Dans le monde naturel tout est à son ouvrage, à sa fonction, et nous en faisons partie, de ce beau monde.

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Journal du jour : encore Covid, et puis crochet, écriture et ADN

Le test pcr confirme que je n’ai pas le covid, bien que je vive et dorme jour et nuit dans la même pièce, le même lit, que quelqu’un qui l’a, bien que nous soyons deux sur quatre à l’avoir à la maison, et bien que je n’aie pas encore reçu la troisième dose de vaccin. Je devais la recevoir hier, presque sept mois après la deuxième, mais j’attends maintenant de n’être plus « cas contact », de refaire un test dans les premiers jours de janvier pour m’assurer que je ne l’ai toujours pas ; en attendant, pas de vaccin donc, et pas de salle de sport, au cas où je serais en incubation et risquerais de contaminer d’autres.

Heureusement j’ai reçu mon fil, et je peux m’amuser à faire du crochet. Comme je n’en ai pas fait depuis mes vingt ans, je m’y remets doucement en réalisant des disques démaquillants lavables, tout colorés, pour remplacer les cotons du commerce, qui ne sont pas recyclables. Très agréables à utiliser : le fil très fin, que je travaille en double ou en triple, fait un micromassage sur la peau du visage très bienvenu, je trouve. Je vais en faire aussi pour qui en voudra autour de moi, puis je passerai à un autre ouvrage, auquel il faut que je réfléchisse encore. En fait j’aimerais faire un manteau, je l’ai en tête, mais avant je pense m’entraîner encore et chercher des idées en faisant d’autres choses plus petites.

Faire du crochet est très très satisfaisant. Cela ressemble à écrire. Ce n’est pas pour rien qu’on parle du fil de l’écriture. Je n’aime pas coudre, je n’aime pas beaucoup tricoter bien que je sache le faire, mais j’aime vraiment beaucoup faire du crochet. Physiquement, c’est très agréable de tirer les points les uns des autres, ce caractère de chaîne est quelque chose qui nous constitue, en fait, comme l’ADN, et ADN c’est aussi une écriture, dans l’écriture alphabétique les lettres aussi s’accrochent pour former quelque chose. C’est aussi comme quand on parle d’accrochage d’une exposition, le côté révélation, démaquillage, et prise de place dans le cosmos, cette chaîne de causes et d’effets, de création.

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