Mobile home

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 Mobile en cartons à pizza industrielle peints à l’acrylique et vernis, reliés par un fil d’or. Comme c’est très léger, ça bouge tout le temps, faisant jouer les deux faces de chaque pièce les unes avec les autres.

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Continuant à faire ce rêve récurrent depuis des décennies, dans lequel je découvre toujours de nouvelles pièces, insoupçonnées, dans l’appartement ou la maison où j’habite.

Médecine de la mort

Bernard Kouchner, qui est favorable à l’euthanasie, ne veut pas employer ce mot, a-t-il dit à la radio, parce qu’on y entend « nazi ». Bel aveu. Où va la médecine ? Aujourd’hui beaucoup de gens n’ont pas les moyens de se faire soigner pour des maladies courantes, d’aller chez le dentiste ou de changer de lunettes, mais la médecine de la mort est gratuite. Une personne en souffrance psychique peut demander, y trouvant un moyen de se quitter elle-même, à changer de sexe : les traitements hormonaux et chirurgicaux sont pris en charge à 100 % par la sécurité sociale, sans respect d’une aide préalable, d’un accompagnement et d’un soin pour la souffrance psychique – bien que ces traitements hormonaux et chirurgicaux soient particulièrement dangereux pour la santé physique, et trop souvent n’apaisent que temporairement des personnes qui finissent, une fois faites les transformations, par se suicider. Il y a là un énorme scandale, mais comme il est politiquement correct, personne n’en parle.

Sosies

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photo Alina Reyes

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D’abord j’ai vu l’ancien grand rabbin Joseph Sitruk, que j’étais un jour allée écouter parler, assis sur le trottoir devant la boulangerie, un accordéon posé à côté de lui, en train de faire la manche. Mince alors, que fait-il là ? ai-je pensé, en le regardant attentivement – sur quoi, il m’a adressé la parole, pour me demander une pièce. J’ai bien dû me rendre à la raison, malgré la silhouette, malgré la barbe, malgré le visage, malgré le maintien, malgré le chapeau, malgré le costume similaires, ce ne pouvait être qu’un autre.

Puis voici que, marchant sur l’avenue, je vois droit devant moi le visage du fameux écrivain Jim Harrison s’afficher sur un panneau de la ville de Paris. Le temps que j’arrive près du panneau, l’affichage a tourné plusieurs fois, mais chaque fois j’ai vu réapparaître le vieux Jim, un petit peu retouché pour être moins abîmé, m’a-t-il semblé. Quand je suis arrivée juste sous le panneau, je me suis arrêtée le temps que revienne son tour dans le roulement. C’est alors que j’ai dû bien admettre qu’il s’agissait en fait d’un autre, puisque ce visage illustrait une campagne municipale pour les droits des SDF.

Si ce n’est nous-même, notre autre en nous est bien peu de chose.

Enterrement, déterrement

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photos Alina Reyes

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Je suis allée faire un tour en librairie, voir s’il sortait quelque chose. Rien vu. Que de la littérature sans poésie, c’est-à-dire de la littérature morte.

Pourtant la poésie, elle, ne peut pas mourir. C’est donc qu’elle est quelque part où on ne la voit pas toujours. Je la vois par exemple sur les murs de la ville. Et je la vois prête à refleurir aussi dans la littérature. Qui sait de quelle terre elle sortira ?

Taureaux

Rêvé de taureaux. L’un, jeune et sans cornes, dans son caprice de jeunesse me poussait du front dans notre forêt, et cela ne m’inquiétait guère quoiqu’il fût déjà extrêmement costaud, simplement je me mettais sur le rocher qui le surplombait. L’autre était chez moi, à l’intérieur, au plus intime, un énorme et très puissant taureau au pelage fauve et aux grandes cornes, tout en muscles et paisible.

Écriture, process

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rue Buffon aujourd’hui, photo Alina Reyes

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J’ai regardé le match de foot, consciente que la vision des évolutions sur le terrain était en train de m’aider pour le travail sur mon roman, auquel j’ai déjà bien œuvré aujourd’hui. C’est une question mentale, de mécanisme dans la tête, genre rubik’s cube, un processus qui fonctionne de lui-même du moment qu’il est alimenté. Yes.

Je suis donc à la rue, mais j’ai de bonnes jambes

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photos Alina Reyes

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J’avais rendez-vous, il y a eu un problème de bus, je suis arrivée avec un quart d’heure de retard, mon rendez-vous était parti. Un tel manque de patience m’a stupéfaite, mais bon, j’en ai profité pour retraverser tranquillement Paris à pied. En chemin je me suis arrêtée à Saint-Nicolas des Champs, où j’ai prié intérieurement la Fatiha devant le Saint-Sacrement, puis, paisiblement, la prière de Jésus en russe. J’aimais faire des retraites au carmel, je ne peux plus en faire depuis qu’ils se sont mis à me surveiller, à cause de l’intérêt que je pouvais représenter, avec mes livres et mon projet d’ordre monastique. J’ai ensuite aimé aller prier en plein air le vendredi à la Grande Mosquée, je ne peux plus y aller non plus, depuis qu’ils ont transféré la salle de prière des femmes au sous-sol. Si chacun refusait d’accepter ce qui est inacceptable, ceux qui commettent des abus de pouvoir n’auraient plus de pouvoir. Là où les religions, quelles qu’elles soient, marchent encore bien, elles seront confrontées à la perte des fidèles dès que les peuples, et notamment parmi les peuples les femmes, deviendront plus conscients de leurs droits et de leur dignité. Mes descendants, charnels et spirituels, prient et prieront libres.

Résumé

En rêve, j’étais avec Jacques et une amie à lui, petite, enveloppée, simplement vêtue de blanc, une grande croyante qui était ou allait être religieuse, et à qui je prenais le bras pour marcher, Jacques marchant à ma gauche, lui. Nous nous rendions à une célébration chrétienne, et assise sur les gradins à côté de Jacques, je pleurais d’avoir eu à partir. La deuxième partie du rêve, simultanée ou postérieure, se passait en effet à la montagne, où j’étais à la maison avec ma famille. Pierre et des amis à lui nous harcelaient pour la détruire ici et là, je faisais de mon mieux pour que les gars ne s’en aperçoivent pas et j’étais sans cesse à réparer ce qu’ils avaient détruit, un escalier etc. Puis je sortais la nuit dans la montagne, afin qu’ils s’occupent de me poursuivre plutôt que de s’en prendre à notre maison. Je courais et faisais des bonds prodigieux dans la neige, les roches, la forêt, ils étaient complètement incapables de me suivre. À la fin il était déclaré par des anges que j’appartenais à la neige.