La stratégie du choc, par Naomi Klein (1) Louisiane, Chili, Irak, Sri-Lanka

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 Gaza, photo Ibrahim Abu Mustafa/ Reuters

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Nous commençons la lecture de l’ouvrage paru en 2007 au Canada, en 2008 en France (éditions Léméac/Actes Sud, traduction de l’anglais par Lori Saint-Martin et Paul Gagné). Je donne au fur et à mesure de l’avancée dans le livre les passages à mon sens les plus significatifs, éventuellement commentés.

« Dix neuf mois après les inondations, alors que la plupart des pauvres de la ville étaient encore en exil, presque toutes les écoles publiques de La Nouvelle-Orléans avaient été remplacées par des écoles à charte exploitées par le secteur privé (…) les 4700 membres du syndicat licenciés. Certains jeunes instituteurs furent réembauchés par les écoles à charte, où ils touchaient un salaire nettement inférieur qu’auparavant. Bien d’autres n’eurent pas cette chance. (…) J’appelle « capitalisme du désastre » ce type d’opération consistant à lancer des raids systématiques contre la sphère publique au lendemain de cataclysmes et à traiter ces derniers comme des occasions d’engranger des profits. » (p.14)

« Pendant plus de trois décennies, Friedman et ses puissants disciples avaient perfectionné leur stratégie : attendre une crise de grande envergure, puis, pendant que les citoyens sont encore sous le choc, vendre l’État, morceau par morceau, à des intérêts privés avant de s’arranger pour pérenniser les « réformes » à la hâte. (…) En cas de crise, le professeur de l’université de Chicago était convaincu qu’il fallait intervenir immédiatement pour imposer des changements rapides et irréversibles à la société éprouvée par le désastre. (…) Variation sur un thème cher à Machiavel, selon qui le mal devait « se faire tout d’une fois »… » (p.15)

« Au lendemain du violent coup d’État orchestré par Pinochet, les Chiliens étaient sans contredit en état de choc. De plus, le pays était aux prises avec les traumatismes causés par une hyperinflation galopante. Friedman conseilla à Pinochet de procéder aussitôt à une transformation en profondeur de l’économie – réduction d’impôts, libéralisation des échanges commerciaux, privatisation des services, diminution des dépenses sociales et déréglementation. (…) Friedman créa l’expression « traitement de choc » pour parler de cette douloureuse tactique. (…) En Amérique latine, nombreux sont ceux qui établirent un lien direct entre les chocs économiques qui se soldèrent par l’appauvrissement de millions de personnes et l’épidémie de tortures qui punirent dans leur chair des centaines de milliers de personnes qui rêvaient d’une autre forme de société.» (p.16)

« En Irak, au Sri-Lanka et à La Nouvelle-Orléans, on entreprit le processus faussement qualifié de « reconstruction » en parachevant le cataclysme initial (guerre ou catastrophe naturelle) : on effaça les derniers vestiges de la sphère publique et des communautés profondément enracinées afin de les remplacer par une sorte de Nouvelle Jérusalem des grandes entreprises – le tout avant que les victimes n’eussent eu le temps de se ressaisir et d’affirmer leurs droits de propriété. » (p. 18)

Il n’est pas interdit de penser aux politiques qui se mènent en Europe et en France. Et aux intérêts en jeu, politiques et financiers, en ce moment pour la reconstruction de Gaza.

à suivre

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