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Cette nuit a eu lieu une pluie d’étoiles filantes. Les habitants de l’étroite, sauvage et splendide vallée d’Aspe, dont quelques-uns s’étaient réunis en soirée pour une Nuit Debout, ont dû en voir passer, dans leur ciel non pollué de lumières artificielles. Comme tous les habitants des campagnes, loin des villes tapageuses, orgueilleuses et superficielles.
Cette nuit j’ai compris que rien de bon ne viendrait de la Nuit Debout parisienne. Elle était assez bien partie, mais soumise à trop d’infections, elle n’a pas su réagir à temps, se débarrasser de ses parasites entristes et manipulateurs de plus en plus nombreux. L’autre jour un groupuscule identitaire d’extrême-droite, qui défilait avec les soraliens et autres fascisants à la manif Jour de colère, s’est même installé sur la place, sans que personne ne réagisse. Avec la complicité des organisateurs du mouvement ou à cause de leur ignorance politique ? Je l’ignore. J’ai alerté sur les réseaux sociaux, on ne m’a répondu que par le mépris. Ceci n’était évidemment qu’une toute petite pointe de l’iceberg. Des forces réactionnaires, voire pire, travaillent Nuit Debout à République, la Gazette du journal et d’autres militants en viennent à prôner l’amitié avec les forces de police, malgré leur brutalité qui a blessé nombre de manifestants. Une violence délibérée qui a d’ailleurs fait son effet : la révolte est écrasée, Nuit Debout contenue dans sa place avec la permission de 22 heures n’est plus que l’ombre d’elle-même.
Mais tout n’est pas perdu pour autant : Nuit Debout, ce n’est pas République. Le travail de ce mouvement, qu’il continue ou non à s’appeler Nuit Debout, grandira très logiquement non depuis Paris, depuis la tête et les chefs du pays, mais depuis ses villages, ses banlieues, ses villes de province. C’est dans les petites communautés, dans les quartiers, dans les villages, parmi les gens qui sont en fait les plus libres, à savoir les humbles, les non-soumis au système, que se développera une nouvelle façon de se gouverner, une nouvelle démocratie. Cela existe déjà dans certains pays pauvres, des localités se sont prises en main ici et là pour assurer leur vie collective et individuelle, leurs relations sociales et leurs échanges entre particuliers et entre communautés. C’est ainsi que de place en place (et non depuis une grande place sinistre comme République, qui se voudrait centrale et symbolique – le symbole faisant ici office de chef – où tout en refusant un système représentatif l’ensemble est soumis malgré lui à des forces incontrôlées qui le dépassent), de place en place à travers le monde et à travers le pays continuera à s’apprendre, s’inventer et s’étendre la sagesse du peuple, une démosophie, véritable philosophie, à savoir philosophie en acte, vécue. Car telle est la nature de la philosophie. Il suffit de savoir que Socrate pensait en déambulant le long d’un cours d’eau avec ses disciples pour comprendre sa philosophie. Il suffit de savoir que Diogène, depuis son tonneau, dit à Alexandre le Grand venu le voir : « ôte-toi de mon soleil », pour connaître sa philosophie. La nouvelle philosophie naîtra ainsi non de spéculations coupées du réel, mais de la vie même, de l’œuvre même de vie – rejoignant ainsi l’antique et véritable essence de la philosophie, celle qui fit une éclatante civilisation, à laquelle nous devons l’invention de la démocratie. La démocratie est moribonde, la nouvelle démocratie se prépare.
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