Aujourd’hui à la Pitié-Salpêtrière

De même que je travaille dans plusieurs bibliothèques, je vais et lis dans plusieurs jardins, dont celui de l’Allée haute, très paisible et très beau en automne, à la Pitié-Salpêtrière.

lci-pitie-salpetriereTous ces jours derniers (voir mes notes précédentes), les médias sont toujours là, attendant l’annonce de la mort de Jacques Chirac, caméras dehors, journalistes patientant des journées entières assis sur des bancs ou dans leurs voitures.m6-pitie-salpetriere On croirait les entendre croasser.

J’ai failli me faire écraser par une ambulance qui sortait tranquillement de l’hôpital, pas du tout pressée, alors que j’étais en train de traverser de façon tout à fait régulière sur un passage piétons, de l’autre côté du boulevard. En arrivant à moi soudain elle a accéléré, foncé sur moi. Le temps s’est décomposé, j’ai vu le visage largement souriant du chauffeur tandis que je bondissais sur le côté, juste à temps pour en réchapper. Il a poursuivi son chemin sans ralentir, tandis que deux personnes qui avaient assisté à la scène depuis le trottoir restaient médusées. J’ai vu que la rue où elle s’engageait était bloquée par un camion-poubelle, je l’ai rattrapée, j’ai frappé à la vitre, que cet ambulancier fou a quand même daigné baisser, et j’ai demandé explications et excuses. Tout ce qu’il a trouvé à dire c’est qu’il n’avait pas fait exprès. Décidément la mort rôde par là. N’est-ce pas romanesque ? Tant que nous ne nous laissons pas attraper ;-) Je suis entrée et j’ai passé un bel et bon moment à lire sous les arbres.

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jardin-salpetriereJ’ai aussi photographié une autre oeuvre de l’exposition en cours. Celle-ci est de Marissa Lopez
marissa-lopezphotos Alina Reyes

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Les vivants et les morts

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Ceux qui par leur politique inique, à l’extérieur ou à l’intérieur, sèment la guerre et réclament la paix sans rétablir la justice ne demandent en fait qu’un armistice de la honte, soumission et collaboration aux forces de la mort.

Églises, mafias, milieux… ces mondes dans le monde, à la fois concurrents et alliés, soumis au pire du monde, ces mondes parallèles où l’humain est proie et le crime fait droit, tendent un miroir au monde ordinaire chaque fois qu’il agit au mépris de la loi ou suit des lois iniques.

Le monde des manipulations et des manigances, si bas, si faux, si lâche, si bête, fait souffrir tout être doté d’un sens de la justesse, et notamment les simples et les génies, par définition animés de ce sens au plus haut point.

Contrairement à ce que prétendent les tenants de l’iniquité, la souffrance n’a aucune vertu. Elle détruit la vie des justes et n’a pas de prise sur les hommes sans justesse, déjà pris par la mort. Refuser de collaborer avec les systèmes iniques, c’est chaque jour contribuer à garder les vivants.

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photos Alina Reyes, hier à Paris : les médias faisant toujours le pied de grue devant la Pitié-Salpêtrière, et un homme sur le toit de sa péniche

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Sexe, mensonge et vidéo (actualisé)

Vendredi soir : j’ajoute ce lien France Inter comprenant des récits de témoins et des PV d’audition accablants pour Di Falco, et pour sa mère la pute l’église qui comme d’habitude n’a rien fait, l’a au contraire promu.
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Mgr Di Falco de nouveau accusé de viols sur enfants. L’affaire est ancienne mais ce qui est actuel c’est la réitération du mensonge par cet homme, mensonge qui redouble le viol. Et le fait que la prescription en matière de pédocriminalité n’est toujours pas supprimée. Si le droit n’évolue pas, la société s’embourbe.

Mieux vaut voir un pénis sur un mur que le pénis du curé dans la sacristie. L’œuvre d’un street artist belge va être effacée dans les semaines qui viennent – d’ici là, les jeunes filles du lycée catholique d’en face et les femmes voilées dans la rue, entre autres, auront eu, s’il leur arrive de lever le nez, l’occasion de songer.

 

Un pénis géant peint sur un mur embarrasse Bruxelles
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Qu’est-ce que la liberté ?

babyfootj’ai photographié ce baby-foot mardi au Kremlin-Bicêtre

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20 % des patrons seraient des psychopathes, selon une étude. Herman Melville a très bien évoqué l’aliénation de ce type de personnes dans Moby Dick (le capitaine Achab) et dans Billy Budd, marin (le personnage de Claggart). Claggart est pire qu’Achab, sans doute parce qu’il n’est pas vraiment le patron. C’est le type de psychopathie la plus banale, celle que nous voyons à l’œuvre tous les jours chez toutes sortes de gens, dans toutes sortes de milieux, publics ou intimes, qui ont des fantasmes de domination et doivent eux-mêmes vivre dominés.

Deux acteurs américains talentueux, beaux, riches, célèbres… et victimes d’addictions, accusés de violences domestiques, l’un sur sa femme, l’autre sur ses enfants. Encore de faux patrons, peut-être pas psychopathes mais maladifs aussi. Je leur conseillerais, pour se libérer, de lire ou relire Melville. La littérature peut tout guérir.

Qu’est-ce que la littérature ? Posant la question l’autre jour, j’évoquais l’unité de l’être qui en est la marque, contre la dissociation des fabricants de produits divers. Ajoutons : la littérature est une activité de recherche – le reste n’est que littérature, au sens dégradé ou frelaté du terme. La recherche est ce qui maintient l’homme en vie.

En ce moment je regarde beaucoup de séries policières. Elles remplacent très bien la plupart des romans actuels, qui ne sont que littérature fabriquée, dégradée, aliénée, et ne peuvent désaliéner leurs lecteurs. Seul le polar me semble encore compter beaucoup de livres de vraie littérature, et c’est un genre qui s’adapte très bien à la série, avec sa pénétration dans les réalités sociales, auxquelles il apporte son essence de jeu cathartique, si capitale en littérature. La justice y est réhabilitée de façon tout autre qu’elle ne l’est dans la réalité : si nous sommes invités à la trouver, ce n’est pas en trouvant la vérité mais en jouant avec l’auteur ou les scénaristes. Dans la réalité, la justice se fait par la vérité et la vérité ne dépend pas des hommes, elle est par elle-même. Sa propre patronne.

Parmi les séries policières que je regarde, mes préférées sont celles qui nous viennent des pays nordiques, où les personnages de femmes sont libérées de l’aliénation aux hommes. C’est ainsi, par l’échange entre la fiction et la réalité, que l’humanité avance. Les femmes et les hommes les plus libérés inspirent des personnages de fiction qui à leur tour servent d’exemples aux lecteurs/visionneurs de ces fictions. Dans leurs combats et dans leur force. Aucun mot français ne rime avec le mot triomphe, paraît-il. Apprécions le seul triomphe qui vaille, celui qui s’éprouve seul, indépendamment de la société, comme celui de la lumière qui chaque jour se lève.

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