«J’ai essayé de donner aux poèmes une autre forme, une autre dimension. Je crois que la poésie, selon notre tradition à nous, les Arabes, c’est le mot. Mais, au fond, il y a de la poésie dans les choses. C’est pourquoi j’ai essayé d’écrire d’autres poèmes, en dehors des mots, en dehors de la langue», dit Adonis à l’occasion d’une exposition de ses images. «On néglige les mains, ajoute-t-il. J’ai essayé de donner à mes mains la liberté liée à mon imagination et j’ai trouvé cette forme d’image liée à l’écriture. Quand on fait une image, on crée la peau du monde.»
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celui qui bâtit le monde est celui
qui active son errance
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vis lumineux crée un poème et va :
accrois l’espace de la terre
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Comment marcher vers mon peuple
vers moi-même
Comment aller vers ma passion et ma voix
et comment m’élever
Je ne suis qu’un fleuve qui déborde, s’apaise
s’embrase
Recouvrant la perle secrète de la poésie
Revêtant la tentation du soleil
Qu’un rêve
d’être fièvre prophétique
Lumière qui enveloppe la nuit
et se dénude
Pour errer dans le corps de la nuit
Rêve d’être l’indomptable
J’étreins la terre comme une femme
et je m’endors
Laissant tinter en elle ma cloche marine
telle une flamme perçante
Je fais descendre un verset pour proclamer
que je suis livre
que mon sang est encre
paroles mes membres
Adonis, Mémoire du vent
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