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« – Donnez-lui donc un baiser, devant moi, en premier gage d’amour vrai.
– Un baiser ? Je n’en vois ni le lieu ni le temps. Ce n’est pas que je ne le désire autant que lui. Mais ces dames sont tout près d’ici, elles s’étonnent que nous soyons restés si longtemps et ne manqueraient pas de nous voir. Cependant, s’il le veut, je lui donnerai ce baiser avec joie. »
Le chevalier est tellement joyeux et stupéfait qu’il ne peut répondre que :
« – Dame, grand merci.
– Ah ! dame, dit Galehaut, ne doutez pas qu’il ne le veuille, c’est son désir le plus grand. Et sachez que nul ne s’en apercevra, car nous nous promènerons tous les trois, comme si nous devisions.
– Pourquoi me ferais-je prier ? dit la reine. Je le veux plus que vous et plus que lui. »
Alors ils s’éloignent tous les trois et font semblant de converser. La reine voit que le chevalier n’ose en faire plus. Elle le prend par le menton et, devant Galehaut, l’embrasse très longuement.
Lancelot du Lac, trad. François Mosès
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