Kalevala bio

photographiée par S. cet après-midi à mon bureau

photographiée par S. cet après-midi à mon bureau

J’ai rêvé du Kalevala sous tous ses avatars, langues, essences, et à la fin c’est de ma peau qu’il était fait, écrit. C’était si sensible, si vivant, que cela m’a réveillée.

Le jour je continue à le lire doucement (j’approche de la fin mais je ne suis pas pressée de le finir), le soir je regarde les films de  The Lord of the Rings dans leurs versions les plus longues (près de quatre heures chacun pour les deux premiers), et je vois tout ce qui, du Kalevala, a inspiré Tolkien.

La traduction parue chez Gallimard est décidément très mauvaise, ampoulée, propre à dégoûter de ce livre splendide. Comme je l’ai déjà dit, la première traduction en prose, disponible en ligne, toute simple, suffit à comprendre la beauté initiale du texte. La traduction versifiée de Jean-Louis Perret (éd. Champion) est très bien aussi. En voici encore un passage :

« Il est doux d’être sur les ondes,
De laisser glisser le bateau,
De parcourir les flots immenses,
De voguer sur les nappes claires ;
Le vent vient bercer le bateau,
La vague emporte le navire,
Le norois fait des clapotis,
Le vent du sud pousse en avant. »

Chant 39

Pour en savoir plus : mot-clé Kalevala

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Débâcle au sommet

Les orages ont fait quelques dégâts au Jardin des Plantes, photo Alina Reyes

Les orages ont fait quelques dégâts au Jardin des Plantes, photo Alina Reyes

 

Le préfet de police de Paris a menti sous serment devant l’Assemblée nationale.

Le président de l’Assemblée nationale veut faire interdire un roman.

Le secrétaire général de l’Élysée, « n° 2 de l’Élysée, bras droit du président de la République », fait l’objet de deux plaintes auprès du PNF (parquet national financier) pour « prise illégale d’intérêt », « trafic d’influence » et « corruption passive ».

Le président de la République, loin de son nervi jouant désormais les gros bras auprès d’une autre star de la téléréalité dans un autre royaume pourri, est retranché dans un fort (avec piscine ponctionnée aux contribuables).

Le vieux monde tourne à la farce, signe de son épuisement.

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Début de la fin

ces jours-ci à Paris 13e, photo Alina Reyes

ces jours-ci à Paris 13e, photo Alina Reyes

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Chaleur. Changement climatique. Quand vient un épisode de fin du monde, que ce soit à l’échelle de la planète ou dans notre vie personnelle, si la sagesse, l’intelligence, le cœur, l’invention, le courage, ne guident pas notre adaptation, la folie et la mort s’emparent sans retour de ce qui est.

L’Union européenne active ce matin la « loi de blocage » contre les sanctions américaines en Iran, afin que les entreprises basées en Europe ne se conforment pas au diktat de Trump. Espérons qu’elles auront le courage et la sagesse de cesser d’obéir aux États-Unis, camp avancé de la folie destructrice en cours.

Patrimoine français. La mission de Stéphane Bern fait flop. Cette façon qu’a Macron de s’entourer de médiocres en tous genres en dit long, malheureusement, et ne peut rien apporter de bon. Nous avons besoin de mobiliser toutes les excellences.

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Lavage de cerveaux

tolbiac

Je suis repassée devant la fac de Tolbiac. La façade est de nouveau de béton cru, même les plus belles fresques ont été effacées. Sur le côté, des ouvriers immigrés étaient en train de frotter pour enlever les derniers tags. L’art, la littérature, la connaissance sont pourtant les seules portes de sortie des idéologies, de toutes sortes d’idéologies – toutes sont morbides.

 

paris 13eces jours-ci à Paris 13e, photos Alina Reyes

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Kalevala, premiers vers (ma traduction)

Screenshot_2018-08-05 Kalevala - kalevala pdf

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J’en avais trop envie, je me suis débrouillée à pouvoir traduire les premiers vers du Kalevala (d’autant que je n’étais pas très satisfaite des traductions existantes, cf note précédente). J’ai trouvé le texte source en programmant une recherche en finnois sur Google, puis je me suis arrangée avec les dictionnaires Lexilogos. J’ai aussi consulté une page de conjugaison d’un verbe en finnois. Il est aisé de comprendre le système du pronom personnel ou déterminant possessif, de comprendre aussi les légères variations d’orthographe entre ce finnois un peu ancien et le finnois récent des dictionnaires. Ensuite tout est une question d’oreille, tant pour la transposition sonore (on fait au mieux) que pour le sens des mots. Les dictionnaires sont précieux sur ce point : par exemple, si je ne me trompe, j’ai retrouvé la racine d’un mot dans un nom signifiant intestins, entrailles, et dans un verbe pouvant signifier pondre. Sachant à la fois que la création du monde, exposée ensuite, se fait par une ponte, et d’autre part que le barde crée le monde par sa parole, le sens poétique de la parole jaillie des entrailles, pondue, apparaît subtil et limpide. Parfois j’ai vérifié mes intuitions en donnant à Google traductions une formule en français à traduire en finnois. Par exemple quand le texte dit que les mots fondent ou tombent, c’est bien avec les mêmes verbes finnois qu’on dit que la neige fond ou que la pluie tombe, c’est pourquoi j’ai employé le verbe dégeler et le mot pluie. Ainsi se présente un moment de dégel de la parole, qui finit par rompre ou dissiper les dents, dit le texte finnois – littéralement ça n’est pas très parlant, mais si on se représente ce qui se passe, on comprend qu’il s’agit de rompre le barrage formé par les dents. Voici donc ma traduction, moderne, imparfaite bien sûr, mais plus compréhensible que celles de mes prédécesseurs.

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Mon esprit est à mon désir,

mon cerveau tout à réfléchir

se met en route pour chanter,

pour arriver à inspirer,

à pondre un hymne pour le peuple,

dire un genre de chant du peuple.

Les mots dégèlent dans ma bouche,

le discours tombe, pluie et douche,

dans ma langue rapide flux,

barrage de mes dents rompu.