L’Église et la justice, deux institutions protectrices de la pédocriminalité

Sous le choc en apprenant que Michelle Martin-Dutroux, kidnappeuse d’enfants, violeuse d’enfants, bourreau d’enfants séquestrés, meurtrière d’enfants, après avoir obtenu, grâce à un couvent qui a offert de l’héberger, de sortir prématurément de prison – au bout de huit ans, sur les trente auxquels elle était condamnée – et après avoir organisé son insolvabilité pour n’avoir pas à indemniser les victimes,

sous le choc en apprenant que cette ordure, après tant de traitements de faveur, est maintenant hébergée par un ancien juge, qui a aménagé pour elle trois pièces au premier étage de sa maison – et qui parle de lui et d’elle comme « prince et princesse ». Princes de ce monde, comme on appelle le diable, le mal.

Comme dans l’affaire d’Outreau, l’affaire Dutroux a été jugée de façon à enterrer un grand nombre de faits et d’impliqués. L’existence manifeste d’un réseau a été niée, on a conclu au pédocriminel isolé. Le silence des pires meurtriers est ce qui se vend et s’achète le mieux.

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Outreau, les procès sodomites

En 2004 à Saint-Omer, les enfants victimes furent pendant tout le procès placés dans le box des accusés (par manque de place pour les accusés !), tandis que les accusés étaient assis dans la salle avec les avocats et les journalistes – avec lesquels ils avaient tout loisir de converser et de se plaindre de ces enfants rois d’aujourd’hui, ma bonne dame, qui racontent n’importe quoi.

Avant-hier Myriam Badaoui, la principale condamnée après son mari Thierry Delay, est arrivée dans la salle du tribunal de Rennes par l’entrée des jurés. De fait elle fut considérée comme l’unique juré, voire comme le juge, puisque toute la presse titra ensuite qu’elle avait « disculpé » l’accusé.

Aujourd’hui l’accusé, Daniel Legrand, a demandé à ne pas parler du box des accusés mais à la barre des témoins. Tout étant inversé dans ces procès, il refuse en fait la place des victimes. Comme Myriam Badaoui, il affirme avoir menti en avouant, et c’est la négation de leurs aveux qui prime dans l’esprit du public. Badaoui après avoir, l’une des toutes premières, indiqué son nom dit cette semaine qu’en fait elle ne le connaît « ni d’Ève ni d’Adam », mais lui aujourd’hui à la barre, tout en niant les connaître, les appelle par leurs prénoms.

Outreau ou la vérité par le « derrière ». Autrefois on appelait « inversion » la sodomie. Les procès d’Outreau sont, à l’instar des coupables, sodomites du sens. Quant aux enfants, ils sont condamnés à devenir « in-sensés ». Heureusement ils résistent, et nous sommes quelques-uns avec eux.

Si vous voulez suivre le procès avec moi sur twitter, c’est ici.

Retour sur Outreau

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Huit des accusés d’Outreau (Sandrine Lavier, Franck Lavier, Alain Marécaux, Karine Duchochois, Pierre Martel, Roselyne Godard, Dominique Wiel, Lydia Cazin Mourmand et Christian Godard) fêtent la fin du procès, en décembre 2005. © AFP . Photo publiée avec cet article du Point, l’un des rares journaux moins partiaux sur cette affaire, lors de la sortie du film Outreau, l’autre vérité

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La propension des hommes à se dire du côté des faibles quand ils sont loin et à ne pas les regarder quand ils sont près n’a d’égale que leur propension à se dire contre les forts quand ils sont loin et à se ranger de leur côté quand ils sont près.

Quelle voix s’élève en France pour défendre la vérité bafouée des enfants violés d’Outreau ? Des humbles se mobilisent, font circuler l’information que les médias depuis des années occultent, en complicité avec les avocats des violeurs. Mais parmi les élites, parmi ceux qui ont accès aux médias, mutisme. Il est aisé et seyant de défendre les grandes causes lointaines, plus risqué de s’engager pour la justice et la vérité dans des affaires aussi proches et aussi sensibles. Les habitués de l’engagement désincarné reculent devant la vérité effrayante des personnes réelles d’Outreau. La peur métaphysique sert le déni et l’injustice.

De quoi ont peur ceux qui détournent le regard ? De voir, en se penchant sur le trou noir d’Outreau, ce qui en eux-mêmes grouille peut-être. Pour le nier, ils sont prêts à déformer la vérité, occulter les faits. À l’occasion de ce troisième procès, celui de Daniel Legrand qui produisit des aveux très détaillés et non extorqués, faits devant un psychologue, on nous dit que la victime c’est lui. Comme on l’a dit des sept condamnés qui furent acquittés en appel, malgré les déclarations concordantes des enfants et d’eux-mêmes avant qu’ils ne se rétractent. Déclarations faites sans que les uns et les autres aient pu se concerter, qui se recoupaient et comportaient des précisions qu’il leur était impossible d’inventer.

À Outreau, il y a eu viols en réunion et prostitution de nombreux enfants par de nombreux adultes. Il y a eu aussi, d’après les déclarations de plusieurs personnes, mort d’une fillette au moins. Douze enfants ont été reconnus victimes de viols, quatre adultes seulement condamnés, un seul encore en prison. Les acquittés (ce qui ne signifie pas « innocentés », car de lourdes charges pesaient sur eux) ont reçu des centaines de milliers d’euros chacun en dédommagement de leur temps passé en préventive. Les enfants violés, eux, ont été indemnisés dix fois moins, et abandonnés à leur sort. Ceux dont on a quelques nouvelles sont aujourd’hui des adultes en grande souffrance, comme Chérif Delay (extraits de son livre).

C’est le juge et ce sont les enfants qui se trouvent mis en accusation. C’est le monde à l’envers. L’abbé Dominique Wiel, l’un des acquittés, voisin de palier des Delay et celui qui, après les deux couples condamnés qui n’ont pas fait appel, avait écopé de la plus lourde peine au vu des déclarations précises de nombreuses victimes, a osé écrire un livre où il traite de « salades et bobards » la parole des enfants, et demande aux enfants Delay (qu’il rebaptise Jean et Luc – où tout psy entend « j’encule ») de dire qu’ils ont menti, qu’ils n’ont jamais été violés par quiconque – alors que leurs parents eux-mêmes ont avoué les viols qu’ils ont commis sur eux. Prenant visiblement les petits garçons pour des femmes, il a prétendu qu’un « gynécologue » aurait déclaré que les fils Delay n’avaient pas été violés. Il s’est répandu en tournée dans toute la France pour porter son accusation contre le juge et contre les enfants, anéantir toute l’histoire, prétendre que tout était pure invention. Il a été reçu dans les médias, dans les télévisions, où il a eu le culot de dire qu’il « pardonnait » aux enfants, mais qu’il attendait que le juge lui demande pardon. Ce même abbé accusait dans la presse la circulaire Royal qui oblige les travailleurs sociaux à dénoncer les abus sexuels sur enfants, et fait partie des comités de soutien d’un prêtre condamné à huit ans de prison pour viols d’enfants en Afrique, et d’un instituteur condamné à la même peine pour abus sur des enfants de sa classe. Lui aussi a reçu des centaines de milliers d’euros en dédommagement, lui aussi est reçu partout en victime ! Comme ce couple d’acquittés dont les enfants vivaient dans des chambres sans fenêtre ni chauffage ni draps, sur des matelas au sol pleins d’urine et le corps couvert de bleus – tandis qu’une vidéo de famille « ordinaire » montrait la mère embrassant sa fille à pleine bouche.

Les Delay ayant été convoqués avant qu’on ne songe à perquisitionner chez eux, comme ils l’ont avoué ont eu le temps de détruire et faire détruire dans leur entourage les cassettes qu’ils échangeaient et commercialisaient, avec les viols des enfants en réunion. Les viols, les sévices, les meurtres semble-t-il, tout ce qui s’est passé à Outreau et dans la région a été effacé, dissimulé, puis occulté par la presse, qui loin d’enquêter a instruit le dossier à charge contre le juge et les enfants, à la suite du livre de Florence Aubenas. De retour de captivité, elle a écrit à la hâte un livre pour disculper les violeurs, livre couronné d’autant plus de succès que l’auteur était auréolée de sa gloire de journaliste fraîchement libérée, et que sa thèse libérait chacun de ce poids de la culpabilité possible des adultes envers les enfants. À l’occasion de ce troisième procès, la même machine à désinformer s’est remise en marche, notamment aussi avec un journaliste du Figaro qui soutient ouvertement l’accusé, client de l’avocat avec lequel il a écrit un livre. Les avocats sont habitués à mentir, cela fait partie de leur métier, mais ce n’est pas celui des journalistes. Ici comme dans bien d’autres cas, toute éthique du journalisme est bafouée sans que personne ne s’en émeuve. Le fameux avocat blogueur qui se fait appeler Maître Éolas m’a mise plus bas que terre quand je lui ai fait remarquer ce fait sur Twitter, alors qu’il promouvait le journaliste du Figaro. Je répète ses mots, parce qu’ils disent le degré de haine des négateurs ; en réponse à ma remarque formulée poliment, voici ce qu’il m’a dit : « Le dernier lambeau de crédibilité et de dignité qui vous restait vient d’expirer. Je vous laisse, par pudeur » et : « Avez-vous si peur d’échapper à mon mépris ? » ; puis, à un autre : « J’ai fait le tour de cette folle ». Les hantises, les phobies sexuelles, produisent les cœurs secs. Les cœurs secs produisent le mépris de la vérité, perpétuent les injustices, répandent aveuglement et lâcheté. J’accuse tous ceux qui se font ainsi les complices de violeurs et d’assassins d’enfants.

Qu’est-ce qu’une société dans laquelle plusieurs témoins parlent d’enfants tués lors de viols, et qui choisit de fermer les yeux ?Qu’est-ce qu’une société où l’on expédie en Afrique puis abrutit de médicaments le témoin le plus « debout », le plus « dangereux » donc, qu’il faut empêcher de parler, qu’il faut convaincre qu’il a rêvé quand il parle du meurtre d’un enfant ? Chérif Delay est aujourd’hui interné, assommé de médicaments. Qu’est-ce qu’une société dont la justice et les médias œuvrent à occulter la parole des enfants violés et innocenter les violeurs ?

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En savoir plus

Au tribunal de la conscience. « Je suis debout », par Chérif Delay

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En ces jours où se déroule un troisième procès d’Outreau, au cours duquel la parole des victimes semble tout aussi méprisée que lors des précédents (rappelons que la première fois ce sont les enfants qui étaient placés dans le box des accusés, au tribunal, tandis que leurs bourreaux étaient dans la salle avec les journalistes, auxquels ils avaient tout loisir de raconter leur déni des faits – et que la presse s’est en effet empressée de les transformer en victimes des prétendus mensonges des enfants – douze d’entre eux ont pourtant été reconnus victimes de viols, alors qui les a violés?), j’ai lu le témoignage de l’aîné des frères Delay, aujourd’hui adulte en grande souffrance. Serge Garde, auteur d’un documentaire, à voir sur Youtube, intitulé Outreau, l’autre vérité, lui a servi de plume. Le livre est paru en 2011. Il est évident que Chérif Delay n’a pas pu tout dire, tout raconter, le traumatisme est trop grand et certains faits sans doute trop terribles – rappelons qu’il a été frappé jusqu’à tomber dans un coma de plusieurs jours à l’âge de cinq ans, puis violé à partir de l’âge de six ans par son beau-père puis d’autres, dont sa mère. Certainement il ne peut dire tout ce qui s’est passé, et qui a impliqué beaucoup de personnes et beaucoup d’enfants – il a même été question de mort d’enfant – mais son livre est un témoignage vivant et très intéressant. J’en donne ici quelques passages.

Ma mère, je dois la tuer. Dans ma tête. (…) Ma mère m’a violé comme elle a violé mes petits frères et d’autres enfants (…) Et voilà qu’elle m’écrit qu’elle veut me « serrer » contre elle et « m’embrasser » ! Comment ose-t-elle ? C’est la dernière femme au monde qui a le droit de me toucher.

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Je viens d’un monde où les gens ne comptent pas, sauf dans les statistiques du chômage. RMI ou RSA ? RAS. Je viens d’un monde où les gens passent sans histoire, sans laisser de trace. Je viens du silence.

Écrire un livre, c’est comme niquer le destin. C’est être dans la lumière. D’un certain côté, j’aime. Mais, franchement, j’aurais préféré rester un enfant, puis un jeune homme anonyme.

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Au plus fort de cette tempête qui, dix ans après, continue de souffler par rafales, je n’ai jamais baissé les yeux. J’ai souvent trébuché mais, aujourd’hui, je suis debout et, quoi que vous ayez pu penser de l’affaire, je vous invite au tribunal de la conscience.

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La présidente me demande de reconnaître les personnes par numéro. Elle m’interroge sur une accusée. Je n’ai pas le temps de répondre. C’est parti ! Les avocats de la défense, derrière, dans mon dos, me coupent la parole, me traitent de menteur, de mythomane, d’affabulateur… Et personne n’intervient pour que je puisse témoigner normalement. Même mon avocat laisse faire. Je ressens l’hostilité de la salle archicomble derrière moi. Je reste figé, sidéré. Personne ne réagit pour dire qu’on devrait me laisser parler. Bouche bée. Le ciel m’est tombé sur la tête. Pourquoi un tel déluge d’agressivité ? Mais qu’est-ce que j’avais bien pu faire ?

Les avocats de la défense se relaient. L’un d’eux m’accuse d’être le fils de ma mère, le fils d’un monstre. (…) Je n’étais plus une victime, pas même un témoin. J’étais l’accusé. (…) La suite, je l’ai vécue comme pendant les viols. Dissocié. J’étais à la barre, mais totalement absent.

(…)

Sans doute persuadé d’appartenir à une espèce supérieure, Delay pataugeait dans un racisme particulièrement sordide. Il me rappelait que je n’étais pas de son « sang ». M’appeler par mon vrai prénom, c’était au-dessus de ses forces. Chérif faisait trop musulman à son goût. Il fallait gommer mes origines. Si quelqu’un dans le voisinage m’appelait Chérif Delay, il décrétait que son nom était sali. D’autorité, il m’a rebaptisé à la mode aryenne. Sans trop d’imagination. C’était la mode des Kévin… Alors tout le monde a dû m’appeler Kévin, et j’ai fini par m’y habituer. À l’époque, j’étais trop petit pour comprendre qu’il me volait mon identité. Il faisait de moi un fantôme.

(…)

J’ai appris « sadisme » dans ma chair avant de connaître le mot. (…) Il ne voulait pas m’entendre gémir ou pleurer, pour, disait-il, que je devienne un dur. Une façon de marquer dans ma chair : « Tu portes mon nom. Si tu veux que je t’accepte, il faut que tu acceptes ce que je te fais. » Mais cela n’avait rien d’un rite d’initiation. C’était un calvaire permanent.

(…)

Dès que je pouvais, de façon indirecte et souvent très maladroite, j’envoyais des appels au secours. (…) J’étais muré dans le silence. Je ne disais rien sur moi, mais combien de fois j’ai dit à une enseignante : Aidez mes frères !

(…)

La période des viols a commencé. Au départ, je ne subissais que Delay. Mais il avait des amis. Il recevait beaucoup.(…) Ils ont élargi le cercle. Le voisin avait un ami qui avait un ami… (…) Je ne peux pas être plus précis sur la constitution du réseau. La plupart des discussions ne se passaient pas devant moi.

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Il y avait régulièrement les menaces de mort : Si tu mouftes, j’te tue !

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Tous ces tarés ont même cherché, à un moment donné, à me transformer en violeur. Ils voulaient que je devienne comme eux, sans doute pour me neutraliser.

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Delay m’a fait creuser une tombe jusqu’au cercueil. Le bois était complètement pourri. Delay est descendu dans le trou, il a ouvert le cercueil et il a saisi la tête du mort et il me l’a tendue pour que je la mette dans un sac-poubelle. (…) Je n’ai pas pu. J’ai dégueulé trois fois.

(…)

Parler de choses difficiles à dire, cela fait mal. Ne pas parler détruit.

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Je ne te pardonnerai jamais. De toute ma vie. Jamais.

(…)

Un père incestueux, c’est d’abord quelqu’un qui a le pouvoir absolu et qui en abuse comme il veut.

(…)

C’était un traquenard et je suis tombé dedans. En quittant la barre, je répétais intérieurement « je sais pas, je sais plus ». J’étais choqué. Pour sortir, je me suis retrouvé face aux accusés. Ils jubilaient. Je voulais m’évanouir, crier, m’éclater la tête contre un mur, sauter par la fenêtre.

(…)

Les journalistes, à mes yeux, portent une responsabilité particulière dans cette affaire.

(…)

« Tu dois le savoir : ils ont tous été acquittés ! » Je suis resté sans voix. J’ai fumé une dizaine de clopes d’affilée. Puis ma tête est devenue un cocktail Molotov. L’explosion a été violente. J’ai tout cassé dans la turne. Mais ça ne m’a pas calmé.

(…)

Je suis allé dans un quartier « chaud » pour acheter un flingue. Pas trop difficile. (…) Fort heureusement, je n’avais pas encore la somme nécessaire. Je me suis promis de réunir vite l’argent pour acheter l’outil de ma vengeance. Rien en moi ne m’incitait à dissuader ce Kévin qui voulait plomber tout le monde. Quand je dis tout le monde, c’est une façon de parler. Kévin ne ciblait que les quelques personnes qui lui avaient volé son enfance. Bien sûr que je savais où elles habitaient.

(…)

Et si vous réussissez à dire ces choses indicibles, personne n’imprime, parce que vous conservez l’apparence d’un enfant comme les autres, en plus chiant. Qui peut deviner qu’une partie de vous est morte ? Pas morte. Plongée dans le coma. (…) Je me suis battu, je me bats tous les jours.

(…)

Suite à une délirante accusation de pédophilie, le Museum national d’histoire naturelle s’autocensure

Cet après-midi, ouvrant mon ordinateur, je vois sur mon fil twitter une affiche du MNHN pour une conférence intitulée Races : pour en finir avec les fantasmes racistes. Une petite vingtaine de personnes de toutes origines posent debout, nues, côte à côte. Quelques-unes ont un petit enfant dans les bras, nu aussi. Je clique sur la photo, qui me rappelle une affiche précédente du Musée de l’Homme, mais à ce moment même, elle disparaît de l’écran. Quelques instants après, le MNHN annonce que l’affiche ayant choqué, il a décidé de la retirer.

En effet deux twittos, Madame Michu et Père J-B Nadler, ont violemment apostrophé le Museum, l’une demandant :
.@Le_Museumça ne vous dérange pas de mettre des gosses à poil sur vos affiches ?

L’autre ajoutant : @Le_MuseumEt si on en finissait aussi avec vos fantasmes pédo ?

En 1992, l’exposition « Tous parents, tous différents », au Musée de l’Homme, avait donné lieu au même genre d’affiche. La voici :

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Autant que je sache, personne n’y avait rien trouvé à redire, et l’exposition a continué à faire le tour du monde jusqu’à nos jours. L’affiche réalisée pour la conférence était plus pudique que cette première affiche, plus belle aussi d’après mon souvenir – je n’ai pu la voir que quelques secondes avant qu’elle ne disparaisse. C’était une photo soignée, elle a coûté du travail aux gens qui l’ont pensée, à ceux qui ont posé et au photographe qui l’a faite. Elle illustrait ma foi si bien son sujet qu’elle a déclenché ces réactions épidermiques de deux malheureuses personnes, qui ont conduit à la retirer.

Au-delà du scandale de cette auto-censure provoquée, je crois que cette histoire est emblématique, plus que d’une hantise pédophile, de la fantasmatique raciste qu’elle évoque. Ceux qui se sont déclarés si violemment choqués par cette affiche l’auraient-ils été si on n’y avait vu nus que des Noirs, enfants compris ? Il y a un siècle, on les exhibait encore comme au zoo (cf la Vénus hottentote) et nulle bourgeoise ni nul curé ne s’en offusquait. Ce qui les aurait choqués, ce qui peut-être les choque encore, n’est-ce pas de voir l’homme « blanc » présenté à égalité de nature avec l’homme « de couleur » ?

Autour de la sortie de prison de Michelle Martin (3 – résumé et conclusion)

mon amie du Jardin des Plantes

 

On nous dit que Michelle Martin souhaite se racheter. Mais si elle souhaitait vraiment se racheter, au lieu de songer à sauver ses meubles, elle parlerait. Elle dirait aux familles des victimes, qui ont le droit absolu de le demander, comment ont vécu et sont réellement mortes leurs enfants, pendant que Dutroux était en prison et qu’elle en était responsable. Et surtout, elle dirait à la justice et à la presse comment et avec qui sont organisés les réseaux mafieux auxquels elle et son mari louaient ou vendaient, pour être suppliciés, les enfants qu’ils avaient enlevés. Elle cesserait d’être leur complice en les protégeant par son mutisme afin de se protéger elle-même.

On nous dit que Dutroux et Martin sont des tortionnaires solitaires, agissant pour eux-mêmes, et que la thèse des réseaux n’est qu’un fantasme. Mais des enfants continuent à disparaître, soit pour quelques jours, soit pour toujours, et des vidéos et photos pornographiques les utilisant parfois jusqu’à leur mise à mort continuent à être produites et vendues. Et les Dutroux-Martin, censés vivre de leurs pensions d’invalidité, possédaient cinq maisons et plusieurs comptes en banque sur lesquels des virements étaient faits après les enlèvements. Et pendant l’enquête sur cette affaire, entachée d’innombrables irrégularités, au moins vingt personnes qui s’apprêtaient à témoigner de ce qu’elles savaient de cette organisation criminelle sont mortes de mort brutale.

On nous dit que la charité des religieuses envers Michelle Martin est admirable. Mais la bienveillance conjointe des pouvoirs politico-judiciaires et d’une certaine partie de l’église belge envers la criminelle, les uns la relâchant, les autres l’accueillant, n’a rien à voir avec une quelconque charité. Le fait est, quoique soigneusement non établi, que dans les milieux politique, judiciaire et même religieux, bien des personnes sont impliquées à divers degrés dans ces mafias de pédophilie, soit comme témoins, soit comme acteurs. Soit comme terrorisés, soit comme terroriseurs. D’après ses déclarations anciennes, le cardinal qui fut primat de Belgique jusqu’en 2010 semble en savoir long sur la question ; et son rôle personnel dans cette histoire est loin d’être clair. Comme ceux de bien des magistrats, policiers ou politiciens autour desquels aucune enquête sérieuse ne paraît possible, à cause de la terreur organisée par cette mafia interne aux pouvoirs, et qui a déjà fait beaucoup de morts.

On nous dit que la haine du peuple envers Michelle Martin est détestable. Mais cette haine est l’expression d’un rejet horrifié devant ce scandale plus qu’énorme. La haine envers les tortionnaires n’a pas à nous effrayer. Elle est moins effrayante et plus saine que la haine envers la vie. Elle traduit la haine envers l’aberration du nihilisme. Cette haine est saine dès qu’on aide les âmes à avoir conscience qu’elle est en fait dirigée non contre une personne, mais contre le mal qui a pris possession d’une ou de nombreuses personnes. En définitive, cette haine, correctement comprise et dirigée, est salutaire. Dans le sens où elle exige que vérité et justice soient faites. Alors que la fausse compassion des « bonnes âmes » et autres « élites », quand elle n’est pas le masque d’une duplicité monstrueuse visant à protéger le crime, n’est en vérité qu’idéologie, stupidité, sécheresse de cœur et d’intelligence, défaut de discernement, indifférentisme moral, aveuglement, lâcheté, dilution des responsabilités dans un grand système d’irresponsabilité générale, d’acquittement général du crime, qui peut ainsi continuer à s’étendre comme dans toute organisation génocidaire.

Car si le crime ainsi commis contre les enfants n’est pas spectaculaire, ni en nombre ni en manifestation, puisqu’il est tellement caché, il n’en est pas moins excessivement grave et immense. Il s’agit d’un crime contre l’humanité qui s’en prend à même sa source. Guy Debord avait très justement prophétisé la société du spectacle. Ajoutons qu’elle a son corollaire, qui se développe en même temps qu’elle : la société de l’occulte. Les deux n’en font qu’une. On montre beaucoup d’inessentiel, on enterre plus encore d’essentiel. Société de fausse transcendance, creusant sa « fosse de Babel » comme le prophétisa Franz Kafka. D’une telle société, qui se tait pendant que ses puissances occultes dévorent ses enfants, nous pouvons prophétiser la chute, la désintégration par aspiration dans la fosse. Cela ne se passe pas qu’en Belgique, cela se produit dans des ramifications mondiales, et cela nous concerne tous. Que chacun se réveille, cesse de croire tout ce qu’ « on nous dit », cherche la vérité et prenne ses responsabilités, chacun selon son domaine et ses possibilités. La vie l’exige, et elle est belle.

 

Autour de la sortie de prison de Michelle Martin (2)

« Combien de temps pouvons-nous tenir le coup, détendus et joyeux ? »

Cardinal Danneels, homélie pour les 75 ans de Caritas en Belgique

« Au XVIIe siècle, le poète néerlandais Jacob Revius écrivait déjà : « Ce ne sont pas les Juifs, Seigneur Jésus, qui t’ont crucifié… C’est moi, ô Seigneur, c’est moi qui t’ai fait cela. » »

« Seigneur Jésus, Agneau de Dieu,
conduit à l’abattoir,
muet devant celui qui le tond,
sans défense,
sans personne pour s’en apercevoir…
Apprends-nous que seuls les agneaux
sont suffisamment solides et forts
pour porter les péchés,
que le salut du monde
exige cette rançon :
la mort de l’Agneau innocent
et les souffrances de tous ceux qui le suivent… »

Cardinal Danneels, Si tu connaissais le don de Dieu

« Dieu s’est rendu si vulnérable : Il est et il veut être un « sans-défense », un nouveau-né livré entre nos mains pour tout : pour être vêtu, nourri, soigné. Dieu a voulu être dépendant de nous en tout et pour tout. Voilà tout autre chose qu’une émotion devant un berceau. Et Cet Enfant-Dieu incapable encore de dire un seul mot, ne l’entendez-vous pas crier haut et fort : « de grâce ayez pitié de moi ». (…)

Il y a beaucoup plus d’agneaux qui sont venus chercher refuge dans la crèche : une foule innombrable d’autres agneaux, invisibles à nos yeux mais si visibles aux yeux de Dieu : la grande famille des « sans-défense », des enfants au sens étymologique de ce terme – in-fans – celui qui ne sait pas encore ou ne sait plus parler. Leurs cris sont plus forts que le chant des anges. (…) »

Cardinal Danneels, homélie de Noël

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Je ne me souviens plus où j’ai lu que les cris poussés par les enfants torturés étaient insoutenables, dans la vidéo du viol et de la torture (jusqu’à leur probable mise à mort) des deux petites filles de huit ans que Martin aurait livrées à une douzaine de personnes, dont des politiciens, pendant que Dutroux était en prison. Cette cassette existe-t-elle vraiment ? Rien ne le prouve. Le 5 février 2004, le député belge Mahieu, à qui un certain X en a parlé, prend rendez-vous avec le cardinal Danneels et lui raconte que X prétend détenir une vidéo avec laquelle il voudrait le faire chanter : selon Mahieu, aujourd’hui mort, le cardinal serait resté froid à l’évocation des sévices subis par les enfants et aurait seulement demandé, avec un peu d’insistance, si on le voyait sur cette cassette. Mahieu n’en savait rien, ne l’ayant pas visionnée. Puis il aurait dit à Mahieu de garder la plus grande discrétion sur cette visite (racontée en détail ici).

En admettant qu’Albert Mahieu ait rapporté correctement les réactions du cardinal, celles-ci ne prouvent pas qu’il s’agissait de sa part d’un aveu implicite, comme il en a déduit. Cela pouvait vouloir dire : je ne peux pas y être, je n’ai donc aucune raison de craindre un chantage. Un mois plus tard, le député se rendait à Rome pour rencontrer des responsables du Vatican, dont Josef Ratzinger, pour leur raconter l’histoire.

Que sait le cardinal Danneels ? Nous l’avons vu dans la note précédente, dans sa lettre au prêtres de 1996, il parle de l’existence des réseaux de pédophilie criminelle, de leur lien avec l’affaire Dutroux. Il y parle aussi de ramifications mondiales, et du trio Argent, Pouvoir et Sexe. Il l’a même dit à la télévision belge en 2000 : comme un train peut en cacher un autre, cette affaire cache de vastes réseaux, qui eux-mêmes cachent le train de la protection des criminels aux plus hauts niveaux. Il est bien regrettable qu’il ait depuis développé une tendance à l’amnésie, pour reprendre l’expression employée par les policiers qui l’ont interrogé pendant dix heures en juillet 2010 au sujet des affaires d’abus dans l’Église.

Je pense à ces mots qu’il prononça lors d’une autre homélie de Noël : « Il y a, en effet, la foule innombrable des enfants qui n’ont rien, si ce n’est la faim et la soif, la maladie, la violence et les abus. (…) Pire encore, il y a les enfants soldats : leurs jouets sont remplacés par un fusil. Leur jeu est de tuer. (…) Enfin, plus près de nous, je ne puis m’empêcher en cette nuit de penser à ces enfants qui sont dans des centres fermés. Ils ne sont pas loin. Ils sont parmi nous. (…) Car ils sont plus proches de nous tous, ces petits mendiants d’amour – beaucoup plus proches – que nous ne le pensons. »

Si près de nous qu’ils pourraient être nous, aussi bien les mendiants d’amour que ceux dont le jeu est de tuer ? Le jour où il se trouva entre l’évêque de Bruges et le jeune homme que ce dernier avait abusé pendant des années, Danneels (enregistré à son insu), après avoir demandé à la victime de ne rien dire et avoir insinué qu’elle aussi pourrait demander pardon, dit à l’évêque : « oui, je le vois, toi aussi tu souffres… » Attention à ne pas tout confondre. Attention à ne pas croire qu’il nous faut resacrifier l’agneau. C’est avec de tels raisonnements qu’on met à mort et enterre les victimes, une première et une deuxième fois. Je ne peux m’empêcher d’y penser aujourd’hui où tant d’inconscients affichent leurs bons sentiments envers Michelle Martin. Pendant ce temps, la meurtrière continue à protéger par son mutisme les réseaux qu’elle servait, et qui continuent à supplicier des enfants, dans le silence assourdissant de la presse. Quelques citoyens, sur internet, sont courageux (j’ai cité plusieurs sites ces derniers jours sur ma page facebook). N’abandonnons pas les enfants.