L’amour avec Johnny Depp

thèse-min*

J’ai beaucoup œuvré et travaillé dans ma vie, je suis ces temps-ci bien fatiguée. Mais cette masse de travail accompli me remplit de vie, de joie, de bonheur, de plénitude. Cette nuit nous avons fait l’amour, Johnny Depp et moi. Lui dans toute sa grâce d’acteur assis sur un banc, au jardin, le tout étant à la fois homme, jardin et manuscrit ou partition. Je me suis assise sur lui et comme il était chaud partant, j’ai ouvert son pantalon de cuir, je l’ai mis torse nu et nous avons baisé comme ça. C’était l’un des meilleurs rêves érotiques que j’ai fait, les sensations si réelles à la fin m’ont réveillée.

Johnny Depp, que je remercie pour son aimable, solide et enthousiaste participation à ce rêve, y représentait à la fois mon compagnon, qui a le même âge et qui est tout aussi beau que lui, et mon œuvre, celle qui me donne mon nom d’usage, comme d’autres portent le nom de leur époux.

J’ai soixante-deux ans, je sens que je suis fatiguée mais ma puissance de vie est intacte, aussi grande que lorsque je suis arrivée en ce monde et peut-être plus car comme dit l’adage « si jeunesse savait, si vieillesse pouvait… » Or je sais plus que dans ma jeunesse, et je peux toujours, même si le travail fourni, si intense, m’oblige à prendre des plages de repos. J’ai lutté constamment contre l’aliénation sociale, j’ai fait quatre enfants, j’ai arraché de moi et bâti une œuvre puissante et audacieuse, qui résonnera dans le temps. Plus trivialement, j’ai travaillé aussi très tôt, dès l’âge de douze ou treize ans pendant toutes les vacances d’été pour payer mes études, et même à onze ans donnant des cours à un enfant, puis gagnant ma vie dans des jobs divers, de serveuse à chargée de communication, de journaliste à prof, etc., de façon toujours précaire, tout en élevant mes enfants et à deux reprises en reprenant mes études.

Dans ma chambre, dans la grange à la montagne, j’aimais beaucoup, dans mon grand isolement, contempler par la fenêtre la nature, les arbres, les rochers, les animaux ; et m’asseoir en tailleur sur le lit, avec des volumes de l’Encyclopedia Universalis autour de moi, à lire ou relire des articles. La maison était tantôt dans les nuages, tantôt dans la lumière éclatante, et c’était toujours aussi beau, aussi intense.

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