Aurore

tout à l'heure, photo Alina Reyes

 

Je vois New-York inondée et je me rappelle mon roman Lilith, où sous le nom de Lone elle est inondée aussi. Écrit seule dans la neige. C’était en 1999, et comme l’année précédente pour Poupée, anale nationale, et comme plus tard jusqu’à aujourd’hui où il m’est devenu impossible de publier et où j’ai dû me séparer de ma grange pour pouvoir survivre, il y eut une opération vengeresse sur ce livre. Je le saisis sur l’étagère, je le feuillette. Il est sanglant, sombre comme un Soutine peut-être. Il y a de beaux passages, et des passages durs, écœurants, que je n’ai pas envie de relire. Seulement cela dit la vérité sur le monde né de la folie des hommes, cela prévient, cela fait son travail, c’est ainsi.

Ce qui me passe à travers, ce qui vit en moi, est si puissant, si vivant, aucune force humaine ne pourra le contraindre. Je prie bras étendus dans le cosmos, je me prosterne le front contre son centre, je vous annonce ce que vous ne voyez pas.

Écoutez le vent. Il vient sur les joues, il emporte les larmes, il les déverse sur le monde, que le monde comprenne, s’agenouille et retourne à la vie.  La vie est là.

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