Habiter les ruines, et reconstruire

107_cabane

*

Cette idée commune à beaucoup de religieux de diverses traditions, selon laquelle les épreuves purifient l’être, ne tient pas dès qu’on la confronte au réel. Le mal fait du mal, il rend mauvais et violent, les délinquants et les criminels sont le plus souvent des gens qui ont subi trop d’épreuves, Primo Levi des décennies après les camps s’est suicidé. Et quand nous réussissons à surmonter une épreuve, pouvons-nous vraiment dire que nous en sommes purifiés ? N’avons-nous pas plutôt à espérer ne pas en avoir été trop abîmés ? Ne pas en avoir trop perdu notre fraîcheur ? Notre intégrité ? Ne nous trouvons-nous pas plus purs à mesure que nous reculons dans le temps ? Et si nous sommes arrivés à sortir des épreuves en gardant notre pureté, cette pureté n’est-elle pas désormais celle d’une ruine ?

Cette idée est une consolation que l’homme invente pour ne pas accuser Dieu des iniquités qu’il subit, mais elle est aussi le signe d’une relation incomplète avec Dieu. Dieu nous envoie des épreuves pour nous purifier, disent-ils, dans leur désir de trouver une excuse à Dieu (ce qui leur laisse tout de même un parfum de ressentiment enfoui envers Lui). Mais Dieu n’a pas besoin d’excuse. Car il ne nous envoie pas d’épreuves. Dieu ne nous envoie ni la maltraitance ni les camps de concentration ni les guerres ni les maladies ni les malheurs, Dieu simplement laisse sa création libre de suivre son cours comme il nous laisse libres. De rester dans le chemin de la vie (de la vérité, de la compassion), ou de prendre celui de la mort (du mensonge, de l’abus, de l’égocentrisme). Si nous n’avions pas cette liberté, nous ne serions pas des hommes, quand nous abdiquons cette liberté nous perdons notre humanité.

Dieu nous donne la vie. La vie est une expérience pleine d’expériences, dont beaucoup sont des épreuves. L’épreuve est consubstantielle à la vie. Naître et donner naissance sont déjà des épreuves. Elles ne sont pas destinées à nous purifier, ni à quoi que ce soit d’autre. Elles ne sont pas destinées, elles arrivent et passent, c’est tout. Elles n’ont pas d’être, seulement une existence. Seul l’être est destiné. Il n’a pas besoin d’épreuves pour accomplir son destin, mais seulement de conserver sa fraîcheur, sa grâce, son intégrité. Les épreuves ne sont que des obstacles et des accidents sur le chemin. On peut en rencontrer beaucoup, ou moins. On peut s’y casser les jambes et y rester. On peut aussi en réchapper. Mais les épreuves, au final, ne sont que des déchets. Les épreuves font partie des énormes déchets que produit la vie pour se maintenir comme création. Ce qui est écrit dans notre être depuis le commencement jusqu’à sa fin, c’est autre chose, cela vient d’ailleurs, c’est ailleurs, et immortel.

Récupération, réinvention…

1

4

Le rhinocéros de Dürer, la Nuit étoilée de Van Gogh… devenus Le rhinoballeur et Dans la nuit… J’ai ouvert une nouvelle galerie sur mon site de peintures pour ces toutes-premières oeuvres d’art récupéré. Il y en aura d’autres.

J’y ai aussi mis, dans cette autre galerie, de nombreuses photographies colorées à la main.

Tout cela toujours dans un esprit de cueillette, de récupération, de réinvention, comme avec les objets transformés ou les peintures sur planches de bois (chutes chez le marchand ou trouvées dans la rue), sur carton… À voir dans l’ensemble des galeries du site alinareyes.eu.

Et bientôt, ici même sur alinareyes.net, de nouveaux titres en ebooks. J’écris, aussi. Haut les coeurs !

À la Grande mosquée de Paris

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

15

16

la Grande Mosquée de Paris cet après-midi, photos Alina Reyes

*

Je suis allée à la nouvelle salle de prière des femmes, bon, ce n’est pas si mal. On entre par la grande porte, on prend le petit jardin, on descend à l’entresol, et là on dispose d’une grande salle assez belle mais sombre.  Le samedi après-midi, il y a plusieurs groupes de femmes, certaines avec leurs enfants, en train d’apprendre l’arabe coranique ou la récitation du Coran, selon les niveaux. J’ai parlé avec des sœurs, j’irai, incha’Allah. Pour cela c’est très bien, mais pour prier c’était tout de même mieux avant. Surtout quand on faisait la prière du vendredi dans le jardin. C’était si extraordinaire. Je le garde bien dans mon cœur. En espérant que cela sera de nouveau possible un jour.

Pour prier j’avais mis sur ma tête la belle écharpe en lin que m’a offerte Avi, juif marocain de mon quartier – il dit que le motif entrelacé représente les trois religions monothéistes.

Ensuite je me suis promenée dans la mosquée puis je me suis assise sur une marche dehors, dans l’odeur exquise des glycines, et j’ai songé, notamment à mon manuscrit, que j’avais emporté avec moi. Toute une après-midi au paradis.

Jusqu’à ce que la vérité crée suffisamment d’hommes capables d’œuvrer pour elle

Mentionner toujours l’antisémitisme à part des autres formes de stigmatisation, comme le font M.Valls et bien d’autres, c’est faire des juifs des hommes pas comme les autres, c’est faire de l’antisémitisme. Quelle différence y a-t-il entre l’agression d’un juif parce qu’il est juif, d’un chrétien parce qu’il est chrétien, d’un musulman parce qu’il est musulman ? Entre un pogrom et un autre ? Une injure et une autre ? Ce sont des expressions d’une contestation du droit de vivre d’individus en fonction de leur religion et de la culture qui s’ensuit, quelle qu’elle soit. Comme il existe et a existé des contestations du droit de vivre des homosexuels, des communistes, des Tziganes, etc. Les juifs ne sont pas soumis à une autre condition que la condition humaine de tous ; prétendre le contraire, voilà de l’antisémitisme. Un racisme comme d’autres, même quand il est ainsi déguisé, et bien logique dans la bouche d’hommes comme M. Valls et d’autres, habitués à montrer qu’ils ne supportent pas telle ou telle catégorie de la population.

Quand on dénonce le FN il faut être cohérent et d’une part ne pas exciter le ressentiment des gens en leur parlant sans cesse de questions subsidiaires (le voile – pour ou contre, le mariage pour tous – pour ou contre, la petite délinquance des pauvres – mais pas la grande délinquance des puissants… etc) comme si c’était le principal problème de leur vie, puis une fois qu’on les a excités, avoir peur de les voir voter FN et pour cela s’abstenir de critiquer Valls et consorts, s’abstenir de dire la vérité, en bons serviteurs de l’hypocrisie sociale et politique. Il ne suffit pas de dénoncer le FN et MLP, encore faut-il ne pas être complaisant avec les autres porteurs de mauvaise parole. Une stratégie qui ne fait que favoriser toujours plus le FN ou ses idées racistes et haineuses, qui ne font que se répandre sournoisement parmi le peuple, comme elles leur ont été servies, sournoisement.

Se taire est le pire qu’on puisse faire. Il faut que la vérité soit dite et circule, jusqu’à ce qu’elle finisse par créer des hommes capables de travailler pour elle, aussi bien des responsables politiques que de simples citoyens, qui doivent être prêts à vouloir vraiment lutter contre ce qui est injuste, même si cela a un prix.