Mahmoud Darwich, « Telle est ma langue »

*

 

Je suis l’adversaire des liens
Et contre l’éternel recommencement.
Telle est ma langue.
Je suis l’adversaire des commencements.
Prolonger un fleuve de musique qui consigne mon histoire et me dépouille des détails de l’identité,
Telle est ma langue.
Je suis l’adversaire des épilogues.
Que toute chose soit son propre commencement et sa fin et que je parte,
Telle est ma langue…
Et je témoigne qu’il est mort, le papillon, le marchand de sang, l’amoureux des portes.
J’ai une cellule de prison qui s’étend d’une année… à une langue,
D’une nuit… à des chevaux,
D’une blessure… aux blés.
Et j’ai une cellule, érotique comme la mer.

(…)

Et le rêve prend forme
Et prend peur.
Mais la cité est debout
Dans la flamme du feu en liberté,
             Dans les veines des hommes.
             Dissous-toi, ou répands-toi, cendres ou beauté !
             Que dit le vent ?

   Nous sommes le vent.
      Nous sommes le vent.
         Nous sommes le vent…

*

extrait d’un recueil-anthologie de poèmes de Mahmoud Darwich intitulé La terre nous est étroite (Poésie/Gallimard)

alinareyes