*
Le tapuscrit de travail pour mon DEA que j’ai retrouvé hier s’accompagnait d’une dizaine de pages manuscrites, notes de lecture et réflexions pour la recherche. C’était il y a trente ans, et mon écriture est toujours la même, on dirait que ces notes ont été prises hier. Il y a là un beau départ de feu. Une note sur le labyrinthe par exemple retient mon attention. Il semble qu’elle soit tirée d’une notice du Dictionnaire des mythes littéraires (livre resté avec presque toute ma bibliothèque dans la montagne). La voici :
Antiquité = l’un et le multiple
Moyen Âge = l’horizontalité et la verticalité
Renaissance = l’extérieur et l’intérieur
Époque classique = la réalité et l’apparence
Époque moderne = le fini et l’infini
—
traversé et annulé par le fil
–
danse rituelle
*
Je remarque combien fidèle est l’esprit au développement de sa pensée. Je résumais ainsi mon projet de thèse dans mon tapuscrit :
« Un fil poétique et philosophique vers une définition de l’identité, qui prend successivement une valeur morale, mythique, et métaphysique. »
Et je constate que c’est ce qu’a réalisé ma thèse, reprise près de trente ans plus tard avec un autre intitulé. J’ai aujourd’hui élargi le corpus à de nombreux auteurs, mais le seul fait que Schwob et Borges fussent deux des trois auteurs envisagés à l’époque eût nécessairement fait entrer la bibliothèque universelle dans ma thèse, dont le plan eût évidemment évolué aussi, tout en conservant cette structure annoncée en deux grandes parties, cette structure en miroir qui est aussi celle de ma thèse d’aujourd’hui et qui est une façon de donner pouvoir, dans le labyrinthe et au-delà, d’entrer, d’aller et venir, de sortir librement, grâce à la métaphysique de la création, grâce aussi à ce fil qui existe dans ma thèse actuelle entre ses nombreux éléments, ses nombreux détours, ses hypothèses et ses fictions, non pas grosse ficelle artificielle comme on en fait dans la littérature industrielle mais fil d’or ténu, requérant l’attention de celle et de celui qui fait le travail de lire, qui accomplit ainsi le travail de l’aventure en soi, comme disait Sarane Alexandrian. Et il ne s’agit pas d’une introspection, d’une affaire psychologique même si la psychologie en est, mais bien d’une aventure métaphysique, poétique, philosophique, l’aventure la plus haute qui soit, l’aventure qui détruit l’effroi mortel devant l’être qui mène l’homme à sa perte. Je suis follement amoureuse de la littérature, qui donne la vie éternelle.
Ayant rêvé hier que j’étais un oiseau blanc, c’est cette fois cet ancien dessin que, dans la continuité des jours précédents (et tout en écoutant Roger Caillois sur l’INA, où il vaut d’être abonné) j’ai repris, en superposant à la gouache originelle des couches de feutre, de crayons de couleur, d’acrylique, de stylo, qui lui donnent un caractère de costume d’Arlequin, aux multiples et divers tissus cousus. Et cette nuit j’ai rêvé que, sous ma forme humaine, je me déplaçais dans les airs, très naturellement.
*