Certains croient au progrès, d’autres croient qu’il n’y a pas de progrès. Moi je ne crois rien, je me contente de progresser (à la course, par exemple). Comme toutes celles et tous ceux qui aiment progresser et font en sorte de progresser, pendant que d’autres espèrent ou fustigent le progrès.
Le progrès ne peut être un bloc monolithique, ni pour l’humanité, ni pour l’individu. Il y a des progrès et il y a des régrès. Ainsi sont les flux de la vie.
Je ne crois à rien, je pratique, à ma façon, ou je ne pratique pas, c’est tout. Ce à quoi il faut croire pour que ça existe n’est qu’un fantasme. Ce qui est se pratique. Que ce soit le sport, l’art, la lecture, l’amour, Dieu, etc.,… si ce n’est pratiqué mais seulement fantasmé, c’est vain, inconsistant, faussé, nul. Comme les ombres dans la caverne de Platon. La vraie vie est dehors, le réel est vivant et se vit concrètement.
C’est la leçon que donne à Ulysse sa mère morte, quand il la rencontre aux Enfers. Il veut l’embrasser, mais il n’étreint rien. C’est que, lui dit-elle, quand les mortels sont morts, ils n’ont plus de muscles pour tenir les chairs et les os. Comme sa mère, Tirésias lui aussi ramène Ulysse au réel et lui recommande de bien retenir ce qu’il lui dit : que seuls lui parleront, et lui diront la vérité, les morts qu’il voudra faire parler. Inutile de se soucier des autres. Ils sont morts et retourneront là où ils sont déjà, à la mort.
Ayons soin de nos muscles, et de tout notre corps. Le mépriser, c’est se mettre avec les morts. Ayons soin de nos paroles, et de tout notre être. Fausser nos paroles, c’est détruire notre être.
C’est l’un de mes soins d’éviter aux gens que j’aime, et même aux autres, de détruire leur être, ou de continuer à le détruire.