Rendre la justice (Jugement dernier et parabole des talents)

St_Michel_balanceune fresque du Mont Saint Michel

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Le mot talents, avant de désigner des poids en pièces de monnaie, désigne les plateaux de la balance. Nul doute que Matthieu, ancien percepteur et juif rompu par sa tradition et sa langue, l’hébreu, à la pensée du sens profond des mots, était conscient du poids des mots grecs qu’il employait pour rédiger son évangile – et notamment ici la parabole des talents. La balance est l’instrument et le signe de la justice. Que nous soient confiées une ou plusieurs balances (reçues avec le don de l’être et de la conscience), notre devoir est d’en faire bonne mesure, de nous en servir pour rendre la justice. Qui a reçu ne serait-ce qu’une balance et l’enterre, au lieu de s’en servir pour faire fructifier le juste dans le monde, celui-ci se rejette de lui-même hors du royaume de Dieu, qui est Justice. Là où est enterrée la justice, là sont « les pleurs et les grincements de dents ». Là où elle est rendue, comme le dû qu’elle est, jour après jour, petite chose après petite chose, grande chose après grande chose, là est la joie.

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La conscience de Parménide

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« Le soi c’est de percevoir, de même que d’être ».

Voici ma traduction du fragment (III) de Parménide « To gar auto noein estin te kai einai », plus simplement : « Penser et être, c’est la même chose ».

Je traduis « to auto » par le soi, plutôt que par le même, et je reporte son sens de même dans le « te kai ». Noein signifie penser, mais plus précisément se mettre dans l’esprit, percevoir (avec une continuité sémantique temporelle : percevoir, comprendre, projeter, faisant signe d’un processus – Parménide n’est pas le penseur de la fixité que l’on dit, même s’il voulait l’être la langue grecque le lui éviterait).

Sa phrase dit donc que percevoir-comprendre-projeter et être sont une même chose, et que cette même chose est le soi. Elle dit aussi que le soi est être, et que cet être est conscience.

Si être et pensée sont même, cela signifie que tout être pense, et que toute pensée est. Il n’y a pas des êtres qui pensent et des êtres qui ne pensent pas. Tous les êtres pensent, n’en déplaise aux élitaires qui pensent faux lorsqu’ils croient que d’autres ne pensent pas (c’est qu’il faudrait éviter de croire, pour rester dans le penser juste). Tout être est conscient, d’une façon ou d’une autre. Cela signifie que l’Être créateur crée en conscience, et que la création est le fruit de la conscience, sa manifestation.

À son tour l’être créé, lui aussi conscient, se met dans l’esprit la manifestation de la conscience, fait le travail de la percevoir, de la comprendre, et d’ainsi participer à sa projection.

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Parménide à la crèche

OreillerII*

Avant minuit, il n’y a rien dans la mangeoire. À minuit, il y a un nouveau-né – nommé Jésus, c’est-à-dire « Dieu sauve ».

Geertgen Tot

Geertgen tot Sint Jans, Nativité

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Je pense à la parole de Parménide : « esti gar einai, mèden d’ouk estin » – mot à mot : « est en effet être, rien, au contraire, n’est pas ». Traduisons : « il y a être, mais le néant, cela n’est pas ». Ou plus familièrement : « être, je connais, mais rien, non, ça n’existe pas ». Ou encore : « ce qui est, c’est ce qui est – quant à ce qui n’est pas, ce n’est pas ».

À minuit nous sommes sauvés de l’illusion qu’il n’y avait rien dans la mangeoire. Rien n’est pas : la preuve, voici l’être qui se montre ; et à partir de là, rien d’autre ne compte que cette vérité manifestée : l’être est. Non seulement il est, mais il est là. Là, c’est-à-dire partout. Il n’est pas de lieu où le néant soit. Il n’est pas d’autre lieu qu’un lieu où est « Dieu », l’ÊTRE. Et ce lieu couvre le temps, comme le corps du nouveau-né couvre le creux de la mangeoire, courbure de l’espace-temps par ce corps courbé. En tout lieu, tout temps, nous sommes dans l’être, et nous sommes nous-mêmes lieu et temps de l’être, berceau de l’être : il nous est impossible de ne pas être.

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Installation

1Devant une plante vivante, une crèche avec un dromadaire et un zèbre comme animaux témoins, un berger tout petit aussi et cinq poupées russes (toutes ces figurines étant des fèves des années précédentes), et une étoile porteuse de lumière avec cinq planètes autour.

Le mot installation vient, comme stalle ou étable, du mot d’origine francique étal, qui signifie position et demeure.

Joyeux Noël à tous !

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Neige !

d

au jardin du Luxembourg à Paris, photo Alina Reyes

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Même si la neige se fait attendre, que sa douceur soit en nos coeurs !

Vous pouvez envoyer des cartes postales numériques (gratuites) avec mes images de neige ou autres

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Vous pouvez aussi en faire imprimer, à votre gré. Bonne journée !