Retour d’Edimbourg

Retour en France, un pays que je n’ai jamais vraiment aimé, un pays qui est resté un pays de collabos depuis quatre-vingts ans, un pays aujourd’hui ravagé par le mensonge comme son maître les États-Unis, un pays lâche, veule, manipulateur, factice, vieux, incivique, antidémocratique, indigne, à l’image du président qu’il s’est laissé imposer, un pays aujourd’hui trop souvent à vomir. Heureusement, mon cœur habite ailleurs, très ailleurs.

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edimbourgLa pleine lune hier soir à Édimbourg

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edimbourghDans l’aéroport d’Édimbourg ce matin

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franceDe l’avion en descente vers Paris Charles de Gaulle, ce matin

photos Alina Reyes

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Cahier

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dessins et collages réalisés dans le cahier où s’écrit l’un de mes prochains livres en écoutant des conférences :

en cours d’écoute Gaëtan Picon (1915-1976) : Esthétique et Culture

et hier soir et cette nuit

sur le storytelling Christian Salmon « politique de la littérature »

François Hartog – « Temps de l’histoire, temps de la littérature »

« Arts, littérature et sciences sociales » – Théories et approches formelles en littérature

Tiphaine Samoyault, « Autour de Pascal Quignard », qui répète une pensée toute faite et fausse, selon laquelle la chute de cheval, comme celle de Paul, serait à l’origine d’une conversion ou d’une renaissance, et à qui j’ai laissé ce commentaire :

Ce qui est très intéressant aussi, c’est que la réalité de la chute de Paul est contraire à l’interprétation qui en est faite par certain story-telling trompeur. Pas question de cheval dans le récit que Paul fait de sa chute, et sa conversion ou sa renaissance n’est pas la conséquence de sa chute. C’est sa conversion-illumination qui est la cause de sa chute. Une bonne chute, et non une chute au sens de péché. Interpellé par la Vérité, il tombe. Il tombe parce qu’il a vu et entendu (alors que d’autres à côté de lui ne voient ni n’entendent rien). La vision de la vérité est première, précède le et la « tombe » dont il se relève. Je dirais : il tombe la chemise. Ce que peu savent faire, en fait.

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Saleté de storytelling, qui infecte la politique, la littérature, la pensée, l’histoire, la science, avec ses productions faussaires comme le roman de Haenel sur Karski ou hier soir sur Arte la diffusion d’un docu-fiction raciste visant à faire croire que l’homme de Néandertal, qui vivait en Europe quand l’homme moderne est arrivé d’Afrique, était en fait supérieur à ce dernier. Notamment en faussant les résultats de la science pour lui attribuer Lascaux et le présenter comme l’enfant de l’homme moderne africain, donc un progrès par rapport à lui. Une entreprise sournoise, aussi basse que le « newspeak » d’Orwell, que je traduis par « newdire » car il ne s’agit pas seulement de changer le vocabulaire (novlangue) mais de faire mentir un discours, en l’occurrence scientifique. Mensonge et racisme sournois, comme avec Goebbels le mal fait dans les esprits, en ces temps où le néofascisme reprend du poil de la bête, a beau se dédouaner en se justifiant faussement par la fiction, il est fait et refait.

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Disparition des humains ?

écoute,-minÉcoute, sculpture d’Henri de Miller que j’ai photographiée un jour où elle était taguée, puis colorée à la main

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Les singes disparaissent comme les primates humains autres que ceux de notre espèce ont disparu, mais ils s’accroissent dans les esprits des humains avides de ce monde qui ressemble de plus en plus à la planète des singes prophétisée par un auteur. Il n’y a aucun honneur à être riche, ou puissant, ou célèbre, ou ministre, ou président… Toutes situations enviées par tant d’entre nous et qui leur feraient faire n’importe quoi pour en jouir ne serait-ce qu’indirectement, toutes situations qui viennent de l’exercice du singe en nous. Le primate lutte et ruse pour la possession des femelles (et d’autres « choses ») et la domination sur les autres mâles, et s’il y met de plus en plus de ruse, de mensonge, de secret, de manœuvre et de complexité à mesure qu’il avance, n’oublions pas que cette stratégie n’est que celle du primate fruste et borné, du « vieil homme », alors que la femme et l’homme qui sont guidés par l’amour de la vérité, de la franchise, de la lumière, des valeurs pacifiques, désintéressées, altruistes, sont les êtres réellement supérieurs, même s’ils sont pauvres et inconnus (et ils ont toutes les chances de l’être, ne se soumettant pas aux singeries nécessaires pour être riche et en vue). Oui, le « vieil homme » est menacé de disparition, et personne ne songe à pleurer sa disparition, visible dans ses sursauts grotesques, en voyant se préparer la relève des jeunes humain-e-s.

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Opération de police à Paris

Je suis allée travailler dans une bibliothèque universitaire. Quelques heures après, en sortant, à quelques dizaines de mètres de là je suis tombée sur une vaste opération de police, une rue bloquée, des camions pleins de policiers partout dans les rues adjacentes. Ils ont refusé de me dire ce qui se passait, ils ont dit seulement : « ce n’est pas un attentat ». J’ai fait le tour comme ils me le demandaient, mais avant j’ai pris une photo, très vite pour qu’ils ne m’obligent pas à la supprimer comme ça m’est arrivé plusieurs fois. La presse n’en parlant pas à cette heure, je ne dis pas où cela se passait, pour ne pas risquer de nuire à leur travail.

tag sorbonne nouvelle-min dbu sorbonne nouvelle-min operation de police-minaujourd’hui à Paris, photos Alina Reyes

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De la démocratie (discours de Périclès)

discurso_funebre_periclesPhilipp Foltz, Oraison funèbre de Périclès

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Rappel salutaire et nécessaire, dans un monde où les abus de pouvoir sont quotidiens, impunis, et trouvent toujours des complices prêts à violer les droits élémentaires de l’humanité, de l’honneur et de la démocratie.

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« Notre constitution politique n’a rien à envier aux lois qui régissent nos voisins ; loin d’imiter les autres, nous donnons l’exemple à suivre. Du fait que l’État, chez nous, est administré dans l’intérêt de la masse et non d’une minorité, notre régime a pris le nom de démocratie. En ce qui concerne les différends particuliers, l’égalité est assurée à tous par les lois ; mais en ce qui concerne la participation à la vie publique, chacun obtient la considération en raison de son mérite, et la classe à laquelle il appartient importe moins que sa valeur personnelle ; enfin nul n’est gêné par la pauvreté et par l’obscurité de sa condition sociale, s’il peut rendre des services à la cité. La liberté est notre règle dans le gouvernement de la république et dans nos relations quotidiennes la suspicion n’a aucune place ; nous ne nous irritons pas contre le voisin, s’il agit à sa tête ; enfin nous n’usons pas de ces humiliations qui, pour n’entraîner aucune perte matérielle, n’en sont pas moins douloureuses par le spectacle qu’elles donnent. La contrainte n’intervient pas dans nos relations particulières ; une crainte salutaire nous retient de transgresser les lois de la république ; nous obéissons toujours aux magistrats et aux lois et, parmi celles-ci, surtout à celles qui assurent la défense des opprimés et qui, tout en n’étant pas codifiées, impriment à celui qui les viole un mépris universel. »

Thucydide, La Guerre du Péloponnèse, oraison funèbre des premiers morts de la guerre prononcée par Périclès à Athènes (extrait). Le texte entier, en grec et en français : ici

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