Gynophobie, judéophobie, islamophobie… Cette peur qui fait perdre la raison (suite)

Quand Angelina Jolie a courageusement annoncé sa mastectomie – conforme aux recommandations médicales pour les femmes porteuses d’un gène responsable de cancers du sein-, Christine Boutin a réagi en écrivant qu’elle faisait cela « pour ressembler aux hommes ». Ce commentaire ignoble, complètement irréfléchi, irraisonné, panique, était avant tout un cri de terreur, la manifestation d’une épouvante secrète face à la sexualité et à la féminité. L’angoisse criminelle de quelqu’un qui d’une part place toute la féminité dans les seins, c’est-à-dire uniquement dans la fonction maternelle, et d’autre part estime qu’il vaut mieux qu’une femme risque la mort plutôt que de « ressembler aux hommes ». Cette peur de la féminité est la même qui s’exprime dans le mouvement des Femen, seins dehors et sexe soigneusement bouclé, figures de sirènes, de femmes interdites donc rassurantes, d’autant plus rassurantes qu’elles sont en même temps souillées, évocatrices de prostitution, donc de femmes que les hommes dominent en les achetant. D’ailleurs elles finissent toujours maîtrisées par les hommes, évacuées et brutalisées, demi-nues, par eux. Tel est le but de leur activisme : donner cette satisfaction morbide aux dominants. Ce faisant, elles ne défendent évidemment pas plus les droits des femmes que ne le feraient des activistes noirs antiracistes en se déguisant en singes pour intervenir dans des réunions de blancs. Bien au contraire, elles renforcent le mensonge patriarcal et la séparation forcenée des uns et des autres.

Le machisme est la conséquence de la gynophobie comme l’antisémitisme est la conséquence de la judéophobie et/ou de l’islamophobie. Des peurs sexuelles sont à l’œuvre dans le racisme comme dans le sexisme. L’autre est perçu comme un danger, celui qui veut attenter à notre intégrité corporelle et à notre identité, « nous ressembler » pour « prendre notre place », et qu’il faut donc constamment travailler à inférioriser et à dominer. Sexisme et racisme font beaucoup de mal, mais ce sont eux qui sont du côté de la peur, du mensonge qui s’ensuit et de la mort qui conclut le tout. Hitler est mort. Il a encore ses épigones, mais ils n’ont pas davantage d’avenir. Seuls les vivants en vérité sont promis à la vie.

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Du juste combat

La Femen russe qui, quoique ne parlant pas français, vient de recevoir son passeport français et sert de modèle à la dernière Marianne sur nos timbres, a déclaré sur Itélé qu’elle accepterait des fonds de n’importe qui, même du diable. C’est bien ce qu’elle fait, comme tous ceux qui prostituent leur âme, c’est pourquoi elle le dit. Le diable, voilà ce qui habite ceux qui soutiennent ces femmes qu’ils réduisent à l’état de femelles souillées et souilleuses en prétendant œuvrer à la libération des femmes : le menteur est un autre nom du diable.

Les Femen, qui agressent chrétiens et musulmans en souillant églises et mosquées – mais jamais les synagogues – sont protégées et promues par les pouvoirs publics français et les médias, tout comme Charlie Hebdo dont les cibles sont les mêmes. J’ai déjà parlé assez longuement de l’enfer où est tombé ce magazine, cent fois plus ordurier que les spectacles de Dieudonné. Le pire est sans doute son traitement des Roms. Mais qui se soucie des Roms ? Certes pas Manuel Valls, qui ne les voit pas comme appartenant à la commune humanité.

Ce qu’on appelle racisme ou antisémitisme dans ce pays n’est bien souvent que la manifestation d’une solidarité ou d’une adversité de classe. Les dominants n’aiment pas leurs victimes, qui leur renvoient à la figure leur iniquité. Pour supporter leur iniquité, il leur faut considérer leurs victimes comme des sous-hommes – phénomène similaire à celui du sexisme. Les victimes n’aiment pas les abuseurs, et elles aussi pour supporter leur condition cèdent souvent à la facilité de les essentialiser, de les rejeter pour ce qu’ils sont alors que ce qu’il faut, c’est combattre ce qu’ils font. Le combattre et le refuser, en refusant premièrement de collaborer à leur mauvais système. Car tout ce qui est mauvais finit au néant, rien n’est plus sûr.

Les hommes ne doivent pas combattre entre eux, les uns contre les autres, mais combattre contre le mal, d’abord en le rejetant de leur vie. Et pour cela, apprendre tous les jours à le voir, à l’identifier clairement, sans se tromper. Ainsi le combat sera-t-il véritablement efficace. Le combat ayant ses racines dans la vérité est le seul combat promis à la victoire. D’autres combats peuvent emporter des victoires éphémères, comme celles que nous voyons tous les jours s’étaler dans les journaux, mais ce sont de fausses victoires. D’une part parce qu’elles seront balayées par l’Histoire, d’autre part parce qu’elles n’apportent nulle paix aux hommes qui les remportent. Alors que le juste, même apparemment vaincu par le monde, est bienheureux.