« perspectives »

Hier soir, rue du Cardinal-Lemoine, Paris 5e. Photo Alina Reyes

 

« … Il y a aussi des comiques citoyens (pas drôles du tout), un tourisme citoyen (avec charte éthique du voyageur et Guide du Routard humanitaire pour une autre approche du tourisme), des immeubles citoyens (ceux où on organise des repas de quartier), un Jésus citoyen (celui d’Hossein qui, sur les affiches, proclame : « Je serai toujours avec vous ! », falsification citoyenniste de la phrase du Christ rapportée dans les Évangiles : « Je serai avec vous jusqu’à la fin du monde », déclaration sans doute jugée trop brutale désormais parce qu’impliquant des perspectives pour le moins apocalyptiques), des ateliers d’artistes citoyens (…) Tout ce qui avait si timidement commencé, au XIXème siècle, avec Louis-Philippe, le Roi-Citoyen, cet oxymore incarné, finit avec le citoyen-citoyen, cette tautologie de masse, et se transforme aujourd’hui en déferlement : mais en déferlement de langue morte, ou néo-rituelle. »

Philippe Muray, « L’avenir tel qu’il parle », in Moderne contre moderne. Exorcismes spirituels IV, juin 2000

« Lorsque je sortirai, je pourrai reprendre mon petit chemin ici et bientôt la belle saison va venir et je recommencerai les vergers en fleur. »

Vincent Van Gogh, Lettres à son frère Théo

 

Voyage

ce vendredi au jardin. Photo Alina Reyes

 

La consommation ne promet rien ; la consommation consomme peu à peu l’être de ceux qui consomment.
La thésaurisation ne promet rien ; la thésaurisation enterre peu à peu la vie de ceux qui thésaurisent.
La drogue ne promet rien ; la drogue drogue.

L’arbre promet la fleur, la fleur promet le fruit, le fruit nourrit l’homme et l’oiseau en l’homme, et puis la graine tombe en terre et se met à promettre le ciel.

 

Parabole de ceux qui mettent l’instrument avant la Vérité, le Chemin et la Vie

Rudolf Koller

 

Désireux de féconder le monde, ils attelèrent aux boeufs la charrue la plus performante du marché. À la voir rutiler sur le champ, ils en étaient tout excités !

Le temps passa, passa. Les mauvaises herbes continuaient à croître, à la fin il y en avait tant qu’elles mangeaient les roues de la charrue, et même les corbeaux se désespéraient de voir un jour blondir en ce champ du blé.

Un enfant vint, il s’écria : « Vous avez mis la charrue avant les boeufs ! » Les jougs pourris pendaient derrière la machine, tandis que les animaux, loin à l’horizon, allaient aux pâturages.

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tableau de Rudolf Koller trouvé ici