Se faire justice

Aux prochaines présidentielles, je voterai dès le premier tour pour le candidat qui ne sera ni l’extrême-droite, ni Macron. Qu’il soit de droite ou de gauche, pourvu qu’il soit le mieux placé pour éviter un deuxième tour « en même temps » Macron et l’extrême-droite. Je pense sérieusement Macron presque aussi dangereux que Le Pen ou Zemmour. Et j’espère que suffisamment de mes concitoyens se mobiliseront pour déjouer le piège qui nous est tendu, à énormes ficelles, d’avoir à choisir entre le nihilisme néofasciste et le nihilisme macroniste. C’est ce que je pensais déjà en 2017, et contre quoi j’avertissais déjà – depuis ma minuscule audience, mais ça ne fait rien, il faut le faire.

Je sais ce que ressentent les rescapés des attentats du 13 novembre. C’est comme d’être un goéland qui se retrouve les ailes engluées de pétrole. Parfois il lui semble qu’il va quand même réussir à s’envoler de nouveau, et parfois qu’il n’y arrivera plus. Il y avait un personnage nommé Terreur dans mon roman Forêt profonde, c’était un personnage de fiction, mais qui existait aussi dans la réalité et qui, depuis, a fait tache d’huile. Il y a toutes sortes de bandes d’ordures terroristes, des islamistes, les plus voyants, mais aussi bien d’autres, non similaires, mais comparables, qu’ils s’en prennent aux corps et aux vies, d’une manière ou d’une autre, ou aux esprits et aux existences. Il s’agit, pour les innocents sur lesquels ils tombent, de garder ce qu’eux ont perdu : lumière, courage, vérité, droiture, honneur, et même de les avoir plus qu’avant encore. Voilà comment se faire justice soi-même.

Je sais que beaucoup de gens trouvent que les éoliennes défigurent les paysages, mais moi je les trouve belles et surtout très émouvantes. Si puissantes, si debout, si sereines. Elles me donnent envie d’écrire, comme, il me semble, les pales des moulins donnèrent envie d’écrire à Cervantès. J’en ai contemplé beaucoup aujourd’hui en visitant avec grand bonheur la Bourgogne – la France est si belle en tous ses paysages, et dans sa paix quand elle est là – je ferai une prochaine note avec des images des vallonnements colorés, des ciels vastes, des vignes, des caves où mûrit le bon vin.

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Échos de la basse-cour

Le combat contre Macron vire au combat de coqs. Un jeune mâle, coqueluche des friqués, pas encore sorti de sous l’aile de sa mère, s’étant fait porter au sommet du tas de fumier, suscite plus d’adversité dans la basse-cour qu’un mâle usé à la même vieille place. Surtout quand le pioupiou en question chante sur tous les toits, cocorico, qu’il est le nouveau roi d’Europe. De quoi hérisser les plumes des autres coquelets de sa caste (Ruffin, Branco) et de la prochaine reine du poulailler étoilé (AKK). Tout comme celles des pigeons et autres volatiles du peuple qui n’ont pas l’intention de laisser l’ergoteur leur marcher sur les arpions.

Branco rue dans les brancards, Ruffin plus malin que Mélenchon au lieu de se dupliquer en hologrammes façon science-fiction flippante se répand en cinéma bon enfant sur le peuple électeur. Le travailleur, la travailleuse qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts se mettent debout comme un seul gilet jaune, sévèrement tabassé par les poulets de la macronie. On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs, caquètent les gallinacées contents de leur sort dans le meilleur des mondes. En embuscade, la poularde Le Pen lorgne sur le tas de fumier. Pourquoi n’y poserait-elle pas sa crotte, elle aussi ?

Cette fantaisie poulaillère et son illustration font suite à mon article précédent sur l’architecture-poulailler et la fausse pensée, qui envisagent les humains comme élevages à parquer et rentabiliser.

poulailler*

À l’Ascension, Marine Le Pen tombe (dans sa piscine vide)

image Alina Reyes

 

Angelina Jolie, mère de six enfants, pour ne pas avoir à les quitter prématurément fait le sacrifice de ses seins : Christine Boutin aussitôt pense qu’elle veut ressembler à un homme. Les obsédés du gender (partisans ou adversaires) n’ont qu’un Dieu : leur propre névrose, pour ne pas dire pire.

Comme tous les tricheurs, Jérôme Cahuzac joua les contrits, voire les au-bord-du-pire, comme qui dirait d’un qui ferait l’expérience de la limite entre la vie et la mort. Pas au point, cependant, de renoncer à escroquer le contribuable en continuant à toucher son gras salaire à ne rien faire.

« L’Église ne s’en sort pas, les hommes (et les femmes) passent, on est toujours dans les mêmes dérives, cela signifie qu’on se trouve dans un système », écrit un lecteur à la suite d’un article du Monde évoquant l’affaire d’abus du fondateur des « Frères de Saint-Jean ». Ce système, c’est l’opacité dans laquelle sont tenues les relations, le refus de la lumière qui préside au fonctionnement d’une institution où l’on croit légitime de dominer les fidèles. Il ne suffit pas de reconnaître les abus passés, ce qu’il faut maintenant c’est changer radicalement d’attitude, car les abus et autres tricheries ne sont pas toujours aussi spectaculaires que les abus physiques. Moraux, ils sont au moins aussi graves, et c’est pourquoi le peuple éduqué fuit l’Église. Il ne suffit pas de prononcer de belles paroles ou de prendre de beaux noms, il faut devenir clair, vraiment. Et puis après tout je suis lasse de le répéter, je m’en désintéresse presque à vrai dire maintenant. Je suis dans l’état d’esprit de secouer la poussière de mes sandales, et de continuer à porter le Christ où il peut être entendu. Peut-être l’Église doit-elle sortir de l’Église pour pouvoir ressusciter. Voyage arrive pour cela. Qui croit au Jour, qu’il le suive.

 

Religion et liturgie de la presse, avec Marine Le Pen en prêtresse

la Compagnie Républicaine de Sécurité, hier devant la Grande Mosquée de Paris, photo Alina Reyes
la Compagnie Républicaine de Sécurité, hier devant la Grande Mosquée de Paris, photo Alina Reyes

 

Voyez comme la presse est bien organisée. Et après on reprochera aux religions de vouloir dicter une pensée toute faite aux fidèles. Mais l’opinion, qui la manipule ?

Reprenons. Mercredi Charlie Hebdo sort ses fameuses « caricatures », des sortes de crachats envoyés à toute une partie d’entre nous, Français, et visant tous les musulmans d’un monde pris dans les douleurs et les violences de sa transformation. Aussitôt bien sûr les islamistes s’énervent, les islamophobes déversent leur hargne et leur haine dans le vaste défouloir d’Internet. Et l’immense majorité des musulmans, les pacifiques, s’appellent les uns les autres au calme et restent calmes.

Jeudi après-midi Le Monde paraît avec en Une une grande photo et un gros titre sur Salman Rushdie qui accuse l’islam. En ligne (et peut-être sur le papier) se trouve aussi un texte d’un philosophe musulman expliquant que les musulmans doivent sortir de la religion, comme l’ont fait les catholiques (l’idée étant de toujours dire à l’autre de se mettre au pas en étant non à sa façon mais à la nôtre). Pendant ce temps le reste de la presse continue à gloser sur « caricature et religion », pour bien enfoncer le clou : dormez en paix braves gens il ne s’agit en rien de notre racisme, seulement de notre droit à nous moquer des religions, comme notre vieille France anticléricale en a la tradition.

Vendredi en Une du site internet, c’est tapis rouge à Marine Le Pen. Portrait soigné, long entretien, au cours duquel elle fait des déclarations martiales sur la nécessité d’éradiquer tout signe visible de l’islam dans les rues de France. Rapidement toute la presse reprend ses propos, et l’article est le plus partagé du journal en ligne. Il fait la Une du journal papier du week-end, sous le titre « L’offensive laïque de Marine Le Pen ». Comme ça sonne tout de suite doux aux oreilles du Français, bien mieux que par exemple « l’offensive raciste » ! Bien sûr le reste de la presse joue son rôle en s’indignant de ses idées radicales, on les trouve « inopportunes » (mais on lui a donné opportunément l’occasion de les exprimer)… mais enfin, c’est ainsi que ça marche, et que ça marche si bien que le Front National est devenu sans problème digne des honneurs du Monde : ses idées opportunément jetées au peuple courent, et secrètement le peuple s’y fait.

Résumons : mercredi Charlie amène la merde, jeudi Le Monde l’assaisonne et la rend présentable, vendredi il la sert sur un plateau… et la France en bouffe pour un bon moment.

Jusqu’au prochain service. Oui, ne sont-ils pas tous bien organisés, dans leur propagande, disons à tendance islamophobe ? Ou pour être plus poli, anti-islamiste (on a quand même bien le droit d’être contre ces sauvages obscurantistes !) C’est que ce sont des héritiers des Lumières, eux. De la Révolution française, des guerres de 70, de 14-18, de 39-45, des guerres coloniales, des déportations, de la collaboration… Des sages, des avisés, pas des barbares !

Mais leur combat est-il vraiment un combat contre l’islamisme ? Ou bien a-t-il de vrais relents de peur et de rejet des musulmans, ou même des Arabes, qui sont nos concitoyens ? Nous verrons cela dans quelques heures, en revenant sur Charlie Hebdo, les idées qu’il véhicule vraiment, délibérément, depuis des années, et ce que sont en vérité ses « caricatures ».

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