Il y a toujours des bidonvilles en France

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Voilà ce qu’on voit de l’autoroute, sur des dizaines et des dizaines de mètres, au nord de Paris. Après plus de vingt ans, tout reste à faire, titrait Médecins du monde en 2014. En 2017, rien n’a changé.

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Comment se fait-il que la riche Europe, et notamment la France (car dans certains autres pays, les choses se passent mieux) laissent perdurer cet état de fait indigne ?

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Cessons de chasser les Roms de leurs bidonvilles si c’est pour les jeter à la rue, il faut bien qu’ils habitent quelque part ; mais cessons aussi de supporter que des enfants, que des gens, vivent dans ces conditions à nos côtés.

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C’est une question de volonté politique.

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Les Espagnols ont intégré des centaines de milliers de Roms. Il y en a quelques milliers en France, il est tout à fait possible de faire quelque chose,

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si l’on veut bien considérer qu’un être humain est un être humain, et que les pouvoirs politiques sont délégués pour tous les êtres humains.

bidonville autoroute nord paris 7Gennevilliers, août 2017, photos Alina Reyes

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Roms en France : 25 ans de déni d’humanité

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La France, une honte avec ses évacuations inhumaines de campements de Roms. Le Conseil de l’Europe condamne, cela continue, encore et encore.
La SNCF a déporté 76 000 juifs dans des wagons de marchandises à travers le pays et vers les camps de 1942 jusqu’à 1944.
Hier matin elle s’est humblement contentée de faire expulser des centaines de Roms de leurs pauvres cabanes, de les jeter avec enfants à la rue, pour envoyer aussitôt les bulldozers raser la place, censée lui appartenir.
Beaucoup, craignant la violence qu’est une évacuation, avaient quitté le camp avant, pour la rue ou d’autres bidonvilles. D’autres seront logés pour 15 jours dans des hôtels en banlieue puis se retrouveront aussi à la rue. Leurs enfants déscolarisés, leurs affaires perdues. Vingt-cinq ans que cette politique dure, et ne fait que s’aggraver. Jacques Debot, lui-même Rom, dénonce cette situation et aussi le rôle des associations qui depuis tout ce temps n’ont jamais dépassé le stade de l’accompagnement, de la perpétuation des faits : à lire sur son blog, « Les Roms et la fumée des cierges ».
J’ai été bénévole dans une association et j’ai vu le calcul de la hiérarchie, la nécessité d’avoir des pauvres pour la perpétuation de l’organisation (en l’occurrence il s’agissait d’assurer la bonne com de l’église catholique). Le problème leur permet d’exister. Certes ce qu’elles font est « mieux que rien », et surtout les bénévoles sont dévoués – tandis que les cadres souvent font tourner la machine, et bien payés pour cela. C’est un système mental et politique. La transposition de la charité dans la laïcité, pour faire perdurer l’iniquité.
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Délation et mensonge, persécution d’enfants, de Roms et de musulmans : le visage hideux d’une certaine France aujourd’hui

Des dizaines d’enfants, dont certains âgés de moins de dix ans, dénoncés par leur école et emportés par la police pour être interrogés. Un enfant de six ans, fils d’une convertie à l’islam, contraint de jouer le rôle de Kouachi abattant un policier. Les mensonges et les dénégations des adultes autour de ces affaires quand elles sont dévoilées. Le numéro 2 de l’UMP accusant faussement des dizaines d’enfants d’être en retard chaque matin à l’école à cause de la mosquée à laquelle leurs parents les emmèneraient. Un prêtre médiatique accusant sur une grande radio les classes populaires et les immigrés de se reproduire comme des lapins. Cinq enfants, dont deux bébés, enlevés brutalement à leur mère au motif que leur père est soupçonné de vouloir faire le djihad – alors qu’il cherche à s’installer dans son pays d’origine, la Tunisie, avec sa famille. À ces persécutions des musulmans, il faut ajouter celles faites aux Roms, obstinément chassés de leurs bidonvilles et jetés à la rue avec leurs enfants. Affaires emblématiques du maire refusant le permis d’inhumer un bébé rom au cimetière de sa commune, ou encore de l’ancien résistant rom de 89 ans, rescapé des camps de la Seconde guerre mondiale, violenté gratuitement par la police (affaire classée sans suite), de l’absence de représentation des Tziganes lors de la commémoration de la libération d’Auschwitz… Ce n’est pas l’histoire qui repasse les plats, c’est une partie des hommes qui s’obstine dans l’indignité. Et l’indignité commence avec l’indignité du discours. Le racisme et l’islamophobie, serinés à longueur de médias par des Zemmour, Charlie, Houellebecq, Finkielkraut et bien d’autres, ne sont pas des opinions, qui mériteraient respect et liberté d’expression. Ce sont des appels à la persécution, et elle ne manque pas de s’ensuivre, en premier lieu de la part des pouvoirs publics.

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« Pour ne pas périr, Tzigane… »

« Darius », sauvagement lynché, désormais handicapé, après un mois à l’hôpital devrait se retrouver à la rue. Ses agresseurs n’ont pas été arrêtés – qui le dédommagera, qui rendra justice ?

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Chante tzigane, chante. Chante pour rendre hommage à l’existence.

Que soit portée à chaque oreille, ta présence.

 

Les cheminées des monstres, régurgitant leurs fumées brûlent yeux et gorges.

Hurle, si tu le peux, de l’horreur de cette nuit.

 

Le secret de vie de chaque monstre se cache dans le ventre d’un poisson rouge,

Baignant dans les eaux dont tu ignores le chemin.

 

La tête de chaque monstre trône sur les cuisses d’une fille,

Telle une bûche sur lingot d’argent.

 

Dans leur soif de saccage, les monstres ont pillé

Soie et rubis des joues et lèvres de ces Vénus.

 

Pour désir de liberté, danse, tzigane, et sur ce rythme,

Envoie un message pour recevoir une réponse.

 

Il faut un signal à la conscience du monde pour croire à ton existence:

Frotte donc un fer sur la pierre, pour déclencher le feu.

 

Les âges noirs reculés, oppriment ton corps,

Sors, ne sois pas une trace sur un fossile.

 

Pour ne pas périr, tzigane, il faut briser la chape du silence,

C’est dire que pour rendre hommage à l’existence, il faut que tu chantes.

 

Simine Behbahan, poétesse iranienne (j’ignore le nom du traducteur) et combattante morte aujourd’hui

Du côté des enfants

On invente un nouveau barème pour noter les dictées, afin que les notes soient moins calamiteuses. Il faudrait surtout enseigner correctement la langue, les mathématiques, l’histoire et la géographie aux élèves. C’est-à-dire, en prenant le temps, au lieu de zapper constamment dans l’apprentissage, de fuir en avant et dans tous les sens alors que les bases ne sont pas acquises, et de faire ainsi souffrir les enfants. Cela me rappelle que lorsque j’avais douze ans, j’ai été embauchée pour donner des cours d’orthographe à un enfant de primaire en grande difficulté. Il fit plus de cinquante fautes à la première dictée que je lui donnai. Au bout de quelques semaines, il n’en faisait presque plus. Il n’y a pas de fatalité, il faut seulement prendre les choses à bras-le-corps. Ensuite je ne suis pas une puriste, la langue supporte quelques écarts d’orthographe, jadis cette dernière n’était même pas fixée. C’était le temps de la jeunesse du français, c’est ainsi qu’il a pu évoluer, et même s’il a atteint un certain âge il doit rester souple.

Un sociologue préconise de placer en institution les enfants roms contraints de mendier. Prudence avec ce genre de solution ! Ne renouvelons pas les fautes commises au détriment d’autres pauvres en d’autres circonstances et en d’autres endroits dans le monde, l’enlèvement des enfants d’indigènes ou de personnes en difficulté et leur placement en institutions, catholiques ou autres, « pour leur bien ». Sauf exception, le bien des enfants est de rester avec leurs parents. L’amour vaut davantage que le confort. Les problèmes de délinquance et de criminalité doivent être traités par la police, les problèmes de misère doivent être traités par les pouvoirs politiques. Chasser les populations d’un quartier à un autre, d’un pays à un autre, ou retirer les enfants à leur famille, n’est pas traiter les problèmes mais les fuir et les laisser s’amplifier, au risque de les voir déborder.

Les députés votent pour que les animaux soient reconnus comme « des êtres vivants doués de sensibilité », et non plus seulement comme des « biens meubles ». Il était temps. Puisque le progrès existe, on peut espérer qu’un semblable statut sera bientôt reconnu aux enfants.