Merci à eux

 

Il se tient debout contre le mur, près de cette porte par où les gens vont et viennent. Chaque fois que j’y vais, je le vois. Avant même que je n’aie traversé la rue, nous échangeons un signe de reconnaissance. Ses vêtements sont sales, mais son sourire est propre est doux. Il ne parle pas français, mais il sait dire « bonjour madame », « merci madame », « bonne journée madame ». Quelques piécettes au fond de son vieux gobelet en carton en appellent d’autres. Seraient-elles des billets de cinq cents, si dérisoire resterait cet argent. Je m’incline aux pieds de l’homme pour déposer moi aussi quelques piécettes, une misère.

Parfois l’homme s’accroupit, mais quand quelqu’un arrive, il se lève. Il déchire l’espace. La rue tangue. L’enfant toujours présent à côté de lui demeure assis, paisible, dans son pauvre sac de couchage crasseux. L’enfant joue consciencieusement avec les minuscules pétales jaunes d’une toute petite fleur. Les disposant et les redisposant sur le rebord du sac qui enveloppe ses jambes. Chaque pétale est peut-être un personnage pour lui, et l’ensemble un univers dont il chorégraphie les étoiles, les âmes.

L’enfant aussi sourit, parfaitement paisible et doux, levant la tête quand il entend votre « bonne journée à vous » en retour. Dieu est là.

 

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Les légumes du jardin partagé, et les fleurs de la Pitié

tout à l'heure dans un jardin partagé du 13e arrondissement, puis dans les jardins de la Pitié-Salpêtrière, photos Alina Reyes

 

J’ai rêvé cette nuit que j’étais debout sur le rebord de la fenêtre de ma chambre, à la montagne. Une biche et son faon, juste au-dessus, étaient là, paisibles. Nous nous regardions, comme chaque fois je le fais avec les animaux sauvages. Le faon est venu à ma fenêtre, il a commencé à essayer d’y monter. Alors, d’où ils étaient, est apparu une très nombreuse troupe, multicolore et joyeuse, de pèlerins, de moines et moniales, de soldats. Ils sont descendus chez moi, se sont installés dans la maison autour de la table. Je leur ai proposé de l’eau, ils ont mangé. Je suis retournée voir le faon, je me suis réveillée.

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À propos de l’imposture du Grand Rabbin. Mensonge et Vérité.

peau de serpent trouvée en juillet 2007 dans les ruines de l'église du concile d'Éphèse, à la place de l'autel

 

Jean-Noël Darde, dont on peut lire les différents articles sur les plagiats de Gilles Bernheim sur son blog (plagiats passés sous silence ou minimisés autant que possible par les catholiques, tel Jean-Marie Guénois parlant dans le Figaro de 8 lignes, au lieu de 8 pages plagiées ; et plagiats bien évidemment encore très partiellement démasqués), écrit à propos du fameux texte contre le mariage homosexuel que Benoît XVI cita le 21-12-12, de façon tout à fait inhabituelle mais dictée aussi par des volontés de rapprochement politiques avec les juifs, concourant ainsi grandement à la gloire du Grand Rabbin, comme le fit pendant des décennies sa prétendue agrégation :

Il est en de cette dernière imposture, comme de la précédente concernant l’agrégation de philosophie. Celle-ci aura des conséquences dévastatrices pour la communauté juive comme pour l’église catholique. Elle ne peut que nourrir les mauvais réflexes de part et d’autre,  et ailleurs.  Ces faits  ne pouvaient qu’être connus depuis au moins quelques jours par des responsables importants de la communauté juive, comme au sein de la hiérarchie catholique. Je pense personnellement même depuis beaucoup plus longtemps.

Dans ce type de situation,  le piège se referme très vite sur les crédules qui même une fois informés sont condamnés au silence au prétexte d’éviter le scandale. Une stratégie qui s’avère souvent, cette affaire en témoigne une fois de plus, de courte vue.

Comme le fait remarquer Loïc de Kerimel, dans l’un des passages plagiés de ce texte (plagiés sur des auteurs catholiques, pour se retrouver cités comme une pensée juive par le pape – le serpent se mord la queue), Gilles Bernheim commente le verset 5 du chapitre 3 de la Genèse : « D-ieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal ».

Le commente en faisant abstraction du fait qu’il s’agit là d’une parole du serpent.

C’est là tout le problème. Ce n’est pas sur la parole du serpent que nous devons nous fonder.

Cependant ceux qui avec lui ont croqué de cette pomme, au lieu de participer au rachat d’Adam, l’ont conduit à sa seconde mort.

 

La presse nous dit ce matin que dans le plus petit État du monde, on télécharge illégalement, comme ailleurs, des films pornographiques, mais avec une préférence pour les films sado-masochistes. Sad Tod.

 

La parole d’un homme est bonne, ou elle est mauvaise. C’est cela, l’unicité de Dieu, de son Verbe. Certes on trouve du bon dans le mauvais, et c’est ce qui incite à écouter la parole du serpent, et à se laisser séduire par elle. Mais ce bon est mis au service d’une racine et d’un but dévoyés.

On ne trouve pas de mauvais dans le bon. Si on en trouve, comme certains en touvent dans la Bible ou le Coran, c’est qu’on se trompe. Qu’on ne comprend pas le texte d’un point de vue surplombant, d’où son sens apparaît dans son entièreté comme dans la vérité de son détail, qui concourent au seul et même but, et de la seule et même source : la Vérité.

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Les puissances du mal et la puissance de la vie

au jardin alpin du Jardin des Plantes, ces jours-ci, photo Alina Reyes

 

À force de lutter, privée de moyens, parfois je suis fatiguée. Ce matin je me suis recouchée, je me suis rendormie, j’ai fait un rêve où j’étais un homme que d’autres hommes coinçaient dans une cage d’escalier sombre, frappaient contre les murs, frappaient. Rien à faire, je ne travaillerai pas avec l’inversion des valeurs que je porte. Ce que les puissances du mal font dans le monde en ce moment, je le vois bien, car c’est de la même façon qu’elles agissent avec moi, depuis des années.

Les puissances du mal sont malines, comme leur nom le dit. Au nom du féminisme, on instrumentalise des femmes pour semer le trouble dans les peuples qu’on veut dominer, Russes, Européens, Maghrébins… Au nom de l’humanisme, on instrumentalise des associations pour s’insérer parmi les peuples sur le terrain, des trolls pour s’insérer parmi les voix des peuples sur internet, des pétitions en ligne pour s’insérer dans la politique des peuples et réaliser en même temps une intense propagande, qui arrive directement dans des millions de boîtes mail, qui s’étale dans la presse, qui sème la confusion entre le bon et le mauvais tandis qu’à l’arrière-plan on s’emploie à attaquer des monnaies, trafiquer des marchés. La corruption progresse dans les esprits, et notamment les esprits des élites. Le mensonge et la manipulation dans ces milieux règnent au point de paraître ordinaires, même à des représentants des plus hautes autorités morales, qui ne savent plus distinguer entre le vrai et le faux.

Pourtant chez moi, dans notre humble foyer, l’amour, la beauté, l’harmonie règnent. Qu’il en soit ainsi pour chacun de nous, et la vérité vaincra, la vérité a déjà vaincu.

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Jumua. Mon journal du jour

"Kavka" au Jardin des Plantes, photo Alina Reyes

 

Je suis très affectée d’apprendre que le Grand rabbin de France, Gilles Bernheim, est un plagiaire récidiviste, qu’il emploie des nègres, qu’il a menti pendant des décennies en se prétendant agrégé de philosophie (et major de sa promotion, entre autres détails inventés pour lui donner un brillant éblouissant) – ce qui lui valut une grande partie de son prestige. Parmi les auteurs qu’il aurait plagiés figure Élie Wiesel, qui fut lui-même accusé d’imposture, sans que l’affaire soit bien éclaircie. De même j’ai été triste d’entendre à la télévision un prêtre, Jean-Robert Armogathe, qualifier d’anecdotique l’affaire Cahuzac. Tous ces hommes qui passent pour des références morales, n’ont-ils en vérité aucun sens, ou qu’un sens complètement faussé, du bien et du mal ?

Ailleurs, toujours, sur toutes sortes de sujets, multiples manipulations de l’information, soit par ceux qui la donnent (sur les sites que je lis, qu’ils soient généralistes, musulmans ou chrétiens), et la donnent partielle ou déformée, soit par ceux qui la commentent sous couvert d’identités faussées. Et la bêtise, et la méchanceté. De cette mare pourtant, s’élèvent de temps en temps quelques voix fraîches, surgissent comme des épiphanies des témoignages de vie, si minces souvent, si petits, et justement pour cela porteurs de la plus haute espérance. Le cœur bondit, le ciel est là, tout proche.

Aujourd’hui, vendredi, jour de prière commune à la mosquée. Jumua, bonheur et joie. À la Grande Mosquée, à cause de la multitude de ce jour, ou grâce à elle, nous prions dehors, dans les jardins. De grands tapis de corde sont disposés pour les fidèles. Vers le fond, quand il n’y en a plus, on se partage le tapis ou le tissu apporté par l’une ou l’autre. On prie côte à côte, coude à coude, inconnue à inconnue. C’est très beau. L’imam récite des passages du Coran et prêche, il y a des invocations en commun, comme c’est en arabe je ne comprends pas mais peu m’importe de comprendre à la lettre, je comprends à l’oreille, je suis dans la prière, nous y sommes toutes et tous ensemble, et la mosquée a les dimensions du monde. Quand c’est fini, celles qui ont apporté des dattes, des gâteaux, du café, les distribuent. Générosité vivante et raffinée. Les jardins du paradis.

À la sortie un jeune homme distribuait des prospectus. Il m’en tend un : « Bonjour madame, c’est pour maigrir ». « Ah, vous me trouvez trop grosse ! », je lui dis. Il éclate de rire. « Non, absolument pas ! » Comme j’aime entendre les hommes rire ! et rire de bon cœur.

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Allons de l’autre côté

 

Je me suis levée tôt pour prier, puis comme j’étais très fatiguée je me suis rendormie. J’ai bien fait, car m’est venu un rêve somptueux. J’étais en voyage, de passage dans un pays semblable à la Mongolie. Pour entrer à la mosquée, qui était aussi la Grande Mosquée de Paris, je faisais mes ablutions avec d’autres dans un espace labyrinthique profondément paisible, puis je me voilais d’un voile blanc transparent tendu sur mon front et surmonté d’un tissu, ou d’une capuche, rouge à pourpre, montant librement élaboré. Je gardais cette coiffure à la sortie de la mosquée, qui se trouvait à la fois dans les vastes espaces où l’on monte à cheval et dans la blancheur lumineuse du Jardin des Plantes légèrement enneigé. Je traversais un palais, accompagnant un moment en chemin son propriétaire terrestre désemparé, tandis que tout devenait céleste, que le palais de la mort se changeait en palais de la lumière, que se formait dans l’invisible l’union des bienheureux, en marche et en repos vers un nouvel espace, un nouveau jardin, un pays encore jamais vu, où, à la sortie du palais, se poursuivait le voyage.

 

 

Le canard qui marchait avec moi

Bon ben salut, à + ! (cet après-midi au Jardin des Plantes, photos Alina Reyes)

 

D’abord j’ai arpenté et re-arpenté les toutes petites allées du jardin alpin, dans l’odeur des fleurs à miel, les chants délicats des oiseaux, la belle franche lumière de printemps. Je mettrai peut-être des photos demain, avec quelque réflexion qui m’est venue ce matin sur le Christ au jardin – à moins que je ne les garde pour mon livre sur le Messie, nous verrons. J’ai parlé avec un jardinier, c’est lui qui m’a adressé la parole, nous avons parlé en marchant. Ces gars et ces filles font un travail remarquable tout au long de l’année au Jardin des Plantes, qui sans cesse change, comme la nature. Je le lui ai dit, puis j’ai poursuivi mon chemin en songeant qu’ils étaient presque des saints. J’ai rencontré un canard, qui pour une fois n’était pas dans l’eau. Il est venu vers moi, je l’ai salué, il m’a accompagnée un bout de chemin. La vie est fantastique.

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En voyage il arrive toujours des choses extraordinaires

par cette belle journée, à Paris, photos Alina Reyes

 

En chemin, j’ai échangé quelques mots avec un SDF très abîmé, vacillant sur ses jambes. Nous avons un peu plaisanté, puis au moment où je suis partie, il m’a dit : « Salut à toi ! ». J’ai su que c’était le Christ qui le lui avait fait dire, et je vous le transmets : Salut à vous. J’ai voulu aller remercier à Saint Julien le Pauvre, mais l’église était fermée. Quant à Notre Dame, la file d’attente des touristes était si longue que je suis plutôt descendue au bord de la Seine, puis j’ai poursuivi mon chemin. Finalement je suis entrée à Saint Séverin. Je suis allée m’asseoir dans la chapelle du Saint Sacrement, il n’était pas exposé mais la bougie brûlait devant le tabernacle, en bois taillé comme dans l’art africain, ainsi que l’autel et le pupitre. Rapidement, le Christ m’est apparu à travers la pierre. J’ai l’habitude de cela, et de l’immense paix dans laquelle cela transporte. Comme à la mosquée, qui contient l’église, qui contient la synagogue. Mais soudain je me suis tournée et j’ai vu, assis un peu plus loin sur ma gauche, l’exact sosie de mon fils Joachim. J’ai été saisie comme lorsque, le mois dernier, j’ai vu un tigre dans la Seine. Et plus encore. Même cheveux, même coupe, même profil, même allure, même vêtements. Et cependant c’était un autre, même s’il était difficile d’en croire ses yeux. Il est reparti, j’ai regardé en face de moi la peinture du repas d’Emmaüs, puis de nouveau, au-dessus du tabernacle, le Christ à travers la pierre, serein.

Une fois sortie, en consultant mon portable, éteint dans l’église, j’ai vu que pendant que ceci était arrivé, Joachim m’avait laissé ce message : « Je mange dehors ». J’ai continué à marcher, je suis passée devant Saint Éphrem, l’église syriaque où j’allai un jour à une messe de soutien aux chrétiens d’Irak. Je suis passée devant une boutique russe en chantier, où étaient en vitrine des œufs de Pâques et des poupées russes. Plus loin, place Monge, une tente était plantée pour les enfants, à côté de la camionnette du baladin. Bientôt je voyagerai, ailleurs, comme on peut aussi voyager chez soi, où qu’on soit.

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