J’ai vu deux fois le Bouddha en rêve. La première fois, il y a très longtemps, au fond d’une forêt profonde, au fond d’un temple en ruine que je découvrais en marchant avec une petite fille mongolienne que j’aimais d’amour d’or. La deuxième fois, il n’y a pas très longtemps, je l’ai vu avec Dieu. J’ai vu en rêve, un jour, Homère. Puis il me donnait sa tête à manger. Elle était d’une matière inconnue, de vives couleurs, assez semblable à manger à des spaghetti. J’ai vu le Christ, j’étais dans un sommeil mais les yeux ouverts, il se tenait tout près de moi, en habit pourpre de gloire et portant une épée. Adolescente puis plus tard, de façon très récurrente je marchais en rêve en apesanteur, à plusieurs mètres au-dessus de la terre. Chaque fois, toute la journée suivante, j’étais sûre de l’avoir vraiment fait, de savoir le faire naturellement. Cela se produit encore parfois. J’ai vu Kafka en rêve, attablé avec quelqu’un, mais je ne me souviens plus de ce qui se passait, le rêve est raconté dans Ma vie douce, j’ai donné le livre à l’avocat lors du procès et maintenant je ne l’ai plus. J’ai vu Rimbaud, il a dormi chez moi. Cette nuit en rêve j’ai marché à l’aube, jambes et pieds nus, par des allées de terre rouge vers notre maison passagère, un bungalow dans les roseaux. Des hommes mauvais m’ont suivie, mais quand ils ont frappé à ma porte sans clé, j’ai ouvert, j’ai refermé, et ils sont partis.


Joie ! Je l’ai dit avant-hier à Olivier et Syd : c’est Dany qui va être élu à l’Académie française. Comment tu le sais ?, m’ont-ils demandé. Eh bien voilà, c’est fait. Ah que son grand rire résonne entre leurs murs ! Comme il réchauffait l’hiver canadien, quand nous tracions à travers Montréal par moins trente et dansions avec les Haïtiens ! Dany Laferrière est un excellent écrivain, et un amoureux de la langue française, comme tous les Haïtiens que nous avons connus là-bas, comme Pit qui récitait par cœur des pages de Mauriac. Dany lisait le Journal de Léautaud, parfois il nous téléphonait pour nous lire un passage particulièrement savoureux. Puis je crois que c’est lui qui m’a parlé de 







