Madame Terre chez Alphonse Daudet à Draveil

Il nous semble simplement [en lisant] que nous continuons à vivre mais dans une autre maison, ou un autre pays peut-être.
Virginia Woolf, L’art du roman 

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maison d'alphonse daudet

mme terre dvt la porte de daudet

mme terre sur le banc chez daudet

mme terre sur la terrasse de daudet

mme terre sur les marches chez daudet

prise de terre chez daudet

mise de terre chez daudet

mme terre sur le piano chez daudet

En revenant de chez Alfred Jarry à vélo (note précédente), avec Madame Terre sur le dos, O a vu par hasard la maison d’Alphonse Daudet, qui était justement ouverte. Ni une ni deux, il s’est arrêté, est entré. La propriétaire, Isabelle Guignard, lui a aimablement fait visiter les lieux, qu’elle fait vivre notamment en recevant des conteurs et des artistes de théâtre. Et bien sûr il a accompli le protocole des actions poélitiques de Madame Terre.

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Les œuvres d’Alphonse Daudet peuvent être lues gratuitement en ligne : ici

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La dernière classe, l’un de ses Contes du lundi, ici admirablement dit par Fernandel, a aujourd’hui une actualité touchante… en Chine, où il passionne les Ouïgours, comme expliqué .

Madame Terre chez Alfred Jarry à Corbeil

Montrez-moi l’insertion de la terre
Antonin Artaud, L’Art et la mort

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en approchant de chez jarry

approche de chez jarry à corbeil

approche de chez jarry

moulin attenant à la maison de jarry

moulin attenant à chez jarry

mme terre arrive devant chez jarry

mme terre à la maison de jarry

chez jarry

mme terre contre le mur de jarry

mme terre par le trou de la maison

mme terre par le trou de la maison de jarry

prise de terre chez jarry

mise de terre chez jarry

mme terre dvt la maison de jarry

mme terre devant la seine chez jarry

Alfred Jarry allait et venait entre Corbeil et Paris à vélo (35 km, 70 aller-retour). O a fait de même pour accomplir l’action poélitique Madame Terre chez Jarry, troisième de sa catégorie, passant le bras à travers un trou dans le portail pour faire entrer Madame Terre dans la propriété. Le poète vivait dans cette maison à l’abandon accolée aux grands moulins, au bord de la Seine, pauvre à se nourrir des poissons qu’il pouvait pêcher dans la rivière et des oiseaux qu’il pouvait tirer dans son jardin.

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On peut lire gratuitement les œuvres numérisées d’Alfred Jarry (comprenant ses dessins) ici.

Et regarder cette mise en scène télévisée d’Ubu Roi par Jean-Christophe Averty, libre d’y voir les allusions qu’on voudra, comme disait Jarry.

https://youtu.be/bQIJiIQjoRU

Vive Jarry ! en chanson aussi

 

Madame Terre au château de Monte Cristo

Après la mort de Patrocle, comme nous le savons par l’Iliade, Achille organisa des jeux. Ce n’était pas seulement un hommage à un héros tombé. La cérémonie avait une signification magique. Les compétiteurs transmettaient ainsi au mort un peu d’énergie vitale.
La seule récompense matérielle du vainqueur était une couronne de branches d’olivier. (…) Cela témoigne d’un lien entre les jeux et les cultes de la végétation. La course en particulier, le choc rythmique des pieds nus contre la terre, devait réveiller une faculté de germination endormie.
Zbigniew Herbert, Le Labyrinthe au bord de la mer, traduit du polonais par Brigitte Gautier

entreel’entrée du domaine

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action monte cristo

madame terreLe petit château qu’Alexandre Dumas réservait à son écriture, et le grand pour un tas de gens qui y passaient ou s’y installaient quelque temps.madame terre 2

mme terre dvt l'eau

terre pour mme terre

madame terre de monte cristo

madame terre 3

C’est la première d’une catégorie particulière de mes actions poélitiques. Il s’agit d’emporter Madame Terre dans des lieux où sera recueillie une pincée de terre pour l’ajouter à l’intérieur. Aujourd’hui le château de Monte Cristo, d’Alexandre Dumas, « force de la littérature, force de la nature » et « forçat de l’écriture ».

Comme l’action alpha, l’action Madame Terre au château de Monte Cristo a été réalisée par O, qui est allé au Port Marly depuis Paris à vélo (plus de 50 km aller-retour) pour accomplir le geste complet et le photographier. Action réalisée en ce 14 juillet 2016

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Lire gratuitement Alexandre Dumas en ligne : ici

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Le comte de Monte Cristo, série télévisée de 1979, adaptation la plus fidèle du roman. Réalisée par Denys de la Patelière, avec Jacques Weber. Musique Nino Rota et Carlo Savina





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chez dumasvue du pays

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Qu’allèrent faire nos frères néandertaliens dans la grotte de Bruniquel ?

Cet article paru dans The Conversation est issu de mes recherches pour ma thèse de Littérature comparée en cours.
image-20160701-18306-1dzmh73Les stalagmites en cercles témoignent d’une vision géométrique, d’une aptitude à la mathématique, à l’abstraction. AFP, A

Alina Reyes, Université Paris-Sorbonne – Sorbonne Universités

En 2003, lors d’un entretien télévisé avec Philippe Lefait, Jim Harrison raconte avoir donné au poète amérindien Lance Henson La poétique de l’espace de Bachelard. « C’est curieux », lui a-t-il dit après l’avoir lu, « Bachelard pense comme un Amérindien. » Et Harrison ajoute : « Je ne connais pas un auteur amérindien qui n’écrive pas pour construire une maison pour son âme. »

Les primates et d’autres animaux peuvent fabriquer des outils. Les humains, eux, impriment des traces. Traces qui sont à la fois pour eux et pour les autres (dans l’espace et dans le temps), des preuves de leur humanité, de leur capacité à dépasser l’utilitaire – même si l’écrit est aussi un outil de communication, de recension, de comptage. L’écriture ne se limite pas à servir de signifiant d’un objet extérieur : elle est identifiée par tout humain qui la rencontre même sans pouvoir la déchiffrer comme la manifestation qu’il y a, à sa source, un objet intérieur, un protosujet que, telle une matrice, elle contient et transforme de sujet en sujet. Originellement, l’écriture dépasse le signe : elle est construction, maison pour l’âme qu’elle abrite et engendre dans un même mouvement.

Une coquille striée de zigzags réguliers.

Les plus anciens signes gravés connus à ce jour datent d’environ 500 000 ans. Leur découverte, en 2014, fut un coup de tonnerre dans la science tempétueuse de la paléontologie. Il s’agit d’un zigzag, fort bien tracé dans l’épaisseur d’une coquille. Il nous est impossible de connaître le sens donné par nos lointains ancêtres à leurs gravures et peintures. Mais de même que nous pouvons lire Homère sans qu’il nous ait jamais confié ses intentions, nous pouvons toujours lire les traces d’eux-mêmes que nous ont laissées les hommes dits préhistoriques.

Une coquille est le contenant, la maison d’un vivant. L’analogie est universelle. Quand une telle « maison » naturelle est transformée par l’homme, par son esprit et par sa main, elle devient maison de l’âme : Ghost in the shell, comme le dit le titre d’un célèbre manga de science-fiction. Une coquille gravée il y a 500 000 ans, bien avant que l’homme ne soit Homo Sapiens, transforme la maison d’un vivant (le mollusque) en maison d’une âme (humaine). Par-delà le sens (ou l’absence de sens) que voulait donner à ces traits l’être qui les fit, que ces traits fussent ou non des signes, le seul fait qu’ils aient été tracés est une preuve de l’humanité de celui qui les traça.

La grotte, écrin du geste et de l’œuvre

Qu’allèrent donc faire nos demi-frères néandertaliens lorsque, il y a à peu près 176 000 ans, ils descendirent et cheminèrent longuement dans l’étroit labyrinthe souterrain de la grotte de Bruniquel puis, au creux d’une salle profonde, cassèrent et disposèrent en cercles, dressées, des stalagmites ? La découverte de constructions humaines aussi anciennes provoqua lors de son annonce il y a quelques semaines un séisme chez les paléoanthropologues. Jamais personne n’avait imaginé que des humains aussi anciens, a fortiori ancêtres des Néandertaliens réputés moins culturellement développés que les Sapiens Sapiens, étaient capables de penser et bâtir un tel ouvrage. À quel usage, dans quel but ? C’est ce que nous ne saurons pas.

Mais encore une fois, cela ne signifie pas que leur geste, et le résultat de leur geste, soient illisibles. La coquille et la grotte sont toutes deux des contenants. L’un porteur d’une gravure sur sa face extérieure, l’autre d’une sculpture, d’une installation au sens moderne du terme, dans son intérieur. Une âme se cache à l’intérieur de la coquille gravée. Une âme se dresse à l’intérieur de la grotte, écrin du geste et de l’œuvre. D’un côté la conscience du contenant, de l’autre celle du contenu. Traits en zigzags et stalagmites en cercles témoignent d’une vision géométrique, d’une aptitude à la mathématique, à l’abstraction. Quels qu’aient pu être les usages de ces élaborations – que nous continuerons à ignorer malgré toutes les supputations –, elles demeurent en tant que telles, et en tant que telles continuent à parler.

La construction circulaire de Bruniquel modélisée en 3D.
CNRS, Author provided

Que cette première architecture ait eu ou non un usage, et quel qu’il ait pu être, ne change rien au fait qu’à un niveau plus profond, et plus élevé, l’être de cette construction souterraine de la nuit des temps fut et reste d’être une maison pour l’âme. Ce fut et c’est de dire la présence de l’âme, comme les traits sur la très ancienne coquille. « L’être qui se cache, écrit Paul Valéry dans L’Homme et la coquille, l’être qui « rentre dans sa coquille », prépare « une sortie ». Cela est vrai sur l’échelle de toutes les métaphores depuis la résurrection d’un être enseveli jusqu’à l’expression soudaine de l’homme longtemps taciturne […] Il semble qu’en se conservant dans l’immobilité de sa coquille, l’être prépare des explosions temporelles de l’être, des tourbillons d’être. »

L’homme écrit pour habiter

L’être s’extrayant du primate signe sa sortie, son être humain, sur une coquille puis dans une grotte. Il ne se singe pas lui-même, il ne singe pas le monde non plus, il le transforme en y imprimant sa marque, son point de départ. La coquille et la grotte disent l’intériorité et l’extériorité. L’être qui y apporte son sceau par ce geste affirme sa conscience et conçoit sa liberté. Il ajoute dans ces ossements du monde, dans l’os du monde, l’antériorité et la postériorité, et même la postérité. Par la gravure comme par la découpure des stalagmites, il fait une entaille dans le temps grâce à laquelle le temps cesse d’être un cercle fermé, grâce à laquelle il ne se clôt pas sur le passé et s’ouvre aux possibles.

L’homme écrit, ou commence par tracer des traits, pour s’inscrire dans l’espace et dans le temps : il écrit pour habiter. Cette inscription, cette écriture, qu’elle soit faite de bâtonnets régulièrement tracés dans une coquille ou de bâtons de stalagmites géométriquement dressés dans une grotte, devient habitation au sein de laquelle une autre écriture peut mûrir, qui rassemble et rassemblera toujours de nouveau le geste et la mémoire du geste, qui se rebâtira en permanence, chaque fois unique et neuve, par et pour chaque nouveau lecteur, et via chaque lecteur par chaque nouvelle lecture.

Nous ne sommes pas condamnés à tout ignorer de la langue de nos si lointains ancêtres : car c’est celle des poètes de tous les temps et de tous les univers. C’est la nôtre, aussi profond en nous que la grotte de Bruniquel. Et il nous suffit d’y descendre pour l’entendre résonner et nous inciter, encore et toujours, à nous extraire de là, puisque nous nous y sommes reconnus, comme l’enfant s’extrait de la matrice. Afin de devenir un homme, un être humain, un être toujours en redevenir – non ce qu’il fut, mais ce qu’il envisagea confusément d’être. Les stalagmites dressées de la grotte de Bruniquel se présentent à nous comme un miroir où nous ne nous reconnaissons pas clairement lorsque, abasourdis, comme dans tout chef-d’œuvre, nous n’y sommes pas encore.

The Conversation

Alina Reyes, Doctorante, littérature comparée, Maison de la Recherche, Université Paris-Sorbonne – Sorbonne Universités

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.

Yves Bonnefoy, poète empirique

yves bonnefoyLe poète, traducteur et critique d’art s’est éteint le 1er juillet 2016 à Paris. Photo Lucy Bonneby/AFP

Alina Reyes, Université Paris-Sorbonne – Sorbonne Universités

Pour commencer, Yves Bonnefoy a fait l’expérience poétique de la mort, autrement dite Du mouvement et de l’immobilité de Douve (1953). Bonnefoy pratique une poésie expérimentale qui est l’inverse, voire le contrepoison, de la poésie expérimentale comme recherche sur le langage. Lui fait d’abord l’expérience du réel. Le recueil inaugural et fondateur du poète pourrait s’intituler Rerum natura. Car il ne s’y agit pas comme chez Lucrèce de discuter de la nature des choses, mais de la faire directement sortir de terre, de la révéler concrètement en la rejoignant là où elle se cache, dans la mort.

Bonnefoy paraît s’être fixé l’objectif de Rimbaud qui se dit dans Une saison en enfer : « rendu au sol, avec un devoir à chercher, et la réalité rugueuse à étreindre ! Paysan ! ». Et tel le paysan de la fable, il demande à ses enfants – ses lecteurs – de creuser la terre à sa suite : y cherchant un trésor, ils y trouveront celui qu’ils auront fait pousser par leur labourage. L’un des poèmes de Ce qui fut sans lumière s’intitule « La charrue ». Le trésor est un autre, pourrait-on dire en paraphrasant Rimbaud que Bonnefoy a tant aimé, or il n’en est pas moins nécessaire de le déterrer.

Extrait de l’émission « Analyse spectrale de l’Occident » consacrée à Rimbaud, diffusée en 1966.

Selon Galien, les médecins empiriques de l’Antiquité grecque se fondaient sur trois sortes d’expériences : l’observation personnelle ou autopsie ; l’histoire constituée par les observations faites par leurs prédécesseurs ; et le passage au semblable, d’un cas à un autre cas qui lui est semblable d’une façon ou d’une autre. Telles sont les procédures que semble avoir suivies Bonnefoy dès son premier recueil.

Un progrès sur la mort

Les six vers du tout premier poème comportent trois fois le verbe voir, conjugué à la première personne du singulier : « Je te voyais […] Je te voyais […] Et je t’ai vue ». Nous sommes ici dans l’autopsie, qui durera tout le temps du « Théâtre », première partie du livre. Le poète regarde le théâtre du monde – le mot théâtre étant lui-même issu du verbe grec théorein signifiant regarder, contempler – en spectateur et en traducteur. Il l’autopsie et le traduit en mots, brutalement : non pour en donner une idée, mais pour le convoquer. Ses mots mêmes sont matière, et si d’aucuns trouvent cette poésie obscure c’est qu’elle est « bois ténébreux » d’après le bois ténébreux. Il y a là, d’une certaine manière, un passage au semblable, sens et sonorité des mots se conjuguant pour rendre le réel perçu et constituer un texte qui est à la fois tableau clinique du morbide et ordonnance contre la mort.

Au milieu du recueil, le chapitre « Douve parle » peut être lu comme la part d’expérience nommée historia par les philosophes grecs empiriques. Il s’agit là d’interroger et d’écouter « Une voix » et « Une autre voix ». « L’historien, c’était moi, dira-t-il plus tard dans L’Arrière-pays (1972), et tout mon passé et tout mon possible, tout l’aperçu et tout l’inconnu, se prenaient violemment dans cette nasse […] au mutisme, il allait falloir que je noue mille circuits d’analyse, de mémoire, à parcourir patiemment dans mes profondeurs. » Douve, nom de fossé entourant le château (de l’âme ?), Douve qui est à la fois personne et éléments, témoigne maintenant de sa propre expérience, qui doit ensemencer le poète, lui aussi terre, lieu de la mort qu’il faut franchir pour vivre.

« Que le verbe s’éteigne/Sur cette face de l’être où nous sommes exposés ». L’exigence du concret comme prédominant, et préexistant à la parole, se rappelle. « La poésie est active en nous depuis bien plus longtemps que les langues », dit Bonnefoy dans le recueil d’entretiens intitulé L’Inachevable (2010). « Les “voix” », y dit-il aussi, « sont pour moi des paroles que je crois avoir entendues dehors […] Des voix, et donc une scène où ces êtres passent ou se rencontrent, où ils se parlent autant qu’ils me parlent. Je crois que cette sorte de théâtre sans fiction autre que prospective est l’essence même de l’écriture qui va à la poésie. »

« Le jour franchit le soir, il gagnera
Sur la nuit quotidienne.
Ô notre force et notre gloire, pourrez-vous
Trouer la muraille des morts ? »

Du mouvement et de l’immobilité de Douve se termine par ces vers qui marquent moins une victoire sur la mort qu’un progrès sur la mort : l’expérience a fait reculer une part de son espace comme le jour à la belle saison gagne sur la nuit, ou bien même a troué sa frontière. Y aurait-il alors ici, par ce trou, possibilité de passage d’un semblable qui serait la mort à un autre semblable qui serait la vie, ou d’un semblable qui serait la morte à un semblable qui serait le vivant ? Cela ne peut s’affirmer, et rien ne le dit de façon définitive.

Tel l’empirique antique

Si l’empirisme n’empêche pas ici une forme d’induction, la vérité reste un chemin, non une arrivée. Comme dans le scepticisme zététique de Sextus Empiricus, où la vérité n’est jamais acquise mais toujours à rechercher, Bonnefoy « s’éloigne sans se retourner dans cette forêt où tout est chemin, où rien ne va nulle part » (La longue chaîne de l’ancre, 2008). Une philosophie qui est aussi une poétique de la vie, résumée par exemple dans le poème « L’inachevable » du splendide recueil La Vie errante (1993-1997) où le poète, ayant constaté que le monde n’est qu’ébauche et ruines, à l’exception de la lumière incréée, « n’aime plus, dans l’œuvre des peintres, que les ébauches. Le trait qui se ferme sur soi lui semble trahir la cause de ce dieu qui a préféré l’angoisse de la recherche à la joie de l’œuvre accomplie. »

Libre au lecteur de constater que l’expérience de l’inachevé donne lieu à l’inachevable, mot où s’entend : l’intuable. Et que cette expérience à son tour fait que la joie franchit l’angoisse, portant lumière dans Ce qui fut sans lumière (1987-1995), selon le titre d’un autre de ses recueils. Bonnefoy a écrit tout au long de sa vie, tel le Voyageur de L’Arrière-pays, tel l’empirique antique dont la pensée, appuyée sur l’expérience et son enseignement toujours renouvelé, ne s’arrête jamais. « Le grand dessin va le trait comme on se défait d’une pensée encombrante, il n’identifie pas, il fait apparaître », écrit-il dans ses Remarques sur le dessin. Et « la poésie aussi, c’est un trait qui se refuse à se refermer sur soi. » Cherchant tout au long de son œuvre dans le réel « la Présence », Bonnefoy sait qu’en provoquer l’épiphanie par l’expérience, c’est aussi faire l’expérience de « la dissolution du moi illusoire » (L’Arrière-pays).

The Conversation

Alina Reyes, Doctorante, littérature comparée, Maison de la Recherche, Université Paris-Sorbonne – Sorbonne Universités

La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation.