À la maison dans la Bible, l’Évangile et le Coran

Jardin des Plantes, photo Alina Reyes

 

Le mot bayit en hébreu, bayt en arabe, désigne un contenant, une demeure : maison, tente, cimetière, temple, et aussi famille avec descendance – non limitée aux liens de sang. En arabe, au pluriel, il a un sens supplémentaire : vers. Le dictionnaire Kasimirski indique : « De même que le vers est homonyme de tente, de même chaque partie dont un vers se compose répond à quelque partie de la tente, comme pieu, etc. » Avant d’être appelé Allah, Dieu est nommé dans le Coran Rabb al-Bayt, Seigneur de la Maison. Cette maison est la Kaaba, élevée à La Mecque par Abraham (sourate II, 127).

Bayit, qui prend souvent la forme beyt en hébreu, en raison de sa forme, dit le dictionnaire de Sander et Trenel,  a donné son nom à la deuxième lettre de l’alphabet hébreu : beth. Cette lettre est la première de la Bible. Lorsque Jacob s’endort, la tête sur une pierre, et voit en rêve les anges descendre et monter à l’échelle entre terre et ciel, puis entend Dieu lui annoncer sa descendance, il s’exclame en se réveillant que c’est ici « la maison de Dieu, la porte du ciel ». Il dresse la pierre sur laquelle sa tête a reposé, en fait une stèle, qu’il appelle Béthel, « maison de Dieu » – bétyle (Genèse 28, 10-19), en promettant que si Dieu le garde dans son voyage et lui donne du pain et lui permet de rentrer à la maison, il sera son Dieu.

Bethléem, « Maison du pain », est le lieu où naquit Jésus-Christ, « le pain de la vie », au creux d’un rocher, d’une grotte qui est aussi un mot. Béthel, où Abraham éleva aussi un autel (Genèse 12, v.8) est considéré comme le village nommé autrement Emmaüs (par déformation d’un nom contenant Luz, ancien nom du lieu renommé Béthel par Jacob), où les compagnons rencontrèrent, au soir du premier dimanche, le Christ ressuscité – qu’ils reconnaissent quand il leur partage le pain et leur explique les Écritures.

La lettre B, en arabe comme en hébreu, signifie dans. De nouveau l’idée de demeure. Elle est la première lettre de la Bible et aussi du Coran, avec ce sens. Dans la Bible, littéralement : « Dans le commencement », et dans le Coran : « Dans le nom » (de Dieu). Ce B est en quelque sorte un bétyle. Que nous dit-il, d’entrée ? Que dans la lettre est Dieu. La première lettre est en quelque sorte la maison d’où jaillit, comme en Big Bang, la parole de Dieu, à la fois source, pain et nom.

Les vêtements liturgiques et le pectoral d’Aaron seront couverts de pierres précieuses (Exode 39), comme la Jérusalem céleste (Apocalypse 21). Le Temple de Jérusalem est le béthel, la maison de Dieu. Dans la Kaaba est enchâssé le bétyle. Le Christ renomme l’apôtre à qui il confie de fonder son église, il l’appelle Pierre. La pierre est à la fois le lien entre la terre et le ciel, et la maison où demeure le ciel descendu sur terre. Une maison tout à la fois aussi concrète qu’une pierre et aussi spirituelle qu’une lettre. Comme le dit Al-Fatiha, L’Ouvrante, la première sourate, Dieu est le « Maître de l’univers », « Maître des mondes ». En Lui les mondes se répondent et communient, aussi étrangement parfois que la pierre et la lettre. En lui les mondes, et la terre et le ciel, forment une unique maison, famille, descendance et poésie, Sa demeure, dont la porte est ouvrante.

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courant debout dans la joie à sa délivrance

 

Elohim et ha-shamayim ve’et ha’aretz (Genèse 1, 1 : « [Au commencement créa] Dieu les cieux et la terre »

Allāhu Nūru As-Samāwāti Wa Al-‘Arđi (Coran 24, 35) : Dieu lumière des cieux et de la terre

 

Elohim et Allah sont le même mot, l’un hébreu l’autre arabe : El (ici en hébreu à la forme pluriel) signifie Dieu et se trouve dans le lah de Al-lah (le Dieu)

shamayim et samawati sont le même mot, l’un hébreu et l’autre arabe : cieux

aretz et ardi sont le même mot, l’un hébreu et l’autre arabe : terre

ve et wa sont aussi le même mot dans les deux langues : et

 

Nurun ala Nurin : Lumière sur Lumière. Le Coran est Lumière sur la Lumière qu’est la Bible. Leurs langues sont sœurs et épouses d’un même Dieu. Eaux d’en haut et eaux d’en bas, comme dit la Genèse (1, 7), au confluent des deux océans comme dit le Coran (18, 60), l’homme se retrouve dans le même et unique lit de la Vérité, torrent courant debout dans la joie à sa délivrance.

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Du christianisme, de la colonisation et du salut dans l’islam

Le problème de la civilisation chrétienne (mais pas forcément de tous les chrétiens) c’est qu’elle ne supporte le Christ que cloué sur la Croix, martyrisé ou du moins immobilisé, neutralisé. C’est-à-dire qu’il lui faut, pour pouvoir survivre à la mort du Christ, inconsciemment perpétuer continuellement son sacrifice qui, croit-elle, la sauve. Il lui faut perpétuellement sacrifier une partie de l’humanité, et particulièrement parmi ceux qui, comme Jésus, sont les plus proches de Dieu, ou de la vie telle qu’elle nous fut donnée par Dieu.

La civilisation chrétienne vit à contre-sens total sa propre religion. Si le salut lui vient du Christ, c’est seulement par son geste d’amour, par sa vie donnée – et reprise – volontairement par lui-même, et par nul autre. Alors qu’elle s’obstine à vouloir toujours le remettre et l’adorer en Croix, de par sa propre volonté à elle. J’ai vécu personnellement dans mes rapports avec l’Église cette volonté de colonisation de mon être, d’exploitation de mon travail et de crucifixion de ma personne. Comme Jésus je suis allée jusqu’au bout de la démarche par amour pour un peuple qui me faisait pitié, comme tout peuple, par amour de toute l’humanité. J’ai subi volontairement tout en me battant d’un bout à l’autre pour arriver à leur faire ouvrir les yeux, comprendre, changer – ainsi que le dit l’Évangile, « ils verront celui qu’ils ont crucifié », et cela devrait les éclairer. Je ne crois pas que beaucoup en aient été éclairés, mais peut-être la lumière finira-t-elle par leur parvenir, plus tard. Comme Jésus, qui m’habite complètement, ma vie je l’ai donnée et je l’ai reprise, librement.

Maintenant je vois, plus profondément que dans la vision politique que j’en avais depuis toujours, ce qui est fait aux petits et aux étrangers de ce monde.  J’ai rejoint ma vraie religion, l’islam, la plus pure et la plus naturelle qui soit, la plus saine. Oui l’islam a raison, Dieu n’a pas permis que Jésus meure sur la croix, sinon en apparence seulement. Il est vivant, avec tous les prophètes et avec le Prophète, avec eux nous serons ensemble pèlerins du seul Hajj, celui qui relie et réunit les hommes sans les discriminer ni les coloniser, pour les conduire dès ici-bas dans la lumière de l’au-delà, la vie d’au-delà des systèmes iniques et trompeurs, la relation nue, franche, bienveillante, de frère à frère dans leur innocence retrouvée.

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Sourate 17, Al-Isra, Le Voyage Nocturne

terre et ciel du Sud, reçu tout à l'heure par mail

 

Il est l’Audient, le Voyant, est-il dit d’Allah au premier verset de cette sourate qui évoque, en 111 versets, le fameux voyage que fit le Prophète en prière, de nuit, de La Mecque à Jérusalem et de Jérusalem au Ciel, auprès de Dieu. Ici cependant pas de jument ni de détails pittoresques (comme il s’en trouve dans des hadiths), seulement la Vérité nue. Mohammed (le salut et la bénédiction de Dieu soient sur toi), je crois que tu as chevauché à cru une cavale nommée Audience et Voyance d’Allah. C’est le miracle de la prière profonde, et je me rappelle ton voyage quand au cœur de la nuit je pratique comme toi la prosternation, Essoujoud, ce mot qu’on retrouve dans Masjid, la Mosquée, tout lieu où l’on se prosterne, la terre entière étant mosquée pour un musulman. Et aussi quand, me redressant après m’être inclinée, je prononce « Samia Allahou Liman Hamidahou », « Allah entend celui qui le loue », ce mot Samia que l’on retrouve dans l’appellation As-Sami, l’Audient, et aussi dans le nom du fils d’Abraham notre ancêtre, Ismaël, et dans l’antique invocation juive, redite par Jésus, Shema Israël, Écoute, Israël, le Seigneur, notre Dieu, est Un…  Oui un voyage dans la langue de Dieu, dans sa Parole transmise à Ses prophètes. Afin de lui faire voir Min Ayatina, dit ce même premier verset, De Nos Signes, ou De Nos Merveilles… et j’écoute et je vois que c’est le même mot qui dit Versets. Dieu t’a fait voir de Ses versets, des antiques et des nouveaux sans doute, Dieu t’a transmis comme Signes et Merveilles ses Versets, que j’entends que je sens galoper sous moi dans le désert tandis que je les vois, que je les lis…

Voyage de la « mosquée sacrée », Al-Haram, à « la mosquée la plus lointaine », Al-Aqsa, trajet eschatologique de la source de tout à l’ultime, du nombril de monde au lieu de la résurrection, de la boîte noire de La Mecque au lieu où tomba, comme l’avait prophétisé Jésus, le Temple jamais relevé. Trajet de l’Interdit (le sacré) au Révélé. Trajet de la terre au ciel via Jérusalem, de la forme au sens, de l’ouïe au dit, de la vision au réel, du sujet à son objet. Le Coran est la transfiguration de l’Écriture – c’est pourquoi, au premier temps de la Révélation, l’Ange de Dieu ne demande pas à Mohammed d’écrire, mais de lire. Les signes anciens, il va les lire selon la nouvelle révélation. Et dès le deuxième verset, voici Moïse et le Livre. Et dès le verset suivant, Noé et l’Arche.

Puis voici le grand sujet, celui du mal commis par les hommes, de leur non-écoute de la parole de Dieu, et du châtiment terrible qu’ils encourent. C’est sur ce terrain que galope la monture jusqu’à la fin de la sourate, le terrain des fins dernières de l’homme, qui est aussi avertissement contre l’enfer après la mort pour ceux qui auront placé tout leur désir sur terre, suivi le diable qui « ne fait des promesses qu’en tromperie ». Sur le déluge, il y revient, car l’eau est la parole où Dieu fait naître et où il fait sombrer, par où il sauve, aussi. Moïse la traversa avec son peuple, Noé y navigua avec ses fils et les vivants, elle noie les méchants, sauve les justes. « Êtes-vous à l´abri de ce qu´Il vous y ramène (en mer) une autre fois, qu´Il déchaîne contre vous un de ces vents à tout casser, puis qu´Il vous fasse noyer à cause de votre mécréance? Et alors vous ne trouverez personne pour vous défendre contre Nous ! » (verset 69)  Sachez traverser sains et saufs la nuit, accomplir le pèlerinage périlleux qu’est la vie en ce bas monde, tel est le message de cette sourate, aussi centrale que Al-Kahf et Maryam, que nous avons déjà lues. Et pour cela, les derniers versets sont des appels renouvelés à la prière, des conseils pour la faire et louer celui « qui n’a point d’associé en la royauté », celui qu’on ne doit point évoquer comme s’il était tour à tour tel ou tel homme ou l’homme, comme le font ceux qui ont laissé se dégrader complètement leur foi, leur vision de Dieu. Mais Dieu est miséricordieux, il a fait descendre le Coran. Qu’ils le lisent en priant, et ils découvriront : « quand tu lis le Coran, Nous plaçons, entre toi et ceux qui ne croient pas en l´au-delà, un voile (hidjab) tabou » (v.45). Et tu es parfaitement pur et inatteignable, comme Al-Haram, ton lieu de départ en ce voyage nocturne, parfaitement musulman, c’est-à-dire en paix bienheureuse.

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Anges, Éléments et Prophètes

 

L’eau a été là ce vent qui frappe sans souffler, pensai-je en lisant que la gare et des rues à Lourdes sont bloquées par le flot tumultueux qui a frappé la ville, et en me rappelant ma vision, écrite lundi dernier sur ma page facebook :

« Vu des gens tomber.  Dans une gare. Dans la rue.

Le vent frappant sans souffler.

La verdure vivante. »

Le travail n’est pas fini. Dieu emploie les éléments (et certains êtres) pour prophétiser quand et comme Il veut, je l’ai vu plusieurs fois de mes propres yeux de chair, et notamment une autre fois à Lourdes lors de la visite du pape, où cela s’est produit par la nuée. Personne ne l’a vu ni ne veut le croire, parce que personne ne sait plus ce qu’est réellement Dieu. Comment ses anges agissent. Comment croire qu’Il est le Créateur de l’univers et en même temps qu’il ne peut pas le diriger, agir par lui quand il le veut ? Je ne dis pas que toutes les manifestations naturelles viennent volontairement de Lui, pas plus que tout ce que nous faisons ne vient de Lui. Il en est de Dieu avec nous et avec l’univers comme de nous avec notre corps. Tout le travail de notre corps pour nous maintenir en vie, respiration, circulation sanguine etc, se fait de lui-même – mais n’empêche pas que nous puissions aussi agir volontairement par notre corps, faire des gestes délibérés. Il faut lire les Livres sacrés dans l’esprit et non à la lettre, mais il faut les lire comme Révélations et non comme récits légendaires.

Je reviens bientôt avec une lecture de la sourate 17, promise hier et depuis notre dernière lecture du Coran, où Dieu parle vraiment, avec cet élément vivant et lié à l’eau qu’est la langue.

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Prélude au voyage nocturne

Jardin des Plantes, photo Alina Reyes

 

La philosophie explore le continent humain, y repère les limites de l’homme et les ayant repérées, les lui assigne. La philosophie préfère l’idéal au réel, la tension à la réalisation. D’une façon ou d’une autre, elle finit toujours par voir l’homme comme un être tendu vers le néant, un “être-pour-la-mort”.

La religion vise derrière la réalité le réel, derrière l’apparence morbide la source vive. Ainsi franchit-elle les limites de l’homme, et les ayant franchies le conduit-elle à son affranchissement ; et par son affranchissement à son accomplissement. La religion voit l’homme comme être-pour-la-vie, être dépassant la mort.

Je ne parle pas ici de limites morales, bien entendu. Celles-ci, la religion les pose, au contraire. Et c’est justement en délimitant clairement le cadre moral qu’elle permet le dépassement de la mort en l’être et la croissance de l’être, qui ne peut avoir lieu que dans le règne de Dieu, c’est-à-dire de sa vérité, où le bon et le mauvais sont distingués. Car le mal tue, physiquement ou symboliquement. Alors que le bon, le juste, est l’ADN de la vie, le seul chemin qui la porte et la transmet.

Le cadre moral est en réalité le Verbe de Dieu, sa Loi. Sa Loi inscrite en tout être vivant, que l’homme connaît lors de sa conception, et dont il peut perdre l’assurance quand il se laisse griser par sa liberté. L’homme se trompe de franchissement. Il croit pouvoir franchir les limites morales, alors que c’est comme franchir le bord du gouffre. L’infini est au contraire dans le franchissement perpétuel et toujours renouvelé de la nuit.

Nous parlerons bientôt de la sourate 17, Le voyage nocturne.

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Sourate 18, Al-Kahf, La Caverne (3). Ses enseignements politiques

Jardin des Plantes, photo Alina Reyes

 

Comprendre ce qu’est, dit et révèle le prodige que sont la Bible, l’Évangile et le Coran, c’est comprendre ce qu’est Dieu, qui il est et ce qu’il veut. C’est bannir la possibilité de l’instrumentaliser. C’est reconnaître qu’en Lui seul réside notre histoire, notre être et notre devenir. Et qu’il est donc de notre devoir absolu d’aider les hommes à comprendre Sa parole, son sens qui n’est pas figé dans le temps mais au contraire vivant, évoluant comme un organisme, un arbre de vie qui jamais ne cesse de produire des fruits beaux et bons à contempler et à manger, pour quiconque va vers lui avec la permission des anges qui en gardent l’accès.

Nous l’avons montré dans nos lectures précédentes, la sourate Al-Kahf n’est pas seulement au centre phonologique du Coran, elle en est comme une matrice, à l’image de ce qui fait son titre, cette Caverne où mûrit la résurrection. C’est en s’isolant lui-même dans une grotte que le Prophète a commencé à recevoir la révélation, signe de résurrection pour son peuple et lui. Or que se trouve-t-il dans ce centre du Livre autour duquel nous tournons comme autour de la Kaaba ? Au centre du centre, nous l’avons dit, un verset qui indique le mystère choquant de la mort. À l’entrée ou au déploiement du centre, une histoire chrétienne de résurrection, celle dite des Sept Dormants d’Éphèse. Suivie d’une parabole sur le sens de l’existence, puis d’une plongée dans les eaux célestes avec Moïse, et enfin d’une expédition aux confins de l’humanité. Une succession de récits de plus en plus énigmatiques, conclue par l’annonce eschatologique du Jour où toutes les âmes auront à répondre à l’appel.

Telle une pierre noire au milieu du Livre, Al-Kahf rayonne au secret d’une intense énergie spirituelle, celle qui transporte quiconque s’en approche dans la voie de la résurrection, transforme la mort en vie, la finitude en vie éternelle. Le Coran tout entier rayonne de ce rayonnement puisé en son centre qui est partout, tout en se trouvant résumé et imagé en Al-Khaf, sourate récitée tous les vendredis. Nous y reviendrons, continuerons à y pénétrer plus avant. Pour aujourd’hui, notons que le sens eschatologique du texte ne nous empêche pas d’y voir aussi un enseignement politique. D’après ce qui nous est montré dans La Caverne, comment devons-nous nous comporter au sein de la Cité terrestre ?

Les histoires ou paraboles successives désignent clairement le mal causé par les abus de pouvoir des hommes. Dans le premier récit, les jeunes gens sont confrontés à la dictature d’une idéologie idolâtre. Face à sa force brutale, se soumettent-ils ? Non. Ils se retirent ensemble. Non pour mourir ou disparaître, mais pour ne pas laisser corrompre leur foi, leur innocence. Leur voilement par la caverne est un témoignage. Le monde veut les forcer à se nier en se faisant discrets ? En se réfugiant en Dieu, dans ce rocher biblique, cette caverne qui est aussi temple, autel, mosquée, ils traversent les siècles et les barrières, deviennent un signe aussi visible que l’étoile au-dessus de la grotte de la Nativité.

Cependant la réaction au monde mortifère ne consiste pas seulement dans le retrait. L’histoire des deux hommes au jardin enseigne que le comportement dominateur, suffisant et méprisant du riche finit par le perdre. Comment réagit le moins favorisé à l’arrogance du dominant ? Non pas en se taisant, mais en lui rappelant les droits de Dieu, sans hésitation ni timidité, en prenant le temps d’argumenter, démontrer, affirmer le vrai.

Dans l’histoire suivante Moïse, en cheminant sous la guidée d’un envoyé de Dieu nous enseigne comment continuer à progresser et à garder la foi même quand l’iniquité à l’œuvre dans le monde tendrait à nous en détourner. Car si l’on rencontre souvent, en plus de l’iniquité des hommes, une apparence d’iniquité de Dieu, c’est seulement parce qu’on en ignore le sens. Le récit constitue donc pour notre vie terrestre, notre politique en ce monde, une incitation à garder la foi et à chercher à pénétrer plus avant dans la connaissance. Le dernier, énigmatique et bref récit des expéditions de Dhu’l-Qarneyn aux confins de l’humanité confirme la nécessité de cette quête de la connaissance, qui est aussi voyage à la rencontre de l’autre.

Nous reviendrons bien sûr de façon plus détaillée sur ces récits. Avant cela nous serons sans doute appelés par la sourate précédente, Le voyage nocturne. D’ici là nous pouvons récapituler les enseignements politiques de La Caverne : se faire témoins de la lumière en se retirant des systèmes idolâtriques ; répondre à l’arrogance par des paroles de vérité ; continuer à avancer dans la connaissance.

Selon le Coran, Dieu seul sait combien ils étaient, dans la caverne. Peut-être trois, est-il dit d’abord. Et je songe : un juif, un chrétien et un musulman, attendant de ressusciter ensemble de leur engourdissement dans un monde troublé ?  Peut-être sept, ou plus, dit encore le texte. Peut-être bien toute l’humanité, réunie dans sa diversité ?

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Précédentes lectures de cette sourate: ici.