être

en Turquie. Photo Alina Reyes

 

Que la langue déferle à la lèvre de l’être,
Qu’elle abreuve les soifs, qu’elle lave les plaies,
Qu’elle prenne d’amour les hommes et les féconde !

Qu’elle baigne les corps qui s’apprêtent à naître,
Qu’elle ouvre les regards, que montent dans les baies
Les larmes et les chants qui consolent le monde !

Qu’approche le pays dont l’amour est le maître,
Que s’animent les cieux, que vienne la nuée
Nous rendre à la lumière, et que la grâce abonde

Aux bordures du temps où nos yeux se pénètrent.

 

Voyage

à Nîmes. Photo Alina Reyes

 

Luxe de calme et de beauté, ma barque

fend les eaux poissonneuses à profusion,

à volonté, à vif, je suis l’étrave

et mon verbe, ma phrase l’étendue

scintillante au soleil des fruits sauvages

qu’on trouve au printemps dans les bois, des fraises

minuscules qui éclatent entre langue

et palais, pleurant leur joie aux papilles

du jour. Ma barque va, béatitude.

Dans sa travée les milliards de poissons

qu’elle engendre se transportent avec elle,

pont d’étoiles jaillissant de la mer,

dans l’infini des siècles que nous sommes,

milliards de mains entrelacées d’amour.