Saurez-vous être nu ?

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photo Alina Reyes

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L’aurore est nue, elle vient de naître. Le jour l’habillera, la nuit l’enveloppera. Mais l’aube, mon âme, est plus que nue. Je suis l’aube qui veille sous tous vos états du jour et de la nuit.

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« Ce Jour-là, mis à nu (ou : sortant de leurs tombes), ils ne pourront rien dissimuler à Dieu de ce qui les concerne. À qui appartient le royaume en ce Jour ? À Dieu, l’Unique, le Contraignant. 

 et Dieu juge selon la Vérité, tandis que ceux qu’ils invoquent en dehors de Lui sont dans l’incapacité de juger (ou : de décider) de quoi que ce soit car Dieu [Seul] est Celui qui entend et qui voit tout.» Coran 40, L’Indulgent, v. 16 et 20 (trad. AbdAllah Penot)

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« La grâce n’exclut pas la justice. Elle ne change pas le tort en droit. Ce n’est pas une éponge qui efface tout, de sorte que tout ce qui s’est fait sur la terre finisse par avoir toujours la même valeur. Par exemple, dans son roman « Les frères Karamazov », Dostoïevski a protesté avec raison contre une telle typologie du ciel et de la grâce. À la fin, au banquet éternel, les méchants ne siégeront pas indistinctement à table à côté des victimes, comme si rien ne s’était passé. Je voudrais sur ce point citer un texte de Platon qui exprime un pressentiment du juste jugement qui, en grande partie, demeure vrai et salutaire, pour le chrétien aussi. Même avec des images mythologiques, qui cependant rendent la vérité avec une claire évidence, il dit qu’à la fin les âmes seront nues devant le juge. Alors ce qu’elles étaient dans l’histoire ne comptera plus, mais seulement ce qu’elles sont en vérité. » Benoît XVI, Spe Salvi

Le lion va se lever

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C’est mon premier Ramadan, et il est bon. J’aime ces longues journées, rendues plus longues de n’être pas rythmées par les repas, de conférer au corps et à l’esprit un ralentissement dû à la brièveté des nuits, à la chaleur de l’été, au fait de jeûner. J’aime ces longues nuits, plus longues parce que les veilles y sont longues, les réveils plus précoces et suivis d’encore un grand temps avant le lever du soleil. Jour après jour, nuit après nuit, la paix du cœur s’approfondit, la joie se fait toujours plus douce. Je suis la seule de ma famille à faire Ramadan et cette année je ne suis pas allée chercher de contacts à l’extérieur, avec d’autres musulmans, mais même de cette façon minimale, c’est très bien, très bénéfique, aisé, léger. J’ai rompu mon jeûne une fois où j’ai été déshydratée, je rattraperai ce jour dans l’année avec plaisir. J’ai passé du temps à lire le Coran, comme il se doit, par les sourires et par les dons j’ai essayé de ne pas oublier les gens dans le besoin, comme il se doit aussi. La prière rituelle du matin a toujours été faite avec les anges et les hommes, dans une immense grâce. J’ai expérimenté la nuit du destin, je la connaîtrai sûrement encore. Elle vient en veillant, mais pas seulement. À force d’être dans la grâce, elle vient en dormant aussi, vous apportant rêves et visions venus du Ciel. Encore une semaine, et le nouveau croissant de lune marquera la fin de ce temps. Je sens que toutes mes forces de lion me reviendront, pour les tonnes de choses que je veux faire. La vie est inlassablement fantastique et bonne.

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Et cette nuit, même à Paris, on voit les étoiles ! Par ma fenêtre, la Grande Ourse et Cassiopée !

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La nuit d’Al-Qadr

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tout à l’heure au Jardin des Plantes, photo Alina Reyes

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La nuit d’Al-Qadr vaut mieux que mille mois, dit le Coran (97, 3). Mille mois qui bien sûr ne comporteraient pas de nuit d’Al-Qadr, précisent les savants. Lesquels rappellent aussi que dire qu’elle est meilleure que mille mois n’exclut pas qu’elle soit meilleure que beaucoup plus que mille mois. La nuit d’Al-Qadr revient à chaque Ramadan, mais personne ne sait quand. Le Coran n’aime pas donner ce genre d’indication. Rappelons-nous la longue nuit où furent plongés les dormants de la Caverne (sourate 18). Dieu seul sait, nous est-il dit, combien de siècles et de jours elle dura, et même combien furent ces endormis dans la mort qu’Il ressuscita. Le Coran rappelle à l’homme ce qui le dépasse. Et qui pourtant le guide avec miséricorde.

N´as-tu pas vu comment ton Seigneur étend l´ombre? S´Il avait voulu, certes, Il l´aurait faite immobile. Puis Nous lui fîmes du soleil son indice,

puis Nous la saisissons [pour la ramener] vers Nous avec facilité. (25, 45-46)

« Son indice » peut aussi se traduire « celui qui guide vers elle ». Créatures, nous sommes ombres du Seigneur, et nous nous repérons à Lui, notre soleil. Mais ce qui est ici dit, c’est que c’est Lui qui nous conduit à nous-mêmes, tout en nous guidant, en nous mouvant, jusqu’au moment où Il nous ramène à Lui.

Mille mois sans nuit d’Al-Qadr, cela n’existe pas, puisqu’elle a eu lieu. Elle a eu lieu en Dieu, donc de toute éternité, ou dès le commencement, c’est pourquoi on ne peut la dater. Elle est la descente de l’Être, de la Lumière sur la terre, où elle projette ses ombres. Tout à la fois descente de la Lumière, Parole de Dieu, et matrice de toutes ses ombres, formant nuit. Puissance, mesure, destin. Telles sont, dans l’ordre, les significations de Qadr. Elle est ce que nous pouvons éprouver dans la nuit de ce monde : la puissance de Dieu qui, en descendant, donne à notre être sa mesure, son destin.

La nuit d’Al-Qadr vaut mieux que mille mois sans nuit d’Al-Qadr. Or mille mois sans nuit d’Al-Qadr n’existent pas, sont néant. La nuit d’Al-Qadr vaut mieux que le néant. La nuit d’Al-Qadr sort l’homme du néant comme Dieu sortit les justes de leur longue nuit dans la Caverne. Dans la nuit d’Al-Qadr Dieu vient à la rencontre de l’homme comme au zénith le soleil saisit l’ombre pour la ramener vers le Seigneur. Nous sommes en Dieu, c’est pourquoi il en est ainsi. Voici la mesure et voici le destin, en Dieu.

Dans la nuit d’Al-Qadr, Dieu fit descendre le Coran d’un bloc, de sa matrice au premier ciel. De là l’Esprit Saint, Ar-Ruh (97, 4), l’ange Gabriel, le révéla progressivement au Prophète, vingt-trois ans durant. Mais où demeurait-il, avant d’être entièrement révélé aux hommes ? Que sont cette matrice et ce premier ciel où il était gardé ? Respectivement, la Puissance et le En puissance de Dieu. Matrice où se trouve et se crée la mesure de tout, et d’où descend notre destin, écrit en puissance, c’est-à-dire avec toutes ses virtualités, où nous pouvons puiser toute liberté et tout accomplissement. Le Coran fut cet écrit en puissance, avant d’être écrit, puis le temps d’être écrit. Et une fois écrit, il demeure en puissance, comme lecture.

Toute nuit est en puissance nuit d’Al-Qadr. Qui veille dans la nuit d’Al-Qadr, comme les bergers dans la nuit de Noël, voit le ciel s’ouvrir et entend les anges annoncer la bonne nouvelle du salut (Luc 2, 7-21). Une nuit, de sa matrice, le Coran descendit dans une grotte sur le cœur d’un homme attentif au Ciel. Une nuit, de la Vierge Marie, annoncé par l’ange Gabriel, un homme naquit dans une grotte, et c’était le Messie. Je n’établis pas d’équivalence, je lève un peu le voile sur ce qui se passe. Le Coran continue d’être révélé dans le cœur des hommes, le Christ aussi, dans le cœur du monde. La nuit de Noël et la nuit d’Al-Qadr continuent d’être, et d’être Paix jusqu’à l’aube qui va bientôt paraître (Coran 97, 5).

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Bonnes nouvelles

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photos AP ; Paulo Whitaker / Reuters ; AP

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« Reprise des négociations de paix israélo-palestinienne lundi à Washington ».

Très beau travail de François au Brésil. Avec l’appui du ciel, qui a bien fait d’envoyer sa pluie contenter d’un côté les crocodiles et de l’autre obliger les pèlerins à prier jusqu’au bout sur la plage. Je me suis rappelé du moment où ils échouent et dorment sur le sable dans Souviens-toi de vivre, heureux comme des rebaptisés. Ils étaient là, tels trois millions de boat people sauvés, sur la voie de la résurrection. C’est parti.

La prochaine fois, Cracovie. Catholiques, orthodoxes, protestants, tous chrétiens, retrouvons les chemins de l’Europe ancienne, plus centrée, plus tournée vers l’Est, refaisons l’Europe, celle de l’esprit. Avec ses nouvelles composantes. Ne nous replions pas, cessons d’exclure, incluons. François l’a dit en quittant Rio, le Christ prépare le printemps dans le monde entier.

Oui, hâte-toi, fratellino mio.

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Le Vivant

Notre Dame d'Aparecida

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image Alina Reyes (7 août 2012)

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Je me suis soudain rappelé cette image que j’ai faite l’été dernier. Il me semble qu’à ce moment-là je ne connaissais pas encore Notre Dame Aparecida, la toute petite Vierge noire du Brésil. En tout cas si je l’avais connue, et si j’avais voulu la représenter, pourquoi n’aurais-je pas mis les pêcheurs et les poissons, et pourquoi pas une barque normale, au lieu d’une coquille Saint-Jacques ? C’est ainsi, cela vient d’ailleurs. Mais ailleurs est nous-mêmes, où je suis, par où cela passe. J’aime voir les vagues de l’océan qui viennent sur le rivage. À la maison, j’ai une coquille que j’ai rapportée de Compostelle, avec une épée rouge peinte dessus. Je me suis baignée à la Fin des Terres, chez moi longtemps puis au-delà de Compostelle, dans l’eau fraîche de Pâques, parmi les rochers couverts de coquillages vivants.

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Le 12 octobre 1492, Christophe Colomb arrive au Nouveau Monde par une petite île que les Espagnols baptisent San Salvador. Le 12 octobre est aussi le jour de fête de Notre Dame Aparecida, « Apparue ». Comme dit souvent le Coran, il y a dans tout cela des signes pour qui réfléchit. :-)

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