La vie afflue

Quel rêve puissant j’ai fait ! Tour à tour dans la montagne la nuit sous la pluie, chez moi là-haut la montagne avec sa terre sa roche sa forêt son ciel comme mon propre corps, et de grands camions clairs dans le chemin portant leur cargaison inconnue dans des maisons, et aussi à l’aube dans le désert splendide trouvant les cailloux laissés au sol par un camp de pèlerins voyageurs réunis un peu plus loin très nombreux pour prier, désert se couvrant ensuite de végétation, un fleuve puissant passant au milieu, des chevaux courant dans l’eau et marchant à leur suite dans le courant, de l’eau jusqu’à la ceinture, un jeune couple, homme et femme avec leur bébé, puis me voici dans une maison en roseaux pleine de pièces et de vie, où habitent des jazzmen d’Afrique – je suis eux, et de nouveau chez moi là-haut à la montagne et partout…

La fausse lettre

Un coursier m’apporte ce matin un courrier venant de mon éditeur Robert Laffont, portant son étiquette. Il ne me fait rien signer, s’en va aussitôt. Le courrier contient un journal sur la Bourse, qui n’a rien à voir ni avec l’éditeur ni avec moi. J’appelle chez mon éditeur : personne, dans aucun service, ne m’a envoyé un courrier par coursier. J’en conclus qu’il s’agit encore de l’une de ces manœuvres destinées à me signaler la présence occulte des gens qui surveillent mon activité, au quotidien mais aussi chez mes éditeurs, m’empêchant ainsi de publier tant que je ne me rends pas à leur raison, tant que je ne leur livre pas Voyage et la règle des Pèlerins qui va avec. Voilà des années que cela dure, en vain.