La crue à Paris, d’Austerlitz au pont de Tournelle

La Seine transformée en Mississipi et le jardin Tino Rossi en bayoucrue seine paris

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crue seine paris 14SOUS L’EAU LES PAVÉS

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crue seine paris 20les petites traces rouges au fond, à l’arrière-plan de la péniche, sont tout ce qui reste émergé du grand tag sur Nuit Debout : images*crue seine paris 23

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crue seine paris 30le monstre du Loch Ness est de la sortie

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crue seine paris 41les murs ruissellent

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crue seine paris 59ce matin à Paris, photos Alina Reyes

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Après le dégel de la Seine dans Forêt profonde, le débordement de la Seine dans Souviens-toi de vivredans Voyage ce sont, toujours à Paris, les voitures brûlées, puis la ville inondée, avec une scène au même lieu que celui de ces photos. Textes, ponts entre les mondes.

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Actualité des « Grands cimetières sous la lune » de Bernanos (extraits)

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Deux des arrière-petit-fils de Bernanos, antifas, ayant été arrêtés l’autre jour dans l’affaire de la voiture de police brûlée, j’ai eu envie d’aller regarder de nouveau son pamphlet autour de la guerre d’Espagne, dont pas mal d’observations peuvent se lire en regard de la situation d’aujourd’hui, en les adaptant à notre société et à ses « clergés », notamment intellectuels et médiatiques, alors que dans le contexte et sous le prétexte d’un état d’urgence encore renouvelé (avec la présence de soldats armés de mitraillettes dans certaines rues de Paris), le mouvement Nuit Debout et les manifestations syndicales contre la loi travail sont réprimées avec une violence démesurée, sans discernement et inquiétante par la police et la gendarmerie – matraquages, tirs de flash-ball au niveau des visages, utilisation massive et systématique de gaz lacrymogènes, tirs de grenades de désencerclement à hauteur d’homme, tout cela y compris sur des manifestants tout à fait pacifiques, parmi lesquels les blessés se comptent par dizaines.

« La colère des imbéciles remplit le monde. » Telle est l’antienne de ce texte, que je lis en toute liberté, comme tous les livres, y laissant ce que je préfère y laisser, y prenant ce que j’y prends, en l’occurrence les extraits que voici :

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« Le premier prêtre venu, s’il est sincère, vous dira que nulle espèce n’est plus éloignée que la leur de l’esprit d’enfance, de sa clairvoyance surnaturelle, de sa générosité. Ce sont des combinards de la dévotion, et les gras chanoines littéraires qui entonnent à ces larves le miel butiné sur les bouquets spirituels ne sont pas non plus des ingénus. »

« Ne touchez pas aux imbéciles ! Voilà ce que l’Ange eût pu écrire en lettres d’or au fronton du Monde moderne, si ce monde avait un ange. »

« L’idée de grandeur n’a jamais rassuré la conscience des imbéciles. La grandeur est un perpétuel dépassement et les médiocres ne disposent probablement d’aucune image qui leur permette de se représenter son irrésistible élan (c’est qu’ils ne la conçoivent que morte et pétrifiée, dans l’immobilité de l’Histoire). »

« Comment lui ferez-vous entendre [à l’imbécile] qu’il y a un peuple des Pauvres, et que la tradition de ce peuple-là est la plus ancienne de toutes les traditions du monde ? Un peuple de pauvres, non moins sans doute irréductible que le peuple juif ? On peut traiter avec ce peuple, on ne le fondra pas dans la masse. Vaille que vaille il faudra lui laisser ses lois, ses usages et cette expérience si originale de la vie dont vous ne pouvez rien faire, vous autres. Une expérience qui ressemble à celle de l’enfance, à la fois naïve et compliquée, une sagesse maladroite et aussi pure que l’art des vieux imagiers. »

« J’admire les idiots cultivés, enflés de culture, dévorés par les livres comme par les poux, et qui affirment, le petit doigt en l’air, qu’il ne se passe rien de nouveau, que tout s’est vu. Qu’en savent-ils ? »

« On ne refera pas la France par les élites, on la refera par la base. Cela coûtera plus cher, tant pis ! Cela coûtera ce qu’il faudra. »

« Quel anarchiste, ce Bernanos ! direz-vous. »

« Nous n’espérions rien des militaires, et des cléricaux pas davantage. (…) Je voudrais tenir devant moi l’un de ces innocents Machiavels en soutane qui ont l’air de croire qu’on manœuvre un grand peuple ainsi qu’une classe de sixième et prennent, en face de la catastrophe, l’air de dignité offensée du maître d’étude chahuté par ses élèves. »

« Oh ! bien sûr, M. Paul Claudel, par exemple, jugera que ces vérités ne sont pas bonnes à dire, qu’elles risquent de faire du tort aux honnêtes gens. Je crois que le suprême service que je puisse rendre à ces derniers serait précisément de les mettre en garde contre les imbéciles ou les canailles qui exploitent aujourd’hui, avec cynisme, leur grande peur, la Grande Peur des Bien-Pensants. »

« Pour moi, j’appelle Terreur tout régime où les citoyens, soustraits à la protection de la loi, n’attendent plus la vie ou la mort que du bon plaisir de la police d’État. »

« Je m’excuse de remuer ces cendres. Elles sont déjà si froides qu’on ne pourrait se coucher dessus sans mourir. »

« En 1207, par exemple, un petit homme commençait à courir les routes de l’Ombrie. Il annonçait aux hommes une nouvelles très surprenante, l’avènement de la Pauvreté. (…) Les dévôts sont des gens malins (…) le Saint une fois mort, que voulez-vous ? Ils se sont trouvés tellement occupés à l’honorer que la Pauvreté s’est perdue dans la foule en fête (…) aux applaudissements des riches, stupéfaits de s’en tirer à si bon compte. Ouf !… Après quoi ce fut, comme on dit, une fameuse reprise des affaires ! Jamais la vente des indulgences n’avait rapporté aussi gros. Vraiment, ça ne retient pas votre attention, cette bacchanale de la Renaissance, les ruffians bariolés, princes, ministres, astrologues, cardinaux, peintres et poètes, drapés d’or ou bardés de fer, tous mangés par le mal napolitain, menant leur ronde infernale, avec des hennissements, autour de la tombe du pauvre des pauvres, découvreur d’Amériques invisibles, mourant au seuil de ces jardins enchantés ?
(Il est vrai que par une délicate attention le supérieur des Franciscains, fait Grand d’Espagne par les Rois Catholiques, recevait pour asile l’un des plus magnifiques palais de Madrid). »

« Il y a un moyen de tout arranger : organisez le culte du Pauvre Inconnu. Vous l’enterrerez place de la bourse et désormais on ne verra plus à Paris un roi de l’acier, de la houille ou du pétrole qui ne considère comme un devoir de venir déposer une couronne sur la dalle sacrée. »

« Le monde va être jugé par les enfants. L’esprit d’enfance va juger le monde. »

« La vie n’apporte aucune désillusion, la vie n’a qu’une parole, elle la tient. Tant pis pour ceux qui disent le contraire. Ce sont des imposteurs ou des lâches. »

« Il n’est rien de plus haïssable en l’homme que sa prétendue sagesse, le germe stérile, l’œuf de pierre que les vieillards se passent de génération en génération et qu’ils essaient d’échauffer tour à tour entre leurs cuisses glacées. (…) Je ne me sens pas né pour couver un œuf dur. »

« Que peuvent avoir de commun avec un vieux paysan de l’ancienne France ces septuagénaires demeurés aussi ignorants des valeurs de la vie qu’un polytechnicien de vingt ans, ces bêtes à formules et à systèmes qui, même pris dans les rets de la paralysie sénile, restent aussi turbulents sur leurs pots qu’au temps où ils présidaient des conférences économiques ? Cet ordre est le leur. On souhaiterait qu’ils crevassent ensemble, tous les deux, très tranquilles. Mais voilà où nous commençons à ne plus nous entendre, eux, et nous. Ils ne veulent pas. »

« jeunes gens (…) c’est votre pensée, mes amis, qui sent la tisane et l’urine, comme un dortoir d’hospice. Plus précisément vous n’avez pas de pensée, vous vivez dans celle de vos aînés, sans jamais ouvrir les fenêtres. »

« J’ai toujours pensé que le monde moderne péchait contre l’esprit de jeunesse, et que ce crime le ferait mourir. »

« Ce n’est pas le désordre qu’ils réprouvent, c’est le bruit que fait le désordre, et ils crient : Silence ! Silence ! de leurs pauvres voix tantôt plaintives et tantôt menaçantes. Si les revendications ouvrières les jettent hors d’eux-mêmes, c’est parce qu’elles agacent leurs nerfs. »

« Hommes d’ordre, le peuple n’est pas si facile à séduire que les innocents paroissiens de vos Ligues. Lorsque vous parlez d’ordre aux classe moyennes, elles comprennent de suite, car depuis cent cinquante ans, sous n’importe quel régime bourgeois, ce mot a toujours signifié pour elles prospérité du commerce et de l’industrie. Mais il ne sonne pas de même aux oreilles populaires. »

« Jeunes gens qui lisez ce livre, que vous l’aimiez ou non, regardez-le avec curiosité. Car ce livre est le témoignage d’un homme libre. »

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Loi Travail : manif du 19 mai en une 50aine d’images

manif 19 mai 2016en allant rejoindre la manif à Austerlitz, j’ai photographié cette vitrine de pharmacie, songeant que mes yeux seraient peut-être irrités bientôt… et ce fut le cas, j’ai fini par quitter la place d’Italie, tout à la fin, quand j’ai « mangé » du gaz d’un peu trop près… quoique tout fût assez calme autour de moi, sauf quand certains se sont mis à courir pour fuir les grenades. Je suis partie à regret mais je ne suis ni équipée ni taillée physiquement (note du soir : j’ai toujours mal aux yeux, les petites réactions allergiques de la peau sont parties mais j’ai eu mal aux reins pendant plusieurs heures au retour) pour insister dans ce genre de situation (ou bien une prochaine fois je m’équiperai un peu, si je veux rester plus longtemps – puisque l’usage de telles armes est devenu monnaie courante de la part de la police. Je manifeste depuis mes 17 ans, je n’avais jamais vu ça). Depuis Austerlitz j’ai défilé avec différents groupes du cortège, et tout le monde était tranquille ou à peu près. J’ai évité de photographier ceux qui préfèrent ne pas être photographiés, les jeunes à capuche et foulard que la police pourrait identifier, mais les seuls moments désagréables et inquiétants furent ceux où je me suis trouvée, en naviguant pour faire des images, tout près des flics. En quittant la place, et alors que les grenades lacrymogènes (qui comme toujours ont fait quelques blessés) continuaient à péter, j’ai vu ce tout jeune homme interpellé, par terre menotté dans le dos, c’était infiniment triste. manif 19 mai 2016 2 manif 19 mai 2016 3 manif 19 mai 2016 4les deux entrées du Jardin des Plantes de ce côté avaient été ferméesmanif 19 mai 2016 5 manif 19 mai 2016 6 manif 19 mai 2016 7 manif 19 mai 2016 8 manif 19 mai 2016 9 manif 19 mai 2016 10 manif 19 mai 2016 11 manif 19 mai 2016 12 manif 19 mai 2016 13 manif 19 mai 2016 14 manif 19 mai 2016 15 manif 19 mai 2016 16 manif 19 mai 2016 17 manif 19 mai 2016 18 manif 19 mai 2016 19 manif 19 mai 2016 20 manif 19 mai 2016 21 manif 19 mai 2016 22 manif 19 mai 2016 23 manif 19 mai 2016 24 manif 19 mai 2016 25 manif 19 mai 2016 26 manif 19 mai 2016 27 manif 19 mai 2016 28 manif 19 mai 2016 29 manif 19 mai 2016 30 manif 19 mai 2016 31 manif 19 mai 2016 32 manif 19 mai 2016 33 manif 19 mai 2016 34 manif 19 mai 2016 35 manif 19 mai 2016 36la vitrine de Monop a un peu mangé, GrosBill et l’église avaient fermé boutiquemanif 19 mai 2016 37 manif 19 mai 2016 38 manif 19 mai 2016 39 manif 19 mai 2016 40 manif 19 mai 2016 41 manif 19 mai 2016 42 manif 19 mai 2016 43 manif 19 mai 2016 44 manif 19 mai 2016 45 manif 19 mai 2016 46 manif 19 mai 2016 47 manif 19 mai 2016 48 manif 19 mai 2016 49 manif 19 mai 2016 50 manif 19 mai 2016 51 manif 19 mai 2016 52 manif 19 mai 2016 53 manif 19 mai 2016 54 manif 19 mai 2016 55 manif 19 mai 2016 56 manif 19 mai 2016 57aujourd’hui à Paris, photos Alina Reyes

photos libres de droit sur site non commercial, mentionner l’auteur et la source svp

à lire sur Paris Luttes Info un récit de la manif d’un bout à l’autre

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Nuit Debout dans la vallée, sous les étoiles filantes : sa véritable philosophie

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Cette nuit a eu lieu une pluie d’étoiles filantes. Les habitants de l’étroite, sauvage et splendide vallée d’Aspe, dont quelques-uns s’étaient réunis en soirée pour une Nuit Debout, ont dû en voir passer, dans leur ciel non pollué de lumières artificielles. Comme tous les habitants des campagnes, loin des villes tapageuses, orgueilleuses et superficielles.

Cette nuit j’ai compris que rien de bon ne viendrait de la Nuit Debout parisienne. Elle était assez bien partie, mais soumise à trop d’infections, elle n’a pas su réagir à temps, se débarrasser de ses parasites entristes et manipulateurs de plus en plus nombreux. L’autre jour un groupuscule identitaire d’extrême-droite, qui défilait avec les soraliens et autres fascisants à la manif Jour de colère, s’est même installé sur la place, sans que personne ne réagisse. Avec la complicité des organisateurs du mouvement ou à cause de leur ignorance politique ? Je l’ignore. J’ai alerté sur les réseaux sociaux, on ne m’a répondu que par le mépris. Ceci n’était évidemment qu’une toute petite pointe de l’iceberg. Des forces réactionnaires, voire pire, travaillent Nuit Debout à République, la Gazette du journal et d’autres militants en viennent à prôner l’amitié avec les forces de police, malgré leur brutalité qui a blessé nombre de manifestants. Une violence délibérée qui a d’ailleurs fait son effet : la révolte est écrasée, Nuit Debout contenue dans sa place avec la permission de 22 heures n’est plus que l’ombre d’elle-même.

Mais tout n’est pas perdu pour autant : Nuit Debout, ce n’est pas République. Le travail de ce mouvement, qu’il continue ou non à s’appeler Nuit Debout, grandira très logiquement non depuis Paris, depuis la tête et les chefs du pays, mais depuis ses villages, ses banlieues, ses villes de province. C’est dans les petites communautés, dans les quartiers, dans les villages, parmi les gens qui sont en fait les plus libres, à savoir les humbles, les non-soumis au système, que se développera une nouvelle façon de se gouverner, une nouvelle démocratie. Cela existe déjà dans certains pays pauvres, des localités se sont prises en main ici et là pour assurer leur vie collective et individuelle, leurs relations sociales et leurs échanges entre particuliers et entre communautés. C’est ainsi que de place en place (et non depuis une grande place sinistre comme République, qui se voudrait centrale et symbolique – le symbole faisant ici office de chef – où tout en refusant un système représentatif l’ensemble est soumis malgré lui à des forces incontrôlées qui le dépassent), de place en place à travers le monde et à travers le pays continuera à s’apprendre, s’inventer et s’étendre la sagesse du peuple, une démosophie, véritable philosophie, à savoir philosophie en acte, vécue. Car telle est la nature de la philosophie. Il suffit de savoir que Socrate pensait en déambulant le long d’un cours d’eau avec ses disciples pour comprendre sa philosophie. Il suffit de savoir que Diogène, depuis son tonneau, dit à Alexandre le Grand venu le voir : « ôte-toi de mon soleil », pour connaître sa philosophie. La nouvelle philosophie naîtra ainsi non de spéculations coupées du réel, mais de la vie même, de l’œuvre même de vie – rejoignant ainsi l’antique et véritable essence de la philosophie, celle qui fit une éclatante civilisation, à laquelle nous devons l’invention de la démocratie. La démocratie est moribonde, la nouvelle démocratie se prépare.

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