Accords, accord !


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Je suis retournée chanter, dans l’un des chœurs dont je faisais partie il y a quelques années, avant mon exil. D’abord nous avons travaillé When I’m gone, comme les collégiens de cette vidéo. Chanté à un rythme beaucoup plus rapide, très agréable dans les jambes. Puis j’ai eu la divine surprise de découvrir qu’ils étaient en train de commencer à apprendre le Kyrie de la Messe en si de Jean-Sébastien Bach, une œuvre que j’adore. Je ne l’ai jamais chantée, mais à force de l’écouter je connais par cœur la partition des sopranos. Je suis alto, je dois donc tout apprendre. Quelle extraordinaire merveille. Chaque voix est un chef-d’œuvre.

Ensuite je suis allée boire un thé à la mosquée, avec le chef et un ténor. Les moineaux faisaient leur concert, l’un a volé si près de mon visage que j’ai senti le bout de son aile me frôler.

Être d’accord avec Dieu suffit.

Manif à Austerlitz (et reportages photo et vidéo)

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J’ai traversé le Jardin des Plantes qui venait d’ouvrir, à huit heures du matin, dans la pénombre. Du bout de l’allée j’ai zoomé pour photographier les premières personnes qui le traversaient, souvent des parents accompagnant leurs enfants à l’école, et aussi quelques joggers ou travailleurs avec ou sans serviette. La photo est floue mais je l’aime bien ainsi.

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Je suis arrivée à la gare d’Austerlitz un peu en avance pour le reportage photo que je voulais faire, sur la manifestation d’agents de nettoyage en grève depuis deux semaines pour protester contre les conditions de travail qui leur sont faites depuis que la SNCF a délégué le travail à des sociétés privées.

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Ils étaient peu nombreux, mais ils se sont déplacés dans toute la gare en faisant beaucoup de bruit, avec des sifflets, des bidons et des bâtons pour taper dessus, un djembé, un porte-voix… Et des journaux qu’ils découpaient en petits morceaux pour les jeter sur le sol. (Voir mes reportages photo et vidéo pour Citizenside, avec leur petit article).

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Après les avoir accompagnés pendant plus d’une heure, je suis rentrée en faisant encore quelques photos dans la rue et en achetant une baguette pour le petit déjeuner.

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photos Alina Reyes

Ce qui se passe (et les photos de la Marche pour la vie)

Mon reportage photo sur la Marche pour la vie est visible ici en diaporama sur Citizenside.

Je suis partie en reportage photo à la Marche pour la vie. J’ai remonté la manif de Denfert jusqu’après Montparnasse, puis dans l’autre sens. Il m’a semblé qu’il y avait environ 20 000 personnes, souvent en famille et de toutes générations (le cortège était long mais peu dense). Une dramaturgie peut-être un peu excessive quand il est demandé aux manifestants de mettre sur leur bouche le bâillon rouge qui leur a été distribué (qu’est-ce que je devrais dire !) et de se tenir en silence droit les mains derrière le dos comme ceux qu’on va fusiller.

J’ai entendu ce chiffre : une naissance sur cinq en France est interrompue par un avortement. Je vérifie sur internet, c’est exact. Pour moins de 800 000 naissances, plus de 200 000 avortements par an. C’est quand même de la folie. Seulement, c’est de la folie aussi d’être à la fois contre l’avortement et contre la contraception.

Tout au bout du défilé, à la fin, des gens prient Notre-Dame des tout-petits. Une femme me saisit par le bras, me dit : « Retrouvez Dieu, Madame ! Vous écrivez bien, mais retrouvez Jésus ! » Puis elle ajoute une phrase dont j’entends seulement le mot « Mahomet ». Je lui réponds en souriant « ne vous inquiétez pas, Jésus est vivant » – mais elle est déjà partie, sans écouter. Ah, si elle savait… Les gens devraient mieux étudier et réfléchir, ils comprendraient ce qui se passe.

Droit des cuissées et insulte aux êtres libres

Je me promenais bienheureuse, un putain de connard sans raison m’a insultée. Il a arrêté sa voiture, m’a appelée pour me demander un renseignement. Mais en fait, ce qu’il m’a demandé, c’est si j’avais quelque chose à vendre. Il a ajouté, goguenard : « vous comprenez ce que je veux dire, hein ? » Et avant que j’aie eu le temps de lui dire quel gros con il était, il a redémarré. Un mec arabe d’une quarantaine d’années, j’étais habillée tout à fait sobrement, en jeans et en manteau, et mes cheveux gris ne l’ont pas dissuadé de m’insulter, même un niqab n’y aurait pas suffi. En rentrant à la maison je regarde les titres de l’actualité, je me dis et de l’autre côté c’est le droit des cuissées, tous les mecs qui ont un quelconque pouvoir estiment que les femmes leur doivent d’être séduites, et les femmes qui rentrent dans leur jeu en sont récompensées d’une façon ou d’une autre, quand ce n’est plus l’une c’en est une autre et ainsi de suite, elles sont aussi responsables de l’indignité faite aux femmes que celles qui portent le voile pour se conformer à la loi des hommes. Femen, cela veut dire cuisse, voilà en effet ce que sont nombre de femmes pour nombre d’hommes, dont ceux qui soutiennent les Femen. Celles qui refusent ça le paient cher, voire très cher, comme d’ailleurs les hommes qui refusent les rapports de sujétion et d’intérêts entre hommes. Bande de misérables.

Un rêve

J’ai fait un rêve merveilleux. D’abord je roulais longuement en voiture, jour et nuit, par tous les temps, admirant le paysage, faisant des pauses, repartant… Les paysages étaient beaux et colorés comme des tableaux, beaucoup de nature et aussi des cités qui apparaissaient, une merveille de voyage. Puis j’arrivais au Vatican, où je prenais mon service de femme de ménage, très tôt le matin. Je mettais ma blouse blanche de chimiste, celle que je mets à la maison pour peindre, et je commençais à laver le sol d’un immense hall. J’étais seule et c’était vraiment très sale, je n’arrivais pas à tout enlever, à mesure que j’étais passée d’autres saletés apparaissaient, il y avait même des branchages morts, c’était vraiment beaucoup de travail. Mais j’avançais, toute joyeuse.

J’étais presque au bout du hall, et sachant qu’il allait falloir que je recommence depuis le début. Un homme de ménage est arrivé, celui que j’ai photographié un jour en train de balayer dans la grotte de Lourdes, autour de la montagne de cierges. Il m’a informé que j’avais pris mon service très en avance, que les équipes allaient arriver maintenant en fait, et que je ne portais pas la blouse réglementaire. Il m’a dit de ne pas m’inquiéter de n’avoir pas tout nettoyé, c’était normal, les équipes qui arrivaient allaient prendre la relève pour finir le travail. Et voilà soudain qu’un homme arrive vers moi, c’est Benoît XVI. Je suis si contente de le voir ! Alors qu’il est encore à quelques mètres, je lui dis tout simplement, toute sourire : « bonjour, vous allez bien ? » Et il me répond sur le même ton tranquille, tout sourire. Nous nous mettons à marcher doucement en parlant de tout et de rien. Au début il était en pape mais en fait il est un homme normal et nous sommes les plus vieux amis du monde. Nous arrivons au bout du hall, la lumière entre à flots par de vastes baies vitrées. Tantôt derrière la vitre et tantôt de l’autre côté, dans l’herbe, nous regardons la route où commence à affluer le peuple, en une intense circulation. Les gens se déplacent en masse car une très grande fête se prépare dans le monde. C’est d’ailleurs pourquoi il me fallait nettoyer ce hall, afin qu’il soit propre pour la célébration, d’autant que pendant ces jours de fête ce sera congé pour tout le monde. Benoît XVI me parle maintenant de son fils, je ne savais pas qu’il en avait un, au début je me dis qu’il a peut-être été marié avant d’entrer dans les ordres, que c’est sûrement pour cela qu’il est si à l’aise avec moi, une femme, que nous nous entendons si bien. Mais en fait il semble que son fils soit encore un petit enfant, ce qui est merveilleux. Je lui demande comment il est venu ici, jusqu’à ce hall où je travaille, et il me dit à pied, ce que je trouve merveilleux.