Message

J’ai un message à vous transmettre.
Il est arrivé ce matin pour vous dans ma tête :
« Dis-leur que je suis parti voir ailleurs si j’y suis.
Qu’ils se démerdent.
Signé : Dieu »
– Mon Dieu, ai-je dit, je ne peux pas leur dire ça !
– Et pourquoi pas ?
– Ça pourrait tomber dans l’oreille de personnes bonnes, justes, gentilles, qui ont besoin de savoir que tu es avec elles !
– Qui ça, tu ?
– Mais toi, Dieu !
– Ne m’appelle pas Dieu. Alors elles sauront que je suis avec elles.
– Quand même, je ne peux pas dire ça.
– Et pourquoi ?
– Ils ne veulent pas me reconnaître.
– Qu’importe ? Ne te connais-tu pas toi-même ?
– Qu’importe ? Je veux qu’ils se connaissent.
– Alors dis-leur que je suis parti voir ailleurs.
– Je leur tendais le miroir, qu’ils se voient en train d’être incapables de me reconnaître. Qu’ils se connaissent, ainsi.
– Pour quoi faire ?
– Pour qu’ils puissent s’en sortir, sortir de leur prison.
– Mais ne t’emprisonnais-tu pas pour eux, dans ce miroir ?
– Ça importe ?
– Hahahahaha !

*

"Moving", acrylique sur toile 61x46 cm

« Moving », acrylique sur toile 61×46 cm

Du Covid à l’hôpital et du yoga selon Carrère et selon Thiellement

Cet après-midi boulevard Blanqui à Paris, photo Alina Reyes

Cet après-midi boulevard Blanqui à Paris, photo Alina Reyes

Hier je suis allée à l’hôpital (visite de routine). Là-bas ils n’ont pas l’air de connaître l’existence du gel hydroalcoolique. Je n’en ai vu nulle part, ni en entrant, ni en sortant. Hall, ascenseur, couloirs souterrains, accueil, salle d’attente, cabine de déshabillage, cabinet de radiologie… rien. Dans la salle d’attente, un infirmier, pour parler à quelqu’un, a rabattu son masque sous son menton. La dernière fois que j’y suis allée, au printemps, c’est le chirurgien (un chirurgien qui a une haute idée de lui-même) qui a fait la même chose pour me parler tout en m’examinant, face à face à trente centimètres l’un de l’autre. Je me suis reculée, il a compris. J’entends dans mon entourage des histoires de gens employés dans d’autres administrations directement dépendantes de l’État et empêchés de télétravailler alors qu’ils en auraient la possibilité ; ou même de personnes avec symptômes et suspicion de Covid à qui l’on demande de continuer à venir au travail en attendant les résultats du test, qui n’arrivent que plusieurs jours après, vu l’encombrement. Et dire qu’on peut prendre une amende de 135 euros si on marche sans masque dans une rue déserte ou à un peu plus d’un kilomètre de chez soi.

J’ai emprunté une version numérique du dernier livre d’Emmanuel Carrère, par curiosité. Bon, j’ai vu très vite que je ne pourrais jamais lire ça, c’est trop bavard, trop plat, trop médiocre, trop peu intelligent, trop dénué de toute poésie, bref, trop chiant. Mais grâce à la fonction find j’ai regardé toutes les occurrences du mot yoga. J’ai souri en voyant combien il insiste pour dire qu’il a eu l’idée de ce livre en 2015, combien il essaie de le prouver – alors que bien sûr il raconte ce qu’il veut, en faisant croire qu’il n’invente rien (sauf pour le Goncourt, qui veut de la fiction : pour eux, il avait précisé que son livre en était – un en-même-temps macroniste (puisqu’il l’est tant) et de curé, bien hypocrite). Eh bien ce qu’il dit du yoga est aussi fade que le reste. À moment donné il raconte avoir fait l’amour façon yoga (d’après lui), sans bouger pendant une ou deux heures – quelle horreur, quel ennui ! Moi qui apprécie quand c’est assez vite expédié (j’obtiens vite satisfaction et elle peut venir plusieurs fois mais au bout d’un moment, ça va, ça suffit), j’ai trouvé que ça résumait toute la lourdeur de sa façon d’être. Comme il le dit lui-même « Malheureusement pour moi, je ne suis pas poète ». Eh bien au moins, il lui arrive d’être lucide. Malheureusement ce n’est pas la règle et son livre donne juste l’impression d’une bouillie sans saveur ni autre sens que d’injurier mollement la vérité.

Après avoir laissé tomber Carrère (après le christianisme puis le yoga, son prochain livre fera-t-il référence à Homère ?), j’ai emprunté Pop Yoga de Pacôme Thiellement (2013). Je vois dans la table des matières des textes entre autres sur Elvis Presley, Twin Peaks, Malcom Lowry, Marilyn Monroe, Frank Zappa, Swedenborg et quelques dizaines d’autres excellents sujets, un programme qui me dit bien. J’en reparlerai peut-être, quoique je sois principalement occupée, littérairement parlant, par ma traduction de l’Odyssée, comme vous le savez si vous me lisez régulièrement ici (la suite arrive bientôt).

Odyssée, Chant III, v. 63-101 (dans ma traduction)

Toujours en guise de déconfinement (en tout cas c’en est un pour moi), je vous propose de continuer à voyager avec Télémaque, parti sur les traces d’Ulysse en compagnie d’Athéna, que nous avons entendue la dernière fois, prononçant une prière que, merveille, elle exauce elle-même.
*
*
*
Puis elle passe à Télémaque la belle double coupe
À pied évasé, et le cher fils d’Ulysse prie de même.
Quand les bons morceaux sont grillés et retirés du feu,
On distribue les parts et on mange le glorieux festin.
Dès qu’est contenté le désir de boire et de manger,
Le cavalier Nestor, de Gérènos, prend la parole :

« Voici le moment parfait pour interroger nos hôtes,
Leur demander qui ils sont, maintenant qu’ils sont rassasiés.
Étrangers, qui êtes-vous ? D’où, par les routes mouillées,
Naviguez-vous ? Est-ce pour une affaire ou errez-vous
Vainement, en pillards égarés aux esprits agités,
Apportant le malheur dans les pays où ils pénètrent ? »

Ainsi lui répond à haute voix le sage Télémaque,
Hardiment ; car Athéna a placé la hardiesse
Dans son âme, pour qu’il s’informe sur son père parti
Et gagne une noble renommée parmi les hommes.

« Ô Nestor, fils de Nélée, grande gloire des Achéens,
Tu demandes d’où nous sommes. Eh bien je vais te le dire.
C’est d’Ithaque, sous le mont Néios, que nous venons.
Pour une affaire privée, non publique. Je m’explique :
Je cherche à m’informer sur mon père à la gloire fameuse,
Le divin Ulysse à l’âme courageuse, qui, dit-on,
Combattant avec toi, détruisit la ville de Troie.
De tous les autres qui guerroyèrent contre les Troyens,
Nous savons où chacun a péri d’une triste mort.
Mais de lui, le fils de Cronos laisse inconnue la mort.
Non, nul ne peut dire clairement le lieu où il est mort,
Ni s’il a été dompté sur terre par des ennemis,
Ou bien en pleine mer par les flots d’Amphitrite.
C’est pourquoi je viens à tes genoux te supplier,
Si tu veux bien, de me dire quel fut son triste sort,
Que tu l’aies vu de tes yeux ou que tu l’aies entendu dire
Par un autre errant. Car sa mère l’enfanta misérable.
N’adoucis pas les choses par pitié, pour me ménager,
Mais dis-les moi exactement comme tu les as vues.
Je t’en prie, si jamais mon père, le vaillant Ulysse,
A, par la parole ou l’action, mené à terme ses plans
Dans le peuple de Troie, où vous avez souffert, Achéens,
Souviens-t’en pour moi maintenant, et parle-moi vrai. »

*
le texte grec est ici
et dans ma traduction le Chant I entier , le Chant II
à suivre !

Odyssée, Chant II entier (dans ma traduction)

jardin des plantesCet après-midi, promenade avec O, au jardin des Plantes quasi désert en ce premier jour de reconfinement.
En guise de déconfinement, voici donc la suite de ma traduction de l’Odyssée : le chant II entier, avec les 104 derniers vers qu’il me restait à traduire, et un final en forme de départ, une toute fin magnifique.
*
*
*

Dès que paraît, née au matin, Aurore aux doigts de roses,
Le cher fils d’Ulysse s’élance de sa couche,
Enfile ses vêtements, pend à son épaule une épée
Tranchante, attache à ses pieds brillants d’excellentes sandales,
Et semblable à un dieu, il va, quitte sa chambre.
Promptement il ordonne aux hérauts à la voix claire
De convoquer dans l’agora les Achéens chevelus.
À l’appel des hérauts, ils s’y rendent prestement.
Une fois qu’ils sont tous rassemblés, quand c’est chose faite,
Il va dans l’agora, sa lance d’airain à la main,
Non pas seul, mais avec deux chiens rapides à sa suite.
Et Athéna répand sur lui sa grâce divine.
Les foules le contemplent, émerveillées, tandis qu’il s’avance.
Les vieux se reculent, il s’assoit sur le siège de son père.
Le premier d’entre eux à parler est le héros Égyptios,
Courbé par la vieillesse et chargé d’expérience.
Son cher fils, le combattant Antiphos, est parti jadis
Sur des nefs creuses en même temps que le divin Ulysse
Pour Troie aux nombreux chevaux ; c’est lui que le cruel Cyclope
Tua dans sa grotte profonde, et qu’il mangea en dernier.
Il lui reste trois autres fils, dont Euronymos,
L’un des prétendants, et deux qui s’occupent de ses domaines.
Mais n’oubliant pas Antiphos, il se lamente et s’afflige.
Tout en pleurant il prend la parole et dit à l’assemblée :

« Écoutez maintenant, gens d’Ithaque, ce que je vais dire.
Jamais n’a eu lieu notre agora, ni une séance,
Depuis que le divin Ulysse est parti sur ses nefs creuses.
Qui nous a conduits là aujourd’hui ? Quelle nécessité
Pèse tant, soit sur les jeunes hommes, soit sur les anciens ?
Quelqu’un a-t-il entendu parler d’un retour de l’armée ?
Veut-il dire clairement qui l’a appris le premier ?
Ou déclarer autre chose qui concerne le peuple ?
Je l’estime alors honnête et utile. Que Zeus soit
Favorable aux fins auxquelles aspire son esprit. »

Ainsi parle-t-il, et sa parole réjouit
Le cher fils d’Ulysse qui, tout à son désir
De s’exprimer, ne reste pas assis. Il se lève
Dans l’agora, prend en main le sceptre tendu par le sage
Héraut Pisenor, et s’adressant d’abord au vieillard, dit :

« Vieillard, il n’est pas loin, il est là tout de suite, cet homme
Qui a convoqué le peuple : une grande douleur m’anime.
Non, je n’ai pas entendu parler d’un retour de l’armée,
Ni ne veux dire clairement qui l’a appris le premier,
Ni déclarer autre chose qui concerne le peuple.
Mais c’est de ma propre nécessité, du double malheur
Sur ma maison que je veux parler : car j’ai perdu mon noble
Père, qui autrefois régnait sur vous comme un bon père.
Et de plus, maintenant, le pire des maux va sans tarder
Détruire tout à fait ma maison et ruiner mes ressources.
Les prétendants harcèlent ma mère contre son gré.
Ce sont les chers fils d’hommes très puissants qui sont ici,
Et ils ne veulent pourtant pas s’en aller chez son père,
Icare, afin qu’il donne une dot à sa fille
Et la marie à qui elle veut, à qui lui plaît le mieux.
Alors ils passent toutes leurs journées dans notre maison,
Égorgeant nos bœufs, nos brebis et nos chèvres grasses,
Banquetant et buvant notre vin rouge follement,
Épuisant tous nos biens. Car il n’y a plus un homme
Tel qu’Ulysse pour repousser ce fléau hors de ma maison.
Moi je ne peux à présent me défendre contre eux
Mais un jour, quoique je ne sois pas expert au combat,
Ils sauront leur misère ! Je le ferais si je pouvais,
Car ils commettent des actes intenables et ma maison
Meurt sans honneur. Indignez-vous donc, vous aussi !
Vous devriez avoir honte face aux autres humains,
Nos voisins ! Et craignez la colère des dieux !
Ils pourraient se retourner, furieux de vos actes mauvais !
Je vous le demande, par Zeus Olympien ou par Thémis
Qui délie ou réunit les assemblées des hommes :
Arrêtez ça, amis, et laissez-moi déplorer seul
La ruine qui m’accable ; si mon père, l’honnête Ulysse,
A jamais fait du tort aux Achéens aux belles jambières,
Alors, mécontents, vengez-vous sur moi, rendez-moi le mal
En les excitant contre moi. Je préférerais
Que vous mangiez vous-mêmes mes biens et mes troupeaux.
S’ils étaient mangés par vous, j’en serais vite remboursé :
Je descendrais sans cesse en ville pour m’expliquer,
Vous redemander mon dû jusqu’à ce que vous me rendiez tout.
Mais là il n’y a rien à faire, vous me fendez le cœur. »

Ainsi parle-t-il, irrité. Puis, jetant son sceptre à terre,
Il répand des larmes. Et la pitié s’empare du peuple.
À ce moment tous les autres font silence, n’osant pas
Répondre à Télémaque par des paroles cruelles.
Seul Antinoüs, prenant à son tour sa place, dit :

« Télémaque, fort en gueule, âme insupportable, pourquoi
Nous souilles-tu par la parole ? Tu veux nous frotter de blâme !
Or ce ne sont pas les prétendants achéens qui sont en cause,
Mais plutôt ta chère mère, qui s’y connaît tant en ruses.
Car voici la troisième année, bientôt la quatrième,
Qu’elle frustre dans leur poitrine le cœur des Achéens.
Elle nous fait tous espérer, promet, envoie des messages
À chaque homme, alors qu’elle a dans l’esprit tout autre chose.
Et voici une autre machination qu’elle a conçue :
Elle s’est mise à tisser chez elle une grande toile
Fine, d’une beauté démesurée, tout en nous disant :

« Jeunes gens, mes prétendants, puisque le divin Ulysse
Est mort, ne pressez pas mon mariage tant que ce linceul
N’est pas achevé. Que mon fil, léger comme le vent,
Ne soit pas perdu ! Il est pour le héros Laërte,
Quand le funeste sort l’emportera, couché par la mort.
Que nulle ne s’indigne à mon sujet chez les Achéens.
Je ne laisse sans linceul un homme si riche en conquêtes. »

« Ainsi parla-t-elle, et nos désirs virils se laissèrent
Enjôler. Or chaque jour elle tissait la grande toile
Et chaque nuit la défaisait, en s’éclairant aux flambeaux.
Trois ans elle a voilé sa ruse et fléchi les Achéens,
Mais dans la quatrième année le moment est arrivé
Où l’une des femmes, sachant ce qu’il en était, l’a dit.
Et nous l’avons trouvée défaisant sa brillante toile.
Alors elle a dû l’achever, contrainte et forcée.
Ainsi te répondent les prétendants, que tu le saches bien
Dans ton esprit, et que le sachent tous les Achéens :
Renvoie ta mère et ordonne-lui de se marier
À qui son père voudra et qui lui plaira aussi.
Si elle faisait languir longtemps les fils des Achéens
En réfléchissant dans son esprit à tous les travaux
Splendides auxquels l’a exercée Athéna, à sa noble
Pensée, à son efficacité, telles qu’on n’entendit
Nul ancien en dire autant des Achéennes aux belles boucles,
Que ce soit Tyro, Alcmène ou Mykène au front couronné ?
Nulle n’était aussi intelligente que Pénélope
Aujourd’hui ; mais ses intentions ne sont pas convenables.
Et donc nous mangerons tes ressources et tes troupeaux
Aussi longtemps qu’elle persistera dans cet esprit
Que les dieux lui ont mis dans le cœur. De là viendront, pour elle
Grande gloire, et pour toi, perte de tes moyens d’existence.
Car nous n’irons pas à nos travaux, ni ailleurs
Tant qu’elle n’épousera pas un Achéen de son choix. »

Ainsi répond à haute voix le sage Télémaque :

« Antinoüs, en aucune façon je ne chasserai
De la maison celle qui m’a mis au monde et nourri.
Mon père est quelque part sur la terre, vivant ou mort,
Et j’aurais beaucoup de mal à payer ma dette à Icare,
Si je lui renvoyais ma mère. Et je serais puni
Par mon père et par les dieux aussi quand ma mère, invoquant
Les terribles Furies après avoir quitté la maison,
Serait vengée par les humains. Je ne prononcerai donc
Jamais une telle parole. Si cela vous irrite,
Quittez donc ce palais. Préparez d’autres repas,
Consumez vos propres ressources, invitez-vous tour à tour.
Mais s’il vous semble plus avantageux et meilleur
De persister à ruiner impunément l’existence
D’un seul homme, allez-y, pillez ! Moi j’invoquerai les dieux
Éternels, afin que Zeus vous fasse payer vos actes.
Puissiez-vous périr sans vengeance au sein de cette maison ! »

Ainsi parle Télémaque. Alors Zeus qui voit au loin
Envoie voler, du sommet de la montagne, deux aigles
Qui tombent en planant le long d’un courant d’air,
L’un à côté de l’autre, les ailes étendues.
Mais quand ils arrivent au-dessus de la bruyante agora,
Ils se mettent à tournoyer en battant de leurs ailes épaisses,
Dévisageant chacun, annonçant du regard la mort.
Puis, de leurs serres, ils se déchirent les joues, autour du cou,
Et s’élancent à droite à travers leurs maisons et leur ville.
Ces oiseaux, qu’ils ont de leurs yeux vus, les laissent stupéfaits.
Remués dans leur cœur, ils songent à ce que cela présage.
Alors vient leur parler le vieux héros Alithersès,
Fils de Mastor, qui l’emporte sur tous ceux de son âge
En connaissance des oiseaux et en interprétation
Des augures. Bien disposé envers eux, il leur dit :

« Écoutez maintenant, gens d’Ithaque, ce que je vais dire :
C’est particulièrement aux prétendants que je m’adresse,
Car un grand malheur roule vers eux. En effet Ulysse
Ne sera plus longtemps loin des siens. Il est quelque part
Près d’ici, plantant la graine du carnage et de la mort
Pour tous les prétendants. Et il y aura du malheur
Pour d’autres habitants de la bien visible Ithaque. Alors
Songeons dès maintenant au moyen d’arrêter cela.
Qu’ils cessent d’eux-mêmes, c’est présentement le mieux.
Je ne rends pas des oracles en homme inexpérimenté,
Mais en savant, et tout ce que j’ai dit s’accomplira,
Comme ce que j’avais prédit quand les Argiens embarquèrent
Pour Troie et que partit avec eux Ulysse aux mille sens :
Qu’il souffrirait mille maux, perdrait tous ses compagnons,
Et qu’inconnu de tous, vingt ans après il reviendrait
Chez lui. Voici maintenant que tout cela se réalise. »

Ainsi lui réplique Eurymaque, fils de Polybe :

« Eh, le vieux, va donc rendre tes oracles chez toi,
À tes enfants, de peur qu’il ne leur arrive malheur
Dans l’avenir ! Ici, je prophétise bien mieux que toi.
Certes beaucoup d’oiseaux vont et viennent sous le soleil
Mais tous n’annoncent pas l’avenir. Quant à Ulysse,
Il a péri au loin. Dommage que tu ne sois pas mort
Avec lui ! Tu ne nous ferais pas de telles prédictions
Et tu n’exciterais pas la bile du si affligé
Télémaque, dont, j’imagine, tu auras un cadeau !
Mais je te le dis, et cela va bel et bien s’accomplir :
Si tu as en tête, avec tes très antiques conseils,
De pousser un tout jeune homme au ressentiment,
Celui qui, d’abord, aura à en pâtir le plus, c’est lui :
Car de toutes façons, il ne pourra jamais réussir.
Quant à toi, vieillard, nous t’infligerons un châtiment
Pénible à ton cœur, une douleur dure à supporter.
À Télémaque, devant tous, voilà ce que je conseille :
Qu’il ordonne à sa mère de retourner chez son père.
Qu’on s’apprête au mariage, qu’on prépare les cadeaux,
Fort nombreux comme il convient pour une fille bien-aimée.
Je ne pense pas qu’avant cela les fils des Achéens
Cesseront leur terrible poursuite. Quoi qu’on fasse, nul
Ne nous fait peur, ni Télémaque qui parle tant,
Ni toi, vieillard, et tes prophéties dont nous n’avons cure,
Que tu nous assènes en vain et qui te rendent plus odieux
Encore. Ses biens seront dévorés toujours plus et rien
Ne changera tant que les Achéens verront différé
Le mariage. Encore une fois nous attendons tous les jours,
Nous luttons à cause de sa vertu, sans aller
Vers d’autres femmes, que chacun serait digne d’épouser. »

Ainsi répond à haute voix le sage Télémaque :

« Eurymaque, et vous tous, aimables prétendants,
Je ne vous supplierai ni ne vous en parlerai plus :
Les dieux et tous les Achéens savent ce qu’il en est.
Donnez-moi juste un vaisseau rapide et vingt compagnons
Pour mener à bien un voyage çà et là :
Je veux aller à Sparte et dans la sablonneuse Pylos
M’informer sur le retour de mon père parti
En écoutant quelque mortel ou plus encore
La renommée que Zeus porte parmi les hommes.
Si j’entends dire que mon père est vivant et revient,
Alors, malgré ma peine, j’attendrai encore un an.
Mais si j’entends dire qu’il est mort, qu’il n’existe plus,
Alors je retournerai dans ma chère terre natale
Lui élever un tombeau, lui rendre les honneurs funèbres
Avec faste, comme il convient, puis marier ma mère. »

Ayant ainsi parlé, il s’assoit. Alors se lève
Mentor, compagnon de l’irréprochable Ulysse,
Lequel en partant lui avait confié toute sa maison,
Pour qu’on obéisse au vieillard et qu’il fasse constamment
Bonne garde. Plein de sagesse il prend la parole et dit :

« Écoutez maintenant, gens d’Ithaque, ce que je vais dire.
Qu’aucun roi porteur de sceptre ne soit désormais bon,
Aimable et bienveillant, que son cœur n’incline à la mesure,
Qu’il soit plutôt pénible, qu’il agisse en criminel,
Puisque nul ne se rappelle le divin Ulysse
Dans ce peuple sur lequel il régna doux comme un père !
Je ne reproche pas aux arrogants prétendants
De commettre leurs violences, dans leur esprit mauvais ;
Car ils risquent leur tête en dévorant par la violence
La maison d’Ulysse, qui ne reviendra pas, croient-ils.
Mais c’est contre le peuple que je m’indigne maintenant,
Vous tous qui restez assis sans rien dire, sans vous lever
Pour arrêter quelques prétendants, vous qui êtes en nombre. »

Ainsi lui réplique Léocrite, fils d’Evenor :

« Malfaisant Mentor, esprit insensé, qu’as-tu dit ?
Tu les pousses à nous arrêter? Il serait difficile
De combattre des hommes si nombreux autour du festin !
Et Ulysse l’Ithacien reviendrait-il en personne
Dans l’intention de chasser de son palais les brillants
Prétendants en train de festoyer dans la salle à manger,
Sa femme ne se réjouirait pas, quoiqu’elle en ait
Très envie, de son retour, car c’est une mort indigne
Qu’il subirait, en s’attaquant à un si grand nombre.
Tu as donc parlé à tort. Mais allons ! Dispersons-nous,
Chacun à ses affaires ! Mentor et Alithersès,
Des proches de son père, aideront Télémaque à partir.
Mais je crois qu’en fait il va rester à Ithaque attendre
Des nouvelles, sans jamais accomplir son voyage. »

Ainsi parle-t-il, et l’agora se rompt aussitôt.
Tout le monde se disperse et chacun rentre chez soi,
Les prétendants retournent au palais du divin Ulysse.
Télémaque se retire sur le sable au bord de la mer,
Se lave les mains dans l’eau brillante et prie Athéna :

« Entends-moi, ô dieu qui vins hier dans notre maison
Et me demanda d’aller en bateau par la sombre mer
M’informer sur le retour de mon père parti.
Les Achéens m’empêchent d’accomplir tout cela,
Surtout les arrogants, les méchants prétendants ! »

Ainsi prie Télémaque, et vient près de lui Athéna,
Semblable à Mentor par le corps et la voix,
Et prononçant pour lui ces paroles ailées :

« Télémaque, tu ne seras ni fou ni faible
À l’avenir, si le noble esprit de ton père se dresse
En toi, tel qu’il s’exprimait dans l’action et dans la parole.
Et ton voyage ne sera ni vain ni sans effet.
Mais si tu n’étais pas son fils et celui de Pénélope,
Je ne crois pas que tu accomplirais ce que tu désires.
Peu d’enfants grandissent semblables à leur père :
Ils sont souvent moins bons, rarement meilleurs.
Mais tu ne seras ni fou ni faible à l’avenir :
L’intelligence d’Ulysse ne t’a pas abandonné
Et je m’attends à ce que tu mènes à bien ton projet.
Pour l’heure, ce que veulent les prétendants insensés,
Ne t’en soucie pas, car ils ne sont ni réfléchis ni justes.
Ils ne savent pas la mort et le noir malheur
Qui sont tout près d’eux et les détruiront tous en un jour.
Le départ que tu projettes ne tardera plus longtemps.
En tant que compagnon de ton père, c’est moi
Qui t’armerai un vaisseau agile et t’accompagnerai.
Mais retourne à ton palais, mêle-toi aux prétendants,
Prépare des provisions, mets le tout dans des vases,
Le vin dans des amphores, et la farine, moelle des hommes,
Dans des outres épaisses. Moi je m’en vais réunir
Des compagnons volontaires dans le peuple. À Ithaque
Entourée d’eaux, il y a de nombreux bateaux, neufs ou vieux.
Je choisirai parmi eux le meilleur et aussitôt
Équipé, nous le lancerons sur la vaste mer. »

Ainsi parle Athéna, fille de Zeus. Et Télémaque
Ne s’attarde pas, une fois entendue la voix
De la déesse. Il s’en va au palais, le cœur attristé,
Trouve dans la demeure les prétendants arrogants.
Antinoüs en riant vient droit sur Télémaque,
Lui saisit la main et lui dit, l’appelant par son nom :

« Télémaque, fort en gueule, âme insupportable, cesse
D’exercer ton cœur aux paroles et aux actes mauvais,
Viens plutôt avec moi manger et boire comme avant !
Les Achéens vont s’occuper d’absolument tout pour toi :
Du bateau et des rameurs que tu demandes pour partir
Au plus vite à Pylos t’informer sur ton aimable père. »

Ainsi lui répond à haute voix le sage Télémaque :

« Antinoüs, je ne peux plus, avec vous les orgueilleux,
Sans rien dire manger et tranquillement m’amuser.
N’est-ce pas assez d’avoir déjà dévoré mes précieux
Et nombreux biens, prétendants, quand j’étais encore enfant ?
Mais maintenant je suis grand, j’ai écouté la parole
D’autres gens, j’ai appris, et la colère en moi a grandi.
Et je vais donc tenter de vous lancer le mauvais sort –
Que j’aille à Pylos ou que je reste ici dans le peuple.
Mais je n’annonce pas ce voyage en vain : je serai
Passager sur un bateau, n’ayant moi-même ni nef
Ni rameurs, puisque cela vous paraît plus avantageux. »

Ainsi dit-il, et d’un geste aisé retire sa main
De celle d’Antinoüs. Les prétendants dans la maison
Préparent le repas et lui adressent railleries
Et injures. L’un de ces jeunes arrogants lui dit :

« Oui, certes, Télémaque médite de nous tuer !
Il ramènera des secours de Pylos la sablonneuse
Ou bien de Sparte, puisqu’il le désire terriblement !
À moins qu’il ne veuille aller à Éphyra aux fertiles
Terres, afin d’en rapporter des poisons mortels
Qu’il versera dans nos cratères pour nous tuer tous ! »

Un autre de ces jeunes arrogants lui dit :

« Qui sait ? Une fois parti loin de ses proches, sur sa nef
Creuse, peut-être mourra-t-il après avoir, tel Ulysse,
Erré ? Voilà qui accroîtrait encore notre fatigue :
Il nous faudrait partager toute sa fortune, puis donner
La maison à sa mère et à celui qu’elle épouserait ! »

Ainsi parlent-ils, et Télémaque descend dans les hautes
Et vastes réserves de son père, où s’amoncellent l’or,
L’airain, des coffres pleins de linge, des huiles parfumées…
Là se trouvent aussi des tonneaux de vin bien doux,
Emplis d’un breuvage non mélangé, divin.
Alignés le long du mur, ils sont pour Ulysse, s’il rentre
À la maison, après avoir enduré beaucoup de maux.
La pièce est fermée par une porte à deux battants
Étroitement ajustés. Nuit et jour une intendante
Monte la garde, vigilante, sur tout cela :
Euryclée, la fille d’Ops, fils de Pisenor.
Télémaque l’appelle dans la réserve et lui dit :

« Mamou, puise pour moi dans les amphores du vin doux,
Du plus doux après celui que tu réserves au malheureux
Que tu espères, Ulysse né de Zeus, si jamais
Il revient, réchappé du noir malheur et de la mort.
Remplis-en douze jarres et rebouche-les toutes.
Verse de la farine dans des outres bien cousues :
Vingt mesures de farine d’orge écrasée à la meule.
Sois seule à le savoir. Prépare et rassemble tout cela.
Car je viendrai le prendre ce soir, après que ma mère,
Songeant à se coucher, sera montée dans sa chambre.
Je m’en vais à Sparte et à Pylos la sablonneuse
M’informer par ouï-dire du retour de mon cher père. »

Il dit, et Euryclée, sa nourrice chérie, pousse un cri,
Et en pleurant lui adresse ces paroles ailées :

« Pourquoi enfin, mon cher enfant, t’es-tu mis un tel dessein
Dans l’esprit ? Comment donc veux-tu aller sur tant de terres,
Toi, notre unique bien-aimé ? Ton père est mort au loin,
Ulysse né de Zeus, quelque part chez un peuple étranger.
Dès ton départ ils méditeront de mauvais coups,
Des pièges pour te faire périr et se partager
Tous tes biens. Reste plutôt auprès des tiens ! Il ne faut pas
Que tu souffres ni que tu erres sur la stérile mer ! »

Ainsi lui répond à haute voix le sage Télémaque :

« Aie confiance, mamou ! Ce n’est pas sans le vouloir d’un dieu.
Mais jure de n’en rien dire à ma mère bien-aimée
Avant que ne soit passés onze ou douze jours,
Si elle me réclame et apprend que j’ai pris mon envol ;
Qu’elle ne déchire pas sa belle chair en pleurant ! »

Il dit, et la vieille femme jure par grand serment
Au nom des dieux. Puis, une fois accompli le serment,
Elle s’empresse de puiser le vin dans les amphores
Et verse la farine dans des outres bien cousues.
Télémaque, allant au palais, se mêle aux prétendants.

Sur ce, Athéna aux yeux brillants de chouette conçoit
Un autre plan. Sous les traits de Télémaque elle parcourt
Toute la ville, parle à chaque homme qu’elle se concilie,
Ordonne de se rassembler le soir sur une nef creuse.
Puis elle demande à Noémon, fameux fils de Phronius,
Une nef rapide, qu’il lui accorde de bon cœur.

Le soleil plonge, toutes les rues s’emplissent d’ombre.
Alors elle tire à la mer le navire rapide,
Y plaçant tous les agrès que portent les nefs bien pontées.
Puis elle l’arrête au bout du port et tous les vaillants
Compagnons se rassemblent autour, pressés par la déesse.
Ensuite Athéna aux yeux brillants de chouette conçoit
Un autre plan. Elle file au palais du divin Ulysse
Et là, verse un doux sommeil sur les prétendants
En train de boire. Ils chancellent, laissent tomber leurs coupes
De leurs mains. Sans plus rester assis, ils s’en vont en ville
Chercher le repos, le sommeil tombant sur leurs paupières.
D’autre part, Athéna aux yeux brillants de chouette s’adresse
À Télémaque. L’ayant appelé hors de la maison,
Elle lui dit, semblable à Mentor par l’allure et la voix :

« Télémaque, déjà tes compagnons aux belles jambières
Sont assis, penchés sur les rames, attendant ton signal.
Allons ! Ne différons pas davantage le départ ! »

Ayant ainsi parlé, Pallas Athéna marche devant
Rapidement. Et lui donc, marche dans la trace du dieu.
Dès qu’ils sont arrivés près de la nef et de la mer,
Ils trouvent sur le sable les compagnons chevelus.
Alors Télémaque à la force puissante leur dit :

« Allons, amis, apportons les provisions ! Elles sont toutes
Rassemblées déjà dans la maison. Ma mère n’en sait rien,
Les autres femmes non plus, à l’exception d’une seule. »

Sur ces mots il se met en chemin et eux l’accompagnent.
Ils emportent toutes les provisions et les déposent
Dans la nef bien pontée, comme l’a ordonné le cher
Fils d’Ulysse. Télémaque s’embarque, conduit
Par Athéna qui s’assied à la poupe. À côté d’elle
S’assoit Télémaque. On délie alors les amarres,
Les hommes montent à bord, se rangent sur les bancs.
Athéna aux yeux brillants de chouette leur envoie un vent
Fort favorable, un vif Zéphyr qui résonne sur la mer
Lie-de-vin. Télémaque, excitant ses compagnons,
Ordonne de mettre la main aux agrès. Ils obéissent
À sa voix, dressent le mât de sapin au creux du coursier,
Le tiennent, le fixent, l’attachent avec des câbles,
Hissent les voiles blanches par des lanières de bœuf
Bien torsadées. Le vent gonfle le milieu de la voile,
Autour de l’étrave la vague bouillonne à grand cri
Le long de la nef qui va, accomplit sur les flots sa route.
Une fois attaché le gréement sur la nef vive et noire,
Ils lèvent des cratères remplis à ras bord de vin,
Versent des libations pour les dieux éternels,
Et surtout pour la fille de Zeus aux yeux brillants de chouette.
Toute la nuit, jusqu’à l’aurore, la nef trace son chemin.

*
le texte grec est ici (il y manque le vers 388, que j’ai trouvé dans un livre)
le premier chant entier, dans ma traduction, est
à suivre !

Reconfinement

Hier à Paris 13e, photo Alina Reyes

Hier à Paris 13e, photo Alina Reyes

Chape de tristesse ce soir sur le pays.

Plus d’autre choix qu’un reconfinement. Je pense à toutes celles et tous ceux qui ne pourront plus travailler, qui ne peuvent plus travailler depuis des mois ; ou qui ont travaillé dur pour lancer des projets qui seront annulés ; ou qui vont devoir continuer à travailler dans des conditions risquées et difficiles ; ou qui vont devoir affronter plus ou moins seuls, ou en compagnie difficile, une période d’enfermement, une période angoissante. À toutes celles et ceux qui, pour ces raisons et d’autres encore, vont souffrir, ou continuer à souffrir, ou souffrir de nouveau.

Je suis allée faire des courses pour le dîner, vers 17 heures passées. Les rayons du supermarché étaient à moitié vides et il y avait de longues queues aux caisses : c’était déjà reparti, les gens faisaient des provisions en vue d’un reconfinement. Dire qu’avec des mesures intelligentes – télétravail obligatoire chaque fois que possible, aération des salles de cours, et bien sûr préparation des hôpitaux, publics et privés, on aurait pu limiter ce désastre. Les quelque vingt pour cent de Français qui ont élu Macron, faute de mieux et pour éviter le pire, ont élu un jeune banquier sans expérience politique et nous le payons, tant en politique intérieure que dans les relations internationales, gérées par des enfantillages d’une personnalité clivante. Le Figaro publiait l’autre jour un article relatant le désarroi du Rassemblement national, dépossédé de ses idées par la classe politique au pouvoir. Je n’ai envie d’accabler personne, nous sommes assez accablés. Mais voilà où nous en sommes. Dans cette situation incertaine, le mieux est de garder au maximum nos forces, afin d’être en état de nous en servir, personnellement ou collectivement, quand nous serons au moins débarrassés de la pandémie.

Depuis que je me suis mise à la course, il y a quelques semaines, j’ai triplé ou quadruplé la (petite) distance sur laquelle je cours avant d’alterner avec des temps de marche. Faire du sport est plus que jamais capital pour nous maintenir en forme, physiquement mais aussi mentalement. Je compatis avec les jeunes, si pleins de vitalité et privés d’activité, surtout en ville. Ils ont besoin de beaucoup de courage dans le monde actuel.

Alain Rey est mort, et je me rappelle que la première chose que j’ai faite, dès que j’ai eu ma première avance de droits d’auteur sur mon premier roman, a été d’acheter un vélo pour chacun de mes deux fils, puis pour moi le Grand Robert. J’avais toujours été pauvre, et c’était le trésor le plus luxueux que j’avais jamais eu. Pour ainsi dire, je n’en revenais pas de l’avoir. Et donc je le devais en bonne part à Alain Rey, dont le nom est d’ailleurs presque l’anagramme du mien. Je ne l’ai plus – j’ai dû le laisser lors du dernier déménagement – mais j’ai toujours un Petit Robert, un trésor aussi.

*
à bientôt pour la suite de l’Odyssée, la fin du Chant II