Pot plus ou moins pourri d’actu

Des tas de gens qui avaient une vie sexuelle « à risques » (plusieurs partenaires) se sont fait vacciner contre l’hépatite B, maladie sexuellement transmissible ; malheureusement ce vaccin a déclenché de nombreux cas de sclérose en plaques. Espérons que Tariq Ramadan n’a pas été victime de ce scandale sanitaire. Espérons aussi qu’il a une bonne chambre à l’hôpital, c’est toujours mieux qu’une cellule en prison, surtout quand on est habitué aux hôtels de luxe.

BFMTV nous informe que Johnny Hallyday a écrit six testaments « de son vivant ». Il faudrait peut-être lui en demander un septième, maintenant qu’il est mort. La mort porte conseil, peut-être ?

Catherine Millet continue à regretter dans L’Obs, qui lui ouvre grand ses fesses, de n’avoir pas été violée. Qu’elle passe plutôt une petite annonce sur des sites spécialisés.

Après avoir viré Aude Lancelin pour délit d’opinion gauchiste, L’Obs a viré Matthieu Croissandeau, coupable d’avoir publié une image de Macron entouré de barbelés et titrant « Migrants. Bienvenue au pays des droits de l’homme ». Après avoir viré Mathieu Gallet, le directeur de Radio France, via la commode Nyssen, Macron, toujours par la même voie, souhaite noyer Radio France dans France Télévisions. En marche vers le passé, voici revenir le temps de l’ORTF aux ordres du général – sauf que celui d’aujourd’hui n’a résisté à rien mais entend quand même commander une armée de petits soldats français obligés comme au mauvais vieux temps de faire leur service militaire.

À propos de vieille France, ce sont les méfaits de la France coloniale qu’a rappelés Gérard Depardieu, pas toujours mal inspiré, en appelant à voir ou revoir les films de René Vautier (il dit Jean, mais c’est René). Ça tombe bien, on peut le faire ici même.

*

David et Laura, enfants trahis mais vainqueurs

Après l’hommage national, le dommage national. C’est un choc d’apprendre que Johnny Hallyday a déshérité ses enfants naturels. L’élu de la macronie, non content d’être exilé fiscal, était donc aussi un exilé du droit français. Encore une fois, les citoyens français se réveillent sous la coupe morale des États-Unis : fric et spectacle. Le parent indigne a-t-il été victime d’un abus de faiblesse ? Cela ne le dédouanerait pas. Quand il s’agit de ses enfants, on ne se laisse pas manipuler sans y être prêt. On n’exerce pas sur ses enfants une énorme violence sans y trouver quelque satisfaction personnelle, quelque sentiment de vengeance pour quelque chose qu’on n’a pas soi-même réglé mais dont les enfants sont innocents. Comme dans tous les cas de crimes, explication n’est pas excuse.

Politiquement, cette affaire est aussi d’une violence et d’une tristesse sans nom. Syndrome du sacrifice de la génération suivante par la génération précédente. Syndrome du sacrifice de la nature, de l’amour, du vivant, par le fric, le faux, la mort.

Pourtant ce sont eux les vivants, Laura et David. Avec ou sans héritage, ils ont une activité, un talent, ils existent par eux-mêmes. Voilà leur victoire. Longue vie à eux !

*

Antisémitisme, l’éternel retour

J’ignorais que Renaud Camus, Alain Soral, Dieudonné, les ultras de la Lazio de Rome, les pangermanistes autrichiens et autres fachos nationalistes européens, étaient musulmans. Et pourquoi pas Antoine Gallimard, qui voulait rééditer les pamphlets de Céline, ou Françoise Nyssen, qui voulait commémorer Maurras ? Car d’après Antoine Gallimard, « aujourd’hui, l’antisémitisme n’est plus du côté des chrétiens mais des musulmans, et ils ne vont pas lire les textes de Céline. » Cette déclaration parfaitement raciste (pourquoi les musulmans ne liraient-ils pas Céline ?) révèle une fois de plus combien sont proches l’antisémitisme et l’islamophobie. L’antisémitisme, qu’il soit de culture chrétienne ou de culture islamique, est d’abord le signe d’une haine de soi, christianisme et islam ayant pour source le judaïsme. Que bien des gens issus du christianisme et de l’islam aient des raisons de se haïr, cela se comprend aisément quand on sait la pression et les abus que ces religions, comme le judaïsme et sans doute toutes les religions, peuvent exercer sur les êtres humains. La tartufferie de Gallimard et de Nyssen est, comme la haine, une tradition bien chrétienne aussi, bien de toutes les religions aussi. Une saloperie, très répandue sous le masque de l’honorabilité.

*

Mêler les sangs

vaguesHier, après être revenue sur L’homme qui plantait des arbres puis leur avoir passé et commenté Le vieil homme et la mer, j’ai dit à mes douze élèves de Seconde (ceux qui ne sont pas partis en classe de ski) que j’étais écrivaine et qu’ils pouvaient me poser des questions. Nous y avons passé une petite heure, puis l’un d’eux m’a demandé un autographe… sur son exemplaire de Dom Juan. Voilà qui m’a plu, c’était mêler un peu de mon sang à celui de Molière. Vivent les noces !

Le soir il m’a fallu exactement trois heures pour revenir du lycée. Les perturbations sur les lignes sont monnaie courante. Comme, le matin, j’avais mis deux heures (la moyenne « normale ») pour y aller, j’ai donc passé cinq heures dans la journée dans les transports en commun. Personne ne peut travailler à la fois bien et longtemps dans ces conditions, ni sans y perdre la santé. Certains de mes collègues me disent que je n’avais qu’à déménager là où j’ai été placée. Mais alors ce serait aux trois personnes avec lesquelles je vis de passer quatre à cinq heures par jour dans les bus, RER, métro et autres transiliens pour se rendre à leur travail et à leurs études, à Paris ? La situation est impossible dans tous les cas. La faute en est à l’Éducation nationale, qui n’avait qu’à m’envoyer plus près de chez moi, dans l’académie de Créteil qui manque aussi cruellement de profs, mais cette grosse machine est impotente, tant dans son organisation que dans sa pédagogie (« Aujourd’hui Camus est mort » ai-je lu hier sur le compte twitter d’une prof réfractaire -je ne suis pas la seule- avec ce lien vers cet article désespérant qui donne des envies de distribuer de grandes baffes réveilleuses mais qui enchanterait les profs de l’Espé en supprimant la littérature de leur enseignement et avec elle, toute question profonde sur le sens des textes. Ma tutrice, à l’Espé : « on ne peut pas laisser dire que l’Arabe dans L’Étranger de Camus n’a pas de nom ». Moi : « c’est pourtant la vérité ». Elle : « mais ça aurait l’air de dire que Camus était raciste ». Une prof de lettres, chargée de former d’autres profs de lettres. On en est là). (De même l’un des Dalton de l’académie, l’autre jour, quand je lui ai dit que j’étais épuisée par les trajets inhumains qui m’étaient imposés : « je ne peux pas vous laisser dire ça, l’académie est très soucieuse du bien-être de ses employés ». Le credo de ces gens est décidément de ne pas laisser dire. « Si je croise ce type, je lui fous mon poing dans la gueule », me dit mon compagnon. « Pour moi, il n’y a pas de différence entre ces gens-là et des salopards de fascistes », ajoute-t-il, connaissant bien la façon dont s’est comportée la fonction publique sous l’Occupation.)

J’écris avec mon sang, celui de Molière et de tant d’autres auteurs, le sang du poète, le sang du témoin qui traverse les âges, toujours vivant dans tous ses visages, toujours présent, toujours parlant.

*