Odyssée, Chant II, v. 258-295 (ma traduction)

ces jours-ci à Paris 13e, photo Alina Reyes

ces jours-ci à Paris 13e, photo Alina Reyes

O et moi sommes allés courir ensemble trois fois dans la semaine, et nous comptons continuer. L’exercice physique est capital. Il m’est quasiment impossible de ne pas faire mon yoga en me levant le matin, au moins quelques minutes les jours où je manque de temps. Je marche moins qu’avant à cause du masque mais je marche quand même, la vie en ville serait intenable autrement. Surtout par les temps qui courent, eux aussi, d’une autre façon.
Il y a des périodes où je peins et d’autres où je ne peins pas. Mais continuer à traduire l’Odyssée, je le fais tous les jours aussi, au moins quelques vers ; c’est un exercice aussi nécessaire et bienfaisant que l’exercice physique.
Nous en étions au moment où l’agora vient de se disperser, après des échanges houleux. Nous nous préparons maintenant, jusqu’à la fin de ce chant, au grand départ « sur la vaste mer ». Le dialogue entre Télémaque, qui la prie, et Athéna, est très touchant, très beau.
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Tout le monde se disperse et chacun rentre chez soi,
Les prétendants retournent au palais du divin Ulysse.
Télémaque se retire sur le sable au bord de la mer,
Se lave les mains dans l’eau brillante et prie Athéna :

« Entends-moi, ô dieu qui vins hier dans notre maison
Et me demanda d’aller en bateau par la sombre mer
M’informer sur le retour de mon père parti.
Les Achéens m’empêchent d’accomplir tout cela,
Surtout les arrogants, les méchants prétendants ! »

Ainsi prie Télémaque, et vient près de lui Athéna,
Semblable à Mentor par le corps et la voix,
Et prononçant pour lui ces paroles ailées :

« Télémaque, tu ne seras ni fou ni faible
À l’avenir, si le noble esprit de ton père se dresse
En toi, tel qu’il s’exprimait dans l’action et dans la parole.
Et ton voyage ne sera ni vain ni sans effet.
Mais si tu n’étais pas son fils et celui de Pénélope,
Je ne crois pas que tu accomplirais ce que tu désires.
Peu d’enfants grandissent semblables à leur père :
Ils sont souvent moins bons, rarement meilleurs.
Mais tu ne seras ni fou ni faible à l’avenir :
L’intelligence d’Ulysse ne t’a pas abandonné
Et je m’attends à ce que tu mènes à bien ton projet.
Pour l’heure, ce que veulent les prétendants insensés,
Ne t’en soucie pas, car ils ne sont ni réfléchis ni justes.
Ils ne savent pas la mort et le noir malheur
Qui sont tout près d’eux et les détruiront tous en un jour.
Le départ que tu projettes ne tardera plus longtemps.
En tant que compagnon de ton père, c’est moi
Qui t’armerai un vaisseau agile et t’accompagnerai.
Mais retourne à ton palais, mêle-toi aux prétendants,
Prépare des provisions, mets le tout dans des vases,
Le vin dans des amphores, et la farine, moelle des hommes,
Dans des outres épaisses. Moi je m’en vais réunir
Des compagnons volontaires dans le peuple. À Ithaque
Entourée d’eaux, il y a de nombreux bateaux, neufs ou vieux.
Je choisirai parmi eux le meilleur et aussitôt
Équipé, nous le lancerons sur la vaste mer. »

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le texte grec est ici
le chant premier en entier dans ma traduction
à suivre !

Odyssée, Chant II, v. 161-207 (ma traduction)

ces jours-ci à Paris, photo Alina Reyes

ces jours-ci à Paris, photo Alina Reyes

J’ai critiqué vivement hier la traduction de Victor Bérard (et j’ai révisé ma note car je m’y étais emmêlé les pinceaux) d’après le début que j’en avais lu. Aujourd’hui, m’étant procuré d’autres traductions encore en bibliothèque, j’ai trouvé cette autre critique sur le travail de Bérard par un autre traducteur de l’Odyssée, Louis Bardollet : « V. Bérard, dans son édition parue en 1924, et sans cesse reprise depuis cette date, s’est livré à un travail de démolition du poème d’Homère qu’il a conduit avec une admirable persévérance. Des vers, des morceaux entiers sont supprimés ou changés de place, quand ce ne sont pas des chants, et cela d’un bout à l’autre de l’œuvre. » La prochaine fois, nous entendrons un homme, animé par Athéna, accuser ceux qui regardent sans réagir les prétendants se livrer à leur entreprise de vandalisme. On pourrait en dire autant de ceux des professeurs, éditeurs et autres intellectuels qui se font les complices de tels vandalismes sur des chefs-d’œuvre.

Nous en étions au moment où, après la survenue des aigles, le vieux devin allait prendre la parole. Voici ce qu’il dit, et comment lui réplique Eurymaque, l’un des prétendants.
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« Écoutez maintenant, gens d’Ithaque, ce que je vais dire :
C’est particulièrement aux prétendants que je m’adresse,
Car un grand malheur roule vers eux. En effet Ulysse
Ne sera plus longtemps loin des siens. Il est quelque part
Près d’ici, plantant la graine du carnage et de la mort
Pour tous les prétendants. Et il y aura du malheur
Pour d’autres habitants de la bien visible Ithaque. Alors
Songeons dès maintenant au moyen d’arrêter cela.
Qu’ils cessent d’eux-mêmes, c’est présentement le mieux.
Je ne rends pas des oracles en homme inexpérimenté,
Mais en savant, et tout ce que j’ai dit s’accomplira,
Comme ce que j’avais prédit quand les Argiens embarquèrent
Pour Troie et que partit avec eux Ulysse aux mille sens :
Qu’il souffrirait mille maux, perdrait tous ses compagnons,
Et qu’inconnu de tous, vingt ans après il reviendrait
Chez lui. Voici maintenant que tout cela se réalise. »

Ainsi lui réplique Eurymaque, fils de Polybe :

« Eh, le vieux, va donc rendre tes oracles chez toi,
À tes enfants, de peur qu’il ne leur arrive malheur
Dans l’avenir ! Ici, je prophétise bien mieux que toi.
Certes beaucoup d’oiseaux vont et viennent sous le soleil
Mais tous n’annoncent pas l’avenir. Quant à Ulysse,
Il a péri au loin. Dommage que tu ne sois pas mort
Avec lui ! Tu ne nous ferais pas de telles prédictions
Et tu n’exciterais pas la bile du si affligé
Télémaque, dont, j’imagine, tu auras un cadeau !
Mais je te le dis, et cela va bel et bien s’accomplir :
Si tu as en tête, avec tes très antiques conseils,
De pousser un tout jeune homme au ressentiment,
Celui qui, d’abord, aura à en pâtir le plus, c’est lui :
Car de toutes façons, il ne pourra jamais réussir.
Quant à toi, vieillard, nous t’infligerons un châtiment
Pénible à ton cœur, une douleur dure à supporter.
À Télémaque, devant tous, voilà ce que je conseille :
Qu’il ordonne à sa mère de retourner chez son père.
Qu’on s’apprête au mariage, qu’on prépare les cadeaux,
Fort nombreux comme il convient pour une fille bien-aimée.
Je ne pense pas qu’avant cela les fils des Achéens
Cesseront leur terrible poursuite. Quoi qu’on fasse, nul
Ne nous fait peur, ni Télémaque qui parle tant,
Ni toi, vieillard, et tes prophéties dont nous n’avons cure,
Que tu nous assènes en vain et qui te rendent plus odieux
Encore. Ses biens seront dévorés toujours plus et rien
Ne changera tant que les Achéens verront différé
Le mariage. Encore une fois nous attendons tous les jours,
Nous luttons à cause de sa vertu, sans aller
Vers d’autres femmes, que chacun serait digne d’épouser. »

Ainsi répond à haute voix le sage Télémaque :

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le texte grec est ici
le premier chant dans ma traduction, en entier
à suivre !

Odyssée, Chant II, v. 129-160 (ma traduction)

à Paris ces jours-ci, photo Alina Reyes

à Paris ces jours-ci, photo Alina Reyes


Voici la réponse de Télémaque à ceux qui lui demandent de collaborer avec eux pour faire plier sa mère, Pénélope. Puis l’arrivée magnifique des deux aigles.
Les derniers vers de la réponse de Télémaque sont exactement répétés du discours qu’il a déjà fait la veille aux prétendants. Homère insiste ainsi sur le caractère nécessairement répétitif de la demande – qui reste non écoutée – et sur la détermination du jeune homme. Par cette réponse de Télémaque, il évite aussi à ses personnages la pire situation possible, celle d’une trahison intrafamiliale, comme celle évoquée par Zeus dès les premiers vers de l’Odyssée, comme celles que mettront en scène, deux à trois siècles plus tard, les dramaturges grecs, et qui ne peuvent que finir épouvantablement.
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Ainsi répond à haute voix le sage Télémaque :

« Antinoüs, en aucune façon je ne chasserai
De la maison celle qui m’a mis au monde et nourri.
Mon père est quelque part sur la terre, vivant ou mort,
Et j’aurais beaucoup de mal à payer ma dette à Icare,
Si je lui renvoyais ma mère. Et je serais puni
Par mon père et par les dieux aussi quand ma mère, invoquant
Les terribles Furies après avoir quitté la maison,
Serait vengée par les humains. Je ne prononcerai donc
Jamais une telle parole. Si cela vous irrite,
Quittez donc ce palais. Préparez d’autres repas,
Consumez vos propres ressources, invitez-vous tour à tour.
Mais s’il vous semble plus avantageux et meilleur
De persister à ruiner impunément l’existence
D’un seul homme, allez-y, pillez ! Moi j’invoquerai les dieux
Éternels, afin que Zeus vous fasse payer vos actes.
Puissiez-vous périr sans vengeance au sein de cette maison ! »

Ainsi parle Télémaque. Alors Zeus qui voit au loin
Envoie voler, du sommet de la montagne, deux aigles
Qui tombent en planant le long d’un courant d’air,
L’un à côté de l’autre, les ailes étendues.
Mais quand ils arrivent au-dessus de la bruyante agora,
Ils se mettent à tournoyer en battant de leurs ailes épaisses,
Dévisageant chacun, annonçant du regard la mort.
Puis, de leurs serres, ils se déchirent les joues, autour du cou,
Et s’élancent à droite à travers leurs maisons et leur ville.
Ces oiseaux, qu’ils ont de leurs yeux vus, les laissent stupéfaits.
Remués dans leur cœur, ils songent à ce que cela présage.
Alors vient leur parler le vieux héros Alithersès,
Fils de Mastor, qui l’emporte sur tous ceux de son âge
En connaissance des oiseaux et en interprétation
Des augures. Bien disposé envers eux, il leur dit :

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le texte grec est ici
ma traduction du premier chant entier est
à suivre !

9 œuvres de Seth à Paris 13e

Avec d’autres street artistes, il réenchante des quartiers un peu tristes, bétonnés. Peintre poète de l’enfance, de la couleur, de l’imaginaire, il fait le tour du monde en « globepainter ». Voici 9 œuvres de lui dans le vaste treizième arrondissement de Paris, dont certaines toutes récentes, de la Butte-aux-Cailles au quartier Nationale.
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seth 3-minLa dernière fresque a été réalisée avec le non moins excellent surréaliste ukrainien Kislow. Photos Alina Reyes
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J’ai fini de préparer mon livre Une chasse spirituelle pour la version papier, il sera disponible dans quelques heures. Pour participer à réenchanter notre monde.

Trek en Lozère. Bonus : l’art urbain à Quézac

Que faire en ville par temps de canicule ? Tranquillement je lis, j’écris, je peins, je joue du piano. Et je prépare, comme prévu depuis longtemps, une rentrée littéraire à ma façon, haha. Tandis que mes muscles se reposent de ces deux semaines de trek, voici un bonus à mes notes précédentes avec les ornements charmants du village de Quézac, celui où l’on produit l’eau pétillante du même nom.
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Photos Alina Reyes. La première œuvre se trouve à Molines, autre beau village proche de Quézac, la dernière entre Quézac et Ispagnac

Voir aussi :
les ciels du causse Méjean
le bestiaire du causse Méjean
l’architecture traditionnelle de Lozère
notre trek pas à pas

De l’aristocratie et de la médiocratie en France

Tag à Paris ces jours-ci, photo Alina Reyes

Tag à Paris ces jours-ci, photo Alina Reyes

Je suis contente d’avoir finalement fait ma thèse, comme je le souhaitais trente ans plus tôt. Mon projet avait été interrompu par le succès de mon premier roman, comme mes études avaient été interrompues en terminale par l’incapacité de mes parents à me permettre de faire des études (ils étaient pauvres) et par leur refus de laisser ma prof de lettres et de grec, qui l’avait généreusement offert, se charger de me loger et de s’occuper de moi afin que je puisse continuer mon parcours. J’avais repris mes études dès que possible, dix ans plus tard et mère de deux enfants. Et voilà qu’au niveau du DEA (Master 2) ce « succès » me tombait dessus : je l’ai fui en quittant le pays. Je n’aime pas les paillettes, j’aime la liberté, la paix, l’amour et le travail. Et j’ai enfin pu retrouver le chemin de la fac trente ans après l’avoir quittée, j’ai mené cette thèse à bien, je l’ai soutenue il y a deux ans.

J’aurais aimé pouvoir enseigner en fac, transmettre les fruits de mon travail, mais c’était apparemment impossible. En France être l’auteure d’une trentaine de livres et d’une thèse de doctorat, qui plus est admissible à l’agrégation et titulaire du CAPES, vaut moins pour enseigner que d’avoir un parcours ordinaire et surtout des copains dans la place. Cela ne concerne pas que l’université. Nous vivons dans une république de copains, où le copinage, le réseautage et les renvois d’ascenseur tiennent lieu de compétences. C’est ainsi que la médiocratie s’est installée un peu partout, à commencer par le sommet de l’État. Les gens qui désirent vraiment se consacrer à leur travail, quel que soit ce travail, n’ont pas envie de « succès », et encore moins de perdre leur temps à manœuvrer pour obtenir ce que le vulgaire appelle le succès. Alors ils quittent le pays ou bien ils s’en isolent. L’aristocratie de l’esprit en France se tient nécessairement à l’écart, tandis que le vulgaire siège dans la petite masse malodorante des élites.
N’entrez pas sans masque dans les commerces !

Street Art, du canal Saint-Martin au canal de l’Ourcq en 38 images

On a pris nos vélos, traversé Paris (vive la piste cyclable place de la Bastille, où l’on peut désormais rouler sans risquer sa vie à chaque croisement). Et j’ai mis pied à terre pour la photo chaque fois que j’ai rencontré une belle œuvre. Bien entendu j’en aurais photographié davantage à pied, mais à pied je n’aurais pas fait près de vingt kilomètres aller-retour. En voilà déjà une belle collection, avec des artistes souvent différents, comme Vinie ou Da Cruz, de ceux que je photographie régulièrement dans les 13e et 5e arrondissements.
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du canal st martin à l'ourcq 4-min… avec les belles jambes d’O

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Hier à Paris 10e et 19e, photos Alina Reyes
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