C’est à lui que vous l’avez fait

 

La terre tremble, les tombeaux s’ouvrent.

Du cœur de l’homme sortent les morts.

L’eau et le sang ont coulé du corps

D’amour. Les ténèbres tombent, couvrent

 

Les heures du jour très long, blessées.

Tonnerre sans pluie, ébranlement

De l’univers, horrible moment

De la mort dans l’âme rabaissée.

 

Froid. Les pierres, muettes, se fendent.

Au pied de la croix de vérité,

Témoins et proches tétanisés.

Que du ciel le jugement descende !

 

Le ciel se tait, leur reste invisible.

Parmi les hommes, combien ont ri

Devant la douleur de l’homme pris

Au piège des hommes ! Indicible.

 

Ils jaillissent de la mort du monde,

Les morts, ceux qui sont saints, seuls vivants

Dans la ville suicidée, errant.

Parlent-ils ? Personne qui réponde.

 

Personne, sinon, au sanctuaire,

Cela qui vient au jour, déchirer

Le voile et exposer, nu, le vrai.

Commencement de la nouvelle ère.

 

*

(Voyage)

 

 

Le moment arrive

Saussure, les Pèlerins d'Emmaüs

 

J’attendais ce moment, celui de pouvoir acheter un billet d’avion et d’avoir les moyens de partir quelque temps en Israël, où je veux fonder les Pèlerins d’Amour. Ce moment est maintenant tout proche. Je vais y aller, je vais commencer à faire moi-même la Pèlerine, avec un minimum de moyens, en marchant et en allant prier dans les mosquées, dans les églises, et même ailleurs si c’est possible. J’écrirai là-bas un livre sur l’être du Messie. La publication de Voyage aura lieu quand Dieu le voudra, en attendant je vais préparer les chemins. Incha’Allah.

Le premier lieu sur lequel je suis tombée en regardant sur google, c’est l’abbaye bénédictine d’Abou Gosh. Je commencerai peut-être par là, s’ils peuvent me recevoir. Ils sont à dix mètres de la mosquée, et ils vivent dans le désir d’ouverture. Nous verrons bien. Ce village à l’histoire contemporaine particulière était peut-être, du temps de Jésus, le village d’Emmaüs, où il est apparu ressuscité, en chemin avec deux de ses disciples. Allahou akbar. Loué soit Dieu.

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Voyage, la maison

4 mai 2010, en descendant de chez moi, avant d'y remonter quelques jours plus tard, pour encore de nombreux mois, seule (photos Alina Reyes)

 

Ma petite maison de pierre là-haut dans la montagne, dont j’ai dû me défaire, en vérité c’est la maison de Dieu, et elle le restera. Voyage aussi, c’est elle. Et il ne sera jamais permis que je laisse les faussaires corrompre sa parution.

Ce n’est pas seulement la maison, c’est la forêt, c’est la montagne, qui sont vivantes et qui me connaissent, et je leur serai fidèle, je veillerai à rester digne d’elles. Les gens ne comprennent rien parce qu’ils ne connaissent pas du tout Dieu. Ils ne comprennent absolument rien à ma démarche, ils ne comprennent pas que Voyage doit être préservé de la souillure. Ils ont les yeux malades et le nez bouché, la souillure ils ne la voient pas, ne la sentent pas, vivent dedans, la font, la vantent, croyant que là est l’ordre des choses.

Tant d’hommes sont malades. Ils ne se guériront pas avec des pansements souillés, des remèdes pourris. Ils ont fait de la vérité, de l’amour, de la littérature, des choses viciées, morbides. Ils ne savent, avec leurs instruments sales, que creuser un peu plus chaque jour la tombe de l’humanité. Même si je meurs, le diable ne sera pas autorisé à mettre la main sur ce livre. Quand Jésus tend l’autre joue, celui qui est assez mauvais pour ne pas renoncer à le frapper de nouveau, sa main s’y brûle, en prémices du feu éternel. Mais Jésus reste intact.

Beaucoup d’autres hommes marchent dans un chemin de lumière douce et fraîche comme la neige. Je suis la foi.

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« Les Romains ont été vaincus ». Sourate « Les Romains », 2.

Olivier enneigé à la Grande mosquée de Paris, photo Alina Reyes

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Selon la prophétie de Malachie, le dernier pape s’appelle Pierre le Romain. Quel que soit le nom qu’il ait endossé, tout pape, évêque de Rome, est « Pierre », successeur de Pierre, et le Romain.

Selon une lecture historique, « Les Romains » du Coran seraient en fait des Byzantins, battus par les Perses en Palestine vers 613-614. Ils sont nommés Romains parce que chrétiens, rattachés à Rome – de même que tout pape est Pierre parce que rattaché à Pierre. Une partie des Arabes se réjouissait de cette défaite des Romains, mais les Croyants parmi eux se réjouirent de leur victoire finale, car ils représentaient les croyants alors que les Perses représentaient les mécréants.

« Les Romains ont été vaincus,

dans le pays voisin, et après leur défaite ils seront les vainqueurs,

dans quelques années. À Dieu appartient le commandement, au début et à la fin, et ce jour-là les Croyants se réjouiront

du secours de Dieu. Il secourt qui Il veut et Il est le Tout Puissant, le Tout Miséricordieux.

C´est [là] la promesse de Dieu. Dieu ne manque jamais à Sa promesse mais la plupart des gens ne savent pas. » (v. 2-6)

 

Pourquoi, pour qui, cette défaite et cette victoire ? La suite de la sourate l’indique, en voici trois versets dans la traduction d’André Chouraqui :

 

14.     Le jour où l’Heure surgira,

ce jour-là ils se diviseront.

 

15.     Ceux qui adhèrent et sont intègres

s’extasieront dans les pâturages.

 

16.     Ceux qui effaçaient,

niaient nos Signes et la Rencontre, l’Autre :

les voilà présents au supplice !

 

Au final, la division s’opère non entre les Romains et les Perses, mais parmi eux entre les croyants et les mécréants. Les « mauvais romains » et les « mauvais perses » seront au supplice, les « bons romains » et les « bons perses » pâtureront. Le destin des Croyants, des gens issus de la Parole de Dieu venue à travers Ses Livres saints, et qui lui sont fidèles, comme des gens qui sont fidèles à ce qui est juste… le destin des Justes, est un et unique.

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Au bout du Voyage, c’est la nuit et le jour

église fortifiée de Luz-Saint-Sauveur, photo Alina Reyes

 

Les dix livres de Voyage s’agencent maintenant comme miraculeusement. Je n’ai pourtant pas fait exprès, je les ai déplacés et recomposés dans l’espace du Livre comme malgré moi, et à la fin je regarde : sidérée de voir comme leur enchaînement est parfait. En même temps c’est un Livre ouvert (de 1470 pages), on peut y cheminer longuement, au long de nombreux lacets comme en montagne, mais aussi par des montées fulgurantes. Parfois il faut s’accrocher au rocher pour pouvoir progresser, mais souvent la nuit ou la lumière vous portent ou vous emportent, dans cette ivresse qui gagne au bout d’un moment tout marcheur qui monte dans l’air pur. Et qui, loin de toute pollution, a tout le temps de la contemplation, dans ses haltes comme dans son avancée.

Je laisse en ligne sur ce site l’ancienne version, autrement agencée et plus courte, mais je n’y mettrai pas la nouvelle avant qu’elle ne soit publiée aussi sur papier. Il se peut que cela prenne du temps, car je dois attendre que cette publication puisse se faire dans des conditions de clarté qui pour l’instant ne sont pas du tout réunies. Nous attendrons autant qu’il faudra, nous en remettant à Dieu.

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