Techno Parade 2017, Paris, en 30 photos

J’ai entendu arriver de loin la Techno Parade alors j’ai traversé la Seine, je l’ai rejointe et je l’ai photographiée. J’aime la danse, la musique, l’énergie, la couleur, la fête. Un garçon m’a demandé un câlin, on l’a fait, d’autres m’ont demandé de les photographier, un autre est venu parler avec moi, puis un peu plus tard est revenu me dire au revoir.

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techno parade 2017 29les camions les moins drôles sont à la fin

techno parade 2017 30sur le passage, restent des musiciens

et sur la Seine, le ciel est bien beau

cielcet après-midi à Paris, photos Alina Reyes

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Rohingyas. Merci à Bernard Kouchner

Tandis que les médias rapportent que dans une télé poubelle du samedi soir une écrivaine s’en est pris, au nom de la défense des juifs, à l’Arabe et au Noir en France – c’est ainsi que je l’interprète, en l’absence de critique aussi du racisme et de l’islamophobie, qui est une forme d’antisémitisme – il est bon d’entendre Bernard Kouchner s’exprimer sans détours contre l’épuration ethnique qui dure depuis trop longtemps en Birmanie et dire clairement la responsabilité d’Aung San Suu Kyi, icône occidentale en toc. Merci à lui et à Christophe Hondelatte qui lui a donné la parole.

Voir aussi cet appel de 2013 des Rohingyas à la communauté internationale, décrivant la situation insoutenable de ces gens.

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Forêt profonde

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L’exclusion des auteurs gênants, qu’on aime dénoncer dans les pays étrangers, se passe en France de façon beaucoup plus sournoise et plus efficace. Voici un livre qui a été empêché de rentrée littéraire, qui reste donc d’actualité, toujours à lire et à découvrir. Il y a dix ans, la parution de mon roman Forêt profonde aux éditions du Rocher, parce qu’il contrariait le milieu littéraire, fut occultée par toute la presse parisienne. Il passa tout de même à travers les mailles de ce filet d’exclusion serré dans trois journaux éloignés de ce milieu. Voici des extraits de deux critiques et d’un entretien parus respectivement dans La Marseillaise, Autre Regard, et Grandes écoles magazine.

« Elle fut mondialement connue (…) cette romancière au souffle puissant possède une vraie plume de conteuse, et surtout ne pratique pas la langue de bois. Pour ses fans et son fidèle public, c’est une joie de la retrouver en cette rentrée littéraire 2007 avec son excellent « Forêt profonde », qu’elle publie aux éditions du Rocher, dont on constatera que le catalogue réunit peu ou prou toute la grande famille des auteurs français. (…) une longue analyse, une belle réflexion sur le sens du sacré. Nous verrons comment une crèche en montagne devient un objet d’art, pourquoi l’on se perd parfois dans l’Europe gelée, et on brossera devant nous une foule de personnages iconoclastes, avec ce qu’il convient de compassion et de brutalité langagière. Un roman coup de poing, mystérieux comme une « forêt profonde ».

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« Alina Reyes fait par bribes le récit de sa vie dans un jaillissement, un long cri.(…) On retrouve les thèmes et l’écriture envoûtante et poétique de La chasse amoureuse. On est fasciné par le rythme de ses phrases, le poids des mots : « Je livre mon âme comme on saute dans l’abîme car c’est ma vocation ». (…) abasourdi, le lecteur en sort terrassé. »

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« En quoi ce dernier roman est-il l’aboutissement d’une carrière littéraire exceptionnelle ?

– Quelques mois après l’avoir écrit, je me suis rendue compte, un beau matin, qu’Alina Reyes était morte. Peut-être l’a-t-on un peu tuée. »

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Globale ou syllabique ? Éducation Nationale, le grand déni

grafLe ministre de l’Éducation nationale parle de restaurer la méthode syllabique d’apprentissage de la lecture, aussitôt les syndicats se récrient, prétendant que la globale n’est plus employée depuis « des décennies ». Il y a quinze ans, j’ai découvert avec une énorme consternation que le livre de lecture de mon fils, entrant au CP, lui demandait de « photographier les mots », avec petit dessin d’appareil photo à l’appui au-dessus des mots, avant qu’on lui ait seulement appris les lettres – cela viendrait, plus ou moins, plus tard. J’ai cherché et acheté un livre de méthode syllabique, à l’ancienne, et je lui ai appris à lire de cette façon, ce qui l’a beaucoup soulagé car il était désemparé par cette méthode qualifiée de semi-globale (qui a toujours cours) qui est tout simplement un interdit de penser. Sur la lancée, préférant prévenir que guérir, j’ai appris aussi à son petit frère à lire ainsi alors qu’il était encore à la maternelle (du coup, sachant déjà lire, il a pu prendre un an d’avance en primaire et depuis il a fait et fait d’excellentes études).

À la même époque, j’ai été invitée à dîner, avec quelques autres personnes, par la ministre de l’Éducation nationale alors en poste. J’en ai profité pour évoquer ce problème. Tous ses conseillers m’ont alors soutenu, comme le font les syndicats aujourd’hui, que cette méthode n’était plus employée depuis des décennies. J’avais beau leur parler du petit appareil photo du livre, ils niaient. Ce n’est pas tout, disent les syndicats d’enseignants, d’apprendre à déchiffrer, il faut aussi enseigner aux enfants à comprendre ce qu’ils lisent. Certes, mais comment le comprendraient-ils, s’ils sont incapables de le lire, comme un grand pourcentage d’entre eux à leur arrivée au collège ? La méthode syllabique ne fait pas qu’apprendre à déchiffrer. Comme les mathématiques ou l’apprentissage des langues, elle éduque le cerveau, le rend capable de déchiffrement non seulement des lettres mais du sens des textes, et de la complexité du monde. La globale est la méthode de la passivité, de la réception des images comme devant la télévision, de la destruction de la capacité à penser.

Tout semble fait pour empêcher les élèves de penser. Les programmes sont surchargés, il faut toucher à tout sans rien apprendre en profondeur. Ce n’est pas de l’apprentissage, c’est du zapping, et il n’en reste quasiment rien. Je ne crie pas à la décadence de l’éducation, car il y a très longtemps que le problème se pose, même s’il semble s’accentuer dramatiquement. Où ai-je appris la littérature ? Certainement pas au lycée, il y a plus de quarante ans. La méthode Lagarde & Michard n’était pas non plus apte à enseigner la lecture. Mais du moins n’avais-je aucun problème à déchiffrer un texte, et partant, à lire tous les livres que je voulais, sans souci des programmes. De même en mathématiques j’avais acquis assez d’outils pour le calcul à l’école primaire, mon cerveau était assez exercé pour aborder l’algèbre en sixième. Ce que j’ai vu avec la scolarité de mes derniers enfants, qui étaient en primaire au début des années 2000, c’était un programme aux yeux beaucoup plus gros que le ventre, où tout n’était qu’effleuré, dans toutes les matières. Pour autant, les enfants étant ce qu’ils sont, intelligents par nature, beaucoup arrivent à développer leurs capacités malgré les mauvaises méthodes d’apprentissage qu’ils subissent. Mais beaucoup, trop écrasés à la fois par le milieu social et par l’école, ne s’en sortent pas. Et nous n’avons pas le droit de nous y résoudre. Il en va de leur avenir et de notre avenir, de l’avenir de tout le pays, que chaque talent puisse se développer au mieux.

Dans quelques jours c’est la rentrée. Certifiée de l’année, je sais dans quel lycée j’ai été affectée, mais comme tous mes nouveaux collègues sans doute, j’ignore quelles classes me seront confiées et quel programme je devrai leur enseigner. On voit là tout le décalage entre des programmes venus d’en haut, contraignants, et l’impréparation, voire l’improvisation auxquelles sont abandonnées les enseignants. Si j’avais à faire moi-même un programme d’enseignement pour telle ou telle classe qu’on m’aurait dit me confier, je l’aurais préparé avec joie. Mais je me sens traitée comme un élève à qui l’on veut apprendre à lire en lui disant de photographier les mots : comme quelqu’un dont on veut nier l’intelligence et l’autonomie. Les programmes officiels du lycée, que j’ai consultés dans l’espoir d’y trouver des indications, sont si vastes qu’il faudrait y passer vingt ans avec une classe pour les aborder un peu sérieusement. Une situation déplorablement absurde.

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L’argument de tous les abuseurs. Un enseignement pour les élèves

l'autre jour à Paris 1er, photo Alina Reyes

l’autre jour à Paris 1er, photo Alina Reyes

E. Macron après avoir manœuvré afin de se faire élire grâce à la presse, et notamment la presse people, une fois élu porte plainte contre un photographe de presse posté dans la rue de sa résidence de vacances.

Roman Polanski est accusé par au moins une troisième femme de l’avoir violée alors qu’elle était adolescente.

D. Trump justifie le meurtre d’une manifestante antifasciste par des manifestants néonazis à Charlottesville par l’argument de tous les abuseurs : « Il y a eu des torts des deux côtés. »

Trois exemples qui ne font qu’illustrer la masse des comportements œuvrant à la confusion des valeurs afin de toujours restaurer la loi du plus fort. L’une de ces constantes que la littérature peut aider à repérer. Les professeurs de lettres, dont je suis dans quelques semaines, doivent aider leurs élèves à repérer, plus encore que la forme des textes, dont l’étude est trop privilégiée par les programmes, leur fond (que même certains professeurs agrégés, faisant passer les concours, ne voient pas). Voir note précédente sur l’écorce et le noyau de l’arbre vus par Rûmî, poète mystique du treizième siècle qui rappelons-le avait entre autres aperçu, de façon beaucoup plus élaborée que Démocrite, le fonctionnement nucléaire et la fission de l’atome, avec ses conséquences.

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Il y a toujours des bidonvilles en France

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Voilà ce qu’on voit de l’autoroute, sur des dizaines et des dizaines de mètres, au nord de Paris. Après plus de vingt ans, tout reste à faire, titrait Médecins du monde en 2014. En 2017, rien n’a changé.

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Comment se fait-il que la riche Europe, et notamment la France (car dans certains autres pays, les choses se passent mieux) laissent perdurer cet état de fait indigne ?

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Cessons de chasser les Roms de leurs bidonvilles si c’est pour les jeter à la rue, il faut bien qu’ils habitent quelque part ; mais cessons aussi de supporter que des enfants, que des gens, vivent dans ces conditions à nos côtés.

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C’est une question de volonté politique.

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Les Espagnols ont intégré des centaines de milliers de Roms. Il y en a quelques milliers en France, il est tout à fait possible de faire quelque chose,

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si l’on veut bien considérer qu’un être humain est un être humain, et que les pouvoirs politiques sont délégués pour tous les êtres humains.

bidonville autoroute nord paris 7Gennevilliers, août 2017, photos Alina Reyes

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Qu’est-ce que rien ? Déterminations de l’être

 

Comme le pronom indéfini on, qui peut être pronom personnel lorsqu’il est employé à la place de nous, rien est à l’origine un nom : on vient du latin homo, « homme » (en ancien français hom, om ou on, tantôt nom et tantôt pronom), rien vient du latin rem, accusatif de res, « chose, être, affaire, fait » (« chose publique » dans république, faut-il le rappeler à M. Macron qui dans son nihilisme existentialiste – l’être ne serait pas donné, il faudrait y accéder en s’accrochant de toutes ses longues dents à la société – déclarait le 29 juin dernier qu’il y a « des gens qui ont réussi et des gens qui ne sont rien » – qui, donc, ne feraient partie ni de l’humain ni de la république). C’est avec des « ils ne sont rien » qu’on (pronom indéfini) remplit les camps de la mort. Parménide a bien spécifié que ce qui est, est ; et que ce qui n’est pas, n’est pas. Dire « des gens qui ne sont rien », c’est-à-dire « des gens qui ne sont être », « des gens qui sont néant », c’est tout simplement une faute de logique. On ne peut être non-être, on ne peut être néant (du latin populaire negens), littéralement non-gens : on ne peut être à la fois gens et non-gens. Nihilisme et confusion, nuit et brouillard.

Rien peut être un nom (un rien, des riens). Le plus souvent, il est employé comme pronom indéfini (rien ne va plus). Quelle est sa nature dans la négation ? Selon les grammairiens, pronom indéfini ou adverbe. Essayons d’y voir plus clair.

Si nous transformons en affirmative la proposition négative ce n’est rien, nous obtenons c’est quelque chose. Pour il n’est rien : il est quelqu’un. Que rien puisse être remplacé par des pronoms indéfinis indique qu’il est également pronom indéfini dans une telle configuration.

Mais quelque chose et quelqu’un sont-ils toujours de simples pronoms indéfinis quand nous disons c’est quelque chose ou il est quelqu’un ? Ne peuvent-ils avoir une valeur adverbiale, être adverbes comme lorsque, par antiphrase, rien est employé à la place de l’adverbe rudement (« C’est rien bath ici » Queneau) ? Un pronom représente ou remplace un nom. Que fait un adverbe ? Il modifie, précise, détermine le sens du verbe ou du mot (l’adjectif bath dans l’exemple précédent) auquel il s’ajoute. Si nous pouvons remplacer ces pronoms indéfinis par d’importance ou par sans importance, groupes nominaux à valeur adverbiale, (« cela n’est rien » : « cela est sans importance »), ou par les adverbes beaucoup ou peu, n’est pas parce qu’ici ils modifient le verbe, deviennent adverbes ? Avec rien, être ne prend-il pas le sens de compter pour (« n’être rien » : « compter pour rien ») ? N’être rien, dans la philosophie de l’être et du néant où l’être n’est que s’il se fabrique et s’il compte, c’est en fait n’avoir rien, socialement parlant, n’avoir pas de costard pour vous maquiller le manque d’être. Nu, le roi n’est plus roi, mais seulement ce qu’il est : un on, un homme déterminé par la société, dont l’être est mangé par l’indéfini.

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