Météorite

« Impossible de ne pas faire un peu de mysticisme.

« Il semblerait que certains « petits hommes verts » refusent de laisser des humains s’emparer de cet objet céleste, commente Maxime Chipouline. Nous pensions que nous allions pouvoir récupérer la « grande » météorite à une profondeur de 14 mètres, mais elle s’est enfoncée de plus en plus profondément dans la vase et nous parlons déjà de poursuivre les recherches à une profondeur de 16-20 mètres. Nous avons même inventé une nouvelle expression : « la vase consciente ». Par ailleurs, il se passe des choses incroyables : le canot a disparu 5 fois, les moteurs tombent en panne, les appareils s’affolent : cette zone est apparemment remplie d’anomalies ! » »

À la recherche de la météorite de Tcheliabinsk : l’article entier dans La Russie d’Aujourd’hui.

Voir aussi : l’Église de la météorite de Tchéliabinsk, dans La Voix de la Russie

Et je ne savais pas que des fragments de la météorite sont tout près de chez moi, au Jardin des Plantes.

*

Machines qui broyez les muscles et le sang

ouvrez un hublot pour l’orage,

que soit le roc visité par la foudre

humilié d’amour des pieds jusqu’à la tête.

 

Que soit le nom crié de sommet en sommet

frotté comme un galet de mer par les figures,

comme un galet blessé, une biche souffrante,

au bord des grandes eaux.

 

Le tremblement de terre est en route. Quel est

le mot de passe cri ou chanson ou sésame ?

L’arbre de l’existence

sera-t-il le premier des arbres foudroyés ?

 

Benjamin Fondane, Titanic

 

Des sables elles surgit, ressuscitée

Voie Lactée. Ex arena rediviva surgit, c’est la devise de ma ville, Soulac, dont le nom selon certains désigne, solum lac, le lait de la Vierge rapporté là par Véronique, et dont la basilique Notre-Dame de la Fin des terres réapparut d’entre les sables à partir de 1858, année où apparut à Lourdes l’Immaculée Conception, Soulac où une petite réplique de la Statue de la Liberté fait face, par-delà l’horizon, à l’autre rive, invisible aux yeux humains, mais qui est.

*

– Ô bras neigeux de Dieu, j’ai vu Ses bras, là, sur les côtés de l’Échelle de Jacob, là par où il nous aurait fallu évacuer (comme si des canots de sauvetage avaient pu rien faire d’autre que de s’écraser comme des fétus contre les flancs du navire, dans cette furie) la face blanche et personnelle de Dieu m’a dit : « Ti-Jean, ne te tourmente pas, si je vous prends aujourd’hui, toi et tous ces pauvres diables qui sont sur ce rafiot, c’est parce que rien n’est jamais arrivé sauf Moi, tout est Moi – » ou comme le disent les textes sacrés Lankavatara : « Il n’y a rien d’autre au monde que l’Éternité dorée de l’Esprit divin » – Je voyais les mots « TOUT EST DIEU, RIEN N’EST JAMAIS ARRIVÉ SAUF DIEU », écrits en lettres de lait sur cette étendue marine. – Mon Dieu, un train infini dans un cimetière sans limites, voilà ce qu’est cette vie, mais elle n’a jamais été rien d’autre que Dieu, rien d’autre que cela – c’est pourquoi plus la plus haute vague monstrueuse se dresse pour se moquer de moi et pour m’insulter, plus je prendrai plaisir à la contemplation du vieux Rembrandt avec mon pichet de bière, et plus je malmènerai tous ceux qui se gaussent de Tolstoï, quelle que soit votre résistance ; et nous atteindrons l’Afrique, nous l’avons atteinte d’ailleurs, et si j’ai appris une leçon, ce fut une leçon en BLANC. 

Jack Kerouac, Le vagabond solitaire 

*

Voyageur

La sonde Voyager 1 est le premier objet humain à quitter le système solaire. Partie pour des milliards d’années. L’article dans Métro.

*

(…)

Que si la source vient à manquer d’une plus haute connaissance,

L’on fasse coucher nue une femme seule sous les combles –

Là même où furent, par milliers, les livres tristes sur leurs claies comme servantes et filles de louage…

Là, qu’il y ait un lit de fer pour une femme nue, toutes baies ouvertes sur la nuit.

Femme très belle et chaste, agréée entre toutes femmes de la Ville

Pour son mutisme et pour sa grâce irréprochable, infusée d’ambre et d’or aux approches de l’aine,

Femme odorante et seule avec la Nuit, comme jadis, sous la tuile de bronze,

Avec la lourde bête noire au front bouclé de fer, pour l’accointement du dieu,

Femme loisible au flair du Ciel et pour lui seul mettant à vif l’intimité vivante de son être…

Là qu’elle soit favorisée du songe favorable, comme flairée du dieu dont nous n’avons mémoire,

Et frappée de mutisme, au matin, qu’elle nous parle par signes et par intelligence du regard.

Et dans les signes du matin, à l’orient du ciel, qu’il y ait aussi un sens et une insinuation…

(…)

Saint-John Perse, Vents

*

Lune

Bel ensemble d’articles sur les gâteaux de lune, pour la fête de la lune, dans Chine Informations – même si le Quotidien du Peuple rappelle que le luxe devient moins vendeur. Et voici un beau calendrier lunaire.

*

Quand la lune passe à l’ouest

L’ombre des fleurs

S’avance à l’est

 

Fleurs dispersées

Le radeau lui aussi

Est une branche de cerisier

 

Allumant une bougie

À la flamme d’une autre

Soir de printemps

 

Laissant mon ombre

Derrière moi

Je vais au printemps

 

Yosa Buson,  Printemps  (traduit du japonais par Koumiko Muraoka et Fouad El-Etr)

*

Le Cerf du Bois Lemoine

Parfois, au milieu du néant de « l’information », un éclair de vie.

*

Que la poésie soit liée d’intime aux forêts, que la forêt primaire soit le lieu dévolu à l’excroissance du verbe humain.

Que le verbe naisse du buisson et renaisse du bois.

Que du murmure des arbres procède le cœur des livres

 

Philippe Bordas, L’invention de l’écriture

*

Une terre lointaine

« J’ai continué à marcher, malgré mon barbelé dans la cuisse. Il faisait si froid. Si je m’arrêtais, j’allais m’endormir, mourir sur place. J’avançais, et il y avait juste une idée dans ma tête : le jardin, la ménagerie. Là-bas il ferait chaud, à cause du souffle des animaux endormis. » (Je finis de taper L’Exclue, paru en 2000 et dont je n’ai plus le manuscrit, qui sera l’un des livres reproposés ici dans quelques jours sous forme numérique).

*

 » … Et l’homme ultime prononcera sa première parole, afin que poussent les herbes, et que la femme comme un rayon de soleil apparaisse à son côté. Et de nouveau il adorera la femme et la couchera sur l’herbe ainsi qu’il a été ordonné. Et les rêves obtiendront vengeance, et ils sèmeront des générations dans les siècles des siècles !

 

Vers une terre lointaine et sans péché désormais je m’avance.

Désormais me suivent des créatures légères

avec aux cheveux les irisations du pôle

et sur la peau le doux scintillement de l’or.

Étrave mon genou, je progresse parmi les herbes

et mon haleine rejette de la face de la terre

les ultimes pelotes du sommeil.

Et les arbres cheminent à mon côté, contre le vent.

Je vois de grands mystères singuliers et étranges :

Fontaine la caverne d’Hélène.

Trident avec dauphin la forme de la Croix.

Porte blanche le barbelé sacrilège.

Par là glorieux je passerai.

Les paroles qui m’ont trahi et les gifles seront

devenues myrtes et palmes :

Hosanna annonceront-elles, Hosanna à celui qui vient !

Je vois dans la privation la jouissance du fruit.

Oliviers obliques avec un peu de bleu entre les doigts

ces temps de la colère derrière les barreaux.

Et plages sans fin, humides du désir ensorcelant des yeux,

les profondeurs de Marina.

Là chaste je marcherai.

Les larmes qui m’ont trahi et les humiliations

seront devenues souffles et chants infinis d’oiseaux :

Hosanna annonceront-elles, Hosanna à celui qui vient !

Vers une terre lointaine et sans péché désormais je m’avance. »

 

Odysseas Élytis, Prophétie

*