Pleine de grâce

photo Alina Reyes

 

Je trouve ici ces deux merveilleux hadith : « Le jeûne est la moitié de la patience » et « La patience est la moitié de la foi ». J’ajoute : et connaître la patience, la vraie humble, confiante et paisible patience, c’est entrer dans la béatitude.

Entendre parler des choses de Dieu ne met-il pas en joie ? Or notre monde sans cesse s’emploie à rabaisser la Sagesse de Dieu en sciences humaines dépourvues de grâce. Aucune religion n’est l’ennemie de l’autre, au contraire, si les unes et les autres veulent bien se retrouver sur la place de l’universelle et pleine de grâce Sagesse de Dieu.

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Moi, vaisseau spatial


tout à l’heure à l’Institut du Monde arabe, photo Alina Reyes

 

À l’Institut du Monde arabe il faisait frais comme dans un mirage. Mais je suis si complètement unie au ciel que j’ai pied absolu sur toute terre. Au long du parcours les musiques discrètes m’ont ravie en extase. Et les motifs géométriques, les astrolabes, l’écriture poussière. Les croix dans des cercles, les chandeliers à sept branches, le feu à la porte du ciel. Je n’ai jamais vu, ni de près ni de loin, un homme ou une femme qui connaisse le « ciel », mais je vois que c’est l’entière communauté des hommes qui en a connaissance, comme l’abeille a être par la ruche. Individuellement ils sont aveugles. Ils vivent selon le monde, selon des intérêts, non selon le tout, dans la gratuité parfaite. C’est pourquoi ils ne peuvent connaître le vrai ni le comprendre ni l’accueillir ni le saisir, comme le dit saint Jean des ténèbres par rapport à la Lumière. En ce moment même le ciel a les yeux grand ouverts, nous nous regardons dans les yeux et il m’embrasse sur la bouche.

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Capuche

à Istanbul. Photo Alina Reyes

 

Je me lève, je vois dans la glace mes seins moulés par le motif panthère de mon gilet en coton. Je suis allée voir un spectacle de danse, le théâtre était comble et à la fin la salle était debout, à applaudir frénétiquement. Ce n’était pas mauvais, mais de là à déclencher un tel enthousiasme… Les gens sont-ils à ce point en manque de vie ? Une autre fois je suis allée au cinéma, où je ne vais quasiment plus, voir un film encensé tant par la critique que par les spectateurs. Pas mal fait, en effet – à part ça, néant. Parce qu’il ne faut pas désespérer Billancourt, ni Saint-Germain-des-Prés ni le Marais, aux autres je dis : « oui, c’est un bon film ». Idem pour les expos, ou les très bons livres, tout ce qui fait la culture de l’homme d’aujourd’hui. Immensément plus vives et plus puissantes sont celles du Moyen Âge, ou de l’Antiquité, ou des aborigènes australiens, par exemple. Mais l’homme moderne ne sait plus ce qu’est la vie. L’homme moderne a des idées complètement faussées sur l’être, sur le soi, sur Dieu. Ceux qui sont aptes à savoir ont au moins un gilet à capuche, comme le mien.

(extrait d’un livre en cours d’écriture)