Strasbourg en 60 images

 

Se plier aux exigences du consensus, avoir ainsi le Congourd ou autre prix ou succès de ce genre, est une solution au statut précaire d’auteur. J’aime trop la vie, la liberté, la littérature, pour seulement l’envisager. Mon truc, c’est la littérature virile. J’en lis (pas dans la production actuelle car il n’y en a pas – le monde littéraire n’a jamais été viril et plus il est industriel, moins il l’est) et j’en fais. Viril ne signifie pas « de mec » mais courageux (selon son étymologie). Je regarde mon trajet depuis l’enfance, je le vois foudroyant et filant, aussi clair que l’éclair ou la météorite, ni compromis ni vaincu, toujours ultrasensible, en éveil. La voilà, l’éternité. Dans ce qui ne sombre ni ne meurt.

Présent. Voici mes images de nos trois jours (deux nuits) à Strasbourg, cette semaine. Nous comptions beaucoup visiter le musée Tomi Ungerer mais il était fermé pour travaux. Une occasion d’y retourner. Strasbourg est magnifique et les Strasbourgeois sont particulièrement gentils, courtois en toute simplicité, souriants. La nourriture et le vin sont excellents. Le centre-ville est largement dédié aux piétons et aux vélos. Les musées contiennent des trésors de tous les temps. Au sommet de Notre-Dame nous avons été accueillis par un arc-en-ciel. Avant de repartir nous avons passé du temps en privé au hamman-piscine-spa, d’où nous sommes ressortis frais comme nouveau-nés.

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strasbourg 1-minUn resto sympa pour commencer

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strasbourg 2-minVue de notre appartement à l’appart-hôtel, que je ne me lassais pas de contempler, avec les lignes graphiques des toits et la véranda, et la nuit les lumières

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strasbourg 3-minUne sculpture sur l’emplacement de la Grande synagogue détruite pendant la guerre, reconstruite ailleurs dans la ville

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strasbourg 5-minJ’ai compté jusqu’à cinq étages sous les toits de certains immeubles

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strasbourg 6-minDerrière la maison, la cathédrale la plus visitée de France (Notre-Dame de Paris étant hors jeu), haute de 144 mètres et contenant tant de merveilles qu’on pourrait y consacrer des milliers de pages, comme il y est dit quelque part

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strasbourg 12-minSon horloge astronomique, que nous avons vue s’animer au quart d’heure

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strasbourg 13-minUne fresque récente plutôt réussie, mais le panneau en grec du Christ annonçant « Je suis le chemin, la vérité et la vie » comporte deux fautes. Sans doute l’artiste, Christoff Baron, ne connaît-il pas le grec, mais il est regrettable que personne d’autre ne l’ait vu

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Retour dans la ville, où se trouve notamment la maison de l’un des enfants du pays, décidément riche en dessinateurs, Gustave Doré

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L’Ill passe partout, sans pour autant enfoncer la ville dans l’eau. C’est très beau.strasbourg 15-min

*strasbourg 16-minUn menuisier à l’atelier, fabriquant des jouets de bois

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Arpenter encore les rues, les quartiers

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Vers « la petite France », allons au Musée d’art moderne et contemporain

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strasbourg 22-minqui possède plusieurs belles œuvres de Victor Brauner – ci-dessus « Logos et les trois matières »strasbourg 23-minet aussi, entre autres de A.R. Penck – ci-dessus « Avant le rebut »

Bon je ne vais pas mettre ici toutes les images de toutes les œuvres que j’ai spécialement aimées, il y en a trop. Encore quelques-unes :strasbourg 24-minDaniel Richter, « L’éternel rêve éveillé des trois fous de la montagne »

alain séchas 2L’installation d’Alain Séchas, mentionnée dans une précédente note

strasbourg 25-minMalcolm Morley, « Wall Jumpers »

strasbourg 26-minMax Ernst, « Les poissons noctambules »

strasbourg 27-minVassily Kandisky, « Salon de musique »

strasbourg 28-minNatalia Gontcharova « Portrait de Verlaine »

strasbourg 29-minNiki de Saint Phalle, « Élisabeth »

Retour dans le quartier de la petite Francestrasbourg 31-min

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Puis à la cathédrale où nous montons par l’escalier en colimaçon jusqu’au sommet strasbourg 33-min

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au paradisun selfie au sommet, et voilà la réponse du ciel

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strasbourg 38-minoù se trouve la « maison des gardes »

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Nous avons visité aussi le Musée de l’œuvre Notre-Dame

strasbourg 39-minavec ses merveilles du Moyen Âge, si primitives

strasbourg 40-minet si actuelles parfois

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Et nous sommes allés au Musée archéologique

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Chaque fois que je dors à l’hôtel, j’y fais aussi mon yoga, comme tous les jours à la maison, histoire de garder un corps souple et musclé, en bon état de marche – et nous avons tout le temps marché strasbourg 44-min

Le dernier jour, avant de reprendre le train, je me suis baladée dans le quartier de la gare et j’y ai photographié cette « trocothèque »

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et des œuvres de Street Art

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strasbourg 50-minNous sommes entrés pour prendre un verre dans cet hôtel entièrement orné de Street Art strasbourg 51-min

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Un peu plus loin dans la ruestrasbourg 53-min

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j’ai découvert ce garage orné comme une grotte du paléolithique, j’y suis entrée strasbourg 55-min

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Retour vers Paris. Il reste encore bien des visites à faire dans cette ville, ce sera donc pour une autre fois.

Du 6 au 8 novembre 2019, photos Alina Reyes

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Enchanteresse, l’exposition « Le rêveur de la forêt » au musée Zadkine

Il y avait longtemps que je n’étais retournée au musée Zadkine, lieu enchanteur par lui-même, atelier et jardin du sculpteur. Cette exposition m’y a appelée, avec son intitulé (inspiré de Zadkine) et ses artistes annoncés. Et je n’ai pas été déçue : un moment de grâce dans ce petit espace légèrement retiré, auquel je vous convie par ces quelques images d’œuvres (il y en a d’autres) à contempler sur place si vous pouvez y aller, ou du moins ici.

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le reveur de la foret 1-minDans la première pièce, la forêt des silhouettes de Zadkine

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le reveur de la foret 33-min Hier au musée Zadkine, photos Alina Reyes

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Voir la présentation de l’exposition sur le site du musée

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Étendre le domaine

Mon dessin du Fujiyama, recolorié ces jours-ci

Mon dessin du Fujiyama, recolorié (au feutre) ces jours-ci

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Décidément je suis comme le champion de jeûne de Kafka avec la littérature contemporaine. Si j’avais trouvé quelque chose à mon goût, crois-moi, je l’aurais mangé, dit-il. J’ai espéré trouver à mon goût le livre de la dernière prix Nobel qu’on nous présente comme son chef-d’œuvre, mais après quelque deux cents pages lues, l’ennui s’accumule trop, je vais sans doute renoncer. Après tout c’est une occasion de faire jouer mes muscles, et pas dans la cage.

Ces derniers jours quand je suis à la cuisine j’écoute de temps en temps France Culture, comme je le faisais quand je vivais seule à la Grange. Saisi quelques morceaux des « Chemins de la philosophie » consacrés cette semaine à la spiritualité – je vais écouter l’ensemble en podcast : une émission sur Bergson, une sur l’Inde, une sur le chamanisme et une sur le soufisme, cette dernière entendue en partie ce matin. L’animatrice n’est pas mauvaise, mais elle a un sacré mur dans la tête qui la borne beaucoup. La raison est nécessaire mais elle n’est pas la seule voie de connaissance, loin s’en faut. L’indispensable, c’est l’expérience. Faites l’expérience de ce que vous aimez, ne vous contentez pas d’en parler ou d’en entendre parler. Seule l’expérience donne la profondeur de la connaissance, qui peut ensuite se déployer par la pensée.

Je suis allée à la BnF à pied comme d’habitude en tirant mon barda – ordi, gros cahier, etc. – mais parce que ce sont les vacances toutes les salles et tous les couloirs étaient bondés, impossible de s’asseoir. J’ai voulu en profiter pour aller voir l’exposition sur Tolkien : une heure et demie de file d’attente pour les gens munis d’un billet, une demi-heure pour ceux qui comme moi ont une carte de la bibliothèque. J’attendrai la semaine prochaine pour visiter cela plus tranquillement et aller travailler, en faisant certainement étendre ma carte à l’accès au Haut-de-jardin, aux salles des chercheurs.

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Street Art à la Butte aux cailles en 50 images

De grands noms du Street Art se retrouvent à la Butte aux cailles. Les semaines passent et les œuvres changent.  Raison pour laquelle je vais régulièrement faire un tour dans ce quartier charmant du sud de Paris. Comme d’habitude j’ai photographié surtout les œuvres nouvelles, qui n’y étaient pas lors de mon dernier passage.

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street art butte aux cailles etc. 50-minCes jours-ci à Paris 13e, photos Alina Reyes

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Expo du Cercle des Gobelins

Le Cercle des Gobelins et des Beaux-Arts a été fondé en 1910 par Gustave Geffroy, critique d’art qui avait fondé en 1889 le Cercle de Gyverny avec Monet, Rodin et Clémenceau. Voici quelques œuvres parmi celles que j’ai le mieux aimées dans l’exposition de cette année à la mairie du XIIIe arrondissement de Paris.

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expo cercle gobelins 1-minLa salle consacrée à l’artiste invité cette année, Laurent Corvaisier

*expo cercle gobelins 2-minPoulopoulos, « L’oiseau de rêve » et « Argos »

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expo cercle gobelins 3-minSous trois de ses faces… expo cercle gobelins 4-min« Minerve » expo cercle gobelins 5-minpar Marie-Christine Roth

*expo cercle gobelins 6-minAnnick Poiraud, « Le rêve » (avec reflets de la salle)

*expo cercle gobelins 7-minSophie Bosse, « Mémoire d’Orient »

*expo cercle gobelins 9-minNicole Mancuso, « Enfance »

expo cercle gobelins 10-minNicole Sadin, « Bleu pourpre »

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expo cercle gobelins 8-minChristian Hartmann, « Manhattan, le Whitehall Building »

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expo cercle gobelins 11-minNeumi Dudas Crepel, « Purple Doubt »

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En repartant, j’ai rencontré un M. Chat dans l’escalier

m chat-minAujourd’hui à la mairie du treizième arrondissement de Paris, photos Alina Reyes

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Avant ça, ce matin, entre mon yoga habituel et mon stage de Pilates, j’ai trouvé de nouvelles choses à propos de la Joconde, j’en reparlerai sûrement – et je compte aussi aller voir bientôt l’expo du Louvre évidemment, même si je renonce souvent aux grandes expos à cause de la foule. J’ai déjà écrit quelques réflexions sur la Joconde : mot-clé Joconde.

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Beautés du sanskrit

statue dédiée à l'archéologue Gabriel de Mortillet. Hier aux arènes de Lutèce, photo Alina Reyes

statue dédiée à l’archéologue Gabriel de Mortillet (son buste en bronze, qui surplombait la colonne, a été fondu par les nazis). Hier aux arènes de Lutèce, photo Alina Reyes

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Le corps aussi a sa langue, et il m’importe qu’elle puisse s’exprimer autant que possible correctement et avec style, comme ma langue écrite. Je suis allée ce matin chez ma généraliste demander un certificat médical pour pouvoir suivre un stage de Pilates, ce sport inspiré à la fois du yoga, de la danse et de la gymnastique. Après m’avoir examinée, elle a dit que tout était parfait, et que j’étais superbe. Yoga et marche jour après jour font leur effet.

Continuant à étudier un peu le superbe sanskrit, j’ai noté quelques-unes de ses beautés trouvées dans un dictionnaire. J’en trouverai d’autres, mais voici déjà celles-ci :

Phrase_sanskrite« Que Shiva bénisse les amateurs de la langue des dieux » (image wikipedia)

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Arbre en sanskrit se dit « qui-boit-par-la-racine ».

Akka Mahadevi, mystique du 12e siècle, écrivit 430 leçons ; elle voyageait et mendiait nue en prêchant l’amour de Shiva.

Il y a un nom pour désigner l’art de parler avec ses doigts, qui est l’un des 64 arts (la chiromancie en est un autre)

Le nom atana signifie « errance, promenade, voyage ». Au féminin, atani, il signifie « extrémité encochée d’un arc ».

Un même mot peut signifier une unité infime de temps ou une unité infime d’espace.

Un verbe qui signifie en dernier lieu « penser » signifie d’abord « atteindre, égaler ; ressentir, percevoir ; éprouver, supporter ; faire l’expérience de ; goûter, jouir de ».

Un même mot signifie « vulgarité, obscénité ; calomnie » et « forme grammaticalement impropre ».

Le mot qui signifie d’abord « innovant » signifie aussi « bénéfice d’une action rituelle ».

Le mot qui signifie « invincible » signifie aussi « incompris » et « triste ».

Le mot qui signifie « nuage de pluie, brouillard, nuée, atmosphère, ciel » symbolise en mathématiques le nombre zéro.

Lotus se dit « né-de-l’eau » ou « qui-croît-dans-l’eau ».

Aya, le nom qui m’avait été donné en rêve, disons, il y a quelques années, signifie en sanskrit ; « qui va ».

Ayoga, par opposition à yoga, signifie « séparation, inutilité, inefficacité, impossibilité, conjonction d’astres défavorable ».

Le mot pour dire « évènement inattendu » se dit « comme-des-grains-de-sésame-dans-la-forêt ».

La phrase donnée en exemple : « L’homme est l’esclave du pouvoir mais le pouvoir n’est esclave de rien » pourrait aussi bien se traduire : « L’homme est l’esclave du sens mais le sens n’est l’esclave de rien », puisque le mot qui signifie « pouvoir » signifie d’abord « cause, intention, sens, signification, substance, réalité ».

Il y a en sanskrit un mot qui signifie « densité du sens exprimé » (c’est une qualité poétique), et un autre qui signifie « qui a son origine dans le pouvoir du sens » (se dit d’un sens suggéré issu du signifié). Un autre mot encore désigne « une phrase dont le prédicat est celui du sens du mot produit, le sujet étant une forme pronominale servant d’anaphore au mot producteur, le suffixe s’appliquant à son thème ».

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Aimer en sanskrit (note rectifiée)

18-10-2019

Je dois rectifier cette note en ce qui concerne mon impression que le mot sanskrit asana pouvait être lié à la racine indo-européenne as, « être », par comparaison avec d’autres langues indo-européennes. En fait le phénomène auquel je faisais allusion touche les langues néolatines, j’en ai trouvé l’explication (que je connaissais mais avais oubliée) dans ce livre de Victor Henry, Les trois racines du verbe « être » dans les langues indo-européennes (1878) dont je recopie ces extraits :

« La primitive langue indo-européenne, d’où sont issus les nombreux dialectes de cette famille si répandue, n’avait probablement, pour indiquer le fait pur et simple de l’existence, sans modalité accessoire, l’être en soi et en tant qu’opposé au non-être qu’une seule racine, qui s’est d’ailleurs conservée dans tous les idiomes de ce groupe. C’est la racine as, que l’on retrouve, plus ou moins corrompue, mais aisément reconnaissable, dans la plupart des temps du verbe « être » de chaque langue indo-européenne. (…)

Dans une étude portant sur la généralité des langues indo-germaniques, il n’y aurait pas lieu de parler des dialectes néo-latins, dont les conjugaisons sont exactement calquées sur celles de leur ancêtre commun, si, par une confusion aisée entre les formes assez voisines des deux verbes latins esse et stare, elles n’avaient ajouté à la conjugaison de leurs verbes « être » un élément tout-à-fait étranger à ce même verbe dans les autres idiomes de la famille. C’est ce qu’il convient de montrer brièvement. Au premier rang, à ce point de vue, se placent d’abord les langues de la péninsule hispanique, où ce processus morphologique apparaît au degré le plus complet. L’espagnol et le portugais possèdent deux verbes « être » ser et estar, le premier désignant l’état essentiel et permanent, le second, l’état variable et accidentel : ser dérive, comme l’italien essere, non pas du latin esse, qui n’expliquerait pas la présence de la vibrante, mais d’une forme de bas latin essere créée par le vulgaire à l’imitation de tous les infinitifs latins, qui se terminent en re, le seul esse faisant exception estar vient sans difficulté de stare, et ces deux verbes conservent d’une manière satisfaisante, dans la plupart de leurs temps, leurs formes ancestrales respectives.

Le mélange des deux éléments en un seul verbe apparaît dans l’italien, qui n’emprunte toutefois à stare qu’un seul temps, le participe passé, stato, nécessaire pour la conjugaison de ses temps composés, et qui manque à esse. Moins pur est déjà le provençal, bien moins pur le français, qui dérive de stare un temps que possédait esse, l’imparfait de l’indicatif, estois, stabam, outre le participe présent, estant, stans, et le participe passé, esté, status. Bien plus, l’infinitif même estre, qui dérive incontestablement de essere (car stare a formé régulièrement ester, mot de la langue judiciaire), se ressent cependant de l’influence de stare il est impossible, en effet, d’expliquer le t médial du mot, sans admettre que, sous cette influence étrangère, le bas-latin essere s’est encore corrompu en estere, en sorte que le mot estre est une formation mixte de l’un et l’autre verbe. Le roumain seul ne s’est point altéré par ce mélange, et conjugue son verbe «être», non pas, sans doute, tel que le latin le lui a légué, mais sans le secours de stare.

C’est ainsi que la racine sta, qui ne se présente dans les autres langues indo-européennes qu’avec son sens primitif de « se tenir debout » revêt, en outre, dans les langues néo-latines la signification accessoire d’ «être» et qu’à ce titre elle a dû prendre place dans cette étude. Quant à son évolution dans son acception originaire, tout le monde la connaît, et elle est d’un degré si élevé, qu’on ne saurait, ce semble, ouvrir au hasard un vocabulaire d’une langue indo-européenne quelconque sans tomber sur un dérivé plus ou moins direct de ce fécond radical. »

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Surya Siddhanta

illustration pour le Surya Siddhanta, traité d’astronomie indien en sanskrit, de plus de 1 500 ans

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Ce matin dans la nuit, à la lumière de la lampe, commençant à étudier un peu le sanskrit, cette langue des plus anciennes, j’ai appris que le verbe aimer s’y construisait avec le locatif. Un cas peu fréquent dans les langues à déclinaisons, qui exprime le lieu où se passe l’action. Ainsi donc en sanskrit, pour dire je t’aime, on dit, mot à mot, « en toi j’aime ». C’est beau comme un premier amour. Parce que c’est une langue première. L’être aimé n’y est pas objectivé, n’y est pas complément d’objet, n’y est pas à l’accusatif, n’y est ni tenu à distance ni accusé de son altérité, il y est en quelque sorte physiquement, innocemment aimé, dans l’interpénétration des amants qui font l’amour.

Puis j’ai fait mon heure de yoga quotidienne, cette fois une séance comportant seulement trois asana (mot sanskrit habituellement traduit par « posture » mais qui me semble (à vérifier !), d’après ma première approche de cette langue, lié à son verbe être, comme d’ailleurs dans d’autres langues indo-européennes – par exemple en français « station » et « exister » ont même racine), trois postures guidées par un cours très précis, très sophistiqué, tenues chacune vingt minutes sur des exercices respiratoires intenses enchaînés savamment. Le yoga est une pratique d’amour avec le cosmos, abolissant les limites, la distance, entre cosmos intérieur et cosmos extérieur.

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