La faute à personne

Clément Méric ne portait pas de poing américain, ses camarades non plus. Les skins d’en face, eux, en avaient, cela vient d’être prouvé. Ils en avaient, comme ils en ont habituellement. Clément est mort, les autres sont vivants. Clément Méric est l’un des hommes que les skins ont tué au cours des années et des ratonnades. Les esprits bien-pensants qui se sont échinés à dire que les deux camps sont de même nature, et qu’il n’y a donc pas de faute, seulement un accident, sont mensongers. Et leur mensonge insulte la mémoire de trop de victimes.

Depuis la fermeture des Urgences de l’Hôtel-Dieu, les opposants à cette mesure prédisent qu’elle provoquera des morts. Une femme a été retrouvée morte la semaine dernière après être restée six heures assise, sans que personne ne s’occupe d’elle, aux Urgences de l’hôpital Cochin où elle avait été admise pour une blessure au pied sans gravité. Après enquête, le ministre conclut que le service n’était pas saturé, bien qu’il reçoive comme les autres hôpitaux les patients jadis envoyés à l’Hôtel-Dieu, et que ce n’est la faute de personne. Ce n’est la faute de personne si personne ne regarde un être humain qui est là, des heures durant. Ce n’est la faute de personne si bien souvent les êtres humains sont traités aux Urgences comme du bétail. Ce n’est la faute de personne si les médecins, et le personnel soignant, sont formés dans un esprit de domination sur les patients.

Une mère et sa fille retrouvées mortes poignardées chez elles. C’est le genre d’informations qu’on lit presque tous les jours. Des hommes tuent des femmes, c’est le génocide immémorial et planétaire quasiment invisible. Quelques années de prison, et la vie des assassins reprend tranquillement. Il y a plus d’un an qu’Oscar Pistorius a tué Reeva Steenkamp. Prétendra-t-on que les torts étaient partagés ? En attendant, l’une est enterrée, l’autre est libre de se promener dans ses costumes de luxe et de s’épancher sur ce drame comme s’il n’était en rien de sa faute.

Bienheureuse

J’ai rêvé que Bedos (à la fois père et fils) et un plombier s’étaient installés chez moi contre mon gré et ne voulaient plus en partir. J’allais à la mairie demander qu’ils téléphonent chez moi afin qu’ils voient qu’ils étaient au courant de leur forfait, et que cela les fasse partir. Mais à la mairie les gens étaient très embêtés, oui me disaient-ils, on sait qu’ils se comportent ainsi, mais nous ne pouvons pas intervenir contre Bedos, étant donné sa position. Je retournais chez moi, et finalement les intrus s’en allaient, emmenés par leurs femmes, des pétasses mondaines, sapées, refaites et maquillées, qui les ramenaient chez elles.

Le rêve est limpide, Bedos à la fois père et fils symbolise le pouvoir temporel, clown médiatique, transmissible et grossièrement calqué sur le christianisme – une sorte d’antichrist ; le plombier représente les hackers et autres poseurs de micros cachés ; et les pétasses la mondanité qui les appelle à retourner dans leur monde.

À l’âge de quinze-seize ans, après avoir lu Freud (mais aussi beaucoup de textes sacrés), je me livrai à des expériences étonnantes, que ne font jamais les psychanalystes – raison pour laquelle ils ne connaissent rien en vérité à leur art ni à l’homme. Je suis loin devant, loin au-delà, cela m’exclut de ce monde mais je suis si bienheureuse.

Multiplication des couleurs

Toujours en train de compléter mes galeries sur alinareyes.euLes peintures pour l’instant y sont toutes ou à peu près – en attendant la prochaine. Les photos continuent de se remplir, les dessins sont en cours. J’ai signé ces derniers, je les photographie et je les propose à l’impression seulement, car j’ai l’intention des les composer en iconostase, un peu à la façon des Masques, qui donnent en vrai un bien beau résultat, plus beau qu’en photo. N’hésitez pas à visiter, y compris ma page « liens » à partir de laquelle vous pouvez visiter aussi les artistes que j’ai pour l’instant découverts sur la plateforme Artmajeur.

À ce jour, mes œuvres les plus visitées ont été deux photos et une peinture : la première de deux brebis en pleine sieste (galeries « Animaux »), la deuxième des Deux océans (4e galerie de peinture) la troisième d’une fente de lumière dans la neige (galerie « Neige ») ; et celle qui a reçu le plus de mentions, un bouquet de fleurs sauvages sur une table en bois (galerie « Graphismes et couleurs »). Ne sont-elles pas, humblement, représentatives de ce qui nous sauve : lâcher-prise, rencontre, pureté, grâce ?

Antoinette Fouque, le clergé et moi

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Antoinette Fouque est morte. Je me rappelle qu’elle m’avait invitée chez elle, quand j’étais jeune écrivain. J’avais été frappée par les canapés de cuir blanc, le luxe bourgeois. D’autres femmes étaient là, des féministes, je ne sais plus qui. Je n’avais à peu près rien dit, tout ce langage me semblait si froid. Je lui étais reconnaissante pourtant d’avoir pensé à m’inviter, et d’avoir publié mon premier roman, lu par Marie-Christine Barrault, dans sa collection audio Des voix. Cela changeait tellement des féministes anglaises avec lesquelles j’avais eu affaire, celles qui étaient venues de Londres à Paris pour m’interviewer ou qui m’avaient interviewée quand j’étais allée à Londres. Pour ces membres du clergé féministe, j’étais une adoratrice du pénis, comme elles disaient, autant dire une sorcière. Je n’ai jamais adhéré au féminisme d’Antoinette Fouque, mais au moins elle était ouverte. Je ne l’ai pas revue quand j’ai accompagné par mes poèmes l’exposition de Sophie Bassouls à l’espace Des Femmes. Les poèmes peuvent être lus ici, je me rends compte que j’en avais perdu certains, je vais les récupérer, merci Antoinette.

Quel ennui, ces grands prêtres mâles ou femelles de toutes sortes de chapelles, à Londres, à Rome, à Paris et ailleurs, qui font la leçon à Jésus. Ils sont fichus.

Bernard-Henri Lévy, serpent d’airain à l’ancienne

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Moïse et le serpent d’airain, par Sébastien Bourdon, 1653

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« Il faut quitter Sotchi », clame Bernard-Henri Lévy. Le choix de quitter Sotchi est défendable, mais pas par lui. Qu’il commence par dire « il faut qu’Israël quitte la Palestine », s’il veut que sa parole ait quelque crédibilité. La vérité est non pas qu’il aime le peuple ukrainien, ou le peuple lybien, ou le peuple syrien, mais qu’il déteste Poutine et tous ceux qui ne servent pas Israël.

La Bible rapporte l’histoire du serpent d’airain que Moïse éleva sur un piquet au désert afin que son peuple, en le regardant, puisse guérir des morsures des serpents. Jean compara Jésus élevé sur la croix au serpent d’airain élevé par Moïse : regarder le Christ crucifié devrait suffire à guérir les hommes de leur mauvaiseté. Il faut croire que bien peu le regardent vraiment. Il est peut-être plus accessible de commencer à guérir selon l’ancienne méthode, celle de l’Ancien Testament : en élevant quelqu’un qui ait une figure de serpent : s’il est trop difficile d’ouvrir les yeux sur le vrai (Jésus), qu’au moins on commence par les ouvrir en voyant le faux pour ce qu’il est, du faux. BHL, comme archétype de la parole séductrice, calculatrice, manipulatrice (ce qui fait aussi le caractère du serpent dans la Bible), peut être élevé comme le serpent d’airain afin de prévenir et vacciner le peuple contre tous les serpents dont il est emblématique.