Quartier des Grands Moulins et des Frigos, en 60 photos

Comme je devais passer la journée à l’université Paris 7 Diderot, j’ai profité de la pause déjeuner pour photographier l’architecture et le street art du quartier, que j’aime beaucoup en semaine, vivant et moderne. Les Grands Moulins abritent la fac, les Frigos un site d’artistes, tout près la BnF, et au bord coule la Seine, entre ses quais affairés.

quartier grands moulins et frigo 1vue depuis la salle où se tenait la journée d’étude

et dans le quartier :

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quartier grands moulins et frigo 21Je me suis assise et j’ai mangé mon pain et mon fromage avec les autres étudiants qui prenaient leur sandwich sur cette aire agréablement aménagée devant la fac, puis j’ai continué la promenade en allant d’abord voir la Seine

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quartier grands moulins et frigo 25l’un des portraits exposésquartier grands moulins et frigo 26

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Et voici les Frigos

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et la balade continue

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les Grands Moulins, vus de deux endroits différents

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aujourd’hui à Paris 13e, photos Alina Reyes

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Et maintenant les poules d’eau couvent, et autres merveilles de la vie des animaux

jardin 1 poule d'eau couve

La semaine dernière je les ai photographiées en train de s’affairer à bâtir le nid, aujourd’hui je trouve le couple en train d’attendre un heureux événement : l’une couve, l’autre continue, à un rythme beaucoup plus tranquille, à aller chercher des herbes sèches et des feuilles mortes qu’elle rapporte à la couveuse, bec à bec. Cette dernière, sans bouger, les ajoute au nid autour d’elle, et sans doute elles se relaient, car lorsque je suis repassée une ou deux heures après, elle était dans l’autre sens – difficile de les distinguer, car les deux sexes sont semblables.

Dans le bassin, des petites grenouilles vertes et beaucoup de crapauds « alytes accoucheurs », dont j’ai vu l’accouplement l’autre jour : le mâle enlace la femelle par les hanches, par derrière, de façon qui ressemble beaucoup à celle des humains, mais en fait ses mouvements sont un massage destiné à faire pondre la dame crapaud : aussitôt que les œufs sont sortis, le monsieur crapaud les féconde et rassemble le cordon d’ovocytes entre ses chevilles. Lors de l’éclosion, il s’immerge pour que les têtards naissent dans l’eau.

jardin 2 grenouille

jardin 3 poule d'eau compagne

jardin 4 poule d'eau au ventil soufflait une jolie brise qui faisait voleter ses plumes tandis qu’elle s’en allait chercher des herbes

jardin 5 poule d'eau herbe au bec

puis les rapportait à sa compagne

jardin 6 poule d'eau buisson

jardin 7 grenouille,

jardin 8 libellule

cette magnifique libellule semblait me regarder sans crainte de ses yeux ronds pendant que je la photographiais

jardin 9 nenuphars

je suis allée voir aussi les autres bassins

jardin 10 bassin

jardin 11 bassin,

et un peu plus loin j’ai contemplé cet ail, tout étoilé

jardin 12 ail

aujourd’hui au Jardin des Plantes, photos Alina Reyes

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Flamant rose et autres choses vues dans la rue

vu dans la rue 1 pipo

Je trouve de la poésie partout. « Ultima latet », dit le cadran à la Salpêtrière : « la dernière (heure) est cachée ». Mais si elle est cachée, c’est en pleine lumière, il suffit de regarder.

« La Treizième revient… C’est encor la première ;
Et c’est toujours la Seule, – ou c’est le seul moment »

Gérard de Nerval

vu dans la rue 2 impasse du marché aux chevaux

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vu dans la rue 28 ultima latet

vu dans la rue 29 fontaine wallaceaujourd’hui à Paris 13e (les grandes fresques sont boulevard Vincent Auriol, j’en ai photographié d’autres ici) et 5e, photos Alina Reyes

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Tolkien, l’érudition faite création (avec vidéo)

Avant, à la question : quel livre emporteriez-vous sur une île déserte ?, j’aurais répondu : la Bible. Aujourd’hui je répondrais : l’œuvre de Tolkien. Car depuis j’ai lu la Bible mais pas encore Tolkien, qui est sans doute d’une grandeur comparable. L’érudition d’Umberto Eco a donné lieu à un roman au succès mondial, Le Nom de la rose, que j’ai lu et moyennement apprécié, lui préférant les œuvres écrites par des auteurs du Moyen Âge, beaucoup plus fines, riches et touchantes. J’ai vu les films tirés de l’œuvre de Tolkien et je sais qu’ils n’en donnent qu’une faible idée. Il faudra donc, un jour où j’aurai terminé ma thèse et quelques autres travaux en cours, que je m’y plonge comme en d’autres temps je me suis plongée dans Nerval, Rimbaud, Kafka, Stevenson, Schwob, Borges, Cortazar… Et peut-être qu’un jour, après être devenue professeure j’écrirai, moi aussi, un autre livre fantastique, né de l’érudition que j’aurai pu acquérir. Comment l’érudition peut faire éclore le génie, voilà qui n’est pas commun, voilà ce que j’aimerais expérimenter.

 

La valeur d’une œuvre littéraire

photo Alina Reyes

photo Alina Reyes

 

La valeur d’une œuvre littéraire est proportionnelle au rayonnement de son champ sémantique, à l’ampleur de ses virtualités sémantiques.

Un livre de peu de valeur littéraire est un livre très peu polysémique, un livre qui dit ce qu’il dit et rien ou pas grand chose de plus.

Une œuvre littéraire, réellement littéraire, ne se contente pas de raconter une histoire bien ficelée, ni d’enfiler des considérations. Elle fait du verbe, du texte, un champ aux strates infinies, extrêmement profond dans tous les sens et mouvant, vivant. Vivant de toute la vie des lectures qui en ont été faites et de celle de toutes les lectures virtuelles qu’il contient encore en son sein comme autant d’enfants. Une œuvre littéraire est une pouponnière d’étoiles qui exige de qui veut l’atteindre et y être accueilli un voyage sans fin.

 

Immeubles de Robert Mallet-Stevens ; et de Ginsberg et Massé, à Paris 16e

Robert Mallet-Stevens, célèbre architecte, a réalisé des décors de film pour Marcel L’Herbier, Jean Renoir, Man Ray et d’autres. Comme j’étais un peu en avance à mon rendez-vous, j’ai photographié, juste en face,  les hôtels particuliers qu’il a créés en bordure de la rue Mallet-Stevens, constructions graphiques, gaies, colorées, aérées (1926-1934). Puis, à côté, un immeuble moins génial mais intéressant aussi, œuvre de Georges Massé et Jean Ginsberg, la Résidence de la Muette, 19 rue du Docteur Blanche (1953).

les hôtels particuliers de Mallet-Stevens :

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Site consacré à Mallet-Stevens

et l’immeuble de Jean Ginsberg et Georges Massé :

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ginsberg et massé rue dr blanche 4aujourd’hui à Paris 16e, photos Alina Reyes

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Albert Camus, se donner à la terre et faire avancer l’histoire

jeanne d'arc fluctuat nec mergiturune image pour illustrer l’accord de Paris sur le climat, rejeté par Trump : « Fluctuat nec mergitur » ; ces jours-ci à Paris, photo Alina Reyes

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Dans son discours à Stockholm, lors de la remise de son prix Nobel en 1957, Albert Camus déclarait que la tâche la plus grande de sa génération était d’ « empêcher que le monde ne se défasse. » Il s’agit là du même appel que celui que sa voix fait entendre ici : celui de se donner à la terre, à la dignité des vivants – un appel qui reste d’une grande urgence dans l’écologie de la nature comme dans celle des esprits : refus de la culture de l’abus, du viol, de la destruction, du trafic, de la domination, du mensonge ; respect et amour de la vérité, de la vie, et courage de les défendre et de les cultiver.

Dans l’entretien avec Jean Mogin, il dit se considérer d’abord comme un artiste, parle de l’importance du style et de la composition, rappelle la possible fécondité du sentiment de l’absurde et affirme qu’ « il y a un chemin qui passe entre la servitude et la folie, et c’est celui que les intellectuels, en particulier, ont pour mission de repérer, au moins ». Puis il lit un passage de son livre L’homme révoltéje donne après la vidéo les dernières phrases de sa lecture, écrites.

 

« L’obsession de la moisson et l’indifférence à l’histoire, écrit admirablement René Char, sont les deux extrémités de mon arc. »

Si le temps de l’histoire en effet n’est pas fait du temps de la moisson, l’histoire n’est qu’une ombre fugace et cruelle où l’homme n’a plus sa part.

Qui se donne à cette histoire ne se donne à rien et à son tour n’est rien. Mais qui se donne au temps de sa vie, à la maison qu’il défend, à la dignité des vivants, celui-là se donne à la terre et en reçoit la moisson qui ensemence et nourrit à nouveau.

Pour finir, ceux-là font avancer l’histoire qui savent, au moment voulu, se révolter contre elle aussi.

Cela suppose une interminable tension et la sérénité crispée dont parle le poète. Mais la vraie vie est présente au cœur de ce déchirement. Elle est ce déchirement lui-même, l’esprit qui plane sur des volcans de lumière, la folie de l’équité, l’intransigeance exténuante de la mesure.

Ce qui retentit pour nous aux confins de cette longue aventure révoltée, ce ne sont pas des formules d’optimisme, dont nous n’avons que faire dans l’extrémité de notre malheur, mais des paroles de courage et d’intelligence qui, près de la mer, sont même vertu.

Aucune sagesse aujourd’hui ne peut prétendre à donner plus.

La révolte bute inlassablement contre le mal, à partir duquel il ne lui reste qu’à prendre un nouvel élan.

L’homme peut maîtriser en lui tout ce qui doit l’être. Il doit réparer dans la création tout ce qui peut l’être.

Après quoi, les enfants mourront toujours injustement, même dans la société parfaite.

Dans son plus grand effort, l’homme ne peut que se proposer de diminuer arithmétiquement la douleur du monde. Mais l’injustice et la souffrance demeureront et, si limitées soient-elles, elles ne cesseront pas d’être le scandale.

Le « pourquoi ? » de Dimitri Karamazov continuera de retentir ; l’art et la révolte ne mourront qu’avec le dernier homme. »

Albert Camus, L’Homme révolté