Palestine

À feu et à sang, encore. J’ai beaucoup écrit pour la Palestine, j’ai passé beaucoup de temps à suivre ce qui s’y passait, je m’en suis beaucoup préoccupée. Aujourd’hui je reste sur ce que j’écrivais ici en 2014 :

Hier à la manifestation j’ai entendu une intervenante déplorer que nul écrivain français ne se soit manifesté pour la Palestine. Bon, ils ont moi, je sais écrire et puissamment, je sais aussi parler de vive voix aux assemblées humaines et les toucher au cœur, je l’ai fait maintes fois. Beaucoup d’entre eux le savent depuis longtemps, mais par compromission avec ceux qui m’empêchent de publier dans les médias mainstream, comme je le faisais avant que mon embarrassante habitude de dire la vérité ne les décide à me bannir, ils ont décidé de me tenir à l’écart aussi. Bien, j’ai fait de mon mieux pour apporter ma contribution, mais je ne souhaite en aucun cas m’imposer, je vais donc retourner cultiver mon jardin.

Que chacun prenne ses responsabilités. On peut toujours, si on veut, aller voir toutes mes notes sur le sujet, ici.

Santé !

Je recevrai une première dose de vaccin la semaine prochaine, c’est très bien mais je trouve que la vaccination devrait être ouverte à tout le monde ; quelqu’un de vacciné, même si ce n’est pas une personne prioritairement à risque, protège tout le monde en étant vacciné. Et il faut penser que les jeunes ont largement le droit de voyager ou de faire d’autres activités pour lesquelles il faudra désormais être vacciné. Voilà plus d’un an qu’ils sont privés de vivre pour protéger les plus âgés, et maintenant ils devraient encore être privés de vivre pendant que les plus âgés, vaccinés, pourraient, eux, retrouver certaines activités ? On manque de doses ; que n’en achète-t-on aux Russes, comme l’a décidé l’Allemagne ? Il faut se procurer tous les vaccins sûrs qu’il est possible de trouver, puisque nous n’en produisons pas. Après un an et demi de pandémie, la logistique et la volonté politique continuent d’être à la traîne, c’est usant pour tout le monde et on ne sait ce que tout cela va générer à l’avenir.

oiseau de paradis,Au yoga ce matin, pour la première fois j’ai réussi à faire la posture de l’oiseau de paradis, qui est une posture de yoga avancé. En fait je ne m’y suis jamais entraînée, mais les deux ou trois fois où je l’ai rencontrée dans un cours et essayé de la faire, quand je me relevais je n’arrivais pas à garder mes mains liées dans mon dos. Mais ce matin, ça a marché. Une vraie joie. La preuve que le yoga quotidien fait doucement progresser le corps jusqu’à le rendre capable même de quelques postures improbables. Cela ressemble à ce qui se passe avec ma traduction. Parfois, soudain, quelque chose de tout nouveau se passe. Et là où j’en suis maintenant, ma traduction pourrait se passer de commentaire, tant elle dit par elle-même. Oui, ce sont des moments de joie indicible – il y a un adjectif grec merveilleux pour dire cela, et intraduisible par un seul mot en français : athesphatos, qui signifie « que les dieux même ne sauraient exprimer, ce dont on ne peut dire la grandeur, la beauté ». Ce que j’ai trouvé de plus grand en traduisant l’Odyssée, et qui se verra avec éclat sans qu’il soit besoin de l’expliquer ni de le commenter (ce que je ferai probablement quand même), je sens que c’est de cet ordre. À la santé d’Homère !

En regardant Le maître du haut château

J’ai commencé à regarder la série The Man in the High Castle, d’après le roman que je n’ai pas lu. Torture, chantage, élimination : les techniques des nazis n’appartiennent pas au passé, et l’uchronie de Philip K. Dick a bien lieu dans un temps, le nôtre, mais de façon cachée, souterraine et, dans les sociétés « avancées » comme la nôtre, en s’en prenant à tout dans un être mais pas au corps, justement afin d’éviter que par sa disparition il ne signale l’existence de ce monde immonde à l’arrière de notre monde. Pas de gaz pour éliminer les personnes qu’on veut éliminer, on les étouffe autrement, tout en les laissant vivre afin que leur vie apparente serve de témoignage contre elles-mêmes, si jamais elles voulaient dénoncer des faits qui seraient alors déclarés faux. Pour les néonazis souterrains, ceux qui n’affichent aucun signe de nazisme, qui ne se savent même pas eux-mêmes nazis, voire qui se croient humanistes et le font croire, un vivant rayé de la société est moins dangereux qu’un vivant qu’on a physiquement tué. Les morts crient, mais on peut empêcher les vivants de parler, ou de parler assez fort pour qu’on les entende. Cependant les vivants seront morts quand même un jour, et le jour viendra où leur cri sera entendu et leurs bourreaux démasqués, et le voile sur leur monde immonde arraché.

Remueurs de queue, serviteurs du pire

En traduisant le passage où les loups ensorcelés par Circé se tiennent autour des hommes comme de gentils toutous et « les flattent en remuant leurs longues queues », je pense à l’édito de Serge Raffy dont j’ai vu quelques passages sur Twitter (je ne vais plus du tout, depuis longtemps, sur le site de l’Obs), édito dans lequel, encore une fois, il tourne énamouré autour de Macron d’une façon telle que, comme dit un twitto, « un tel léchage de bottes, ça ne peut pas se faire en respectant les gestes barrière ». J’avoue, ma comparaison n’est guère scientifique, car d’une part je doute que Serge Raffy ait jamais été un loup, et d’autre part j’ignore tout de la longueur de sa queue, et de sa capacité à la remuer aussi vigoureusement qu’un chien remue la sienne.

Mais d’un autre côté, notre Emmanuel ne tient-il pas d’une Circé, d’une ensorceleuse, pour susciter tant de flagornerie ? Voyez ses mines, entendez ses formules (si vous supportez encore de l’entendre et de le voir), n’essaie-t-il pas constamment de subjuguer les humains ? Sans doute, mais alors il est bien moins doué que Circé, car si ça « marche » encore avec quelques professionnels de la chose comme Raffy et quelques vieux bourgeois, la catégorie dans laquelle il recrute ses fans depuis l’enfance, pour plus de gens sans doute il est plutôt le valet d’antichambre d’une autre sinistre sorcière qui attend à la porte de l’Élysée. Continuez à lui cirer les pompes, JDD et autres Nouvel Obs, vous ne faites que dégoûter encore plus de lui. Et ainsi servir le pire.

Quand je pense que Serge Raffy, en 1998, avait tenu à parler de mon livre Poupée, anale nationale, et à me donner la parole sur mes inquiétudes quant à la montée du Front national. Comment peut-il avoir sombré dans ce macronisme pitoyable ? Lui et ses pareils des médias ont non seulement porté Macron au pouvoir, mais certains continuent à le soutenir après la catastrophe de ses quatre ans au pouvoir ? Voilà comment s’avancent les régimes fascisants, par la démission intellectuelle, la compromission politique, l’aveuglement porté par une vie confortable, tout cela germant sur des choses plus louches encore, plus intimes, plus cachées. Tous ces gens qui chutent et essaient d’entraîner le plus de gens possible dans leur chute.

Il y a toujours des inquisiteurs qui croient pouvoir arriver à leurs fins par la torture.

Tapie, réunions non mixtes, running, travail quotidien…

Dans la rue ces jours-ci à Paris, photo Alina Reyes

Dans la rue ces jours-ci à Paris, photo Alina Reyes

Screenshot_2021-04-05 Le parquet de Paris reprend l'enquête sur le cambriolage du couple TapieMacron appelle Tapie parce qu’il a été cambriolé. Ceux que Tapie a « cambriolés », nous tous les contribuables, personne ne les a appelés. Manquerait plus que le lascar ait monté le larcin pour faire marcher les assurances, avec lui on peut s’attendre à tout.

C’est quoi ce pays où certains veulent faire interdire les associations qui pratiqueraient des réunions non mixtes ? Je suis toujours prudente par rapport aux possibles dérives idéologiques de tout activisme, mais enfin comment peut-on seulement songer à interdire ce genre de réunions ? « La question elle est vite répondue » : on peut y songer quand ce ne sont pas des Blancs qui sont concernés. La non-mixité, il y en a partout, on la pratique partout -associations et autres clubs spécialisés, congrégations religieuses et autres, sans parler de la non-mixité informelle, avec des lieux de pouvoir souvent presque exclusivement masculins et blancs), c’est seulement quand il est question de gens non blancs qu’elle pose problème, aux Blancs évidemment. Comme quoi les antiracistes ont d’excellentes raisons de parler de temps en temps entre personnes touchées par le racisme. Les réunions en non-mixité sont un bon outil d’émancipation pour toutes les catégories sociales qui subissent des discriminations, un outil connu et utilisé depuis au moins la Révolution française. Vouloir les interdire aux personnes racisées est une indignité scandaleuse.

En fait l’actualité n’est qu’un fatras d’indignités. Pourquoi parler de celle-ci ou de celle-là plutôt que de telle ou telle autre ? Parce qu’au fond n’importe laquelle fait l’affaire pour rappeler la folie du monde, la nécessité de la combattre mais aussi de s’en détacher, de ne pas la laisser accaparer notre vie.

Courir est l’un des excellents moyens pour ça. J’ai très peu couru cet hiver (je m’y suis mise seulement à la fin de l’été dernier, alors que je n’avais pas couru depuis le lycée), mais je m’y remets ces jours-ci, avec bonheur. Mon appli de sport m’a proposé de relever le défi de courir 30 km entre le 1er et le 30 avril, je m’y suis mise. Ce vendredi 2 j’ai couru 2,8 km en fractionné, hier dimanche 2,4 km en footing continu . Au début, en août dernier, je tenais à peine 200 mètres d’affilée, puis j’ai couru trois ou quatre fois par mois jusqu’à la fin de l’automne, où je suis arrivée à 1,5 km d’affilée, à mon petit rythme. Maintenant j’ai juste hâte d’y retourner, je sens que je peux de nouveau progresser – pas aujourd’hui quand même, je veille à ne pas me faire mal, et puis je pratique d’autres sports.

J’ai trouvé l’autre jour une toile dans la rue et j’ai le projet de la repeindre, quand je sentirai que j’ai besoin d’une pause dans ma traduction. Pour l’instant le désir de traduire me réveille chaque matin, et comme je me couche tard, du coup je dors souvent peu mais la joie du travail qui avance me tient éveillée. Là je commence le chant X, Ulysse et ses compagnons arrivent chez Éole, roi des vents.