à la boulangerie orientale où j’ai déjeuné ce midi, entre deux séances de travail à la bibliothèque de recherche du Museum
*
À la maison, ce soir. Je raconte à O : Sollers, Pierrat, Savigneau, Gallimard, interrogés par le New York Times (article en français) pour leur implication dans l’affaire Matzneff, et qui, bien sûr, se terrent, ne répondent pas. Haha ! Je reconnais que je suis fort aise de voir en si mauvaise posture la bande de ceux qui se sont faits mes ennemis depuis une quinzaine d’années (raison pour laquelle je ne publie plus, mais ça changera). Les masques tombent. La presse française continue à les protéger mais l’histoire retiendra tout ça, et d’autres choses encore.
À la bibliothèque, dans la journée. Je suis en train de devenir une autre, ai-je pensé en me repoussant dans ma chaise après avoir fini d’écrire un paragraphe. Encore ? Oui. Face à moi l’étoile verte et le croissant de lune jaune de la mosquée, à hauteur de mes yeux en cette bibliothèque du Muséum, au dernier étage. Nous sommes nous-mêmes notre livre saint en puissance, celui qui fonde des mondes, des vies. Encore faut-il se donner la peine de l’écrire, ou de le lire personnellement, ce qui est une autre façon d’écrire.
Énormes rafales de vent. Derrière l’autre baie vitrée, les arbres nus s’agitent vivement. De temps à autre la pluie survient, tapote longuement le toit. Puis de nouveau bourrasques bruyantes, tournant autour de la bibliothèque, on pourrait croire qu’elle va décoller, s’envoler, voguer parmi les nuages, par-dessus les paysages, avec tous ses travailleurs dedans, impassibles, naviguant de leurs livres à leurs ordinateurs, de leurs lectures à leurs écritures, peut-être pas même conscients d’être parmi les plus heureux du monde.
*