au square René Le Gall, photo Alina Reyes
Sa maison n’est pas construite sur le roc. Trop fuyant pour le faire lui-même, il a fait faire à tant d’autres des livres avec plein de choses censées m’insulter, et qui ne m’atteignent pas – je suis seulement consternée par la stupidité de cette démarche, de ce désir de vengeance obsessionnellement répété. Jamais je n’aurais imaginé qu’on puisse avoir un ego si monstrueusement enflé qu’on ne puisse supporter d’avoir inspiré des mots et des phrases « désagréables ». Une telle réaction n’est-elle pas signe d’une coquille creuse, d’une construction de soi complètement factice ? En vérité rien n’est désagréable en littérature, en littérature tout est littérature, tout écrivain et tout lecteur devraient le savoir.
Nous n’avons absolument pas la même vision de l’existence, ni de l’être. Elles sont absolument incompatibles. C’est la raison pour laquelle, en plus de ses manies vengeresses et de ses velléités de manipulation et de domination, il m’est impossible d’œuvrer avec S. Ce n’est pas moi que je veux protéger, c’est l’œuvre qui doit être faite, et qui est mieux faite en ce moment même dans l’abstention que si elle était mise en route selon une pensée fausse, comme il en était question. Je pense que nous n’avons pas besoin de stratégie de communication, ni du renfort de stars, ni de rien d’emprunté au système du monde tel qu’il ne va pas. Nous voulons toucher beaucoup de personnes, mais par le profond de notre être et de notre parole, par la vérité de notre amour et de notre démarche, non par ce que nous espérons en retirer par rapport à notre situation dans le monde, même « pour la bonne cause ». Je pense que nous ne devons pas chercher le brillant, la surface, les apparences. Je pense que nous devons au contraire nous retirer de tout ce système. Je pense que nous ne devons pas viser des efficacités qui seraient aussi immédiates qu’immanentes et éphémères, je pense que nous devons être un humble surgissement de l’éternité dans le temps, conscients que notre œuvre dépasse de loin nos personnes, le temps de nos vies, le temps de notre temps. Je pense que nous devons être une apparition, venue du profond du cœur pur, venue de Dieu, et promise à propager ses ondes plus loin que nous ne pouvons le voir dans l’espace et le temps. Je pense que Dieu est déjà vainqueur.
Heureuse de réentendre tout à l’heure que le prêtre dit Effata ! à l’enfant qu’il baptise. Je sais que même nouveau-né, et surtout nouveau-né, nous entendons la parole du ciel, et c’est ainsi que mon oreille s’est ouverte aux langues dans lesquelles Il s’est dit.
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