Le site d’Élisabeth Daynes, avec images de ses reconstitutions d’hominidés
Et une présentation de l’artiste, suivie d’un entretien avec elle, ici
Mois : octobre 2015
Halloween ou la lecture des news
photo Alina Reyes
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Le bel automne et les belles citrouilles, au Jardin des Plantes
Cet après-midi au Jardin des Plantes, où je suis allée travailler (un peu) au soleil…
photos Alina Reyes
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Choses vues du jour
la seule eau de source de Paris : place Verlaine à la Butte aux Cailles ; j’en ai rempli une bouteille et je l’ai ramenée à la maison la belle piscine de la Butte aux Cailles j’ai ramassé au square René Le Gall quelques gravillons et feuilles mortes pour un peu de jardinage intérieurmalheureusement à côté de cette belle oeuvre de Seth, il y a toujours des soldats lourdement armés, pour garder une école juive
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aujourd’hui à Paris 13e, photos Alina Reyes
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Collège de France : Jean-Jacques Hublin et Bence Viola sur les Dénisoviens et Néandertals dans l’Altaï
hier soir au Collège de France
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“L’évolution est une histoire d’extinctions”, a rappelé Jean-Jacques Hublin vers la fin, au moment des échanges avec le public. Beaucoup d’hommes du passé n’ont pas de descendance aujourd’hui : c’est le cas des Dénisoviens et des Néandertals, qui se sont éteints, mais dont certains gènes continuent à nous habiter, ou du moins à habiter certaines populations. Ainsi va la fascinante histoire de la vie.
C’était la première fois hier soir que j’allais assister à un cours au Collège de France. Quelle merveille nous avons là : rappelons que ces enseignements de très haut niveau, donnés par des chercheurs très éminents, sont ouverts à tous, gratuitement. Le bonheur de la science et de la recherche en leurs multiples domaines, dans la rigueur et l’humilité, une satisfaction puissante et rare. Voilà ce que j’appelle le luxe républicain, le savoir, la pensée offerts à tous – cela se passe aussi tout simplement dans les bibliothèques municipales, par exemple, où chacun peut emprunter de quoi nourrir son intelligence à volonté. Je ne vais pas tenter de retranscrire le cours et le séminaire ni de les résumer, simplement donner quelques éléments, en espérant ne pas trahir ce qui a été dit, tant par Jean-Jacques Hublin, responsable du cours de l’année, “Paléoanthropologie du genre Homo : les hommes intermédiaires”, et par Bence Viola, venu spécialement de Toronto pour le séminaire qui a suivi sur “Dénisoviens et Néandertals dans l’Altaï”.
Rappelons que l’homme de Néandertal est issu d’une migration de nos ancêtres africains sur le continent européen il y a environ cinq cent mille ans. Il a ensuite voyagé au Proche Orient et en Asie Centrale, et vécu jusqu’à il y a environ trente mille ans, laissant 1 à 3% de ses gènes à l’homme moderne, sauf en Afrique. Les Dénisoviens sont un groupe frère des Néandertaliens, découvert dans la grotte de Dénisova, dans l’Altaï, au cœur de l’Eurasie, et identifié génétiquement en 2010.
L’homme de Dénisova, qui doit son nom au saint ermite qui habita la grotte, est surtout une petite fille de cinq ou six ans, dont le seul reste trouvé, un minuscule bout de phalange, a permis une analyse génétique précise, qui a donné des résultats très étonnants. Déjà deux dents de sagesse d’adultes, retrouvées dans la même grotte, dont la température relativement basse et constante a permis la préservation des restes humains (quoique beaucoup aient été grignotés par des hyènes) présentent des particularités morphologiques et une taille (très grande) qui les rapprochent d’un homininé extrêmement ancien, comme l’Australopithèque (4 à 1 million d’années). Or, bien que la grotte présente une stratigraphie complexe, rendant les datations problématiques, les restes humains trouvés dans la couche 11 ne datent pas de plus de quelques dizaines de milliers d’années.
La petite fille de Dénisova aurait vécu il y a environ 80 000 ans. Son ADN mitochondrial ne ressemble en rien à celui de l’homme de Néandertal, ni à celui de l’homme moderne – mais à celui d’un ancêtre séparé depuis un million d’années. Son ADN nucléaire donne des résultats complètement différents de son ADN mitochondrial, et montre que Dénisoviens et Néandertaliens sont des groupes frères, séparés il y a 381 000 à 473 000 ans, peu de temps après la séparation des ancêtres de l’homme moderne et des ancêtres des Néandertaliens, qui aurait commencé il y a 650 000 ans selon les dernières estimations. Environ 6% de l’ADN des Dénisoviens est présent aujourd’hui chez les Papouasiens, en Nouvelle-Guinée, et 3 à 5% chez les Australiens, chez les peuples de l’est de l’Indonésie, des Fidji, de Polynésie, des Philippines. Il est probable que les hommes modernes, en allant vers l’Australie il y a environ 50 000 ans, aient rencontré les Dénisoviens sur leur chemin, et emporté avec eux un peu de leur matériel génétique. Car les espèces paléontologiques ont été interfécondes, avec degrés d’introgression du matériel génétique faibles. Il pourrait y avoir eu des Dénisoviens ailleurs en Asie, les recherches n’en sont qu’à leurs débuts et l’identification des restes trouvés par le passé n’est pas facile car on ne connaît les Dénisoviens que par leur génome, et non par leur morphologie. Il faudrait donc faire l’analyse génétique de certains restes possédés pour savoir s’ils sont dénisoviens. D’autre part les Chinois sont restés d’ardents défenseurs du modèle multirégional, modèle aujourd’hui abandonné par le reste de la communauté scientifique : ils pratiquent une paléontologie locale, ne prenant pas en compte les migrations mais envisageant l’évolution de l’homme en Chine comme purement locale. Il se pourrait que les Dénisoviens aient été présents aussi dans cette partie de l’Asie, mais depuis leur découverte aucun article scientifique chinois ne les a mentionnés… Quoiqu’il en soit, les recherches sont en cours, et la recherche est justement l’esprit des cours du Collège de France.
L’Asie centrale, entre Himalaya et taïga, déserts, montagnes immenses, steppe, marais de Sibérie… est souvent considérée comme une fin du monde, mais c’est aussi un grand carrefour du monde, connexion entre l’Est et l’Ouest par où passe la route de la soie, notamment par Samarkand, en Ouzbékistan. (Et je pense à La prose du Transsibérien de Blaise Cendrars !) Les Dénisoviens y étaient sans doute déjà présents quand sont arrivés les Néandertaliens, il y a plus de 100 000 ans. Ces derniers étaient mobiles et avaient un taux d’occupation des sites très faibles. À Dénisova, ils mangeaient les poissons de la rivière, comme le révèlent les restes trouvés sur place, et l’analyse du tartre sur leurs dents, dont les isotopes d’azote sont élevés. D’autres recherches sont menées dans des grottes proches, celles de Chagyrskaya, qui témoigne d’une occupation intense, et celle d’Okladnikov. Des outils du Moustérien y ont été trouvés, sans doute œuvres de Néandertaliens.
Un beau bracelet trouvé dans la couche 11 de la grotte, celle des Dénisoviens, interroge : ces gens étaient-ils capables, déjà, d’un tel art ? Ou bien est-il l’œuvre d’hommes plus récents, mélangée à leurs restes ? C’est une belle question, et ce que j’ai aussi trouvé très beau, c’est, notamment, les cartes de la terre, magnifique, avec ses habitants d’il y a quelques dizaines de milliers d’années encore : homme moderne en Afrique, homme de Néandertal en Europe, homme de Dénisova en Eurasie, et les trajets de leurs déplacements, de leurs migrations, de leurs rencontres.
Le cours peut être écouté en vidéo sur le site du Collège de France – ainsi que beaucoup d’autres cours.
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« Et si on s’était trompé ? » Exposition au Centre culturel irlandais
Blaise Drummond (ci-dessus et ci-dessous)
* Andrew Kearney (premier plan), Moment to Moment
*Alice Clark (premier plan ci-dessus – arrière plan : Brigitta Varadi, In Conversation) et Christine Makey ci-dessous* Susan Leen
*Selma Makela
*Brigitta Varadi, Noel Ruane
*Ruth le Gear, ci-dessus et ci-dessous, photograph and video installation
George Bolster, vidéo
*John Gerrard, Near Landscape
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Anna Macleod
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« Cette exposition collective réunit le travail d’une quinzaine d’artistes irlandais, qui tous explorent les impacts de notre société et notre économie globalisée sur l’environnement. Et si, en mesurant le progrès par l’industrialisation, l’expansion et l’accumulation, on s’était trompé ? L’eau et la glace de l’Arctique, véritables baromètres des influences néfastes de ce « progrès », sont l’un des fils conducteurs de l’exposition. »
Oeuvres de (voir ici)
Emily Robyn Archer, George Bolster, Mark Clare, Alice Clark, Blaise Drummond, Seamus Dunbar, John Gerrard, Andrew Kearney, Susan Leen, Ruth Le Gear, Christine Mackey, Selma Makela, Anna Macleod, Seamus Nolan, Softday (Sean Taylor & Mikael Fernstrom), Brigitta Varadi
Puis flâner dans la belle cour du Centre… Avant d’aller suivre un cours au Collège de France, sur lequel j’essaierai de faire une note cet après-midi au Centre culturel irlandais de Paris, photos Alina Reyes
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Grégoire de Naziance, Proust et l’islam
Qui suit docilement la Voie est renforcé par elle et en elle, même par les actions extérieures qui voudraient l’en détourner. L’autre jour j’ai assisté à l’exposé d’un étudiant sur la théologie négative. Il y fut dit un peu n’importe quoi, et pas mal de bêtises et d’incohérences, de la part du professeur comme de celle de l’étudiant, mais nous étions dans un séminaire de littérature, pas de théologie, et de plus, comme le dit Grégoire de Naziance dans son Discours 27, chapitre 3 (ma traduction, du grec) :
« Ce n’est pas tout le monde, vous savez, qui peut philosopher à propos de Dieu, ce n’est pas tout le monde ! Ce n’est pas une affaire à bon marché, ni pour ceux qui se traînent à terre. J’ajouterai même : ce n’est ni partout, ni pour tous, ni sur tout qu’on peut en discuter, mais à tel moment, pour telles personnes, et jusqu’à un certain point. Non, tous ne peuvent pas en discuter, mais seulement ceux qui en ont fait l’épreuve, qui sont passés par la contemplation, et avant tout ont purifié et leur âme et leur corps, ou prennent soin de les purifier. Car toucher la pureté sans être pur, c’est précisément aussi dangereux que de regarder un rayon de soleil avec de mauvais yeux. »
C’est la raison pour laquelle je me suis abstenue d’intervenir, sauf pour évoquer très brièvement l’islam et Rûmî. Et plus tard, à la fin, un étudiant du fond de la salle a pris lui aussi très brièvement la parole, pour dire en écho à ma brève intervention la profession de foi à laquelle bien sûr je pensais : lā ilāha illa-llāh, “il n’est de dieu que Dieu”, qui fit éclater magnifiquement la vérité, provoquant un moment de stupéfaction, comme si tous venaient de se brûler les yeux. (Moment qui témoignait aussi de la gêne que provoque le fait de parler positivement de l’islam – car la prétendue théologie “négative”, ou apophatique, lorsqu’elle est développée jusqu’à son accomplissement, révèle la pure positivité – un peu comme si quelqu’un arrivait nu dans une assemblée, à l’université par exemple : être sans vêtements n’est pas négatif, c’est pleinement être).
Al-Haqq, la Vérité est l’un des noms de Dieu en islam : il n’y a de vérité que la Vérité. S’y tenir c’est avancer, en tous domaines. Et pour en revenir à la littérature, ce passage du Temps retrouvé de Proust :
“… car je sentais que le déclenchement de la vie spirituelle était assez fort en moi maintenant pour pouvoir continuer aussi bien dans le salon, au milieu des invités, que seul dans la bibliothèque ; il me semblait qu’à ce point de vue, même au milieu de cette assistance si nombreuse, je saurais réserver ma solitude. Car pour la même raison que de grands événements n’influent pas du dehors sur nos puissances d’esprit, et qu’un écrivain médiocre vivant dans une époque épique restera un tout aussi médiocre écrivain, ce qui était dangereux dans le monde c’était les dispositions mondaines qu’on y apporte. Mais par lui-même il n’était pas plus capable de vous rendre médiocre qu’une guerre héroïque de rendre sublime un mauvais poète.”
Un peu plus tôt dans le livre Proust avait parlé du “sens artistique” comme de “la soumission à la réalité intérieure”. On ne saurait mieux définir la façon d’être du musulman, si l’on songe notamment au verset où Dieu dit de l’homme : Nous sommes plus près de lui que sa veine jugulaire. (Coran 50, 16) Suivre la Voie, ce n’est rien d’autre qu’obéir à la Vérité qui est en nous. Encore faut-il ne pas, à force de pratique du mensonge sous diverses formes, l’avoir laissée partir en de meilleures demeures.
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