La nuit d’Al-Qadr

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tout à l’heure au Jardin des Plantes, photo Alina Reyes

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La nuit d’Al-Qadr vaut mieux que mille mois, dit le Coran (97, 3). Mille mois qui bien sûr ne comporteraient pas de nuit d’Al-Qadr, précisent les savants. Lesquels rappellent aussi que dire qu’elle est meilleure que mille mois n’exclut pas qu’elle soit meilleure que beaucoup plus que mille mois. La nuit d’Al-Qadr revient à chaque Ramadan, mais personne ne sait quand. Le Coran n’aime pas donner ce genre d’indication. Rappelons-nous la longue nuit où furent plongés les dormants de la Caverne (sourate 18). Dieu seul sait, nous est-il dit, combien de siècles et de jours elle dura, et même combien furent ces endormis dans la mort qu’Il ressuscita. Le Coran rappelle à l’homme ce qui le dépasse. Et qui pourtant le guide avec miséricorde.

N´as-tu pas vu comment ton Seigneur étend l´ombre? S´Il avait voulu, certes, Il l´aurait faite immobile. Puis Nous lui fîmes du soleil son indice,

puis Nous la saisissons [pour la ramener] vers Nous avec facilité. (25, 45-46)

« Son indice » peut aussi se traduire « celui qui guide vers elle ». Créatures, nous sommes ombres du Seigneur, et nous nous repérons à Lui, notre soleil. Mais ce qui est ici dit, c’est que c’est Lui qui nous conduit à nous-mêmes, tout en nous guidant, en nous mouvant, jusqu’au moment où Il nous ramène à Lui.

Mille mois sans nuit d’Al-Qadr, cela n’existe pas, puisqu’elle a eu lieu. Elle a eu lieu en Dieu, donc de toute éternité, ou dès le commencement, c’est pourquoi on ne peut la dater. Elle est la descente de l’Être, de la Lumière sur la terre, où elle projette ses ombres. Tout à la fois descente de la Lumière, Parole de Dieu, et matrice de toutes ses ombres, formant nuit. Puissance, mesure, destin. Telles sont, dans l’ordre, les significations de Qadr. Elle est ce que nous pouvons éprouver dans la nuit de ce monde : la puissance de Dieu qui, en descendant, donne à notre être sa mesure, son destin.

La nuit d’Al-Qadr vaut mieux que mille mois sans nuit d’Al-Qadr. Or mille mois sans nuit d’Al-Qadr n’existent pas, sont néant. La nuit d’Al-Qadr vaut mieux que le néant. La nuit d’Al-Qadr sort l’homme du néant comme Dieu sortit les justes de leur longue nuit dans la Caverne. Dans la nuit d’Al-Qadr Dieu vient à la rencontre de l’homme comme au zénith le soleil saisit l’ombre pour la ramener vers le Seigneur. Nous sommes en Dieu, c’est pourquoi il en est ainsi. Voici la mesure et voici le destin, en Dieu.

Dans la nuit d’Al-Qadr, Dieu fit descendre le Coran d’un bloc, de sa matrice au premier ciel. De là l’Esprit Saint, Ar-Ruh (97, 4), l’ange Gabriel, le révéla progressivement au Prophète, vingt-trois ans durant. Mais où demeurait-il, avant d’être entièrement révélé aux hommes ? Que sont cette matrice et ce premier ciel où il était gardé ? Respectivement, la Puissance et le En puissance de Dieu. Matrice où se trouve et se crée la mesure de tout, et d’où descend notre destin, écrit en puissance, c’est-à-dire avec toutes ses virtualités, où nous pouvons puiser toute liberté et tout accomplissement. Le Coran fut cet écrit en puissance, avant d’être écrit, puis le temps d’être écrit. Et une fois écrit, il demeure en puissance, comme lecture.

Toute nuit est en puissance nuit d’Al-Qadr. Qui veille dans la nuit d’Al-Qadr, comme les bergers dans la nuit de Noël, voit le ciel s’ouvrir et entend les anges annoncer la bonne nouvelle du salut (Luc 2, 7-21). Une nuit, de sa matrice, le Coran descendit dans une grotte sur le cœur d’un homme attentif au Ciel. Une nuit, de la Vierge Marie, annoncé par l’ange Gabriel, un homme naquit dans une grotte, et c’était le Messie. Je n’établis pas d’équivalence, je lève un peu le voile sur ce qui se passe. Le Coran continue d’être révélé dans le cœur des hommes, le Christ aussi, dans le cœur du monde. La nuit de Noël et la nuit d’Al-Qadr continuent d’être, et d’être Paix jusqu’à l’aube qui va bientôt paraître (Coran 97, 5).

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Le jour où le Ciel se fendra

KFR, pour dire les mécréants, les infidèles, signifie d’abord : couvrir, recouvrir quelque chose, cacher, celer , et en fin de compte nier, et aussi habiter toujours le même village, sens qui se rapproche du nom KFR, employé pour indiquer le fait de se prosterner devant un prince, et signifie aussi village, tombeau, ténèbres de la nuit, terre, terroir. L’infidèle est donc celui qui « habite toujours le même village », c’est-à-dire qui – contrairement à Abraham – ne sort ni de lui-même ni des traditions de son clan, qui se prosterne devant l’homme comme prince et comme villageois, c’est-à-dire devant sa société et ses règles figées telles des idoles, devant le tombeau de l’esprit, l’obscurantisme, la terre et le terroir comme couvercles posés sur le ciel.

Voyons ces versets de la sourate 25, Le discernement (nouvelle traduction Tawhid) :

25] Le jour où le Ciel se fendra pour livrer passage à des nuées et où les anges descendront par vagues successives, [26] ce jour-là, la vraie royauté appartiendra au Tout-Clément ; et ce sera pour les négateurs un jour terrifiant.

Le mot KFR est ici traduit par négateurs. « La vraie royauté » traduit les mots al-Mulk et al-Haqq : Royauté et Vérité. Le « Tout-Clément » traduit al-Rahman, Le Tout-Miséricordieux, avec ce mot qui comme en hébreu, dans la Bible, signifie la miséricorde venue de la matrice, comme origine et comme amour maternel, viscéral. Le Jour où le Ciel se fendra est celui où il mettra au monde, en déversant ses anges par vagues successives, la Vérité qui est en sa matrice. Jour terrifant pour ceux qui se sont enterrés dans leurs traditions, dans leur soumission à l’ordre terrestre, humain, social, mais jour de la Miséricorde, car c’est de leur tombe que la Vérité, vivante, vient arracher les hommes.

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Épée

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image Alina Reyes (juin 2012) (« procession des hommes/procession des anges »)

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Je l’ai raconté dans Ma vie douce, toute jeune je rêvai une nuit que, ayant trouvé un petit miroir où je me regardai, j’y vis L’homme à l’épée.

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11 C´est Nous qui, quand l´eau déborda, vous avons chargés sur l´Arche

12 afin d´en faire pour vous un rappel que toute oreille fidèle conserve.

13 Puis, quand d´un seul souffle, on soufflera dans la Trompe,

14 et que la terre et les montagnes seront soulevées puis tassées d´un seul coup ;

15 Ce jour-là alors, l´Evénement se produira,

16 et le ciel se fendra et sera fragile, ce jour-là.

17 Et sur ses côtés [se tiendront] les Anges, tandis que huit, ce jour-là, porteront au-dessus d´eux le Trône de ton Seigneur.

18 Ce jour-là vous serez exposés; et rien de vous ne sera caché.

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Sourate 69, Al-Haqqa, La Vérité, à écouter, lire en arabe, en phonétique et en français ici.

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Le verbe haqqa, d’où vient le mot Haqqa, qui est l’un des noms de Dieu et donne son titre à cette sourate (La Vérité, L’Inéluctable… L’Heure ou Le Jour de vérité), signifie d’abord : venir chez quelqu’un. Où nous voyons que messianisme et vérité sont intimement liés. Ce verbe signifie aussi : frapper quelqu’un au milieu du crâne, ou  sur le creux de la nuque. Et : faire juste, tomber, frapper juste. Et : devoir absolument arriver. Et : savoir avec certitude. Le mot comporte les sens de justesse, et aussi de justice.

Tout étant lié, quand le ciel est fendu et la terre frappée, c’est que la vérité vient frapper à notre tête.

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Sagesse des Pèlerins

 

Le premier mot de la Bible est bereshit, qui signifie  au commencement, en premier, et qu’il est aussi possible de traduire, comme je l’ai fait dans Voyage : dans le plus précieux. Le dernier mot du Coran est an-nasi : les hommes. Voici le résumé de l’histoire de la Révélation :  Dans le plus précieux, les hommes.

Et cela au nom de Dieu, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux, selon les premiers mots du Coran, et la grâce du Seigneur Jésus avec tous, selon les derniers mots de l’Évangile, qui commence en rappelant que Jésus est né fils de David, fils d’Abraham, comme les juifs, donc, et comme les musulmans aussi.

Au verset 67 de la sourate 22, Le Pèlerinage, il est dit : À chaque communauté Nous avons institué un ensemble de rites qu’elle doit observer. Qu’ils cessent donc de discuter avec toi l’ordre reçu ! Implore plutôt ton Seigneur, car tu es assurément dans le droit chemin. Au verset 40 de la même sourate, il est dit : Si Dieu ne repoussait pas les gens les uns par les autres, les ermitages seraient démolis, ainsi que les églises, les synagogues et les mosquées où le nom de Dieu est beaucoup invoqué. Que Dieu « repousse » les gens les uns par les autres signifie qu’il veille à ce que règne une diversité de communautés et de rites, afin justement d’éviter la destruction de toute maison où Il est invoqué. La non-diversité, c’est la mort. Dieu veut et aime la diversité, toute sa création le prouve. De même que la diversité est nécessaire dans le monde naturel, elle est nécessaire aussi dans le monde spirituel. Même si cela peut irriter les hommes aux rêves totalitaires, ainsi est la volonté du Ciel.

Le verset 15 de la même sourate dit : Celui qui pense que Dieu ne le secourra pas dans l´ici-bas et dans l´au- delà, qu´il tende une corde jusqu´au ciel, puis qu´il la coupe, et qu´il voie si sa ruse va faire disparaître ce qui l´enrage. Qu’est-ce que cela signifie ? Le mot sabab, corde, employé avec le mot ciel, signifie les voies du ciel ; c’est un mot qui désigne aussi le lien de parenté, et aussi les moyens, et encore la cause, la raison. Qui veut donc couper son lien de parenté, qui est au ciel, qui veut couper les moyens, la raison et la cause de la vie, qui sont au ciel, qu’il voie donc si cela va arranger le monde selon son désir, ou si ce n’est plutôt lui qui va devoir, d’une façon ou d’une autre, se plier à la volonté du ciel.

Sagesse des Pèlerins est le titre du livre que je prépare comme vademecum pour les voyageurs, Voyage étant plutôt destiné à la lecture dans les maisons, s’il plait à Dieu.

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Plénitude, enfantement, éternité

 

Passé une bonne partie de l’après-midi à lire le Coran, dans la traduction agréable (autant que le format du livre, en édition bilingue, chez Alif Éditions) d’AbdAllah Penot. Arrivée au verset 120 de la sourate An-Nahl, Les Abeilles, je lis : « Ibrâhim constituait à lui seul une communauté ». Cette phrase me remplit de joie. Quelle meilleure façon de dire la plénitude ? Je regarde le texte arabe, il dit : « Voici, Abraham était une oumma ». André Chouraqui, toujours au plus près des mots, traduit : « Ibrâhim était une matrie ».

Justement, un peu plus tôt, j’avais songé à la Vierge Marie, en lisant un passage (Coran 13, 39) où était évoquée Oum al Kitab, la Mère du Coran, le prototype du Livre au ciel, qui, dit le Coran, est auprès de Dieu, lequel y écrit comme il veut. Oum al Quran est aussi un nom de Al Fatiha, L’ouvrante, la première sourate, dont les sept versets contiennent l’ensemble du Livre. Ouvrant mon dictionnaire, je vois que la Vierge Marie est appelée Oum an Nûr, Mère de la Lumière.

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