Sabots fendus

Quand les hommes veulent être en s’imposant « Je suis partout », le Vivant n’est plus où ils existent sans être.

Le mystique et l’artiste cherchent Dieu à travers l’homme et le cosmos, métaphore de l’homme, dans le retrait d’eux-mêmes. Équivalence du paysage et du portrait ou de l’autoportrait, mise à distance de l’égo révélant la faille, le mystère, le chemin.

L’apparence est le voile, le manteau, dont la contemplation est déchirement. Par cette déchirure, se voit Dieu.

Le Vivant est où est le vrai lieu de l’homme : retirant son manteau ou se tenant dans une fente du rocher, comme Élie ; nu et devenant fente lui-même, comme le Christ en croix, inspirant et exhalant la Vie.

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Montez en vous aux repaires splendides de la jeunesse

photo "Olivier-grand frère"

 

« J’ai l’impression que nous avons plus qu’il ne nous faut de cités, de villes et de villages, et en revanche une carence certaine en espaces réellement sauvages. Dans les quarante-huit États contigus du continent nord-américain, quels sont les lieux où on peut encore disparaître et se recueillir ? Ces sanctuaires paisibles, accessibles seulement au prix d’efforts physiques, ou même carrément interdits. Pour l’essentiel, les repaires splendides de la jeunesse.

Il nous reste tellement d’endroits où devenir vieux, franchement assez à mon avis, de lieux pavés, clôturés, raccordés.

Nous qui sommes déjà vieux ou en passe de le devenir en avons trop pris, nous avons dévoré plus que notre part. »

Rick Bass, Journal des cinq saisons

Bon jour de fête de fin de Ramadan aux musulmans ! Et bonne et joyeuse ascèse spirituelle à tous.

 

exactement ce qu’il faut

 

Me tournant vers le visage du Christ scotché sur mon mur, je le vois me sourire, et plaçant deux doigts à mon front je le salue, lui disant, radieuse : « je t’écoute, Capitaine, je te suis ! » Il me sourit dans tout le corps, il est content.

 

manteau de mousse sur le rocher soulevé par le vent, photo Alina Reyes

 

« Mais l’enchevêtrement de ces longs pins abattus [par la tempête], semblables à des baguettes de mikado, crée en une nuit, comme des dés jetés par la main de Dieu ou, qui sait, selon le schéma directeur pensé et exécuté par un autre grand architecte, tout un réseau spontané de barrières, de corrals et de murets qui vient protéger la future vague de trembles et de cèdres prêts à prendre racine au centre de ce labyrinthe de troncs éparpillés, de ce chaos, ou de ce qui apparaît comme tel, trop confus et trop dense pour que même le cerf le plus affamé s’y aventure et atteigne les pousses naissantes des jeunes arbres. C’est ainsi que l’effondrement de l’ancienne pinède et l’érection de barrières qui l’accompagnent fournissent, dans cette abstention même, exactement ce qu’il faut aux cerfs pour assurer leur survie – la future protection de l’épaisse canopée des cèdres adultes en hiver quand les cerfs affaiblis chercheront un abri contre la neige profonde et le froid glacial, et les tendres feuilles de tremble quand les faons de l’été seront en passe de devenir de jeunes adultes et qu’ils seront prêts à dévorer la terre entière. »

Rick Bass, Le journal des cinq saisons

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Dieu est exact

 

Le sublime

dans la maison de Dieu, photo Alina Reyes

 

« Nous sommes tous les quatre plantés devant la fenêtre du premier étage, et nous scrutons l’obscurité, suspendus dans le noir d’une foi aveugle – guettant la prochaine trouée dans les nuages qui nous permettra d’entrevoir le retour de la lune de l’autre côté.

Il me vient soudain à l’idée que ce dont nous venons d’être témoins ressemble à quelque chose que nous aurions pu voir dans un film, dans un spectacle de prestidigitation mis en scène par Hollywood – tout cela n’a été qu’une illusion – et pourtant l’événement laisse un sillage de réalité, une authenticité dépassant ce que nos sens nous disent que nous venons d’observer. Alors que je me tiens devant cette fenêtre avec ma famille, je comprends qu’il existe une distance fixe entre le sublime et la représentation du sublime, et nous restons là tous les quatre dans l’ombre, dans l’obscurité, chacun ayant parfaitement conscience de cet écart et s’installant confortablement dans cet espace : le dos tourné vers l’un, le visage tendu vers l’autre. »

Rick Bass, Le journal des cinq saisons

Demain est l’Aïd El-Fitr, la fête de fin du Ramadan.  J’ai lu ce matin le tout petit livre sur les 99 noms divins que j’ai trouvé l’autre jour à la librairie face à la mosquée. Voici la page d’un beau site consacrée à ces Noms, avec leur commentaire par Ghazali, indiquant la nature de la possible participation humaine à ces qualités divines.

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