Le plus grand

Lever des lièvres. Quoi de meilleur ? Je suis en chasse. Levant des lièvres, je lève les voiles, je lève les voiles de l’aube, le jour commence à paraître, puis nous ferons midi.

D’après Alain Finkielkraut, Allah Akbar signifie « Allah vaincra », c’est « un cri de guerre ». Entendu sur France Culture, où nul homme de vérité n’était là pour rectifier : Allah Akbar signifie Dieu est le plus grand.

Leur guerre culturelle ne les emmènera nulle part. Ils avancent masqués, ils tomberont démasqués. Seule la vérité vainc.

Un rêve plus réel que la réalité

« J’étais bien à Lourdes pour un colloque, ces trois jours derniers ? », lui dis-je. Il me regarde comme si je me moquais de lui, nie.

« Alors comment se fait-il que j’ai laissé mon sac là-bas ? Allons le chercher ensemble, tu verras bien ! »

« Mais qu’est-ce que tu racontes ? », dit-il. Je lui demande encore une fois de venir avec moi, chercher mon sac là-bas. Il commence à être un peu en colère, je comprends qu’il ne peut pas comprendre, et que même s’il me croyait un peu, il ne pourrait jamais envisager de faire huit cents kilomètres pour aller vérifier que mon sac est bien là-bas. Quant à lui expliquer que nous pourrions y être en un instant, sans avoir à prendre le train ni la voiture ni l’avion ni rien, ce n’est même pas la peine d’y songer. J’y vais donc seule.

À peine décidé, j’y suis. Les dernières personnes sont en train d’évacuer l’amphithéâtre, sous la conduite de l’évêque qui se tient en bas, vers une sortie latérale, les invitant à le suivre dans les catacombes. Je trouve mon sac près de la scène où j’ai parlé, par terre contre un mur. Je regarde à l’intérieur, tout y est, même mes lunettes. Pourtant je les ai sur le nez. Je regarde, ce sont bien exactement les mêmes. Je me dis que quand il va voir, l’instant d’après, que j’ai soudain deux paires de lunettes exactement pareilles, alors que je n’en avais qu’une, il va bien devoir soupçonner qu’il se passe quelque chose. D’ailleurs cela se produit, en même temps – car je suis aux deux endroits en même temps.

Alors que je remonte vers la sortie de l’amphithéâtre, un crâne humain minuscule, de la taille d’un caillou et doré, apparaît. C’est celui de quelqu’un qui m’est extrêmement cher mais qui Dieu merci est bien vivant, à Paris. Je comprends qu’ici est le monde de la mort, je souffre terriblement, je pleure. Une lumière immense vient et m’habite tout entière car voici que je suis simultanément dans une multitude de lieux dans le monde et de temps dans l’histoire, et au-delà du monde et de l’histoire et de tout ce qu’on peut connaître et imaginer.

Pi (Apocalypse, 3, 14-16)

14 À l’ange de l’église en Jugement du Peuple, dis :

Ainsi parle l’Amen,

le Témoin, le fiable et le véritable,

le principe de la création de Dieu.

15 Je sais ce que tu fabriques parce que tu n’es ni frais ni fervent. Que n’es-tu frais ou fervent !

16 Parce que tu n’es pas franc, parce que tu n’es ni fervent ni frais, je vais te vomir de ma bouche.

 

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(ma traduction ; chliaros, habituellement traduit par tiède, signifie aussi mou, efféminé, c’est-à-dire maniéré, indirect, non franc ; psuchros, habituellement traduit par froid, indique aussi la fraîcheur, au sens de plongé dans l’eau fraîche. Ceux qui ne sont ni fervents ni frais, ni purifiés par le feu ni purifiés par l’eau, ne sont pas francs, ils trafiquent, ils sont indirects, ils peuvent avoir du pouvoir mais ils sont sans puissance vitale, Dieu les vomit car il rejette le mauvais et il garde la vie).

OGM, perversion du sens et « plates-bandes d’amarantes »

amarante-en-fleur

amarantes en fleur

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Christian Vélot, lanceur d’alerte, chercheur en biologie moléculaire qui sait, comme il l’a dit, prendre des coups et ne pas faire carrière, et Hervé Le Meur, militant, ont pris hier soir la suite de la projection du film La science achetée – dans le cadre des Sciences en bobines des Sciences citoyennes-, pour parler du multi-scandale des OGM. Des plantes que C. Vélot appelle « collabos » car elles portent en elles la tolérance aux herbicides commercialisés par ceux-là même qui les commercialisent aussi, ces OGM. « La mutagénèse dont sont l’objet ces plantes, dit-il, c’est comme de changer les mots dans une phrase, ça change le sens. » C’est bien ce que je me disais en regardant le film, avec ces histoires de scientifiques persécutés par le lobby industriel parce qu’ils ont osé dénoncer les dangers des OGM. Ce qui arrive au maïs arrive aussi à la parole, à la langue, de plus en plus trafiquées par l’industrie de la littérature. Le vivant n’est pas seulement le biologique, et le trafic du vivant au profit des industries s’opère en ce moment sur tous les plans.

Question des brevets sur le vivant, perte d’autonomie des paysans, risques sanitaires… Les chercheurs qui ne cherchent pas dans le « bon » sens, c’est-à-dire dans ce monde où le sens est perverti, les chercheurs de vérité, sont victimes d’attaques féroces. « On emploie la diffamation, on casse la personne, on la dévalorise, on la déclare scientifique de second rang, on la rend insupportable, on fait en sorte qu’elle ne puisse plus publier dans des revues qui l’avaient accueillie, on invente de faux savants qui se répandent en critiques contre elle sur internet… Les curés de la science, alliés aux industriels, ne supportent pas que certains de leurs confrères viennent critiquer leur église », résume Christian Vélot. Qui s’insurge aussi contre le mythe du gène tout-puissant, qui seul conditionnerait l’homme et le vivant – l’ADN sur lequel, en le modifiant, on se permet de déposer des brevets. Sans tenir compte de l’action de l’épigenèse, qui fait par exemple qu’au-delà de la transmission égale des chromosomes, un enfant hérite davantage de sa mère que de son père. « Il faut sortir d’une vision mécaniste du vivant ».

Pensons par exemple à l’amarante, la « mauvaise herbe », « mauvaise » dans le monde de la perversion du sens, qui a mis en échec les sojas modifiés de Monsanto sur des dizaines de milliers d’hectares, lesquels ont dû être complètement abandonnés, aux États-Unis. D’après les deux intervenants de cette soirée, la résistance qu’a développée l’amarante ne viendrait pas d’une transmission du gène par la plante OGM, mais d’un processus épigénétique propre. Ainsi donc la plante sacrée des Incas, leur plante nourricière aussi, interdite par les conquistadores, montre la voie. « Plates-bandes d’amarantes », chantait Rimbaud…

Afrique 50


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Le décor, et ce qui se cache derrière : de quels crimes vient la fortune de BHL, par laquelle il règne, et les aises de tant d’autres, néo-colonialistes et conseillers des princes néo-colonialistes, tel Hollande inaugurant son mandat par un hommage à Jules Ferry et ne sachant le marquer autrement qu’en allant ou voulant guerroyer en Afrique ou au Moyen Orient. Le film a été interdit pendant quarante ans et a valu à son auteur, René Vautier, plus d’un an de prison.

Dans « Caméra Citoyenne, Mémoires », son livre biographique, le cinéaste avoue : « En voulant braquer ma caméra sur les luttes des travailleurs – des travailleurs en France, des travailleurs coloniaux, des travailleurs immigrés, etc. – j’ai rencontré quelques problèmes : 39 arrestations, 17 inculpations, 5 condamnations, 54 mois de prison, 6 séjours à l’hôpital, 11 fractures, 4 expulsions, 5 caméras détruites par matraques, balles ou grenades, 7.000 mètres de pellicules saisis, 60.000 mètres de pellicule détruits à la hache ou à la cisaille … sans compter les dizaines de films pour lesquels je dois me battre en justice pour récupérer le droit de les montrer « . Afrique 50 n’est donc qu’une censure parmi tant d’autres. Le film lui coûta treize inculpations et une condamnation à un an et un jour de prison pour violences sur la personne d’un agent de l’autorité (mais aussi la médaille d’or au festival de Varsovie). Le « un » jour de prison est important car il prive tout citoyen français de ses droits civiques ! » (l’article entier sur darkness-fanzine)
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Littérature

Ce n’est pas le nombre de pages qui compte, c’est leur densité. Ce qui est indense ne se tient ni ne danse.

Ce n’est pas le sens de surface du texte qui compte, c’est le sens de ses profondeurs. Dans les grandes surfaces du livre que sont devenues même les petites librairies, il ne se trouve presque plus que des textes de surface, formant des lecteurs de surface.

Ce n’est pas en voulant évoquer son temps qu’un texte évoque quoi que ce soit. Vouloir évoquer son temps, ou quelque temps que ce soit, c’est nourrir le néant – ne pas faire le « bond hors du rang des meurtriers », comme le dit Franz Kafka qui, lui, le fait. Seule l’éternité peut évoquer le temps, tous les temps, et elle-même en même temps.