Autoportrait d’une yogini au sein nu

ce matin à 7 heures chez moi, photo Alina Reyes

ce matin à 7 heures chez moi, photo Alina Reyes

Je célèbre avec gratitude mes un an de yoga quotidien. Ce matin au lever, avant d’enfiler ma tenue pour ma séance, j’ai photographié rapidement mon corps dans le miroir. Mon corps de 64 ans, qui a enfanté quatre fois, qui a lutté contre deux cancers, supporté plusieurs opérations dont une mastectomie, mon corps toujours bienheureux en train d’être redessiné par le yoga. Avec mon sein tout nu, celui qui a été reconstruit joliment, dont la cicatrice est devenue presque invisible, et pour lequel j’ai choisi, plutôt que d’y faire maintenant ajouter un faux téton, d’y faire faire, dans quelques mois, un grand tatouage floral qui remontera jusqu’à l’épaule.

J’ai commencé le yoga par du kundalini en salle, fin septembre 2018. Une heure et demie par semaine, mais je n’y allais pas toujours. Deux semaines après ma dernière opération, début juillet 2019, je me suis mise au hatha yoga à la maison, en m’aidant de livres, revues, vidéos et cours en ligne. Je me suis essayée – et je continue à le faire – à différentes sortes de yoga, et sauf rares exceptions je n’ai jamais dérogé à ma pratique quotidienne, d’une bonne quarantaine de minutes en moyenne. Je m’en porte magnifiquement bien, de corps et d’esprit.

mes notes sur le kundalini yoga : ici
mes notes sur le yoga dans tous ses états :

18-7-2020 : j’ai fait aussi mon autoportrait de dos, il est

Le monde d’après

Vénus masquée, une nouvelle œuvre de Street Art sur le mur d'une librairie à Paris 5e

Vénus masquée, une nouvelle œuvre de Street Art sur le mur d’une librairie à Paris 5e

J’ai vu dans un demi-sommeil, avant de m’endormir cette nuit, des groupes de grandes allumettes, dressées dans la lumière, à bout blanc (et non rouge). La signification de la vision venait en même temps que la vision : il s’agissait des peuples du monde, pacifiés. Je vois ce matin que certains déplorent que le monde d’après ne soit pas réalisé. Ont-ils si peu de temps à vivre, pour être si pressés ? À vin nouveau, il faut outres nouvelles, comme dit Jésus. Attendons un peu, les vieilles règnent encore. J’ai mille et trois ans devant moi. Avant de m’endormir j’ai ensuite évolué dans un univers de peinture vivant. Dans la nuit, j’ai rêvé que je faisais du yoga. Au réveil le matin, j’en ai fait, comme toujours.

venus masquee etc 2-min
venus masquee etc 3-min
Et la nouvelle signalisation à la Grande Mosquée :
venus masquee etc 4-min
Hier à Paris 5e, photos Alina Reyes
*
« Aurore », prélude en do mineur, toute fraîche composition d’un jeune pianiste proche

*
29 juin 2020 : voir aussi « Le monde d’après, suite« 

« Le visage tourné »

"Le visage tourné", acrylique sur toile 46x37 cm

« Le visage tourné », acrylique sur toile 46×37 cm

Par la fenêtre ouverte la lumière, la douce chaleur, les couleurs des briques et des fleurs, les senteurs de la verdure montant de la cour, avec les voix du voisinage qui composent une musique du quotidien, et de temps en temps celle d’un proche ou d’un autre qui interpellent d’en bas : « Regarde, j’ai ramené le vélo », « lance-moi la clé », « L. est là, on va se promener », etc. Avec le réchauffement climatique, une ambiance de Sud à Paris. En attendant la réouverture des jardins, je me balade à vélo ou à pied dans la ville, et en attendant la réouverture des bibliothèques où travailler, je peins. Bienheureuse.

Sainteté des animaux sauvages

*
Les animaux sauvages ne sont jamais en surpoids. Ils ne sont jamais négligés, ils sont toujours pleins de grâce. Certains se parent de couleurs magnifiques. Des oiseaux chantent splendidement aux heures de prière, à l’aube et au coucher du soleil ; et certains d’entre eux réalisent de véritables œuvres d’art en disposant plumes, brindilles, etc., pour faire la cour à l’oiselle. Beaucoup d’animaux forment des couples pour toute la vie. Beaucoup élèvent leurs petits avec la plus grande attention, sans violence et avec bienveillance. Ils vivent libres. Bref, les animaux peuvent être souvent des exemples de spiritualité pour nous, de plein accord avec leur Créateur, à l’image des plus grands saints parmi nous, de « l’élite de l’élite » spirituelle.
*

Exercices pratiques contre les effets néfastes du confinement

 

Le Parisien propose des cours de sport et des cours de yoga en ligne, gratuitement, pendant le confinement. C’est excellent. D’autres médias le font, mais souvent pour leurs abonnés. C’est excellent, surtout quand on est confiné en appartement, sans possibilité de sortir dans son jardin. Attention tout de même : en cas de maladie, il faut laisser le corps se reposer. O et moi sommes confinés depuis plus de deux semaines, le coronavirus s’étant invité chez nous avant le confinement général. O a subi des symptômes assez sérieux ; la fièvre a baissé assez rapidement avec les cachets mais la fatigue et la toux ont perduré pendant quatorze jours. Pour ma part j’ai été paucisymptomatique, très peu atteinte, mais j’ai constaté, en continuant mon yoga quotidien, que lorsque je faisais une séance un peu trop sportive mes petits symptômes se ravivaient – et cela n’est pas tout à fait terminé, ce coronavirus se comportant comme une entité itinérante, qui se manifeste tantôt ici tantôt là dans le corps, auquel il occasionne ainsi la fatigue de devoir se défendre.

Cela dit, oui, faire de l’exercice est excellent pour le corps, et au moins autant pour l’esprit. Le confinement est particulièrement révélateur de l’état de calme ou d’agitation de notre esprit, et c’est une période pénible ou même dangereuse pour les enfants et les gens qui vivent avec des personnes agitées ou violentes, physiquement ou psychiquement. Le stress est aussi contaminant qu’un virus et tout ce qui peut l’apaiser est bienvenu. Chacun le sait, mais chacun ne l’applique pas pour autant, et cela fait partie des choses qu’il ne faut pas hésiter à répéter malgré leur banalité, leur simplicité. Nous devons sans cesse nous encourager les uns les autres, et nous encourager nous-mêmes, aux choses simples, à la simplification de notre vie. La simplification est une hygiène.

Simplifier notre vie, c’est la libérer de tout ce qui l’encombre inutilement. Exactement comme dans les diverses formes de la méditation on libère l’esprit des pensées parasites. Chacun de nous, placé au pied du mur, devant l’injonction « simplifie ta vie », sait très bien ce qu’il lui faut faire pour cela. Ne reste plus qu’à trouver courage et détermination. Comment ? C’est en pratiquant qu’on devient pratiquant.

Rien ne peut détruire notre paix royale.

*

Notre-Dame, Sainte-Sophie, la Bibliothèque

cet après-midi à la bibliothèque des chercheurs du Museum, photo Alina Reyes

cet après-midi à la bibliothèque des chercheurs du Museum, photo Alina Reyes

*

Les mêmes qui déplorent que Notre-Dame était devenue une usine à touristes déplorent qu’Erdogan songe à rendre à Sainte-Sophie, qui n’est plus qu’une usine à touristes, sa fonction de mosquée. Bon en fait, c’est surtout ça qu’on aime, à Sainte-Sophie comme à Notre-Dame : qu’elles soient devenues des lieux à admirer, où se promener et où se recueillir en paix sans pression des clergés et des intégristes.

Ce que je retiens de l’incendie de la cathédrale, construite par Victor Hugo, artisan du roman, autant que par des artisans du bâtiment, c’est qu’il aurait pu être évité si on n’avait pas fait d’économies sur la sécurité anti-incendie. L’État n’assume pas ses responsabilités, et une fois que c’est brûlé, il n’assume toujours pas, il appelle aux dons. En France ça continue, on prend le pire de chaque système, l’étatique intrusif et le libéral, mais on n’a presque plus rien du mieux. Espérons au moins qu’ils ne vont pas refaire une charpente en bois, il y a d’autres matériaux aujourd’hui.

Le mieux pour moi c’est d’aller chaque après-midi à la Bibliothèque, d’enlever mon pull et mes chaussures, et de travailler dans la paix et le recueillement à mes constructions, pas pour retenir le passé mais pour faire vivre le présent et sa suite.

*

Les travailleurs intellectuels

vignette these*

L’océan assume et surmonte ses tempêtes, elle est en paix. Elle entend la gardienne, en bas, qui sort les poubelles. Elle est heureuse de faire partie du peuple des travailleurs. Tout à l’heure, songeant dans l’ombre et la lueur de la liseuse de Plaisir, avant de s’endormir, elle lui a dit : Fais-moi penser demain à écrire quelque chose sur cette phrase de Kafka : « Dans ton combat contre le monde, seconde le monde. » Parce qu’elle venait juste de vraiment la comprendre. Cela lui revient maintenant. Elle ne va pas l’expliquer tout de suite ici, mais il lui revient aussi que juste avant de penser à cette phrase, elle se disait que face à la douleur, face à la souffrance, il ne fallait pas, pour les rendre supportables, s’y enfoncer, soit par l’alcool, soit par d’autres drogues, soit par la folie mauvaise, mais leur faire un pied-de-nez par la folie douce et l’esprit d’enfance. Tiens, Joie le dit : seconde le monde, cela signifie continue à lui donner des gages de la vérité, qui le rendront furieux contre toi. C’est ainsi que tu resteras debout, et qu’il s’effritera. De même que les énormes secrets que tricotent les hommes, ces parques dérisoires, finissent par s’effondrer sur eux-mêmes, dévorés par leur néant. Car tout ce qui est tissé dans le secret, fût-il de polichinelle, est tissé à l’envers. C’est la nuit que Pénélope détisse ce qu’elle a tissé le jour, afin que les prétendants piétinent et n’arrivent à rien, aussi longtemps qu’il le faudra.
Les travailleurs intellectuels. Quand Joie rencontre cette expression, « travailleurs intellectuels », elle lui plaît. Les travailleurs intellectuels forment une classe moyenne grandissante, où grandit aussi la précarité et la paupérisation. La paupérisation des travailleurs intellectuels a pour effet de les ranger de plus en plus aux côtés des autres pauvres, et de stimuler en eux une pensée du combat. Mais cette paupérisation s’accompagne d’une invisibilisation, par la falsification médiatique du terme « intellectuel ». Les intellectuels médiatiques ne sont pas des travailleurs intellectuels mais des agents du show-business (disons pour éviter d’employer le terme de spectacle, qui désormais renvoie aussitôt, dans le champ intellectuel, à la pensée de Guy Debord, laquelle, toute pertinente qu’elle soit, sert de pseudo-pensée révolutionnaire à une bourgeoisie intellectuelle qui n’est en réalité attachée qu’à conserver ses privilèges).

 

Un professeur de philosophie, à propos de BHL

Un professeur de philosophie, à propos de BHL

(…)

À la Halle Saint-Pierre, Joie a entendu Jean Maurel parler de la main dans Nadja, et chez Chirico, et chez Nietzsche. Son discours sortait de son corps en réseaux, comme par les synapses du cerveau, en quelque sorte un discours automatique, un discours-poésie, surréaliste. Maintenant un éditeur historique élève ses auteurs en batterie, telles des poules de luxe pondeuses de livres commandés et formatés. Des bourgeoises ou filles de bourgeois paient leur formation chez le patron qui continuera à les manipuler une fois qu’elles seront devenues productives, et les lecteurs, formatés eux aussi, ne songeront même pas à exiger une nouvelle réglementation pour l’étiquetage des livres, mentionnant comme pour les produits alimentaires si c’est du naturel ou de l’industriel. Malheureux temps de cerveaux disponible, gavé de saloperies cancérigènes. Heureusement les morts nous regardent et les poètes qui ont visité Joie en rêve, Homère, Rimbaud, Kafka, et même Bouddha, et même Dieu, tous venus l’habiter la nuit et restés là en elle avec ses bêtes et ses dents, sont toujours vivants, sauvages, et sauveurs.

À propos d’œufs et de poules, sommes-nous dans une époque où les gens ont une basse idée de la littérature parce qu’on leur fait avaler de basses œuvres, ou la médiocrité des œuvres mises sur le marché vient-elle de la médiocrité de l’idée que se font les marchands et les clients de la littérature ? D’où viennent les ombres qu’on projette au fond de notre caverne ?

(…)

Je lui ai exposé le plan de ma thèse, en utilisant des cailloux pour mieux le disposer sur la table. Nous étions sur la terrasse, au troisième étage dirais-je, quoique cela ne soit pas facile à déterminer dans ces maisons qui épousent la pente et où le rez-de-chaussée n’est pas au même niveau des deux côtés. De là-haut nous avions une vue plongeante sur ce village où sont passés nombre de surréalistes, et le sujet de ma thèse était donc, à partir de ce cas, le rapport entre la lettre, l’art et le lieu. Soudain il a dit : et si nous faisions faire des fouilles archéologiques, pour déterrer un morceau de l’antique mur d’enceinte ? J’ai été absolument ravie par cette idée. Il est alors descendu aussitôt voir des gens du village, puis il est remonté et nous avons assisté ensemble au dégagement et à l’apparition symbolique du mur : les habitants enthousiastes se disposant eux-mêmes sous nos yeux comme des pierres et retraçant ce qui était en fait moins un mur que deux murets parallèles bordant et créant un sentier. Émue et surexcitée, je me suis retirée à la cuisine. Il m’a rejointe et nous avons parlé encore un peu de mon sujet. Le soir tombait. Nous sommes sortis. La tempête se levait entre les rochers, autour du village, c’était très beau.

*

Ce sont des extraits d’une partie de ma thèse révolutionnaire, qui comporte quelque 400 pages disons de recherche théorique interdisciplinaire et quelque 300 pages de recherche littéraire sous forme de fiction, théâtre, poésie. Je rappelle qu’elle est téléchargeable gratuitement ici. Elle a été téléchargée déjà près de 300 fois depuis sa mise en ligne à l’automne dernier, et sur un rythme qui va croissant. Bonne lecture !

*